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sur 601 notes
Le roman s'ouvre avec Kid, vingt et un ans, récemment condamné pour crime sexuel. Il ne doit plus s'approcher à moins de 800 mètres de tout lieu où se trouvent des enfants, et est entravé par un bracelet électronique de localisation. Héros peu attirant ? Et pourtant, quand on apprend le réel motif de sa peine, et que l'on découvre ce que fut son enfance , le jeune homme gagne des galons en sympathie.
Cependant sa solitude et sa liberté surveillée limitent ses possibilités au quotidien. Il n'a d'autre choix que de squatter un terrain vague au dessous d'un pont, où se sont réfugiés d'autres parias, pour les mêmes raisons, parfois beaucoup plus graves.
L'irruption du Professeur, un personnage énigmatique va bouleverser sa vie.

Outre le fait de pointer du doigt les aberrations du système de justice et de répression aux États-Unis, Russel Banks magnifie deux personnages uniques, solaires, qui maintiennent une tension de lecture constante, sans temps morts. Son appétence pour mettre en lumière les plus déshérités, les oubliés du système est encore un fois au premier plan.

La langue est belle, le lien avec les personnages met peu de temps à se mettre en place, et l'auteur sait parfaitement faire avancer l'intrigue pour maintenir l'attention jusqu'au bout. Les descriptions de paysages sont dignes des plus belles pages de nature-writing.

Doit-on voir dans le dernier personnage qui entre en piste, un
double de l'auteur ?

Merci à la Caverne des lecteurs et à Jérôme pour nous avoir proposé
une fois de plus une très belle lecture

443 pages Actes Sud 14 mars 2012
Traduction (Anglais): Pierre furlan

Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Attention, Russel Banks est de retour et confirme avec ce roman sa place de grand penseur et écrivain américain. Renouant avec ses sujets de prédilection, l' adolescence, les laissés-pour-compte, une Amérique en perte de repères et avec son regard plus aiguisé que jamais, il écrit un brûlot sur les dérives de la société américaine contemporaine.

Bienvenue à Calusa, ville que l'auteur situe à l'extrême pointe de la Floride, ville imaginaire qui ressemble comme deux gouttes d'eau à Miami. Hormis son parc national aux allures de forêt vierge d'un autre temps et ses complexes hôteliers ultra-modernes en front de mer, vous pourrez, si vous prenez le temps de vous arrêter au Viaduc, visiter sa Colonie, un endroit unique en son genre : un terrain vague, en contrebas du pont, où se sont regroupés des délinquants sexuels qui, bien qu'ayant tous purgé leur peine, sont condamnés à porter et à recharger un bracelet électronique permettant aux autorités de les localiser à toute heure du jour et de la nuit ; délinquants qui sont aussi condamnés à rester hors d'un périmètre dit de sécurité de 750 mètres, ayant en son centre tout endroit susceptible d'abriter des enfants - en faisant tous les calculs nécessaires, cette seconde contrainte ne laisse à ces hommes comme possibilité pour vivre, que ce bourbier, un infréquentable hall d'aéroport et des marécages. Curieux, vous descendez voir en faisant extrêmement attention, l'endroit étant pour le moins escarpé ; et voici que vous apercevez des silhouettes répondant aux noms étranges de Paco, le Grec, P.C, Rabbit qui résident tous là, masquant derrière ces pauvres abréviations et autres pseudonymes ce qu'il reste d'eux, c'est-à-dire des êtres humains sans avenir, en situation de survie quotidienne, privés de rédemption. Un homme détonne au milieu de ces fantômes plus ou moins coupables : il se fait appeler le Kid, bien qu'il ne soit plus un enfant. Mais si personne ne sait vraiment pourquoi il se fait appeler comme ça, tout le monde peut convenir que ce surnom lui va plutôt bien du fait de sa petite taille et de son allure chétive. Il vit dans une tente en compagnie d'Iggy, son fidèle iguane qui l'accompagne depuis ses jeunes années et lui sert tout à tour de gardien, attaché à un parpaing, ou de camarade muet. Outre cette tente et quelques affaires, le Kid possède un vélo et il a un petit boulot dans un restaurant qui lui permet de subvenir à ses modestes besoins.

