Le temps des ogres

Lu dans le cadre de la Masse Critique Jeunesse, ce roman a été une agréable surprise alors qu'à l'annonce de sa réception, j'avais été un peu déçue de l'avoir sélectionné. Il aborde frontalement la question écologique en situant son récit dans un temps où l'eau s'est à ce point raréfiée que la Terre est une vaste étendue désertique où les hommes les plus vils et les mieux armés ont confisqué les quelques citernes restantes. Sous leur joug impitoyable, les survivants rationnés à outrance vivotent, affamés et hagards. C'est le cas de la jeune Victoire 13 ans et de ses tantes Oma et Rosy abritées dans l'ancienne ferme familiale où elles cachent aux yeux de tous - et notamment des Patrouilleurs - leur bien le plus précieux, leur vieille brebis, Belhamelle. Victoire y est très attachée et pourtant, la brebis va être portée en sacrifice par les deux tantes désireuses de sauver l'adolescente qui est tombée gravement malade et qui nécessite des soins que seul, le vieux Glauque, guérisseur du village, peut leur offrir. le marché est pipé : les tantes se retrouvent arrêtées et Victoire dans les griffes de l'affreux vieux bonhomme et de son fils dégoûtant. Comprenant que sa survie est en jeu, l'adolescente s'enfuit et se retrouve perdue dans le désert, proie facile pour les prédateurs en chasse qu'elle va croiser sur sa route. Rejoindre le lac Baïkal, comme ses parents avant elle, pourrait être la solution. Or la jeune fille part en sens inverse et se retrouve coincée face à la mer asséchée, au pied d'un navire naufragé des sables qui abrite une cohorte de pirates dévoreurs d'enfants. D'un roman qui présente tous les codes de la dystopie, on évolue rapidement vers une sorte de conte cruel aux références mythiques, voir religieuses qui loin d'être dérangeantes, apportent une vraie originalité à ce roman et lui donnent une dimension philosophique forte et passionnante. J'ai tourné les pages avec de plus en plus de plaisir à suivre Victoire à la fois débrouillarde, courageuse et pleine d'humanité au coeur de cette histoire surprenante, racontée avec finesse et brio. Un vrai bon roman jeunesse sur un sujet difficile et douloureux écrit sans concession et même avec rudesse qui pourtant sait intéresser et amener par petites touches le lecteur à appréhender des thèmes profonds tels que la culture dans sa dimension humaniste ou les différents contours de la sauvagerie humaine. Beaucoup de sujets passionnants sont esquissés dans ces quelques pages sans prétendre à plus, invitant simplement à prolonger la lecture par des réflexions ou des recherches personnelles. Une belle découverte que le travail de cette autrice, Michelle Montmoulineix que je ne connaissais pas !

Dans la vallée de Milleherbes, Victoire, treize ans, vit avec ses tantes Oma et Rosy dans un petit village depuis que ses parents sont partis dès sa naissance chercher un nouveau lieu de vie possible, probablement sur les bords du lac Baïkal. En effet, le réchauffement climatique a entraîné une raréfaction de l'eau désormais rationnée et une désertification des sols avec une disparition totale de l'agriculture et de l'élevage. Quand Victoire tombe malade, ses tantes sont obligées de négocier avec l'affreux guérisseur, le vieux Glauque et son fils Brunon, qui les trahissent et les dénoncent aux Patrouilleurs, une milice de l'eau qui sème la terreur. Oma et Rosy sont emprisonnées et Victoire doit fuir, elle croit prendre le chemin du lac Baïkal, espérant y retrouver à la fois ses parents mais aussi son ami d'enfance, le jeune Pavel.

Michelle Montmoulineix vit en Brenne, une zone humide du centre de la France, classée parc naturel régional. Mariée à un ornithologue, elle porte elle-même un intérêt majeur à toutes les espèces sauvages : des oiseaux aux reptiles, des mammifères aux insectes, des plantes aux araignées. Elle a publié, pour la jeunesse, aux éditions Albin Michel et Bayard, et pour adultes, aux éditions La Bouinotte. Chez Hélium, elle est aussi l'autrice de Baleine rouge (2017), un roman d'aventures lyrique sur la relation entre un garçon et une baleine. source ; éditeur

Après Balein rouge en 2017, Michelle Montmoulineix nous surprend à nouveau par ce roman hors-normes, iconoclaste et extraordinaire. Elle joue sur les codes de la dystopie en imaginant un monde bouleversé par le réchauffement climatique et en mettant en scène une jeune héroïne combattante. Cependant, son écriture nous emmène dans un autre univers, celui du conte et celui des religions par une juxtaposition et une succession d'images symboliques. La quête de la jeune héroïne est ainsi ponctuée de scènes saisissantes, le sacrifice de la brebis, la négociation de la vierge, la rencontre avec le renard, l'amitié avec le prince ou la princesse grenouille, l'affrontement avec la marâtre ogresse, l'affrontement de Jonas, la rencontre avec les sirènes… Il s'agit donc encore de la part de Michelle Montmoulineix d'un roman extrêmement original dans la production actuelle du roman pour la jeunesse, un texte poétique et exigeant, un roman à la beauté fascinante dans le choix des images et des métaphores.

