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Michel Viegnes (Traducteur)Myriam Heintz (Traducteur)
EAN : 9782908606157
432 pages
Entrelacs (28/05/2004)
5/5   2 notes
Résumé :

La crise de l’environnement naturel est un rappel externe de la crise spirituelle des hommes et des femmes qui, ayant délaissé les cieux au nom de la terre, risquent maintenant de détruire celle-ci. La résolution de cette crise sans précédent ne requiert pas seulement des réponses rhétoriques, mais une réelle conversion du regard de l’homme moderne sur son environnement et un changement de s a conception du monde. Constatant que chaque tradition spiritue... >Voir plus
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La doctrine traditionnelle de l’unité intérieure et de la multiplicité formelle des religions, loin d’être une invention moderne comme les autres méthodes universitaires d’étude des religions, est immémoriale. Elle est enchâssée dans les traditions elles-mêmes. C’est seulement maintenant qu’elle est à nouveau formulée, car l’humanité actuelle a un besoin urgent de compréhension religieuse, au-delà des frontières traditionnelles qui ont séparé les cultures les uns des autres au fil des siècles. Les porte-parole traditionnels de la philosophe pérenne n’ont pas non plus recours au langage d’une seule tradition. Plus exactement, ils font un plein usage de toutes les possibilités de la riche tradition métaphysique occidentale en sus de celle de l’islam, de l’hindouisme et d’autres religions.

Par conséquent, ils parlent d’essence et de forme ou de forme et de substance, d’archétypes et de théophanies, d’Atman et de maya, de manifestation (zuhur) et de voile (hijab), etc. Le royaume principal est celui des essences, tandis que les choses de ce monde appartiennent au royaume des formes. La Réalité Ultime est la Substance Suprême dont tout ordre de réalité inférieure est un accident. Les archétypes contiennent les réalités qui, en ce monde, se manifestant à travers la théophanie, laquelle per se n’est qu’un miroir reflétant les formes d’une origine céleste, tout en n’étant rien en elle-même.

Seul l’Atman, le Soi Suprême, est Réel, et toute autre chose est un voile, irréel au sens ultime, mais possédant une réalité à son propre degré. Ainsi la maya n’est pas uniquement une illusion, telle qu’on la conçoit en général, mais le pouvoir créatif et la Shakti, ou « l’épouse », d’Atman.

Le Divin se manifeste à travers Ses Noms et Ses Qualités, et pourtant, les choses qui révèlent les Noms sont aussi des voiles ou hijab, qui cachent le Visage du Bien-aimé. Car le Prophète a dit : « Allah a soixante-dix mille voiles de Lumière et d’Obscurité : s’Il devait les retirer, alors les splendeurs de Son Aspect consumeraient sans aucun doute tous ceux qui L’auraient appréhendé du regard. »

