TOC ! Ploc ! tchac tchac et pfft sur le sol !
Aristide de Bonne-Fortune n'eût pu espérer mélodie plus étonnante, plus stimulante, plus excitante qu'une sonate d'orchestre prestigieux !
La mélodie de l'aventure, c'était ça !
Le parfum et le goût viendraient après, avec la découverte de ce continent insolite.
Il en avait la certitude, entre deux ou trois flèches qui pourfendaient les airs ou qui se fichaient dans la carapace de l'énorme tortue qu'il participait à porter à bout de bras.
Les tortues sont des boucliers solides et fidèles, le saviez-vous ?
Celle de Artis ne le cédait pas une seconde au danger, parce qu'elle était lente d'une part et parce qu'elle lui obéissait tout simplement.
Aristide, ou plutôt« Artis », penserait certainement à la remercier d'une confection de plusieurs pliages de lotus. Artis n'était pas complètement guéri de son ennui chronique et occupait ses mains sainement de quelques bonnes vingtaine de pliages.
Xiaoshan, c'était le nom de sa tortue, dévorait, mâchouillait les pliages avec gourmandise et lenteur aussi. Désolé d'insister sur ce point.
En tout cas les flèches de Sixia ne perçait pas la coque et de temps à autre, Xiaoshan rentrait la tête de prudence et de bon sens.
Cette idée d'Artis, il en était fier.
Le seigneur Zhou, son hôte chinois grand seigneur de la ville de Sanxia, la trouva fabuleuse et ses troupes se trouvèrent donc illico presto sous leurs montures, les avançant vers les portes de la ville ennemie de Sixia.
Non, ceci n'est pas une affabulation!
Dieu sait qu'il en avait rêvé. Cette expédition en mers d'Asie dans laquelle il s'embarqua spontanément, à bord de « l'Amphitrite », aux côté du « valeureux » chevalier François-Marie de Maubriand, émissaire du roi de France et du Docteur Magnolet, chirurgien de sa majesté et excentrique scientifique foldingue. Il n'aurait pu envisager pareil destin héroïque entre deux soupirs d'ennui. Mais chut, reprenons là où l'action s'était reposé.
TOC ! Ploc ! tchac tchac et pfft sur le sol !!!!
: «
Artis ou les tribulations orientales d'un jeune homme de bonne fortune » de
Bruno Albert-Gondrand est une des quelques rares propositions de l'édition Hongfei dans le genre roman. C'est une lecture qui, peut-être, rappellera à quelques amateurs de grands classiques les aventures du fabuleux «
Baron de Münchhausen » de
Gottfried August Bürger.
Si ce dernier semait le doute parmi son auditoire avec son récit gonflé d'aventures extraordinaires et de rencontres improbables, un compagnon qui souffle des tempêtes et un autre qui à des oreilles de la taille de ceux d'un éléphant, une balade sur un boulet de canon, Artis, lui au contraire, pourrait gagner notre confiance tant les situations se mêlent de vraisemblances et de crédibilité.
Toutefois, l'extraordinaire est présent, par l'originalité du personnage notamment, qui de fait ne se bride pas d'idées toutes aussi farfelues que lui. Ce roman est presque une comédie, un petit théâtre d'aventures au pays de la grande Chine et le trio d'hurluberlus nous contente par leur singularité et leurs travers. Si Artis n'a rien d'un héros mais passerait au contraire pour un adorable benêt, le chevalier est très loin de poser comme le conquérant tant attendu et décrit par ses inépuisables récits ampoulés Celui-ci hésite rarement à faire passer le jeune et vigoureux garçon devant dès que cela se corse. Quand au Docteur, sa curiosité extrêmement poussée pour la connaissance de la faune, de la flore, du corps humain et des grandes vertus scientifiques de la dissection feront partir les assaillis de la cité de Sixia en courant. Tout un programme !
Si le style du roman peut ne pas convaincre de prime abord, l'humour, lui, déja présent dans la quatrième de couverture sera un élément décisif pour se plonger dans le petit volume de poche En effet, l'auteur nous fait vivre tout ceci d'une manière décalée, sur le ton du rocambolesque. Une expédition unique, au bout du monde et parfois dangereuse devient une anecdote extrêmement décalée par le prisme du regard d'Artis, toujours enthousiaste, obnubilé par ses besoins de découvertes, de nourrir son ennui doré dans lequel le petit coq en pâte vit le jour. de cela émergent des situations absurdes, des observations cocasses sur la culturelle chinoise qu'il découvre et des dialogues aux petits oignons avec ces compagnons de route , avec lesquels, vous en conviendrez après lecture, il partage une folie douce et un enthousiasme contagieux.Ce petit grain rend Artis rôle et attachant. C'est très accessible et on passe un bon moment.