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EAN : 9782290070437
373 pages
J'ai lu (23/04/2014)
2.87/5   19 notes
Résumé :
Adam Pennyman, employé d’une société Internet, ne se distingue en rien de n’importe quel autre employé de ce type. Ou presque. Adam a en effet une passion, les jeux vidéo, et une ambition, arriver au bout de son Catalogue des jeux obsolètes, le livre ultime sur les jeux d’arcade des années quatre-vingt. Plus que de simples distractions, Pennyman sait que ceux-ci ont fortement contribué à forger son identité. En les étudiant inlassablement, en essayant d’en extraire ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
« Video Games » (titre original, « Lucky Wander Boy ») est un roman de l'américain D.B. Weiss, « le scénariste de la série culte Game Of Thrones (Le trône de fer) ». Édité chez Plume (Penguin Putman Inc.) en 2003, paru dans la collection J'ai Lu en mars 2014, cet ouvrage de 374 pages nous raconte l'histoire tout à fait singulière d'Adam Pennyman. Comme indiqué en quatrième de couverture, Adam, « médiocre employé d'une société Internet, a une passion, les jeux vidéo. En les étudiant inlassablement, il cherche à comprendre le désastre qu'est son existence et à reprendre sa vie en main. le jeu « Lucky Wander Boy », et son légendaire troisième niveau, l'obsède. Adam se lance dans une course folle sur les traces de la créatrice » de ce jeu, « Araki Itachi. »

Adam est embauché comme rédacteur de séries Web chez PED (Portal Entertainment and Development) ; on attend de lui qu'il écrive le scénario du film « Lucky Wander Boy ». Au boulot, Adam croise plusieurs personnages fortement typés : il y a Anya Budna, une polonaise qui a quitté Varsovie pour Los Angeles, « un équilibre parfait entre vierge contemporaine et allégorie de la pècheresse » ; Jeffrey, collectionneur de programmes de jeux vidéo ; Ted, illustrateur ; Anthony, vidéonaute ; Samy (dit Sexy Samy), un costaud d'1m 90, pesant près de 110 kg ; Shay, programmeur ; Linda, graphiste douée, se baladant en pantalon et bottes de chantier ; Clio, graphiste un peu azimutée, débrouillarde en diable et « girl friend » d'Adam ; Tamar, productrice Web et supérieur hiérarchique direct d'Adam ; Tom Lyme, Vice-Président de PED, un vrai lèche-cul ; Kurt Krickstein, le P-DG de PED, dandy extravagant, exécrant « les blaireaux et les feignants », et féroce en affaires ; Alicia, l'assistante de Kurt ; et Curly, la chienne bâtarde de Kurt. La vie de bureau en open space, avec son pesant d'égoïsme et de chausse-trappes, ses avalanches de mails quotidiens, ses tâches plus prioritaires les unes que les autres, son management par la terreur, son absence d'intérêt et l'inexistence de réelle perspective d'ascension sociale, voilà qui n'est pas pour ravir Adam. Parallèlement à son job, qui ne l'occupe au mieux qu'une heure par jour, Adam s'évade en écrivant le Cahier des Jeux (vidéo) Obsolètes.

