Masse Critique Non-Fiction Février 2023
Le moins que l'on puisse dire, c'est que ce tome 4 de Féminologie, Géni(t)alité, recueil de textes et discours d'
Antoinette Fouque, co-fondatrice du Mouvement de Libération des Femmes en 1968 en France décédée en 2014, est abscons. Disons que, sans doute aucun, il s'adresse à des personnes - dont fort heureusement je fais partie - qui maîtrisent le lexique de l'engagement et de la pensée féministes, et en comprennent les postulats fondamentaux.
Tel que le décrit à plusieurs reprises
Antoinette Fouque, le mouvement féministe initié par le MLF des années 60, est d'abord un mouvement philosophique et culturel, influencé par les hautes sphères intellectuelles de la connaissance scientifique (sciences dures comme sciences humaines). Seulement ensuite un mouvement politique intersectionnel.
Le recueil est monté de telle façon que les conclusions des réflexions d'
Antoinette Fouque se basent sur des argumentaires parfaitement articulés, mais forcément - question d'époque ? - les divergences dans les opinions qui guident une femme née dans les années 30 et qui a eu tant d'impact sur la vie de toutes les femmes françaises, et d'une simple féministe comme moi née à la fin des années 80, sont plurielles. Pour faire court : je n'adhère pas à toutes les convictions de l'essayiste, que par ailleurs je respecte, car je le leur dois à plus d'un égard.
Je remercie du fond du coeur les éditions "des femmes" et l'opération Masse Critique de Babelio de m'avoir permis de lire cette passionnante oeuvre technique et d'avancer encore sur mon chemin dans le féminisme.
Les thèmes qui y sont abordés et qui m'ont particulièrement passionnée sont :
- le lien entre création et procréation ;
- L'oralité comme tradition féminine et le sens du mot "écriture", sa construction notionnelle, son utilité, sa signification dans la gestation et sa polysémie ;
- La notion fondamentale d' "envie de l'utérus", exposée ici comme la source de la misogynie culturelle ;
- L'esquisse d'une nouvelle ère, effective et linguistique, dans la prise de conscience et l'acceptation de l'origine corporelle de tout être, l'origine utérine par opposition aux récits des mythes fondateurs les plus influents de la culture humaniste ;
- La redéfinition de plusieurs termes ou plutôt la prise de conscience de ce qu'un mot utilisé quotidiennement comprend non seulement sémantiquement mais culturellement et donc sociologiquement, politiquement, économiquement (exemple : le terme "maternel" par rapport au terme "matriciel", dénué de connotation culturelle et structurée, embrassant strictement sa nature biologique).
En conclusion, "Géni(t)alité" est une livre à lire pour ouvrir ses champs de réflexion sur la pensée féministe et dans la perspective de la construction d'un nouveau monde qui ferait de la relation hétérosexuelle un duo créateur plutôt qu'un duel destructeur.