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EAN : 9782355361678
400 pages
Carnets Nord (21/05/2015)
3.75/5   4 notes
Résumé :
Sixten Braun a l’allure d’un homme d’affaires à qui tout réussit : sillonnant l’Asie comme commercial, il est fiancé à une jeune femme de la bourgeoisie colonaise qui l’attend sagement au pays. Mais derrière ce complet veston se cache un homme qui rêve de devenir maître nageur plutôt que manager, et qui n’éprouve que de l’indifférence envers cette fiancée bien sous tous rapports. En l’espace de seulement quelques jours, sa vie est bouleversée par deux accidents incr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
L'histoire est celle de Sixten Braun (j'ai eu envie de l'appeler Tony, car j'ai lu dans la foulée Une fille, qui danse de Julian Barnes qui m'a énormément marquée), un trentenaire qui travaille à Tainan, une ville au sud de Taïwan. Sa vie intense, rythmée par son travail, semble plutôt normale jusqu'au jour où un cachalot remorqué par un camion dans la rue explose et qu'un bout de ses viscères l'envoie à l'hôpital. Il y rencontre Lana, une doctoresse allemande spécialiste du cerveau dont il tombe amoureux. A partir de ce premier incident, les hasards extraordinaires ne vont plus cesser de tomber sur Sixten : un accident d'avion et un dilemme moral sur un gilet de sauvetage plus tard, il perd son boulot, se voit finalement contraint de retourner en Allemagne, y devient maître nageur et est fortement invité – comme on invitait fortement Sénèque au suicide, si vous voulez – à adopter le fils de Lana. On le soupçonne d'être le père, mais les yeux en amande du petit Simon disent bien que ce n'est pas le cas… A partir de ce moment-là, le roman se centre pas mal sur la relation entre Sixten et son fils, qui est un enfant spécial : celui-ci en effet parle une langue qui semble élaborée mais n'est compréhensible de personne. Envoyé dans une école spécialisée où il ne semble pas apprendre grand chose, il se révèle étonnamment doué pour diverses choses, et notamment l'escalade. Or… (vous voyez comment c'est difficile à résumer) l'escalade rappelle à Sixten la perte de sa soeur, Astri, sur une montagne du Tyrol, et l'amène à reconsidérer son passé et ses certitudes sur le deuil.

Ça a l'air assez chaotique, dit comme ça. Pourtant, le roman se lit bien, et est bien construit : les informations sont distillées à l'exact bon rythme pour que le lecteur les assimile et poursuive sa plongée dans l'histoire. Mais il y a un hic. Il peut sembler complètement hors sujet, dans le cadre d'une telle histoire, de parler d'invraisemblable, mais je n'ai pas réussi à croire à ce roman-conte. Pourtant, j'en avais envie. Mais je pense qu'il y a un petit défaut dans la gestion de la suspension de l'incrédulité du lecteur. J'aurais eu besoin d'une étincelle de plus – peut-être même de moins de rationnel et d'explications – pour souscrire à la vision du monde très particulière qu'offre ce livre. Pour sa défense, on pourrait penser que tout cela vient de l'imaginaire bizarre du personnage principal et narrateur (à l'exception de la parenthèse sur le père biologique de Simon, que j'avoue n'avoir pas trouvée très utile – même si elle permet une très belle scène de confrontation à la fin*). Mais il se peut alors que j'aie du mal à comprendre tout à fait la logique dudit personnage.

* Ça en a l'air, mais ceci n'est pas vraiment un spoiler – l'intrigue principale porte sur tout autre chose.

Ce livre, en tout cas, permet de montrer toute la difficulté à traiter d'un univers fantaisiste. J'ai l'impression que son propos vise à réenchanter le réel en y insérant un peu de mystère ou de poésie, et c'est une ambition à la fois classique et très louable de la littérature – ou de l'art en général. Mais j'ai l'impression que l'univers instauré est un peu trop hybride, comme s'il ne savait pas se décider entre la fadeur du quotidien et la magie de l'extraordinaire qui y surgit. Peut-être aussi est-ce parce que je ne trouve pas le quotidien fade, et que j'aime quand la littérature le réenchante sans coller par-dessus des hasards magnifiques, deus ex machina et autres miracles. D'ailleurs, les moments que j'ai préférés dans ce livre sont justement ceux où l'on se croit dans le monde réel, où l'on perçoit, légèrement, l'inspiration de l'expérience, la déformation de souvenirs personnels. Tout d'un coup, c'est tout simple – c'est bizarre tout de même – et cela sonne vrai. Là, j'ai le sentiment que l'auteur vise juste.