Quand il découvre la singularité de « Lucky Wander Boy », Adam réalise qu'il va pouvoir remplir le vide de sa vie ; avec ce jeu, Adam va pouvoir enfin ne pas être ce qu'il est, et vivre tant qu'il peut vivre (Adam vient de perdre sa grand-mère, dont il a vu l'état se détériorer alors que son corps était progressivement envahi par les métastases). Adam déborde d 'un désir dévorant de plus de vie. Par le jeu, Adam va pouvoir s'approcher de la richesse absolue (gagner des points ou des vies gratuites), conquérir et devenir un maître (d'ennemis, de terrains), naviguer dans un monde parfois glauque et labyrinthique (une référence à la vie intra-utérine ?) et vaincre après avoir exploré toutes les issues possibles. Jouer aux jeux vidéo, c'est pour Adam l'occasion de dilater le temps, de progresser avec l'assurance inflexible et inébranlable du Samouraï, se transformer en un personnage rêvé ou maudit, se constituer un fragment d'histoire spécifique ; c'est également l'occasion de monter dans un ascenseur social puisque, talentueux et chanceux, il passe de niveau en niveau, oubliant peu à peu l'incompréhension initiale du jeu. Devenant un initié, cherchant et découvrant au fil du jeu -derrière une absurdité parfois trompeuse- la promesse d'une révélation, Adam s'escrime et gagne, au milieu de ses compagnons de jeu, dans une salle d'arcade. Adam fait la preuve de sa capacité à craquer un code, à surmonter des obstacles, des conspirations, des astuces technologiques dernier cri. D'initié, Adam gagne même le statut de créateur, comblant les vides du jeu avec des combinaisons bien à lui, se créant les raisons de continuer à jouer. le jeu devient alors sa vraie vie, un endroit dans lequel il n'a pas à effectuer de choix dramatiques, des choix qui effaceraient trop d'avenirs radieux, un endroit qui lui permet de tuer son père (en fait, l'ennemi) en toute impunité, un endroit qu'il ne peut quitter. « Je fais quelque chose ! C'est bien réel » (page 313). « Être (enfin) un héros, juste une journée » (page 315). « Pour la première fois, je pouvais affirmer sans rougir que j'avais un but » (page 321).

Mais par-delà le jeu, il y a la vie de tous les jours. Obsédé par LWB et par son mythique troisième niveau, Adam laisse sa relation avec Anya puis avec Clio se dégrader. La nature ayant horreur du vide, Adam part au Japon pour s'entretenir avec Araki Itachi, la créatrice de LWB, et percer ainsi le mystère qui entoure ce troisième niveau. Adam idéalise Araki, désire même une relation sexuelle avec elle (page 245), car elle seule peut le conduire de l'autre côté du désert du réel (page 355), le mener à une réelle rédemption de la réalité physique. Stupéfaction ! Araki lui démontre que l'argent n'est rien, que le corps constitue un obstacle à l'immortalité, que s'accomplir, c'est se donner et fusionner avec autrui, quel que soit le prix à payer, rejeter ses ambitions personnelles, accepter l'humiliation ou le châtiment.

Au final, LWB ne ferait jamais un bon film ; ce serait un échec total. Alors, Adam va continuer quelques temps à errer dans sa vie, mais « tous ceux qui errent ne sont pas perdus » (JRR Tolkien). Roman réservé à la génération jeux vidéo ? Non ! Un ouvrage intéressant et superbement documenté, un scénario palpitant, un style résolument moderne, présentant plusieurs niveaux de lecture et conduisant le lecteur à réfléchir (sans avoir à avaler des manuels de psycho-philo-sociologie) au sens de la vie. Un détour inattendu, mais utile, par l'histoire des relations tumultueuses entre la Chine et le Japon : je mets quatre étoiles.
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…quand la curiosité est plus forte que l'avertissement…

Ce qui marche assez bien en musique avec le fameux autocollant « Explicit Lyrics » qui dope les ventes, ne s'applique pas forcément à la littérature…du moins dans mon cas.

Profitant de l'engouement quasi général pour l'adaptation télévisuelle de « Game Of Thrones », J'ai Lu sort la grosse artillerie avec un appât à priori imparable : non pas en bandeau papier ceinturant le livre mais à même la couverture, ces quelques mots : « Par le scénariste de la série culte GAME OF THRONES le Trône de Fer »…typiquement le genre de message dont je me méfie, que je vois plus en avertissement qu'en attracteur universel…

Ce qui m'a malgré tout fait passer outre cet avertissement fut plutôt la conception graphique de la couverture : différentes manettes, joysticks, joypads, gameboys etc. de tailles différentes, hommage aux pixels, formant la silhouette (bien connue pour les gamers) du fameux Pac-Man... pour les autres, vous y verrez une pizza amputée d'un quartier...ou Wiitoo y verra lui une meule de Gruyère entamée ;-)

C'est donc plus la recherche graphique et l'originalité qui a eu raison de ma réticence initiale…pari et parti pris plus que risqué.