Cet homme, nous allons le suivre, découvrir qui il est, apprendre pourquoi il est là au travers de ses souvenirs et au travers d'une rencontre qui bouleversera sa vie, celle d'un homme monstrueux (il est plus qu'obèse, énorme) qui se fait appeler Le Professeur. Ce dernier travaille à la faculté et traîne derrière lui une réputation de génie. Il est descendu jusqu'à ce cloaque dans le but d'étudier le cas de délinquants sexuels. Les échanges vont emmener les deux hommes bien plus loin qu'ils ne le pensaient…

Russell Banks revient donc quatre ans après La Réserve, roman qui m'avait déçue, du moins en comparaison de ses magnifiques American Darling ou de beaux lendemains. Ce nouveau livre, inspiré d'un fait divers réel (l'affaire dite du "Julia Tuttle Causeway", histoire d'un campement sauvage fondé par un groupe de délinquants sexuels à Miami), est une fulgurante réflexion sur les dérives de notre société prisonnière de ses schémas et de ses peurs. Ce roman propose un voyage inédit au coeur de ces ténèbres d'une nouvelle ère et, grâce à sa structure qui multiplie les angles et les surprises narratives, évite les mirages du manichéisme et du racolage (sans jamais nier la crudité, voire la violence de son thème) et les réponses péremptoires. Lentement, il creuse son sujet, accumule les strates, emmène son lecteur dans d'étranges directions sans jamais sacrifier son ambition au confort de celui-ci, jusqu'aux confins d'un hypothétique après.

