Voilà un ouvrage de bandes dessinées qui est pour collégiens, lycéens et adultes, donc un peu en marge de notre sujet. Il est vraiment intéressant et original, aussi nous l'évoquerons ici.
Son contenu permet d'approcher un certain nombre de personnages phares dans le domaine de l'horreur. Toutefois par prudence peut-être afin de ne pas froisser certaines sensibilités, d'entrée de jeu l'auteure par l'exemple de Napoléon montre qu'elle n'entend pas traiter des chefs militaires mais des chefs d'état qui se seraient attaqués à des populations civiles. Traiter de "pas assez méchant" Napoléon qui doit avoir sur la conscience environ un million de morts est surprenant et il est dommage qu'elle n'est pas explicitée le critère que l'on devine.
On se dit que l'auteure, après avoir choisi de "valoriser" comme terroriste ici
Maximilien Robespierre qui s'est opposé aux manoeuvres sanguinaires et parfois crapuleuses de personnages comme Fouché ou Carrier (on doit à ce dernier les noyades de Nantes), qui veut cibler la répression et qui meurt victime d'un complot ourdi en particulier par ces deux derniers, aurait mieux fait de ne pas toucher à la "grande histoire" avant d'avoir défini clairement son sujet et sans au moins consulter intelligemment wikipedia. Pour une fois cette encyclopédie en ligne se révèle d'un esprit nuancé et d'une grande rigueur à la fois sur
Robespierre, la Terreur révolutionnaire et les comploteurs du 8 thermidor.
Mis-à-part ce dernier contenu discutable, mais qui ravira tous les nostalgiques de la Contre-révolution, d'autant que
Caroline Guillot nous épargne Thiers avec 10 000 morts pour une semaine de 1871 alors que son dernier personnage Mary Ann Cotton trois personnes empoisonne justement à la même période.
Le reste du discours est fort intéressant. Sont traités, comme autres chefs d'états Isabelle de Castille, Henri VIII, Mary Tudor, sa demi-soeur Élisabeth Tudor, deux papes, Éric XIV de Suède, Attila et Ivan le Terrible. D'autres personnages ont un statut souverain plus ambigu comme Vladimir III prince roumain connu comme Dracula ou Messaline impératrice romaine. Les personnages sont présentés dans l'ordre chronologique depuis Caligula jusqu'à
Caroline Guillot, on a donc aucun personnage qui n'ait vécu dans le dernier quart du XIXe siècle et au-delà.
Les Poitevins seront heureux (ou malheureux) de se voir rappeler que dans l'ordre chronologique Jeanne de Belleville, Gilles de Rais et François l'Olonnais sont enfants de leur province, Des personnages comme Renaud de Châtillon (né en Orléanais) ont eu un rôle historique important et cela est très bien expliqué avec deux pages supplémentaires autour des états chrétiens nés des Croisades. Mis-à-part Messaline dont les turpitudes criminelles tiennent certainement plus d'une façon de dénigrer a posteriori son époux l'empereur Claude que de la réalité, on a effectivement affaire à des criminels avérés. Ceux-ci ont des pratiques variées, pour plusieurs ils sont pirates et outre François l'Olonnais, on a une des rares femmes flibustières à savoir l'Anglaise Anne Bonny.
Dans une préface, témérairement l'auteure annonce que tout a été passé au détecteur de mensonges d'un historien, on doute qu'elle en ait trouvé un spécialiste de toutes les périodes qu'elle évoque et on se demande si ce dernier n'aurait pas de larges complaisances pour les défenseurs de l'ordre social.
Elle précise qu'elle ne traite que de personnages européens. Deux doubles-pages sont destinées à trouver les liens que certains personnages étudiés entretiennent avec des souverains français. Chaque personnage dans un style caricatural sur une page de droite est proposé sur quatre vignettes. Là le texte du cartouche rappelle ou prolonge le contenu d'une phrase de la page de gauche et dessins ainsi que dialogues donnent souvent une note d'humour noir. Cette page de gauche présente la personnalité de façon globale et en mettant en exergue un aspect particulier de son oeuvre destructrice sous le chapeau "le détail qui tue".
En résumé le concept est excellent et ne sont à discuter que les choix et non-choix des personnalités faits au titre de "grands méchants". Couverture matelassé et papier glacé sont les propriétés de cet ouvrage qui fait suite sous la même forme et du même auteur à un ouvrage sur les rois de France et un sur les maîtresses de
Louis XIV.