L'histoire demeure prenante, et on a envie de suivre le narrateur dans sa quête pour retrouver Astri et recomposer son souvenir – quand les motivations de sa petite amie et de Simon sont plus floues. Elle dit également toute la fascination et l'amour du père pour son gamin bizarre, qu'il apprend doucement à comprendre et qu'il finit par aimer non pas malgré tout mais parce que. le Mondologue, avec son titre mystérieux (on ne saura réellement pourquoi ce titre qu'à la toute fin de l'ouvrage) traite métaphoriquement de l'acceptation de son passé – j'aurais peut-être aimé un développement plus ancré dans le réel de cette question-là, mais on peut penser que le choix d'écriture est original. Et on ne peut nier qu'il soit bien écrit – bien traduit. J'ai d'ailleurs pris mon carnet à plusieurs reprises pour noter tout de même quelques phrases qui m'inspiraient.
Lien : https://gnossiennes.wordpres..
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Je viens de terminer la lecture de ce livre. Je ne vais pas faire une longue critique (je ne sais pas faire), mais je ne peux que le recommander à tous ceux et celles qui aiment les romans où l'auteur ce joue des codes d'une certaine littérature bien huilée et qui se voudrait réaliste, nous emmène avec audace dans les fantaisies les plus surréalistes tout en faisant montre d'un humour des plus décapants et en gardant un fond d'humanisme touchant (voir la relation avec Simon, l'enfant prodige qui parle un langage inconnu). Tout cela très bien écrit (et traduit). Un régal pour les amateurs de romans non conventionnels.
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Une hilarante et songeuse quête du sens perdu dans les lieux les plus improbables, entre Taïwan, mer de Chine, Stuttgart et Alpes autrichiennes.

Sur mon blog : https://charybde2.wordpress.com/2017/03/03/note-de-lecture-le-mondologue-heinrich-steinfest/

Lien : http://charybde2.wordpress.c..
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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
Les débuts de livre souffrent d'un grand défaut : il leur manque la musique.
Ce n'est pas comme les films, où le générique est soutenu par une introduction sonore qui agit comme une promesse. Celle-ci ne se réalisera pas forcément, mais elle captive instantanément le spectateur, éveille instantanément en lui de l'excitation, de l'émotion ou de l'étonnement.
Prenez Les Dents de la mer par exemple. Dès le tout premier moment, quand apparaît le globe terrestre des studios Universal, tournant dans l'espace, nous entendons un sonar, encore inoffensif, gazouillant, papotant, mer paisible, sauf que les mers paisibles n'existent pas. Et tout de suite après, lorsque les noms des producteurs s'affichent en lettres blanches toutes simples sur un fond totalement noir, la musique commence, la musique s'approche d'une manière menaçante, et avec elle le grand poisson. On ne le voit pas, mais la caméra semble installée dans ses yeux, elle montre ce qu'il aperçoit, elle le montre se glissant parmi les récifs. En fait on dirait plutôt qu'on emprunte le regard d'un passion-clown, mais premièrement il parait que même ces minuscules bestioles attaquent les plongeurs, et deuxièmement c'est la musique - encore plus forte, encore plus inquiétante, davantage d'instruments, davantage de notes - qui signale sans la moindre équivoque la taille que doit avoir ce poisson et le fait que, dans cette histoire, il n'arrivera rien de bon avant très, très longtemps.
Et quand la musique s'arrête (ou plutôt quand elle se transforme en une rengaine simplette jouée à l'harmonica), la caméra se porte sur une joyeuse bande de jeunes gens qui font la fête tard le soir sur la plage. Aussitôt nous nous demandons lequel d'entre eux se montrera assez bête pour faire plaisir à Steven Spielberg en allant se baigner.
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"Pour être franche, si, très triste, répondit-elle avec nettement moins de sécheresse. Mais je ne rentrerai pas en Allemagne et vous ne viendrez pas vous installer à Tainan. N'est-ce pas? Et nous n'avons pas l'intention d'entretenir une relation épistolaire, est-ce que je me trompe? Alors il vaut mieux rompre au moment où on vit quelques chose de beau et ne pas se mettre à courir après l'impossible".
Il était terrible de penser que l'amour était assujetti à la géographie. Aux nécessités du métier et de l'endroit où l'on vivait. Et que c'était la raison pour laquelle les personnes destinées l'une à l'autre se rencontraient si rarement. Elles épousaient ceux qui travaillaient dans la même entreprise, vivaient dans la même ville, fréquentaient le même cours de danse.
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Le Japon se passa on ne peut mieux. Je m’entendis très bien avec ces gens, avec leur superficialité, que l’on prend volontiers pour du formalisme pur. Tout ce cirque à propos des haïkus, de l’ikebana ! Les Européens en raffolent parce que cela leur semble avoir du sens, un sens qui ne requiert pas d’effort. Voilà ce qui en fait l’attrait : être génial en trois phrases. Plus exactement : être paresseux et génial. Je sais, en général on dit plutôt que les Japonais sont assidus, et sur ce point on leur trouve une grande ressemblance avec les Allemands. Mais chez eux, c’est plus artistique, moins laborieux. Comme si leur zèle les élevait au-dessus du sol. Cependant ce que nous aimons le plus, c’est leur façon de manier le vide. De faire comme s’il y avait quelque chose là où il n’y a rien.
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Pourquoi, ne pouvais-je m'empêcher de penser à des poissons? A cause de cette baleine, qui en réalité n'était pas un poisson? Bon, l'univers des associations d'idées aime aussi les erreurs. Tout particulièrement les erreurs.
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La croyance au hasard est une création des Lumières pour nous permettre de remplir lez zones blanches sur la carte de la vie.
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