Le miroir de Lorenzo est un ouvrage qui veut mettre en avant l'amitié et l'autisme. Si on regarde plusieurs définitions de l'autisme, et d'après ce que je peux comprendre du sujet actuellement : on retrouve des comportements répétitifs stéréotypés qui se concentrent sur des intérêts spécifiques. Autrement dit, quand ce qui peut être une passion-plaisir pour nous peut devenir un besoin presque vital et rassurant pour ces personnes qui présentent des troubles du spectre autistique. L'autisme est connu et méconnu à la fois paradoxalement. le présenter ou tenter de le décrire est une tâche complexe ! Tout aussi sophistiqué que la façon dont les personnes autistes peuvent percevoir et traiter les informations du monde d'une manière qui peut être différente de la plupart des gens. Elles ont donc très souvent des talents et des attachements incroyables/uniques.
Ce qui est sûr, c'est que pour les professionnels comme pour ceux qui peuvent vivre avec, on a encore beaucoup de chemin à parcourir, ici, en France (moi, le premier) !
J'ai aimé cet ouvrage car :
- on met en images l'univers, tel qu'il peut être "réellement" perçu par Lorenzo : un monde fantastique où il a besoin de la force que lui apporte son frère, seule personne qui n'est pas un animal
- la bienveillance, la curiosité et l'ouverture d'esprit du personnage de Sofia, représentée par une renarde blanche : une façon de représenter une attitude positive qui se montre rassurante, élégante et ambitieuse (elle prend des initiatives)
- le réalisme des réactions : Lorenzo essaie de crier plus fort que ses "assaillants", évidemment, cela a l'effet inverse
- les dessins et couleurs
- l'outil du miroir qui est là pour symboliser les façons différentes de percevoir le monde
- la prise en compte des proches qui vivent avec une personne autiste : le frère de Lorenzo s'en veut de ne pas l'avoir protéger, heureusement la mère, ici, l'enlève sa culpabilité, ce n'est pas son rôle (l'environnement a souvent tendance à vouloir surprotéger ou faire les super-héros alors que, comme les autres, ils ont besoin de notre présence)
- la façon dont est géré ce statut de super-héros car Lorenzo veut aussi que son frère le soit. Assumer cette posture n'est pas dans les responsabilités de Raphaël, accepter que son frère le voit ainsi tout en étant à côté de lui, est en revanche une belle façon de pouvoir évoluer ensemble.
Je vous conseille de réaliser plusieurs lectures pour bien saisir tout ce qui est mis en avant. C'est donc en soi une réussite d'avoir compilé tout cela en moins de 50 pages, mais aussi, à mes yeux, un inconvénient. Ainsi, si j'avais quelque chose de négatif à émettre, ce serait de pouvoir comprendre du premier coup et que cela reste en surface : il faut voir cela comme une sensibilisation. de plus, je trouve qu'il ne parlera pas à toutes les personnes qui ont des troubles du spectre autistique. Une palette d'univers variés aurait pu contrecarrer cela. En ce sens, je ne sais pas si la lecture en autonomie pour un enfant peut être adaptée aux propos qui peuvent se révéler implicites : à part sur la quatrième de couverture, le mot autisme n'est pas mentionné explicitement dans l'oeuvre. Quel dommage ! Ça fait passer la note de 4 à 3,5 pour moi, malheureusement ! C'est peut-être une volonté des autrices mais j'aurais aimé une approche plus explicite.
Pour les professionnels de l'enfance qui souhaitent l'utiliser comme support d'enseignement, je pense que cela peut être une première approche, ne pourra pas se suffire ou se révéler pertinent selon les spécificités de l'enfant. Pour ma part, je retiens que ce livre peut être :
- pertinent dans tous les cas si présence d'une personne ayant des troubles du spectre autistique (TSA) pour permettre aux enfants de développer de l'empathie à l'égard de leur camarade
- proposé en cycle 1/début cycle 2 : minimum GS avec un fort étayage en raison de la quantité de texte/informations implicites
- fin cycle 2/cycle 3 : en autonomie, lecture intégrale ou lecture cursive
- enfants relevant de l'ASH : important pour l'identification, ne pas se sentir seul avec ses différences et développer l'expertise de sa différence pour lui rendre accessible l'autonomie
- parents : prendre du recul sur la différence de sa fille/son fils (dédramatiser) et être attentif au fonctionnement familial possiblement perturbé par la spécificité de leur enfant.
En tout cas, j'ai eu envie de proposer cette lecture à un élève en particulier avec qui je travaille pour lui demander de m'aider à arriver à pouvoir voir à travers son miroir pour mieux l'accompagner.
Merci à Babelio de m'avoir proposé la lecture de ce livre.