Inutile de le nier : cet album parle de foot ! Mais ne s'arrête pas là …
Car le rouge, signe d'infraction sur le terrain est aussi la couleur de la violence … On ne la voit pas tout de suite, l'histoire commence avec des scènes familières : un enfant joue au foot, la famille se réunit pour le repas … et puis « la grande Allemagne », « les nazis » arrivent dans la conversation … le contexte se précise. Nous sommes en Autriche, avant l'Anschluss … le jeune Marcus est impatient de voir jouer son idole, Matthias Sindelar, en équipe nationale lors du dernier match Autriche-Allemagne avant l'annexion. Il assistera au match avec son père qui, lui, est désigné par ses « amis » pour tenter de convaincre Matthias de ne pas jouer avec les envahisseurs…
Fabrizio Siléi, sociologue spécialisé dans les questions d'identité et de mémoire, Prix Andersen 2014, aborde un aspect rarement évoqué de l'histoire des années 30 : la Résistance autrichienne. A cela s'ajoute le climat de l'époque : antisémitisme, endoctrinement des jeunes, violence, occupation, pour terminer par une évocation des camps. Sans oublier, bien sûr, l'axe dominant de l'album : l'exaltation de l'esprit sportif au service d'une idéologie politique. Si nous sommes dans une fiction, Sindelar a réellement connu le destin décrit et illustré ici. Les illustrations puissantes, plutôt réalistes, de Quarello évoquent l'oppression et l'écrasement par toute une série de détails : le ballon écrasé, la troisième illustration pleine page, allégorie guerrière proche des images de propagande de l'époque, les poings serrés de rage et d'impuissance, la bouteille qui explose en éclats …
Il n'est pas si fréquent de lire un album de cette qualité dont le « prétexte » est le sport … celui-ci va bien plus loin dans les thématiques mais reste cependant accrocheur pour le lecteur qui y rechercherait le plaisir de lire une bonne histoire consacrée au foot. Une qualité de plus !