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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Né suite à des échanges entre organisateurs et participants lors du festival des Utopiales 2018, « No(s) futur(s) » est un ouvrage un peu particulier, à mi-chemin entre le rapport scientifique et l'anthologie de SF. La lutte contre le réchauffement climatique et ses conséquences est au coeur de l'oeuvre qui tente de mêler informations rigoureuses permettant de mieux cerner les enjeux du changement climatique et les options qui s'offrent à nous, et récits visant à rendre cette problématique plus humaine, plus palpable. Pour cette raison, l'anthologie rassemble à la fois des auteurs d'imaginaire francophones bien connus du grand public (Pierre Bordage, Jeanne A. Debats, Catherine Dufour, Jean-Marc Ligny…) et des experts scientifiques qui interviennent tour à tour sur la base d'un rapport spécial du GIEC qui analyse « les liens entre les actions à mener en faveur du climat et les objectifs de développement durable de l'ONU ». Dix thèmes ont ainsi été retenus, et chacun a fait l'objet de deux textes complémentaires : l'un, technique, écrit par un ou une scientifique ; l'autre, sous forme de fiction, par un ou une auteur/autrice. L'initiative est audacieuse et fort bien pensée, même si la qualité des nouvelles s'avère malheureusement très variable d'une thématique à l'autre. N'ayant absolument pas les compétences nécessaires pour émettre un avis critique concernant le volet scientifique de l'oeuvre, je me contenterais de vous parler des dix nouvelles qui composent cette anthologie. Sachez toutefois que les textes écrits par les différents experts intervenants sont très bien vulgarisés, même certains passages nécessitent de posséder un petit bagage scientifique (que je n'ai pas) pour bien réussir à cerner toutes les facettes du changement climatique abordées ici et les leviers qui peuvent être utilisés pour le contrer.

Étrangement, la césure m'a parue assez nette entre la première moitié de l'anthologie, à laquelle je n'ai que modérément accroché, et la seconde, qui offre des textes plus originaux et aboutis. Sur le thème de la lutte contre la faim, Raphaël Granier de Cassagnac a choisi de remobiliser l'univers déjà mis en scène dans ses précédents romans (« Thinking Eternity », notamment). Ne connaissant pas ces derniers je suis totalement passée à coté de ce texte qui met en scène une communauté d'humains ayant survécu au réchauffement climatique et à l'effondrement qui s'en est suivi et qui tente tant bien que mal de vivre de la Terre quelque part dans le désert africain. L'univers y est dépeint de manière trop succincte et l'intrigue se révèle trop restreinte pour capter efficacement l'intérêt du lecteur. La nouvelle de Claude Ecken (« Toxiques dans les prés ») consacrée au volet « Bonne santé et bien être » est plus captivante mais aurait elle aussi mérité d'être bien plus développée, si bien qu'on a encore une fois l'impression de ne rester qu'en surface du récit. Même reproche pour le texte de Sylvie Lainé (« Au pied du manguier ») qui, malgré de bonnes idées concernant le sujet « réchauffement climatique et égalité entre les sexes », s'avère trop bref et trop brouillon, comme si l'autrice avait jeté sur le papier des idées en vrac, sans qu'on puisse discerner une véritable trame narrative cohérente. La nouvelle d'Estelle Faye consacrée à l'accès à l'eau salubre et à l'assainissement (« Conte de la pluie qui n'est pas venue ») met en scène une espionne envoyée assassiner un magnat russe responsable du détournement d'un fleuve à son usage privé. La plume de l'autrice est agréable et sa vision du futur marquante par sa noirceur, mais l'intrigue est trop mince et la morale bien étrange.