Avec une désarmante acuité, Russell Banks nous livre une histoire animée de cette formidable humanité qui traverse ses meilleurs livres et qui en a fait depuis plusieurs années un sérieux candidat au prix Nobel de Littérature - son oeuvre associant style, profondeur et défense de valeurs humanistes, avec une constante justesse.
Ce livre ambitieux et dérangeant, nous interroge, nous interpelle et ne nous laisse pas indifférent !
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Lointain souvenir de la peau, lointain souvenir de la civilisation américaine quand on est retranché sous le Viaduc, avec pour compagnons d'exil les recensés du délit sexuel. C'est le seul lieu éloigné de plus de 800 mètres des écoles, parcs ou autres lieux urbains possiblement fréquentés par des enfants, auquel les autorise le bracelet électronique chevillé à leur corps. Des reclus que la société ne veut plus voir, et pour cause. le lecteur aussi risque d'avoir du mal à entrer dans leur univers, sans parler d'empathie, avec cette part de l'humanité qui fait honte à l'autre. Russel Banks n'a pas hésité quant à lui à pénétrer cet univers par le biais de deux personnages magnifiques, le Kid d'un côté, le Professeur de l'autre, pour un roman dense parfois un peu long et tortueux, sous couvert d'analyse sociologique et de décrépitude humaine. Rien à dire c'est magistral par moments, malgré le sujet comme un caillou dans la chaussure du lecteur, et on retrouve ici la puissance accrocheuse de cet auteur. Même si j'ai préféré nettement « De beaux lendemains ».
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Russel Banks est -à mes yeux- l'un des meilleurs romanciers contemporains américains. de sa belle plume souvent sombre, il dépeint les exclus, les minorités et les marginaux avec tant de réalisme qu'il semble les avoir étudiés et côtoyés longuement.
« Lointain souvenir de la peau » me faisait de l'oeil depuis des mois mais, j'avais quelques hésitations du fait du thème même des délinquants sexuels. Et je finissais toujours par commencer un autre roman moins « dérangeant ».
Finalement, je m'y suis risquée et je n'ai pas regretté. Je crois d'ailleurs que cette lecture me restera en mémoire pendant un certain bout de temps.
Banks nous raconte la réalité de ces déviants sexuels aux Etats-Unis par l'histoire du Kid, un jeune délinquant sexuel, et de sa rencontre avec un professeur de sociologie (aussi intelligent qu'obèse) souhaitant étudier les sans-abri et les délinquants en tout genre.
Tous deux ont un rapport au corps (et aux autres) (le premier qui ne s'est plus touché depuis sa condamnation et le deuxième boulimique à l'extrême) qui ressemble à un lointain souvenir de la peau. (Mais on pourrait aussi parler de leur addiction respective : le sexe virtuel et la nourriture).
Le Kid est un jeune homme de 21 ans, naïf, vierge et qui a pour seul ami son iguane Iggy. Son seul lien avec le monde se fait par le biais d'Internet ; le virtuel faussant alors sa vision du réel et de la relation aux autres (sites pornographiques, etc.).
Condamné à porter pendant 10 ans un bracelet électronique à la cheville, à rendre des comptes à la société, obligé à résider dans le Comté mais à qui il est interdit de s'approcher à moins de 800 mètres de tout lieu fréquenté par les enfants, soit par équation, de toute école, lieu public, etc., il n'a donc d'autre choix que de vivre sous un viaduc (en Floride) avec les autres condamnés et déviants sexuels de toute sorte.
Si j'ai été quelque peu déçue par une partie du livre -le mystère qui entoure le professeur que j'ai trouvé un peu rocambolesque-, l'histoire du Kid n'en reste pas moins touchante et captivante. Et, en nous faisant aussi sourire, notamment par la naïveté et les réflexions du Kid, R. Banks nous évite une lecture trop pesante.
Ainsi, j'aurais tendance à considérer qu'au-delà du Kid, ce qui me restera en mémoire, c'est surtout la capacité qu'a eu Banks, presque insidieusement, de m'ouvrir un peu plus l'esprit, de me rappeler que tout n'est pas radicalement ou blanc ou noir et que trop souvent et trop rapidement, nous posons des étiquettes et portons des jugements sur les autres. Par facilité et sentiment de sécurité, nous mettons des personnes en marge de la société et préférons les éviter du regard, les oublier, les éloigner de notre vie.
Et ce, avec ce « paradoxe » que la société a elle-même rendu possible (pour ne pas dire créée) certaines de ces déviances et donc déviants (sexuels dans le cas présent).

Lorsque certains auteurs (ou romans) me permettent de réveiller ma conscience, m'aident à avoir un regard différent et plus « juste » sur ce qui m'entoure, pour les remercier, je me dis qu'ils méritent au moins un « quatre étoiles »…
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J'adore ce titre. Il me fascinait au point d'ouvrir le livre avant même d'en connaître le sujet. "Lointain souvenir de la peau" m'évoque d'emblée la rupture sociale, la solitude radicale et la souffrance de ne plus pouvoir étreindre ni être étreint. Et c'est bien de cela dont Russel Banks nous parle à travers son personnage du Kid.

Depuis que le kid a été condamné et enregistré sur la liste des délinquants sexuels de Floride, une simple recherche sur internet permet à chacun de connaître son adresse et ses condamnations. Un bracelet électronique fixé à sa cheville permet à son assistant de probation de le localiser en permanence. Des mesures sécuritaires qui équivalent pour beaucoup de délinquants à la mort civile. Exclusion du marché locatif par des propriétaires soucieux de minimiser les risques, interdiction de se trouver à moins de huit cents mètres d'un lieu fréquenté par des enfants (alors qu'il y en a tous les cinq cents mètres !), c'est en dessous d'un viaduc et dans des abris de fortune que sont contraints d'essayer de survivre le Kid et ses semblables.

