Je ne retrouve plus ce petit récit de voyage médiéval, mais je me souviens que c'est resté mon livre de chevet pendant quelques temps.
C'est le point de vue d'un homme qui part de Kyoto en empruntant la route du Tokaido pour se rendre à Edo. Récit anonyme, on ne sait donc pas qui est ce voyageur, ni pourquoi il entreprend ce voyage. Ce récit étant antérieur au Shogunat, cette route n'était donc pas aussi empruntée que sous les Tokugawa. Pas d'auberges, pas de rencontres. (contrairement au récit de Jippensha Ikku). Ce qui est mis en avant, c'est le rapport à la nature et l'histoire des lieux traversés. Le narrateur décrit les milieux naturels qu'ils rencontre : le vent dans les arbres, les aspérités du chemin... Je me souviens de longues descriptions de la végétation, des cascades, des cours d'eau dans une relation très étroite avec son environnement. Egalement beaucoup de souvenirs d'évènements passés, de combats entre samourais, à tel ou tel endroit, apportant alors une réflexion sur la mort des personnages et sur la précarité de l'existence. S'arrêtant ici ou là sur les témoignages de ce passé, comme une tombe ou une inscription sur une pierre. On a donc une relation très bouddhiste et shintoïste avec la nature.
C'est donc un voyage autant "intérieur" que géographique, voire mystique, le narrateur étant souvent dans la contemplation et la méditation.
Un livre à conseiller pour las amateurs du genre. Pour moi, un livre fondamental que j'espère retrouver.
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Au soir de cette journée de marche, je fais halte aux abords d'un temple de montagne appelé Musa-dera.
Sur ma couche frustre, souffle le vent automnal, plus pénétrant au fur et à mesure que s'avance la nuit. J'ai le sentiment que, sans que je m'en sois aperçu, plus rien n'a à voir avec la capitale.
Je n'ai jamais aimé a prospérité que connurent Kin et Chô, puis leurs descendants pendant sept générations. L'unique chose à quoi j'aspire, c'est le logis aux cinq saules de Tô Sen. Pourtant, j'hésite encore à vivre dans une hutte de branchages au fond des montagnes: demeurant, non sans inconséquence, aux abords de la capitale, je parcours au côté du commun des hommes le chemin de la vie. Comme on l'a dit: "Mon corps hante la cour et la ville, mais mon coeur s'est retiré du monde."
Bien que mon âge approche la moitié d'un siècle et que sur mes tempes le givre peu à peu répande sa froidure, nulle affaire ne me retient et je passe vainement jours après jours; bien plus, j'en suis à ne savoir fixer le lieu où m'établir pour le reste de ma vie. Aussi me revient à l'esprit, avec toute sa poignance, ce qu'écrivait Haku Rakuten: " Mon corps ressemble au nuage flottant, mon chef est pareil au givre."
A y songer, ce sont les périls qui toujours jalonnent notre traversée de la vie.