Bon, qu'en est il donc de D.B. Weiss et son fameux Video Games, le roman culte de la génération jeux vidéo dixit le 4eme de couverture ?

Après un début assez prometteur, le Pac-Man survatiminé grille trop vite ses supers-pacgommes et se retrouve à errer dans le labyrinthe en tentant désespérément de survivre à l'assaut des fantômes de plus en plus insistants…jusqu'à l'inéluctable déshydratation et désintégration de ce pauvre petit glouton jaune…bwe bwe bwe bwe bwe pop !

L'idée de départ est bonne mais après à peine quelques dizaines de pages, le côté rétro gamer hardcore monomaniaque autistique, l'intrigue ( le mot est peut être un peu fort, allez, on va dire l'histoire) s'enlise de façon magistrale entre philosophie et crise existentielle à la mord moi le noeud, de lourdeurs scénaristiques ( la lecture du pseudo scénar de Lucky Wander Boy fut un calvaire, heureusement, je m'en suis sorti par une pirouette en le lisant façon « les inconnus » et leur parodie de Bioman), d'anecdotes connues comme Barabbas, de lieux communs, de pseudos rebondissements, de personnages tellement caricaturaux qu'ils en deviennent inconsistants, de délires métaphysiques sur Donkey Kong , onanisme cérébral stérile à la sauce Stonienne « I Can't Get No ( Satisfaction) »…la seule fulgurance dans ce marasme reste à mon sens la métaphore de Frogger et du sens de la vie…mais, cela seul ne justifie en rien le sadisme ou le masochisme à vous faire lire ce « roman culte de la génération jeux vidéo ».

Allez, soyons facétieux :

Je suis le joueur d'un jeu vidéo révolutionnaire qui s'appelle « Read a Book », via un bouton X nommé « Page Turn », j'imprime l'action à mon avatar pixellisé, au dessus de l'écran, une jauge de vie composée de cinq étoiles.
Malgré l'usage intempestif du bouton X et ma ténacité, la jauge se vide inexorablement, un ou deux bonus lui font regagner un peu d'énergie…mais au final, la sanction est terrible, je n'ai plus d'énergie, la dernière page tournée, la jauge reste bloquée sur une étoile (parce que pas d'étoile n'est pas repris dans le système de cotation Babeliesque, dommage ceci dit)

Game Over, please insert coin to try again… désolé Mr Weiss, tout diplômé en philosophie du Trinity College que vous soyez, je m'en vais mettre mes pièces ailleurs…

Si il vous reste un peu de menue monnaie, préférez lui de loin « Player One » d'Enest Cline.

Fred-Fichetoux-Beg mode Wicked Games activé

PS, désolé Wiitoo, j'avais espéré, comme tu l'avais fait à mon égard avec le fabuleux "Player One", te faire découvrir une pépite, en fait, je n'ai que de la pyrite à te proposer…en tout cas, te voilà prévenu ;-)
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Passionné de jeux vidéo, Adam Pennyman entreprend de rédiger un guide des jeux anciens, son "catalogue des jeux obsolètes". Il y devise et philosophe autour de jeux vidéo aujourd'hui passés de mode ou dépassés par la technologie.

C'est ainsi que nous découvrons la place qu'ont occupée ces jeux dans son existence, depuis Microsurgeon offert par son grand-père. Celui-ci l'a profondément marqué car il y jouait à l'époque où sa grand-mère est décédée d'un cancer. L'enfant qu'il était a alors créé un parallèle entre le jeu, soigner un patient fictif et la maladie bien réelle, persuadé de guérir sa grand-mère en gagnant.

