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Alix Payen (Autre)Michèle Audin (Autre)
EAN : 9782377291342
120 pages
Libertalia (28/05/2020)
4.32/5   11 notes
Résumé :
Printemps 1871. Assiégée, la Commune de Paris se défend contre Versailles. Les témoignages sur ce moment sont extrêmement rares. Après celui de Victorine Brocher (Souvenirs d'une morte vivante, Libertalia, 2017), voici celui d'Alix Payen, écrit sur le vif. Née dans une famille bourgeoise et fouriériste, Alix Payen (1842-1903) a 29 ans lorsqu'elle s'engage dans le 153e bataillon de la Garde nationale.
Ambulancière et infirmière, elle participe à la défense du ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
« C'est la nuit surtout que le combat devient furieux » est un ouvrage qui propose de revisiter le témoignage d'une certaine Alix Payen, ambulancière pendant la Commune de Paris en 1871. Ses écrits sont ici retranscrits et contextualisés par Michèle Audin (fille du tragiquement célèbre Maurice) et ont déjà été édités précédemment par le frère de la jeune femme, Paul Milliet. La version proposée ici a cependant été réactualisée et augmentée grâce à des inédits conservés par l'arrière-petite nièce d'Alix. L'ouvrage alterne entre les lettres envoyées par cette jeune femme pendant la Commune à ses parents, et des passages de la main de Michèle Audin qui approfondit un point particulier de son récit, ou replace les événements mentionnés dans leur contexte. L'ouvrage n'a donc rien d'une synthèse historique, il vise à mettre en avant le témoignage d'une contemporaine de ce moment marquant du XIXe siècle, et, pour cette raison, nécessite d'avoir quelques connaissances de base sur l'époque et ses protagonistes. Nous sommes donc en 1871 : la France est en guerre contre la Prusse depuis plusieurs mois, après que Napoléon III se soit brouillé avec Guillaume Ier sur la question de la succession du trône d'Espagne. Les armées françaises essuient défaite sur défaite, le point culminant de l'humiliation étant atteint à Sedan, bataille au cours de laquelle l'empereur lui-même est capturé. A Paris, on profite de l'occasion pour proclamer la fin du Second Empire et le début de la IIIe République. Un gouvernement provisoire est formé, et des élections ont lieu. Celles-ci, qui opposent partisans de la poursuite de la guerre (majoritairement républicains) et ceux avides de faire la paix (majoritairement à droite), conduisent à l'élection d'une majorité de députés royalistes ou bonapartistes qui envisagent une trêve avec la Prusse en échange de lourdes sanctions. Entre les mois de mars et mai, la population parisienne, refusant de baisser les armes contre les Prussiens, se soulève et proclame la Commune de Paris (d'autres communes verront d'ailleurs le jour ailleurs en France à la même époque, mais le mouvement sera immédiatement réprimé).

C'est cette période extrêmement courte (soixante-douze jours) qui nous intéresse ici, et ce d'autant plus que les témoignages consacrés à l'événement se font rare, tant à cause de sa brièveté que de l'enfermement des protagonistes, mais aussi en raison de la répression sanglante qui s'est abattue sur les survivants. le témoignage d'Alix est d'autant plus précieux que son profil est pour le moins atypique : issue d'une famille bourgeoise très engagée à gauche, la jeune femme a vingt-neuf ans lorsqu'elle devient infirmière dans le bataillon de son mari, membre de la garde nationale (troupes constituées de citoyens ayant accepté de prendre les armes pour défendre la ville). Les lettres écrites par Alix à son père et sa mère ont été ré-organisées ici de telle manière qu'elles permettent d'élargir progressivement l'horizon du lecteur qui découvre d'abord le contexte familial particulier de la famille Payen, puis se familiarise avec les événements du siège de Paris (de septembre 1870 à janvier 1871), avant d'enfin pouvoir entrer dans le vif du sujet avec la Commune, suivie de la semaine sanglante. le témoignage d'Alix est passionnant pour plusieurs raisons, la première étant qu'on possède peu d'écrits d'acteurs de la Commue en général, et de femmes en particulier. L'occasion de rappeler que celles-ci ont joué un rôle essentiel lors de l'événement, participant activement au débat politique, revendiquant la possibilité de prendre les armes et servant souvent comme cantinière ou ambulancière. le fait qu'il s'agisse de lettres destinées à des proches nous permet de plus de rentrer au plus près de l'intimité d'Alix dont les préoccupations et le caractère nous font souvent oublier qu'elle a vécu il y a un siècle et demi. La jeune femme parle de son mari en des termes touchants et fait preuve d'un grand courage, sans chercher à se mettre en avant. Elle relate également par le menu les rapports qu'elle entretient avec les soldats qui constituent le bataillon de son mari, et qui la traitent tous avec déférence et affection (elle mentionne les petites attentions discrètes qu'ils ont pour elle au quotidien comme lui déposer un bol d'eau au réveil pour qu'elle puisse de laver ou lui réserver un coin un peu plus douillet pour dormir).