Voir, au-delà du voile de la multiplicité – particulièrement dans le domaine de la religion – cette unité à l’origine de toutes les formes sacrées, et en même temps être capable de saisir l’importance de son sens au seins de l’univers religieux dont elle fait partie, sont les tâches que la philosophie pérenne s’est assignées. (pp. 28-29)
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Ce qui caractérise de la manière la plus évidente la vie des peuples pratiquant une religion primordiale est qu’ils voient le corps humain comme une réplique en miniature du cosmos – donc en communion directe et permanente avec le monde naturel et détenteur d’une sagesse qui lui est propre, indépendante de l’intelligence rationnelle. Les peintures corporelles que l’on peut observer chez les Maoris, les aborigènes d’Australie, les Africains, les amérindiens et d’autres sont directement liées à leur conscience du sens cosmique dont le corps est porteur. On ne doit pas oublier que l’ornementation au sens originel signifiait un embellissement assorti de qualités cosmiques et divines, et que le mot cosmétique, réduit de nos jours à un sens si frivole, dérive étymologiquement du grec kosmeticos, « orner », lequel appartient à la même famille que cosmos ; l’ornementation consiste donc à se revêtir soi-même de qualités cosmiques, à devenir, en quelque sorte, « conforme à l’ordre cosmique ».
(…)
En outre, les religions primordiales mettent toutes l’accent sur un contact direct entre le corps humain et les éléments naturels, non pas dans une perspective « naturiste », mais parce que le corps est subtilement lié à tout le réseau de la vie, et cela en un sens qui échappe à notre compréhension mentale habituelle. Dans ces traditions, l’homme s’identifie aussi dans sa chair, et non dans son mental, avec telle ou telle bête, plante ou montagne, prise non pas comme des objets physiques au sens scientifique moderne, mais comme des manifestations matérielles d’archétypes célestes. Les coiffures empruntées à différents animaux, que portent certains peuples primitifs, ainsi que les noms donnés à certains héros visionnaires comme le grand chef Indian Seating Bull (Taureau Assis), procèdent du même principe. Le corps apparaît à la lumière d’une vision holistique de la nature qui met en évidence à la fois le lien entre les créatures, et l’unité ontologique du symbole avec ce qu’il symbolise, autrement dit la forme terrestre et l’archétype céleste. (pp. 349-350)
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Après avoir abordé dans la première et la seconde partie de son livre ce qu’il appelle la « scolastique », constituée en majeure partie de la loi et de théologie, et dont l’influence fut considérable en Occident médiéval et ses institutions, [George] Makdisi se tourne vers l’organisation de la connaissance dans la tradition de l’adab, ou de ce qu’il appelle l’humanisme dans la connaissance religieuse.

Il énumère donc les principales disciplines de l’adab, à savoir la grammaire, la poésie, l’éloquence, l’art oratoire, les arts épistolaires, l’histoire et la philosophie morale. Il évoque ensuite les méthodes d’instruction pour apprendre l’adab : la mémoire, le débat et la conversation instructive, la dictée, l’autodidactisme, etc. Il détaille aussi les figures du protecteur, des humanistes-érudits, des humanistes-amateurs, et d’autres membres de la communauté de l’adab, qui n’était pas seulement constituée par des adibs (ou spécialistes de l’adab) professionnels, tels que les professeurs, directeurs d’études (mutadassir), les libraires, les secrétaires, etc., mais aussi par les « gais compagnons ».

A travers les détails et l’étude approfondie de Makdisi, on est frappé par les similitudes – en ce qui concerne les sujets d’étude, la manière d’enseigner, voire les institutions formelles – entre le monde islamique et les studia humanitatis qui se développent en Italie au XIVe siècle. (p. 242)
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La métaphysique islamique ultérieure a élaboré les enseignements coraniques concernant les Noms et Qualités de Dieu, afin de mettre en évidence le lien qui existe entre les ordres naturels et divins et, ésotériquement, l’extension de l’Ordre Divin vers ce qui constitue extérieurement l’ordre naturel.

Toute la réalité cosmique consiste en reflets et combinaisons des théophanies (tajalliyyât) de divers Noms et Qualités Divins qui sont les racines (asl), ou supports (mustanad), de toutes les réalités ou phénomènes de ce monde qui n'existent et fonctionnent que parce qu’ils sont soutenus (istinâd) par les Noms Divins. Selon Ibn ‘Arabî, « Il n’y a pas de propriété dans le cosmos sans un support et un attribut seigneurial ». Les Noms Divins sont les principes des archétypes immuables (al-a’yân al-thâbitah), qui sont les « Idées » de toute manifestation cosmique contenues dans l’Intellect Divin. Dieu « souffle » sur ces archétypes, et ainsi le cosmos prend vie. La substance du cosmos est le « Souffle du Compatissant » (nafas al-Rahmân), tandis que les formes cosmiques et tout ce qui constitue l’ordre naturel émanent des réalités archétypales et, en fin de compte, de l’Essence Divine.