Dans ce catalogue figure Lucky wander boy, un jeu qu'il n'a jamais pu terminer, la machine ayant été enlevée de la salle d'arcades qu'il fréquentait. Profondément frustré, Adam rêve d'aller au bout de la quête du héros et ferait n'importe quoi pour découvrir une machine permettant d'y jouer. Employé comme rédacteur dans une société informatique, il est chargé d'écrire le scénario du film Lucky wander boy. Voici enfin la chance de sa vie : l'occasion de changer son destin !

La présentation du roman m'avait attirée par cette possibilité de remettre sa destinée en question. Je trouvais intéressante cette seconde chance et le rôle joué par les jeux vidéo. Pourtant, ma lecture entamée et bien avancée, j'ai eu l'impression, au diapason du Lucky wander boy de me trouvée perdue dans le désert : je ne savais trop ce qu'Adam avait exactement en tête et il ne me donnait pas l'image de quelqu'un souhaitant sauver sa vie. Il se complaisait plutôt dans le marasme ambiant...


Au cours de la lecture, les parallèles entre le roman et le jeu apparaissent bien : tout comme le héros du jeu vidéo disparu, Adam mène une quête lui permettant de grimper les niveaux et de découvrir enfin le niveau 3 tant espéré, après avoir traversé un désert. En effet, comme le jeu, le livre est découpé en trois parties et comme Lucky, Adam collectionne des objets au cours de son errance.

