Les origines de
Milka Assaf sont multiples, ce qui rend son histoire familiale particulière et pleine de ressources. Des pays comme la Bulgarie, la Russie, la Syrie et le Liban ont sensiblement participé à son cheminement, à travers les générations. Malgré la disparité des cultures, la langue française les unissait par alliance.
Réalisatrice de films, elle publie
L'ombre du Cèdre aux éditions L'Harmattan dans la collection de lettres du monde arabe (Maghreb, Moyen-Orient, Liban). Ce premier roman est inspiré de son vécu personnel dans un but initiatique.
La commémoration du 14 juillet occupe une place importante chez Loza et son mari. Tous les ans, il lui réserve des festivités particulières dans leur somptueuse résidence à Alep. Malgré la diversité des origines de leurs invités, la langue française reste un moyen de communication d'usage. Ils demeurent des francophones en somme.
Autrefois, sous mandat français, Alep était un havre de paix. Ces derniers temps, l'environnement en Syrie est devenu étouffant pour les résidents français. le couple souhaite donc laisser derrière eux des souvenirs mémorables avant leur départ pour Paris. À l'inverse d'Olga, sa soeur qui déménage à Damas en compagnie de son mari, Alphonse Aramoun, et de leurs deux enfants. François et Anya.
D'origines bulgares, les deux soeurs sont exilées depuis leur adolescence. Danseuses de music-hall, elles ont sans ménagement travaillé pour arrondir leurs fins de mois. Olga et Loza restent solidaires en toutes circonstances. La séparation imminente sera sans aucun doute difficile pour elles, notamment pour Anya, profondément liée à sa tante.
Du haut de ces cinq printemps, Anya est une petite fille espiègle, enjouée et orientée vers de nouvelles connaissances régulièrement. En cette merveilleuse soirée du 14 juillet 1947, la fête bat son plein. Anya s'occupe des invités avec beaucoup d'adresse.
La gastronomie bulgare, syrienne, etc. se mêle aux danses fiévreuses et interminables et aux discussions parfois malveillantes. le mariage d'Olga et Alphonse demeure un sujet de débat dans la société. Un scandale pour les églises maronites considérants certains métiers tels que la danse compromettant pour l'honneur familial. Leur union s'est soldée par une conversion religieuse. Ces échanges poussent Anya à un relèvement de questionnements sachant qu'elle idolâtre sa mère.
Depuis ce jour, Anya prend son destin en main. Elle décide d'acquérir les connaissances et les aptitudes nécessaires pour appréhender la vie et porter un jugement objectif sur tout ce qui concerne la société libanaise.
Passionnée de films cinématographiques, elle souhaite apprendre à lire pour mieux comprendre les intrigues. Son enseignement commença chez les Franciscaines missionnaires de Marie. Anya est très brave. Elle suscite l'attention de ses camarades à l'école. Ces séances régulières au cinéma lui permettront de créer un cercle d'amies afin de raconter des histoires. Cette cinéphile est ravie de ses plans d'action, certainement ingénieux. L'engouement et la détermination de cette petite fille lui promettent un avenir salvateur.
Tour à tour,
Milka Assaf nous partage les étapes du développement d'Anya allant de l'enfance à l'adolescence. Elle nous dévoile son combat permanent face aux contraintes dans un pays multiconfessionnel. La séparation de ses parents a fortement influé sur ses valeurs et ses convictions personnelles. Ces choix lui seront propres, qu'ils soient d'ordre religieux, politiques, etc. Elle refuse de renouveler l'héritage familial composé de violences conjugales et d'humiliations de toutes sortes envers les femmes. Les propos sexistes des hommes témoignent d'une mentalité restreinte qui existe encore actuellement. Anya tient à son indépendance.
À travers son personnage,
Milka Assaf décrit le Liban avec ses villes et ses montagnes. le cheminement d'Anya révèle les quartiers populaires et luxueux, composé d'anciens bâtiments qui datent depuis des siècles. L'auteure met en avant la dualité réelle entre les privilégiés et les pauvres à travers Olga et Alphonse. L'un vit dans l'abondance et l'autre dans la précarité. L'addiction au poker d'Alphonse et la misérable vie d'Olga pousseront Anya à aller de l'avant avec courage. Elle consacre son temps à enrichir son éducation sur de nombreux domaines tels que la littérature, la peinture, la danse de rock, la natation, etc. Dotée d'une force de personnalité, elle multiplie les exploits et les rencontres plus ou amicales et amoureuses dans la haute société nécessaire pour son autonomie.
Voyager en France demeure son unique espoir pour retrouver la liberté et la dignité loin des traditions libanaises. Elle se sent étrangère au Liban.
L'ombre du Cèdre est un roman initiatique captivant ! le combat d'Anya se situe à partir des années 1947-1960.
Milka Assaf livre plein d'informations assez documentées sur le Liban, de manière à ce que le lecteur comprenne l'atmosphère existante. Ces révélations sont historiques, culturelles et religieuses, etc. D'autres sont cocasses comme l'art de vivre ou les insultes des libanais ou encore lire dans le marc du café. L'auteure a détaillé ses écrits, de manière fluide et agréable (quelques longueurs auraient pu être évitées, mais sans conséquence . J'ai pris beaucoup de plaisir à lire ce pavé.
Milka Assaf aspire à transmettre la complexité des droits des femmes, concernant le mariage et les violences à leur encontre. Malgré l'évolution de notre société actuelle, certains faits perdurent malheureusement. L'histoire d'Anya est celle de beaucoup de femmes qui souhaitent retrouver la liberté et la dignité loin de toutes ces décadences libanaises. Un roman sous fond historique empreint de réalités que je vous recommande de lire sans attendre.
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