J'ai été davantage sensible au texte de Laurent Genefort (« HOME ») qui met en scène une société futuriste dans laquelle une interface permet de quantifier l'empreinte de chaque humain sur son environnement, et ce en récupérant toutes les données possibles sur les citoyens afin de récompenser les comportements vertueux. La nouvelle relate le conflit opposant une mère, partisane du système et son fils, séduit par le discours déculpabilisant et à contre-courant de ceux qui nient le réchauffement. Nuancé et doté de personnages attachants, le texte aurait mérité d'être un peu plus développé et complexifié mais reste de bonne facture. Sur la question de la réduction des inégalités, Chloé Chevalier met en scène dans « Trois poneys morts » un monde dans lequel chaque habitant du globe se voit doter d'une carte carbone dans laquelle sont engrangés des points permettant de se déplacer ou se chauffer dans la limite des émissions autorisées. On y suit une femme qui, parti à l'étranger afin de récupérer les cendres de sa défunte ex-compagne, va se retrouver bloquée faute de points à des milliers de kilomètres de chez elle, sans possibilité de prendre avion, train, bateau ou voiture. Un texte introspectif qui séduit surtout par son héroïne à laquelle on s'identifie sans mal et qui ne cesse d'émouvoir. Seul bémol : cette histoire de poneys morts qui permet, certes, de présenter un peu plus en détails les spécificités de cette nouvelle société dans laquelle se déplacer devient un acte réfléchi dicté par la nécessité, mais qui n'apporte rien à l'intrigue et est même carrément abandonnée en cours de route. Catherine Dufour, elle, s'est penchée sur la thématique des villes et communautés durables et relate dans « La chute de la Défense » le périple d'un petit-fils décidé à faire quitter à sa grand-mère son quartier, l'une des dernières enclaves encore préservées des effets du réchauffement climatique et, pour cette raison, cible d'une attaque imminente des autres habitants réduits à vivre dans des conditions extrêmement précaires. Comme la plupart des textes de l'autrice, la nouvelle est brute de décoffrage et offre de beaux moments tout en abordant le sujet avec plus de subtilité que ce que le côté un peu « cash » du ton pourrait laisser penser.

La nouvelle de Jeanne A. Debats est la plus longue de l'anthologie et est, à mon sens, de loin la meilleure. Consacré à la « consommation et production responsable », « Le monde d'Aubin » met en scène un jeune homme vivant dans une communauté humaine plus ou moins revenue à l'âge de pierre et séduit par la perspective de rejoindre le monde virtuel dans lequel baignent les Pixels. Les personnages y sont beaucoup plus fouillés que dans les précédentes nouvelles et l'intrigue plus dense, si bien qu'on suit avec à la fois curiosité et horreur les épreuves par lesquelles passeront Aubin et l'étrange femme qui croisa par hasard sa route. La question de l'égalité entre les sexes y est centrale, bien qu'il ne s'agisse pas du coeur du récit, et certains passages sont franchement rudes à lire tant ils révoltent par leur violence. A noter que la chute est également très bien trouvée. La nouvelle de Jean-Marc Ligny, qui s'est déjà beaucoup penché sur la question climatique dans ses romans (« Semences », « Alliances »), est elle aussi très réussie et se compose de deux parties, l'une se déroulant en 2030 et mettant en scène un homme chargé de gérer une grosse structure spécialisée dans l'enfouissement de CO² afin de réduire les émissions carbone dans l'atmosphère, et l'autre en 2300, où l'on découvre les conséquences insoupçonnées de ce type de centrales des siècles plus tard. Bien construite, agréablement écrite, la nouvelle est plaisante à lire et a pour mérite de s'interroger sur les effets de certaines politiques climatiques à long terme. C'est à Pierre Bordage qu'il revient enfin de conclure avec « Sanctuaires », une nouvelle intéressante qui met en scène deux adolescents curieux de découvrir ces enclaves qui parsèment la France et qui, grâce à une habile action militante de rachat de terres, a permis de préserver la faune et la flore menacées par le réchauffement climatique partout dans le monde. L'idée est chouette et mériterait d'être davantage creusée.