Néanmoins, à mes yeux, ceci ne m'a pas rendu le récit passionnant, ou ne serait-ce qu'intéressant. Je n'ai pas eu l'impression de progresser dans la vie d'Adam. Il faut dire que je n'ai pas éprouvé de sympathie pour le héros de D.B.Weiss : fixé sur les jeux, sa vie privée et professionnelle est un grand ratage et hormis Lucky wander boy, tout lui semble plutôt indifférent. Ceci ajouté à son apathie m'aurait plutôt donné envie d'abandonner ma lecture, ce que je n'ai pas fait. J'ai donc suivi Adam/Lucky dans sa découverte du troisième niveau et même si cela n'a pas rattrapé mon impression globale, la fin m'a bluffée. C'est pourtant sur une grosse déception que je referme ce roman mais j'imagine que d'autres lecteurs pourront y trouver leur bonheur.
Lien : http://nahe-lit.blogspot.be/..
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Un roman avec lequel on passe un bon moment. Il y a beaucoup de références aux jeux vidéo, et les fans de jeux prendront beaucoup de plaisir à suivre les passages d'étude des jeux qui répondent aux passages sur la vie de notre héros.
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Le pitch semblait intéressant mais l'histoire s'embourbe rapidement dans les considérations pseudo-psychologiques autour de jeux rétros et, pour la plupart, méconnus ou oubliés du public.
Le projet du héros de créer un inventaire de ces jeux dévie complètement de son but et lui-même se donne un but et des motivations aussi puériles qu'irréfléchies qui le mènent à tout perdre en courant après ses fantasmes idéalisés et une quête irréaliste.
Bref, je l'ai lu jusqu'au bout car cette lecture reste plus plaisante qu'Eugénie Grandet mais j'ai cru pendant un instant que je finirai dans le même état que le héros en tournant la dernière page.
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critiques presse (1)
LaPresse
11 février 2013
Video Games étonne par ses analyses philosophiques des jeux vidéo, que l'auteur pousse vraiment très loin, au risque de nous faire décrocher, mais c'est tout à fait dans l'esprit de son étrange personnage.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
page 141 [...] "Excellent, ai-je dit. Génial. Alors, vous voulez que je ...
- Je veux que vous le lisiez, que vous appeliez Itachi, et que vous la persuadiez que les choses sont exactement telles qu'elles sont censées être, que ce sera le film Lucky Wander Boy parfait. Lâchez-vous, vendez-lui le truc, c'est top, c'est cool, c'est fun. Vous êtes l'intermédiaire. J'ai assez d'emmerdes avec les Japonais à propos d'Eviscerator III, je dois m'occuper de mes investisseurs, j'ai pas le temps à perdre avec ces conneries.
- On pourrait simplement laisser l'option expirer, a suggéré Lyme.
- Non ! a rétorqué Krickstein. La diversité est un élément très important de l'identité de la marque Portal. Nous possédons un portefeuille diversifié de propriétés intellectuelles, et celle-ci remplit notre quota de "conneries cultes bizarres pour geeks" - et elle m'appartient, et c'est pas en bazardant ce qui m'appartient que je suis arrivé là où je suis aujourd'hui ! Peut-être qu'Itachi va mourir demain, peut-être qu'elle va nous foutre la paix pendant un mois et qu'on pourra se faire un peu de fric grâce à la licence.
- Fric, fric, fric, a dit Lyme.
- Occupez-vous de ça, Pennyman."
Kurt m'a fait signe de m'en aller [...]
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Tout a commencé avec le Catalogue des jeux obsolètes. Chaque chose doit commencer quelque part. C'est là que ça a commencé pour moi.
Je n'ai parlé du Catalogue qu'à une personne, une seule, et c'était bien après que Lucky Wander Boy est devenu l'un des facteurs - voire le facteur - qui ont tout changé. Je n'en ai pas parlé à Anya - elle m'aurait pris pour un extraterrestre, et elle était déjà étrangère dans un pays étrange. Elle m'en aurait voulu et aurait considéré mon projet comme l'un de ces nombreux exemples de l'imbécillité américaine qu'elle voyait partout où elle regardait.
Elle avait déjà commencé à m'en vouloir le mercredi 5 septembre 1999. Il s'avérait que ce 5/ 9 tombait exactement 95 jours après notre arrivée à Los Angeles. Mais, surtout, c'était le vingtième anniversaire du jour où Toru Iwatani, le concepteur de jeu de Namco, était allé manger une pizza avec des amis à Tokyo et, après avoir pris la première part, avait eu l'idée de Pac-Man. Une date propice aux commencements, rétrospectivement - et même si le concept du Catalogue germait dans la moiteur de mon esprit depuis quelque temps, c'est ce jour-là que ses premières pousses ont surgi, exigeant toute mon attention et des actes concrets de ma part.
J'étais dans la deuxième chambre, celle que j'avais réquisitionnée comme mon « bureau » à l'époque où je payais l'essentiel du loyer, même si ce temps et ma prospérité étaient depuis longtemps révolus. Après une heure de recherches assidues sur Internet, j'avais trouvé le hack de Clyde's Revenge, la version (ou inversion) du jeu qui vous permet d'être un fantôme pendant que Pac-Man vous poursuit à l'écran. Les sons étaient les mêmes que dans l'original - le swing électronique du thème d'ouverture, la sirène tourbillonnante en fond sonore, la spirale de la mort qui descendait glissando. Quand Anya les a entendus jaillir de mes petites enceintes, elle a fermé la porte de mon bureau et s'est vautrée sur le canapé du salon pour regarder la chaîne E ! Entertainment à plein volume. À travers la porte fermée, j'ai entendu A. J. Benza, le présentateur de Mysteries & Scandals, poser une question ironique et rhétorique sur les désagréments de la célébrité (« Ça craint, hein ? »).
J'ai continué de jouer, passant à la version hackée de I'm Going Berserk !, qui permettait à Pac-Man de gober des pac-gommes sans être poursuivi, et était donc moins un jeu qu'un exercice méditatif. Tandis que je faisais passer le Pac-Man du tunnel situé sur la gauche de l'écran à celui de droite, puis du tunnel de droite à celui de gauche, et ainsi de suite, tentant de le faire disparaître indéfiniment, j'ai clairement senti naître en moi une pensée essentielle, mais le bruit de la télé l'a empêchée de se fixer et elle est restée vague et brumeuse.
Pour essayer de donner vie à cette pensée, j'ai légèrement monté le volume, moyennant quoi Anya a à son tour monté le sien, ce que je n'aurais pas cru possible, si bien que notre voisin du dessous, dont j'ignorais le nom, s'est mis à cogner au plafond pendant qu'A. J. Benza explorait les mystères qui entouraient la mort du producteur de cinéma Paul Bern, dont le fantôme était apparu à Sharon Tate, deux ans avant son propre assassinat, dans le cottage de Benedict Canyon où Bern s'était collé une balle dans la tête le 5 septembre 1932.
Quand la coupure pub est arrivée, la télé est devenue silencieuse, et Anya a ouvert la porte du bureau.
« Wakawakawakawaka ! » s'est-elle écriée, et elle a quitté l'appartement.
J'ai été frappé par la violence de sa réaction, sans parler de sa futilité ; les seuls endroits à moins de cinq minutes à pied étaient un centre de réadaptation pour sourds alcooliques, l'Elks Club Lodge, et le salon de massage Kyoto Dreams. Cependant, lorsque le bruit de ses pas s'est estompé, une paix rare a envahi les quatre pièces, un silence riche dans lequel ma pensée a pu se fixer et croître jusqu'à ce que me vienne l'idée du Catalogue des jeux obsolètes. Dans tout projet d'ampleur, le plus dur (outre l'achever) est de s'y mettre, et je savais que je n'aurais peut-être jamais de meilleure opportunité. J'ai donc abandonné l'émulateur de jeux vidéo et lancé mon traitement de texte. Le temps était venu de commencer.

