Un livre lu par le plus grand des hasards mais c'est une très bonne pioche. Un très bon polar italien, se situant à Bologne, et où sévit le sergent Sarti Antonio. Il est en charge d'organiser la garde des locaux d'une exposition de numismatique mais les pièces les plus chères sont volées. Il est sanctionné par son chef et doit faire des rondes de nuit dans le quartier du Pilastro. Un quartier chaud de Bologne. Il y fait la connaissance de Claudio, un gamin de la rue, et décide de l'aider. Mais cela tourne au drame.
Un livre que je n'ai pas lâché. le ton est sombre, l'histoire est prenante, les personnages savoureux. Des répartis bien senties, parfois drôle, parfois grinçantes. Toujours sur fond de misères sociales, de luttes des classes.
La narration est particulière, c'est un roman qui alterne le "je" et le "il". Pour le "je", c'est l'écrivain qui intervient, il n'hésite pas à interpeller son personnage, à lui parler sans que celui-ci ne l'entende, le nomme "Mon sergent". C'est original et bien amené.
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Raimondi Cesaré - "Comment dire" (les lecteurs comprendont), Inspecteur chef de son état, attend dans son bureau ... tandis que le sergent Sarti Antonio prend racine dans la voiture 28... Des pièces de valeur ont disparu lors d'une exposition numismatique, et le cadavre d'un gamin est découvert sous un lampadaire dans une rue de Bologne. Les faits sont-ils liés ? Entre les tasses de café qu'il avale, ses rondes de nuit et ses discussions avec son ami Rosas, Sarti va s'attacher à résoudre ce problème. Il est suivi en voix "off" par l'auteur.
Un auteur que je ne connaissais pas, un style original, des personnages touchants... A découvrir ou à redécouvrir !
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La Fiat 850 du sergent Sarti Antonio appartient désormais à la préhistoire de l’automobile, mais ça n’a pas l’air de lui poser de problème. Des pièces d’origine, si je me souviens bien, il ne reste que le volant et le levier de vitesse. Et la plaque d’immatriculation.
Mais mon policier a la chance d’être l’ami, au bon sens du terme, de Romano, et Romano, pièce après pièce, lui a refait sa Fiat 850. Sauf que les pièces changées viennent toutes, ou presque, de voitures qui ont déjà, et depuis très longtemps, fait leurs adieux aux autoroutes et à l’asphalte des rues de la ville. Bref, de voitures de casses.
Et chaque fois que Romano voit se pointer le museau de la Fiat 850 devant son garage, il se passe les mains dans les cheveux et essaie de déguerpir avant d’être vu. C’est ce qu’il fait maintenant.
Mais Sarti Antonio ne lui en laisse pas le temps.
– T’en vas pas. Tout va bien. Je viens pas pour la voiture.
– Tu veux dire que ta 850 n’a rien ?
– Pour l’instant, tout va bien.
– Dieu soit loué.
– Je suis venu pour te demander un service personnel.
– Manquait plus que ça ! Viens boire un jus.
Romano le précède vers l’angle du garage où sont installées les machines à jetons et Sarti Antonio le suit.
Je suis très étonné quand mon policier prend le gobelet en carton que Romano lui tend et qu’il le porte à ses lèvres comme si c’était une tasse quelconque. C’est maintenant qu’il va réagir !
Mais non, rien. Juste une grimace de dégoût. Puis le gobelet et le café finissent dans la poubelle. Pas un mot, pas un geste d’intolérance. Ça m’inquiète.
Un type, un certain consul romain, a voulu laisser une trace de son passage chez nous. Il a appelé le Léonard de Vinci de l’époque et lui a dit :
– Écoute-moi, mon cher, tu pourrais pas me construire un bel aqueduc ?
– Tu paies combien ?
– On arrive toujours à se mettre d’accord. Mais je veux que tu fores pour que l’eau arrive au centre du forum.
– Forer le forum ?
– Faire arriver l’eau au centre, jusqu’à la place quoi…
– Rien de plus facile.
– Bien, alors on commence tout de suite et n’oublie pas que c’est moi qui dois donner le premier coup de pioche.
– Et tu paies combien ?
– On arrive toujours à se mettre d’accord, je te dis.
Le Léonard se mit au boulot et dessina un aqueduc entièrement souterrain qui arriva au centre du forum.
Un beau tunnel avec un passage pour les esclaves de service et pour les militibus chargés de la surveillance.
Ainsi va le monde et le progrès avance.
Et c’est ainsi qu’une histoire aussi lointaine s’achève sous les yeux de Sarti Antonio, sergent de son état, tout comme trois précieusissimes pièces qui ont disparu du palais du roi Enzo, on ne sait trop comment.
Une nouvelle preuve que l’Histoire est maîtresse de vie. Si preuve il fallait.
Le résultat, c’est que Sarti Antonio, sergent de son état, Felice Cantoni, agent de son état, et votre serviteur, rien de son état, prennent leur service à minuit pile et le quittent à six heures de matin. Au Pilastro.
Dit comme ça, ça n’a l’air de rien. Mais ce n’est pas rien.
Le premier à se plaindre, c’est Felice Cantoni :
– Ce service de nuit me gonfle déjà.
Sarti Antonio l’écoute à peine. Il a sommeil et a du mal à garder les yeux ouverts. La voiture 28 parcourt lentement les rues désertes du Pilastro à peine éclairées par des lanternes suspendues à une hauteur improbable. Un vent féroce secoue les arbres et fait danser les lampes, et les ombres s’allongent, disparaissent et réapparaissant derrière les silhouettes sombres des édifices, dans un clair-obscur qui oscille en continu.
– Je suis d’accord : c’est gonflant. Et puis, tout m’a l’air en ordre, ici.
Sarti renonce à continuer un discours qui ne l’intéresse pas, tout comme ne l’intéressent ni le Pilastro ni même son service. Il le sait bien, lui, pourquoi il se trouve en ce moment dans la voiture 28 et dans ce quartier. Parce qu’il ne connaît pas assez bien l’histoire de sa ville.
S'il y a quelque chose qui ne va pas, c'est que ce sont toujours les plus faibles qui trinquent ; ceux qui sont obligés de laisser les autres leur marcher dessus ; ceux qui n'ont pas encore compris que les ongles servent à rester accroché à la vie, ceux qui ont des griffes encore peu robustes et peu pointues. Comme le petit Claudio
Piccola Scuola di Lettura Consapevole - sessione estiva