« No(s) futur(s) » est un ouvrage très instructif qui permet de mêler expertises scientifiques et imaginaire sur la question du réchauffement climatique et ses conséquences. La qualité des nouvelles au sommaire est très variable mais certains textes sortent du lot, à l'image de ceux de Jeanne A. Debats, Chloé Chevalier, Pierre Bordage ou encore Jean-Marc Ligny. Les passages scientifiques permettent quant à eux de vulgariser un certain nombre de questions propres aux différentes facettes et enjeux du changement climatique et d'offrir d'intéressantes perspectives.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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Ce qui m'a attiré dans cette anthologie, c'est cette idée de « binôme » entre chercheurs/spécialistes et auteurs/autrices de SF sur des problématiques écologiques & sociétales très concrètes. J'étais curieuse de lire cet état des lieux mais surtout d'en découvrir les réponses. Après tout, la SF n'est-elle pas le terreau idéale pour nous réinventer un futur ?

Cette anthologie tient toutes ses promesses : elle offre un tour d'horizon de nos problèmes écologiques actuels, leurs sources et leurs conséquences, tout en proposant des solutions. de leur côté, les auteurs invités poussent plus loin la réflexion de leurs binômes en nous offrant un avant-goût (souvent amer) de ce futur.

[Petit aparté] Je préconiserai une lecture homéopathique de ce recueil tant le fatalisme de la plupart des nouvelles peut miner très rapidement le moral. Surtout dans notre contexte actuel (2020 tout ça, tout ça…).[Fin de l'aparté]

J'ai trouvé les textes scientifiques plutôt bien vulgarisés même si j'avoue avoir survolé, sur le moment, certains d'entre eux pour les reprendre plus tard. Celui de François Mouton a été particulièrement passionnant, par son écriture agréable et fluide mais également du fait de l'actualité : les virus, leur impact, leur origine, les liens avec la surpopulation et l'état de notre système immunitaire en plein Covid-19, on est d'accord que c'est parlant.

Bien que ces textes et points de vue fussent tous enrichissants, ceux sont surtout les nouvelles qui m'ont intéressé. Ecrites par des noms de la littérature SF francophone qui me sont plus ou moins connus, elles m'ont permis de tester des plumes que je n'avais encore jamais lu et d'ajouter quelques auteurs à ma PAL.

Je pense notamment à « La faim justifie les moyens » de Raphaël Granier de Cassagnac dont j'ai particulièrement aimé l'écriture même si j'ai moyennement apprécié que sa nouvelle soit plus une invitation à lire ses romans qu'autre chose. Je pense également à Chloé Chevalier dont la série « Récits du demi-loup » attendait déjà patiemment dans ma PAL (plus pour très longtemps) et qui nous offre ici un très beau portrait de femme (même si l'aspect enquête me laisse sur ma faim). Ou encore Jeanne-A Debats avec cette vision d'un monde post-apocalyptique cruel et patriarcal divisé entre ceux qui restent et ceux qui fuient vers un monde numérique. de très belles plumes donc que j'ai été ravie de découvrir.

De toutes les solutions et visions qui ressortent de ce recueil, je retiendrai la régulation des populations (naissance et mort), un crédit énergétique ou un système de bonus malus sur notre impact énergétique au quotidien, et la préservation à tout prix d'espaces naturels au détriment de l'humanité. Il y en a d'autres mais celles-ci m'ont particulièrement marqué.

Ce que je pourrai reprochait à cette anthologie, ce serait que certaines nouvelles sont plus hermétiques et factuelles que leurs homologues scientifiques. Elles tombent dans l'excès d'explications au détriment d'une bonne histoire et en deviennent stériles. Je comprends bien que cette anthologie n'a pas pour but de nous faire rêver mais de nous faire réagir (parce qu'on en est plus à devoir prendre conscience de l'urgence dans laquelle on est… n'est-ce pas ?). Mais venant d'auteurs et autrices de SF, je m'attendais à ce qu'ils/elles aillent plus loin qu'une simple énumération des retombées écologiques. Surtout que le texte scientifique est là pour ça. Bref, il m'a manqué à certains moment d'un souffle épique et poétique et c'est franchement dommage.

En conclusion, je suis toujours entrain de digérer la masse d'informations qui m'a été donnée. J'ai plutôt apprécié l'ensemble de ces nouvelles, certaines plus que d'autres et c'est bien normal. La ballade a été souvent difficile car le sujet nous met face à nos responsabilités et c'est très loin d'être confortable. Enfin, vu notre situation actuelle, je ne peux que saluer l'initiative et vous encouragez à la découvrir.

