SNCF, URSS, CGT, CFDT, CFTC, FO, FEN, UNEF, PC, PS, PRG, CIA , GI, OAS, ORTF, CRS, SO, AG, vous suivez ?
CFT, CIP, CPE, CFEM, D&S : plus difficile !
Mais le coeur du sujet est : JCR, UEC, VO , PCI, OCI, OT, LC, LCR, PCE, ERP, PRT, PSUC, PSU, UGS, PSA, SFIO, CED, PCM, SWP, FGDS, FNCL, JSU, GP, MNR, COB, POR...
Gérard Filoche écrit ses mémoires de trotskyste, brièvement au Parti Communiste puis dans ce qui sera la Ligue Communiste Révolutionnaire, de 1964 jusqu'à son adhésion au
Parti Socialiste en 1994.
Comme trait d'union, il maintient que mai 1968 était un mouvement révolutionnaire, important par la participation massive de la classe ouvrière à la grève générale. A travers des circonstances électorales diverses, la trace de mai 1968 dans la société explique pour lui l'élection de
François Mitterrand en 1981 et les événements français suivants. « Tout ce qui s'est passé depuis a été associé, stimulé, produite, nourri par le 'tsunami social' de Mai 68, qui a mobilisé durablement le ban et l'arrière-ban du salariat, et qui a toujours des répercussions tant intellectuelles et politiques que sociales ». Pendant toutes ces années, lui et ses camarades d'un parti ultra-minoritaire semblent avoir continué à croire qu'une reprise de cette révolution était possible, et que leur mouvement pouvait y jouer un rôle important.
Donc pendant trente ans l'auteur décrit de l'intérieur les relations entre les mouvements à la gauche du PS (parti bourgeois ou représentant la classe ouvrière?), et surtout à l'extrême gauche, leurs débats et leurs modes de fonctionnement. le récit par lui de son exclusion du PC est très amusant, renforçant pour longtemps sa vision d'un parti staliniste auquel il opposera le mouvement trotskyste (conçu comme le communisme plus la démocratie, pour faire simple). Cette nébuleuse trotskyste, ce conglomérat de groupuscules est remuant et son histoire est passionnante. Selon
Gérard Filoche, la démocratie interne de la LCR et des autres mouvements n'est pas exemplaire. Il cherche à démontrer que, le plus souvent minoritaire, il avait pourtant toujours raison. En presque 500 pages il n'a pourtant pas la place pour détailler les conflits idéologiques internes, le principal opposant ceux qui voulaient participer aux mouvements syndicaux et universitaires de l'intérieur à ceux qui prônaient un large front extérieur, qui restera toujours imaginaire, si les élections font foi.
On peut sourire de ces querelles de clocher entre micropartis. J'ai pourtant beaucoup apprécié de suivre le récit de ces années de vie politique française et mondiale, même d'un point de vue un peu décalé. Les analyses, même rapides, des violents mouvements en Amérique du sud, en Asie du sud-est, des renversements de tendance en Espagne et au Portugal, de l'ouverture du rideau de fer etc. m'ont bien intéressé. Son point de vue sur Grenelle et les diverses réformes introduites par Mitterrand et Jospin a également fait une bonne lecture ; quant à Jospin justifiant son passage chez les trotskystes, il faudrait le citer en entier. Filoche est assez discret sur la fondation de SOS Racisme, dont il fut un acteur clé, mais ce rappel est utile. Et, pour revenir à mon introduction, s'il abuse des sigles, explicités au mieux une fois, il faut reconnaître qu'il dresse un tableau bien vaste, bien vivant et bien informé d'organisations qui n'ont cessé de se renommer, d'être interdites, de réapparaître, de se scinder et parfois de fusionner.
Le ton de la narration est assez monotone, beaucoup d'imparfait avec quelques passés simples pour les actions personnelles ; le livre est un peu lourd, mais j'ai bien apprécié cette lecture, faite avec une distance critique (de ma part). Je remercie Babelio et les éditions de l'Archipel pour cette opération masse critique qui m'a ouvert la mémoire.
PS : qu'est-ce que ça fait d'apprendre que deux gouvernements de bords opposés ont écouté toutes vos conversations téléphoniques, même familiales ?