Evidemment, ce nouveau
Carlotto a immédiatement aiguisé ma curiosité : cet auteur formidable au parcours sans faute si l'on excepte son dernier ouvrage – à quatre mains comme celui-ci – aura-t-il su redresser la barre et faire oublier les faiblesses de
Padana City ? La réponse est oui, sans aucune réserve.
C'est ce que
Carlotto sait le mieux faire, les personnages de salaud intelligents, cyniques, égocentriques et sans aucun scrupule... Gigi Vianello, il s'appelle, ici. Installé en Sardaigne, il possède avec sa "fiancée" un restaurant gastronomique, parfaite couverture pour le gigantesque trafic d'aliments frelatés qui a fait peu à peu sa fortune. Gigi est un type brillant, fin psychologue et habile manipulateur. Aussi, on peut dire qu'il n'a vraiment pas eu le nez creux en dragouillant la superbe épouse du bijoutier le plus important de Cagliari.
Le super salaud de "
Arrivederci, amore" a été le plus gros succès de
Carlotto semble-t-il. Un succès amplement mérité. Adapté (sans brio, certes) au cinéma en en BD. On peut facilement imaginer la tentation de l'auteur de remettre un selle un personnage du même tonneau. Un peu comme
Jim Thompson passant du "Démon dans ma peau" à "
1275 âmes". Mais comment le lui reprocher alors que le résultat est constamment jouissif, aussi captivant, drôle et effrayant que son chef d'oeuvre de 2001, sans pour autant qu'il y ai redite : Gigi présente des faiblesses inconnues chez le Giorgio Pellegrini de "Arrivederci", faiblesses qui causeront sa perte. de plus,
Carlotto et Abate profitent de l'intrigue pour dénoncer les trafics de bouffe avariée et polluée qui se sont naturellement développés avec la mode des labels qualitatifs, bio et autres. Polluée, mais pas trop : l'important est de bien faire la différence entre la merde, écoulable sans risque majeur, et l'hyper merde qui peut tuer et qui donc ne doit pas être mêlée à la merde dans une proportion supérieure à 20%... c'est l'une des règles d'or établies par Gigi pour ne pas mettre en péril la pérennité du bizeness.
Style d'une parfaite efficacité, dialogues aussi intelligents que percutants (Les auteurs n'ont rien à envier aux américains les plus brillants,
Elmore Leonard en tête), traduction transparente qui se fait oublier instantanément, "
J'ai confiance en toi" sera à coup sûr l'un des must de l'année.
Une seule question me tarabuste : quelle est donc la contribution de Franceso Abate (journaliste et DJ !?) dans cette impeccable réussite, qui ne présente pas de qualité que nous ne connaissions déjà chez
Carlotto ?