Coup de coeur.

Dans cette saisissante dystopie, Michelle MONTMOULINEIX décrit un monde inquiétant qui convoque nos angoisses et préfigure ce qui pourrait être notre futur.
Victoire est élevée par ses tantes depuis que ses parents sont partis avec d'autres vers le Lac Baïkal, à la recherche d'un lieu vivable pour leurs familles.
A 13 ans, elle n'a jamais connu la pluie. le changement climatique a entrainé la raréfaction de l'eau, la disparition des plantes et de l'élevage, le rationnement de l'électricité et de l'eau ainsi que la destruction des rapports sociaux.
Forcée de fuir son village pour échapper aux patrouilleurs, qui contrôlent le peu d'eau restant, Victoire décide de suivre le lit de la rivière, transformé en chemin creux, pour rejoindre ses parents. Après bien des déboires et de violences engendrées par la faim, elle arrive au pied d'un cargo échoué et rencontre des enfants abandonnés.
Son personnage, lumineux, cherche à communiquer, partager et éduquer les petits sauvageons alors qu'ils n'ont rien tandis que les adultes ayant perdu toute humanité font usage de violence pour préserver leurs dérisoires possessions. La jeune héroïne possède deux valeurs essentielles : l'empathie et le langage et l'issue viendra d'elle.
L'autrice, engagée dans la défense du vivant, ménage pour les lecteurs une fin toute en poésie et les héros trouveront un sens à leur vie au contact de la nature nourricière.
Ce texte, très court mais d'une efficacité redoutable, présente des personnages étonnants et malmenés qui ne laissent pas indifférent.
Des thématiques fortes comme la solidarité indispensable pour vaincre un monde hostile, la nécessaire préservation des beautés de la nature et l'importance de l'écologie pour anticiper l'avenir sont abordées pour des jeunes lecteurs.
Ce roman d'anticipation sombre et angoissant fait, aussi et surtout, l'apologie de l'apprentissage pour conquérir, en conscience, sa liberté.
A découvrir que l'on soit adolescent ou adulte.

Je remercie tout d'abord Babelio et Masse Critique pour la réception de ce roman.
Victoire, 13 ans, vit avec ses deux vielles tantes dans une ferme isolé du village. La jeune fille évolue dans un monde où l'eau se raréfie, provoquant des changements climatiques terribles pour l'agriculture et l'élevage de bétail obligeant des restrictions sévères. L'eau devient l'or bleu dont le contrôle est le nerf de la guerre.
Les descriptions que fait l'autrice suite à ce constat sont glaçantes. L'humain devient une bête sans coeur quand vient le pire. Mais l'autrice glisse des notes poétiques pour contrebalancer l'ambiance pesante des événements. le personnage de Victoire aide aussi à avancer dans cet univers, elle est pleine d'espoir et porte un regard plein d'innocence sur ce monde ravagé. Elle ne se laisse pas décourager malgré les situations terribles qu'elle traverse dans le roman.
Cette courte dystopie aux allures de conte prophétique aborde beaucoup de sujets : la question de l'écologie, la solidarité, la préservation du vivant, le partage et l'entraide. La fin laisse une note d'espoir, la nature trouve toujours un chemin et l'humain doit apprendre à vivre en harmonie avec elle et non contre elle.
C'est un roman très intéressant qui est saisissant, audacieux et engagé. Une belle lecture pour moi !!

Courte dystopie évoquant autant la beauté et la dureté de la nature que celle des Hommes.
J'aurais aimé un périple plus long. Les rencontres que fait Victoire et la découverte de ce monde asséché à travers ses yeux sont ce que j'ai préféré. L'innocence de notre héroïne y est adorablement bien décrite, avec une écriture simple et fluide adaptée à son public.
Il y a tout de même des scènes assez violentes, notamment dans le dernier tier, qui ne m'a d'ailleurs pas convaincue... Trop de choses sont survolées, j'ai trouvé les "méchants" un peu brouillons, ça manque vraiment de développement..
Néanmoins la toute fin est surprenante et assez poétique.