Wakawakawakawaka, p. 13-15
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A l'époque , j'éprouvais déjà une version vague du soupçon que j'éprouve toujours aujourd'hui : à savoir que la valeur intrinsèque d'une chose est directement proportionnelle à son incompréhensibilité initiale, et que les choses qui valent la peine d'être connues se trouvent souvent derrière des absurdités trompeuses pour effrayer les dilettantes et les personnes qui cherchent juste des pépites pour entretenir la conversation.
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Tout choix délibéré et la ligne de conduite qu'il entraîne placent le joueur sur une voie précise et éliminent toutes les autres possibilités. En optant pour une certaine direction, il réduit la super configuration qui contient tous les mondes possibles à un fragment d'elle-même. Combien d'avenirs radieux sont oblitérés à chaque décision, à chaque choix ? Des milliards, c'est certain. Plus il s'enfonce dans une situation donnée, plus l'arbre des possibilités est élagué.
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L'appétit insatiable qui pousse le Pac-Man à dévorer les pac-gommes et les supers pac-gommes qui remplissent les couloirs de ses univers labyrinthiques n'est pas sans rappeler le désir dévorant de plus de vie que Darwin percevait dans toutes les espèces, espèces qui n'hésiteraient pas à surpeupler et ravager la Terre sans les fantômes prédateurs de la sélection naturelle. On pense aussi au « besoin d'un marché toujours croissant » qui « répand la bourgeoisie sur tout le globe » (Manifeste du Parti communiste), avec la « vocation de s'approcher, par une augmentation quantitative, aussi près que possible de la richesse absolue » (Le Capital), faisant du Pac-Man l'antihéros capitaliste d'un monde utopique où les agents qui s'opposent à sa domination absolue du monde labyrinthique le vainquent au bout du compte. Des métaphores évidentes, cachées juste sous la surface du jeu. Suspicieusement évidentes. Ce genre d'interprétation trahit un certain manque d'imagination. Si Pac-Man et les jeux qui ont suivi dans son sillage signifient quelque chose pour nous, s'ils sont le centre névralgique à travers lequel passent des milliers de nos souvenirs les plus importants, il est de notre devoir de creuser plus profondément.
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