Je ne sais pas si c'est quelque chose de banal ou si ma personalité aurait sa place sur le spectre autistique mais il m'arrive régulierement de me retrouver en fascination totale et active pour une activité quasiment aléatoire. Recemment cette loterie cerebrale inexplicable est tombée sur les ascencions de sommets de plus de 8000m et bien que mon record personnel en terme d'alpinisme soit probablement la 5ème marche d'un escabeau, je viens de passer une semaine à lire et voir tout ce que je trouvais sur le sujet. C'est dans ce cadre que j'ai englouti
Asphyxie en 2 jours.
Je dois donc avouer que je n'ai aucune idée de ce que j'aurais pensé de ce roman si je l'avais lu il y a un mois, en tant que simple thriller.
Cela étant dit, la force de
Asphyxie est qu'il est écrit par une auteure qui sait de quoi elle parle ayant elle-même un passé confirmé de "huit milliste", comme on dit.
Et c'est très probablement la ou le bat blesse.. ou enchante.
En effet, la simple ascencion de ce genre de sommets est digne d'un thriller en soi. Pas besoin de tueurs sanguinaires, ni d'histoire d'héritages ou d'amants méconduits pour trouver la mort quand on entreprend de grimper sur l'un des 14 toits du monde, en l'occurence ici, le Manaslu.
L'aspect quasi documentaire du bouquin est donc déja très interessant et ma foi, palpitant.
Ajoutons à cela l'ombre d'un réel tueur et la recette risque d'etre exquise. D'autant plus que j'avais déja entendu un policier dans un reportage sans rapport, avouer à demi mot que les meurtres en montagne etaient malheureusement, de nos jours les enquêtes les plus complexes pour la police et donc, la catégorie la plus propice aux fameux "crimes parfaits".
Le problème qui en découle pour le lecteur est que, si ce dernier est dénué de toute fascination ou interêt pour cet environnement, l'intrigue bien que à mon gout vraiment bien ficelée, se déroule au rythme d'évenements qui pourraient paraitre redondants.
En fait une ascencion comme celles dont on parle, se fait par palier. Il y a plusieurs campements entre le camp de base et le sommet, et pour des raisons d'acclimatation du corps, le processus standard est de monter au camp 1, redescendre au camp de base, remonter au camp2, redescendre au camp 1, monter au camp 3, redescendre au camp de base, etc.
Dans
Asphyxie, cette progression est donc, vous l'aurez compris très bien décrite et utilisée par l'auteure, mais la réalité est parfois moins sympa que la fiction et je comprend tout à fait que ces allers retours paraissent longs ou ennuyeux comme je l'ai lu dans les quelques critiques mitigées d'autres membres. En ignorant cette particularité de la discipline, on pourrait même peut etre penser que
Amy McCulloch a fait dans la simplicité à limiter grossomodo les déplacements des personnages et les décors de son thriller aux seuls 4 camps du Manaslu et aux difficultés topographiques qui les séparent.
Les descriptions de ces derniers et des différentes épreuves qui s'offrent aux courageux entre chaque camp peuvent également être un peu perturbantes car regorgent d'un langage qui parfois peine à créer une image mentale efficace pour le lecteur étranger à tout ça. Crevasses, cascade de glace, serac, de quoi parle t on exactement? Tout est très bien décrit bien sur et ce livre est adressé au grand public rassurez vous, mais disons qu'un leger effort est demandé au lecteur, et que si un quelconque interêt pour ce milieu sublimera sans aucun doute la lecture, l'effet inverse est peut etre vrai également.
Pour ce qui nous interesse davantage, la partie thriller/polar du roman m'a paru de bonne facture. Sans se l'avouer ou en faire un argument marketing, on est malgré tout dans quelque chose de proche d'un huis clos et j'ai soupçonné quasiment chacun des personnages tour à tour, persuadé à chaque fois d'avoir trouvé la solution à l'énigme. Ce qui est à mes yeux un gros compliment car signifie que l'auteure m'a parfaitement balladé au fil de ses chapitres.
Le style d'écriture lui est simple et tout à fait agréable, ce ne sera pas la force d'
Asphyxie mais ce n'est pas une faiblesse non plus loin de la. Les personnages sans être particulièrement fouillés ou originaux (quoique..), sont également bien définis et la profondeur de chacun est largement suffisante à nous porter la ou il faut.
Je sors de cette lecture avec un sentiment qui, je pense se ressent dans ces quelques mots. Celui d'avoir lu un livre formidable qui m'a completement transporté, mais dont je ne suis pas sur qu'il arrive en premier dans ma réponse si un ami me demandait quoi lire aujourdhui. Il pourrait être interessant, bien que une fois encore, pas forcément necessaire, de regarder un reportage ou le résumé d'une expedition sur le Manaslu avant-lecture pour mieux visualiser les lieux évoqués et leurs particularités (notamment le "Gibet", très fameux mur de glace à gravir entre le camp 1 et le camp 2)
Je met 17/20 a ce premier thriller de
Amy McCulloch qui a dans mon cas était exactement ce que je voulais lire d'un tel ouvrage.