L'intérêt de l'ouvrage réside également dans le fait que Michèle Audin entreprend lors de ses interventions rythmant les différentes lettres de confronter le témoignage d'Alix à d'autres écrits de contemporains qui se rejoignent souvent mais se contredisent aussi. le récit de la jeune femme permet en tout cas de se faire une bonne idée des conditions de vie des soldats et des citoyens à Paris pendant le siège de la ville par les Prussiens, puis lors des combats contre les Versaillais. Elle relate le rationnement, la pluie, la boue, le froid, l'inconfort, la mauvaise gestion des bataillons et des armes… Ses lettres permettent également de revenir sur des idées reçues concernant la Commune mais aussi sur les représentations parfois erronées que l'on se fait des combats. Alix parle des états-d'âme des soldats, de leur ras-le-bol, de leurs familles, de leur talent, aussi (certains sont poètes, d'autres chanteurs, d'autres des vétérans de précédentes batailles, à l'image du zouave Mercier…). Enfin, son témoignage permet d'avoir l'avis d'une contemporaine sur certaines grandes figures historiques (Trochu est par exemple dépeint avec hostilité quand Gambetta semble avoir les faveurs de la jeune femme). Les annotations de Michèle Audin permettent chaque fois de préciser un point un peu flou du témoignage ou de confronter les dires d'Alix à ceux d'autres sources historiques, ce qui permet de se faire une idée plus précise de cette période foisonnante et pourtant mal connue. A noter que les lettres et annotations sont accompagnées d'autres types de sources, comme des cartes des lieux des combats, un portrait de la jeune femme, des laisser-passer (qui permettent de suivre le déplacement de la famille pendant cette période) ou encore les cachets des lettres (qui nous donnent cette fois des indications concernant la manière dont des lettres pouvaient parvenir à destination hors de Paris en plein blocus militaire).

En proposant une nouvelle version augmentée et commentée du témoignage d'Alix Payen, ambulancière pendant la Commune de Paris, Michèle Audin nous permet de revivre les événements par les yeux d'une contemporaine, et ainsi de nous faire une vision d'autant plus précise de la période que l'autrice exerce un regard critique sur sa source, soulignant des approximations, erreurs ou contradictions. A noter que la lecture nécessite d'avoir, au préalable, quelques connaissances sur cet événement marquant du XIXe sur lequel l'autrice apporte ici que des précisions : il ne s'agit pas d'un ouvrage de vulgarisation ou d'un essai. Avis aux amateurs d'histoire, donc…
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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Alix MILLIET est née en 1842. Parcours de femme française bourgeoise du XIXe siècle. Mariée à Henri PAYEN en 1862, couple engagé. Et puis janvier 1871, les prussiens sont aux portes de Paris, et là Alix commence à raconter, dans des lettres destinées à sa seule famille, ses proches. le prolétariat gronde, se soulève, s'organise tant bien que mal. Henri est sergent dans un bataillon fédéré. Alix va le rejoindre très précisément le 16 avril au fort d'Issy, en qualité d'ambulancière. Elle va être sur le terrain, non seulement pour témoigner mais agir au nom de la Commune de Paris, cette utopie de 72 jours.

Alix PAYEN voit les combats, vit en partie dans les tranchées, près des barricades. Elle relate tout cela dans des notes, des lettres. Mais il n'y a pas que ses propres sentiments retranscrits dans ce livre, puisque figurent des lettres de la mère d'Alix, de sa soeur. Ces témoignages sont précieux car venant du coeur du combat.

Cette « Commune en direct » n'a pas souvent été décrite, ce qui donne à ce livre un intérêt tout particulier. Ici, nous pouvons avoir le sentiment que les obus pleuvent alors qu'Alix tient la plume pour raconter. Communards tout d'abord vaillants et têtes brûlées, partant à l'assaut de l'armée versaillaise. Puis la fatigue, l'épuisement même, à cause d'une totale désorganisation, d'une improvisation au quotidien, mais aussi des armes obsolètes.

Chaque lettre est une part d'Histoire de la Commune, non vue sous l'angle d'un historien mais d'une activiste. Pourquoi ce témoignage écrit au lendemain de la Commune est resté dans l'ombre ? Alix n'était pas une vraie militante engagée, elle n'appartenait à aucun courant. de plus, elle était issue d'une famille bourgeoise, ce qui ne faisait pas assez rêver dans les chaumières.