Lien : https://wanderingcrossroad.w..
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Nos Futurs paru chez Actu SF est une anthologie atypique. Elle regroupe dix textes scientifiques et dix oeuvres de fiction autour de dix thèmes liés au réchauffement climatique et ses conséquences. Avant chaque récit fictionnel, la réalité des faits, des chiffres (basés sur les rapports du GIEC) est mise en exergue avec un article assez complet sur le sujet traité tel l'agriculture, l'énergie, l'eau...

Ce livre peut surprendre puisqu'en effet plus de la moitié est consacrée aux articles scientifiques. Même s'ils sont assez accessibles et didactiques ceux qui espéraient lire des oeuvres de fiction seront probablement un peu déçus. le sujet est grave plutôt sombre et Nos Futurs pointe tout ce qui ne va pas dans nos sociétés actuelles mais dans le même temps trouve des biais pour ne pas être trop anxiogène. de nombreuses pistes de réflexion et moyen d'actions sont préconisés à plus ou moins court terme afin de modifier dans le bon sens nos façons de consommer. Une dose d'espérance bienvenue permet de ne pas sombrer totalement...


Quelques mots sur chacune des dix nouvelles :

- Conte de la pluie qui n'est pas venue d'Estelle Faye. Très joli texte sur l'accès à l'eau dont le principal atout, outre l'écriture lumineuse de l'autrice, est cette fin (a)morale qui pose une question existentielle et insoluble.

- La Faim justifie les moyens de Raphaël Granier de Cassagnac. Un préquel à sa série Eternity autour de l'agriculture et de la transmission du savoir, avec une réflexion sur la surpopulation. Pas vraiment convaincu par la forme mais ce texte fait mouche sur le fond.

- Home de Laurent Genefort. Chaque citoyen est responsabilisé dans sa consommation énergétique par une application. Entre dictature et sauvegarde écologique, sur fond de fake news et de complotisme. L'un des textes qui me parle le plus. du très bon Genefort, une excellente nouvelle.

- La chute de la Défense de Catherine Dufour. le personnage central est Paris. J'ai eu beaucoup de mal à plonger dans la ville lumière inondée et je n'ai pas pleinement apprécié le voyage.

- Au pied du manguier de Sylvie Lainé. Ici, il est question une fois encore de surpopulation mais conjugué au désir d'enfants. Avec en toile de fond les questions de genre. Je suis complètement passé à côté, impossible de me projeter dans cet univers.

- Trois poneys morts de Chloé Chevalier. Thématique similaire à la nouvelle de Laurent Genefort où les déplacements et le logement sont couplés à un Crédit Carbone individuel. Hymne à la nature, ode au temps qui passe, ce texte est exceptionnel, poétique, assez noir mais glaçant de réalisme.

- 2030/2300 de Jean-Marc Ligny. Une solution à court et moyen terme de piéger le CO2 atmosphérique est l'enfouissement de ce gaz à effet de serre dans des puits carbone. Mais quelles conséquences à long terme ? L'auteur apporte une réponse pas très optimiste dans un contexte qui ne l'est guère plus.

- Sanctuaires de Pierre Bordage. Texte classique sur la confrontation de deux mondes, de deux façons de penser, où il faut (peut-être) abandonner le confort individuel pour que la Terre vive, survive. Efficace mais assez sombre.

- Toxiques dans les prés de Claude Ecken et le monde d'Aubin de Jeanne A Debats sont les deux nouvelles qui m'ont vraiment laissé de marbre.


Pour conclure, l'anthologie Nos Futurs est très recommandable, que ce soit pour ses articles scientifiques très instructifs et intéressants ou pour ses nouvelles très différentes les unes des autres que l'on trouvera plus ou moins à son goût selon ses affinités.

Nos Futurs est donc un bon moyen d'aborder et de comprendre des sujets complexes et "de se divertir" même si l'ensemble reste très sombre, à l'image du rapport du GIEC. Saurons-nous modifier nos habitudes à temps pour éviter que le changement s'impose à nous ? L'enjeu est là...

Lien : https://les-lectures-du-maki..
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