La doctrine du « Souffle du Compatissant » est liée à la doctrine soufie de la dilatation du cosmos que l’on appelle « le renouveau de la création à chaque instant » (tajdid al-khalq bi’l-anfâs). A tout instant, l’univers est absorbé dans le Centre Divin et se manifeste à nouveau dans un rythme de contraction (quabd) et d’expansion (bast) qui ressemble à celui de la respiration humaine.

Cette doctrine – comme celle de l’unité transcendante de l’être (wahdat al-wujûd) qui considère que seul le Principe Divin est réel et qui, du point de vue de la Divine Vérité (al-Haqq), nie la réalité de tout le reste – met seulement l’accent sur l’absolue dépendance de toute chose à l’égard du Principe Divin. Elle retire du monde naturel toute illusion d’indépendance et de permanence, et rattache ainsi, implicitement, l’ordre naturel, dans le sens le plus profond, à l’Ordre Divin. L’ordre naturel reflète et plonge ses racines dans l’Ordre Divin, et l’ordre dans la nature est un reflet de celui des archétypes, et, en fin de compte, des possibilités internes du Divin Lui-même.

A un niveau plus profond, on peut dire que l’ordre naturel est la Réalité Divine se manifestant sur le plan de l’existence phénoménale. C’est à cette réalité essentielle que le Coran fait référence quand il affirme, « Quel que soit l’endroit vers lequel nous nous tournions, se trouve le Visage de Dieu » (II : 115), une parole dont les nombreux traités soufis sur le wahdat al-wujûd sont autant de commentaires. (pp. 105-106)
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…un développement encore plus significatif du dualisme exprimé dans le pensée de [Giordano] Bruno se manifeste dans le dualisme qui caractérise les idées du père de la philosophie moderne occidentale, René Descartes.

Avec Descartes, on se trouve face à une prise de distance radicale par rapport à la perspective traditionnelle de la compréhension de l’ordre naturel qui a caractérisé et influencé à peu près toute la pensée moderne précédente. Pour Descartes, l’expansion est un attribut essentiel de la matière, et toutes les propriétés authentiques de la matière dérivent de cette expansion, qui implique aussi la durée. Dans ses Méditations, Descartes considère même que cette conception est innée à l’intelligence humaine, comme l’est le concept de Dieu et d’esprit. Les qualités de base des choses sont en rapport avec l’expansion, et elles sont mathématiques, alors que les autres qualités sont secondaires et peu importantes.

Donc, à la manière de Galilée, Descartes met de côté tous les aspects qualitatifs de la nature, la réduisant à une réalité cinématique explicable par la géométrie. Il ramène la physique aux mathématiques, et la matière, pour ainsi dire, à l’espace, négligeant la distinction entre un objet et son environnement. L’ordre naturel devient ainsi un ordre mécanique d’où toute finalité est exclue. Dans ses Principes, Descartes cherche à tirer les principes de sa physique de la métaphysique, mais pas dans le sens traditionnel du terme, car sa métaphysique n’est qu’une philosophisation sur une nature complètement quantifiée et mathématisée.

La physique de Descartes s’est effacée au profit de celle de Newton, mais sa conception entièrement mécaniste de l’ordre de la nature – fondée sur un dualisme radical entre l’esprit et la matière, mais aussi entre le sujet connaissant et l’objet connu – l’a emporté, et a exercé une influence, perceptible aujourd’hui encore, sur la conception moderne de la nature. Descartes a ôté à la nature toute sa réalité ontologique, hormis son aspect quantitatif. Il a aidé à créer la notion mécanique de l’ordre naturel et la vision de la nature comme une pure « chose », coupée de toute réalité spirituelle ; une vision qui a dominé l’horizon de la civilisation moderne, et ce en dépit des transformations ultérieures de la philosophie et de la science occidentales. Descartes a confondu les mathématiques de la nature avec la philosophie de la nature, et a créé une philosophie qui sert les desseins de la science naturelle… (pp. 157-158)
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An Anthology of Philosophy in Persia
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