Les documents ici présentés sont souvent inédits. Michèle AUDIN a eu accès aux archives privées de la famille MILLIET, celle d'Alix. Elle y a pêché des trésors. Mais elle ne s'arrête pas là : elle replace dans le contexte certains écrits, intervient dans le récit pour mieux faire comprendre les enjeux de l'époque. Et cette phrase qui donne à réfléchir sur les témoignages historiques écrits en direct : « La séparation des familles, au moins de celles qui maîtrisent l'écriture, fait le bonheur des historiens ! ». Il est vrai qu'un événement vécu en direct, en tout cas avant l'arrivée de la technologie, pouvait laisser peu de traces à l'instant T.

« On nous a fait dire que nous ne serions pas relevés aujourd'hui ; il y a du mécontentement chez quelques hommes ; ils sont réellement rendus de fatigue et contrariés surtout du manque d'ordre qui préside, soit à la distribution des vivres, soit aux durées des factions aux avant-postes ». À ceci s'ajoute un gel du courrier par l'armée versaillaise dans Paris intra-muros, donc les informations passent mal.

Sous-titré « Une ambulancière de la Commune, 1871 » ce récit met le doigt sur le militantisme des combattants fouriéristes, des femmes dans une tentative de révolution, du chaos régnant à cause d'une très mauvaise préparation. Mais il y a la foi en un renversement de régime, à la proclamation dune vraie République, il y a la solidarité, la force collective.

Ironie de l'histoire, Henri PAYEN, ce mari qu'Alix a suivi sur le champ de bataille, meurt le 29 mai 1871, soit le lendemain de l'écrasement de la Commune. Superbe témoignage édité en 2020 par Libertalia, il montre la Petite Histoire imbriquée dans la Grande, c'est ce qui en fait un document unique.

https://deslivresrances.blogspot.com

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Alix Payen née dans une famille bourgeoise et fourièriste a 29 ans lorsqu'elle s'engage dans la Commune comme ambulancière et infirmière. Elle s'engage corps et âme, perd son mari, se bat pour défendre Paris communard. Elle n'écrit pas pour la postérité mais pour informer son père hors de Paris, sa famille. La Commune ne dure que 72 jours et les témoignages écrits sur le vif comme celui-là sont rares et précieux. Un regard de femme, toujours bousculée par les événements, engloutie sous sa tâche mais convaincue de son engagement, lucide sur sa trajectoire politique.
Michèle Audin, (mathématicienne et romancière/historienne de la Commune) responsable du blog Macommunedeparis, a rassemblé la correspondance d'Alix Payen qui nous fait entrer de plein pied au coeur des combats du 153ème bataillon de la Garde Nationale. Elle présente et publie ces lettres : "C'est la nuit surtout que le combat devient furieux - Alix Payen, une ambulancière de la Commune de Paris en 1871". Aux éditions Libertalia comme il se doit.
Alix Payen est entrée récemment dans le "Maitron" où grâce à des historiennes comme Michèle Audin de plus en plus de femmes trouvent leur place. https://maitron.fr/spip.php?article219169
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En ces temps de commémoration de la Commune, un témoignage de premier plan et de premier ordre.

Dans ce recueil de lettres au titre éclatant, formidablement agencé par Michèle Audin, nous suivons Alix Payen, bourgeoise et citoyenne. Son profil l'a longtemps laissée sous les radars. Oubli que ce livre vient corriger.

La première partie nous présente la famille d'Alix Payen. Ses relations avec ses parents et ses frères.
Puis vient le siège de Paris, suivi du déclenchement de la Commune.
Enfin, et c'est la plus importante partie, son engagement, en temps qu'ambulancière. L'on suit son quotidien, à l'aune des lettres qu'elle envoie à sa mère. L'espoir, les galères, les avancées, les échecs, la difficulté du quotidien, autant de thématiques abordées dans ces lettres.

Et en fil rouge, la nuit... le moment où les combats redoublent.
La nuit est omniprésente dans ces lettres.

Une nouvelle belle réussite au catalogue des éditions Libertalia, portée par l'érudition passionnée de Michèle Audin.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Mais il faut que je te raconte la nuit dernière. J'ai reçu le baptême du feu. Le combat a été terrible et me voilà aguerrie du premier coup. C'est comme lorsqu'au bain froid on se jette franchement à l'eau au lieu d'entrer petit à petit. (49)
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La nuit arrive, la canonnade se ralentit, mais la fusillade commence avec rage; on dirait un essaim de gros bourdons qui passent sans cesse sur nos têtes. (71)
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Je crois que cette nuit ce sera encore très chaud. J'espère que notre bataillon sera porté à l'ordre du jour. (95)
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Vidéo de Alix Payen
Michèle Audin. Sur Alix Payen.
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