Le Kid a 21 ans, il sait qu'il a commis une erreur et aussi qu'il n'est pas pédophile, ce qui dans sa situation finalement n'a plus beaucoup d'importance. L'arrivîée au campement d'un mystérieux chercheur universitaire désireux de connaître ses conditions de vie et de comprendre son parcours va l'amener à regarder dans le rétroviseur et à se livrer.

Russel Banks distille au compte-goutte les infos sur son enfance, son parcours, et les faits pour lesquels il a été condamné, pour finalement nous amener à réfléchir sur les dérives sécuritaires du "surveiller et punir". La sanction garantit-elle un changement de comportement ? Contribue-t'elle au final  à plus de sécurité pour la société ? Faut-il abandonner tout espoir de réinsertion pour certaines catégories de délinquant ? Est-il justifié et acceptable de les bannir et de les parquer dans des zones d'exclusion et de non-droit ?

Russel Banks est à mes yeux un des plus grands auteurs nord-américains. "Affliction" et "De beaux lendemains" sont deux pépites. Si "Lointain souvenir de la peau" n'est pas aussi abouti, il n'en demeure pas moins un bouquin bien construit dont l'épaisseur et la richesse du personnage principal servent une réflexion plus que jamais d'actualité sur l'enfance maltraitée (des victimes mais aussi souvent des abuseurs) et sur la réaction sociale à des faits qualifiés d'infractions.

On regrettera juste des phrases parfois très longues dont la (difficile) traduction en Français alourdit le texte et plombe parfois le rythme.
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Addict au porno et à la masturbation depuis la pré-adolescence, le Kid, à peine plus de 20 ans, a été condamné comme délinquant sexuel pour avoir fait des avances à une mineure sur Internet. Il doit porter un bracelet électronique et ne peut pas vivre à moins de huit cents mètres d'un lieu fréquenté par des enfants. Il vit, survit, sous un viaduc autoroutier, en compagnie d'autres délinquants sexuels en semi-liberté.

Un jour, il suscite l'intérêt du Professeur, sociologue universitaire atypique, qui s'intéresse au Kid dans le cadre de ses travaux sur les sans-abri, et qui développe une théorie de rupture sur la ré-insertion des délinquants. Le Professeur prend peu à peu le Kid sous son aile. Mais des zones d'ombre apparaissent. Où se cachent les vérités du Professeur, et quelles sont-elles ?

Banks a situé son roman en Floride, dans une ville, Calusa, et un marais, le Grand Marais de Panzacola, imaginaires, mais dans lesquels on n'a pas de mal à reconnaître Miami et Les Everglades.

Le roman s'intéresse à l'âme égarée du Kid (comment et pourquoi en est-il arrivé là ? Comment peut-il s'éveiller à une vie plus normale ?), et à celle plus complexe du Professeur (un génie dans son domaine de recherche, mais lui aussi avec ses failles, ses ombres et ses secrets, qu'on ne décodera vraiment qu'à la toute fin du livre). La "normalité" n'apparaît que dans les derniers chapitres, lorsque le Kid rencontre Cat et Dolorès, loueurs de bateaux dans le marais et l'Ecrivain, en reportage pour un magazine new-yorkais. Ils aideront le Kid à voir plus clair en lui.

La société américaine en prend également pour son grade, dans la manière dont elle ôte toute chance de ré-insertion aux délinquants : ils ne sont plus en prison, mais leurs libertés de manoeuvre sont tellement restreintes que c'en est presque pire.

Le sujet et les personnages sont très intéressants. L'histoire est bien construite et racontée, entretenant le suspense sur la suite. Dommage qu'il y ait quelques longueurs et lourdeurs qui nuisent à la dynamique de lecture. Russel Banks m'avait habitué à mieux...
Lien : http://michelgiraud.fr/2019/..
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La bestiole sur la couverture, c'est un iguane. Il s'appelle Iggy, comme Iggy Pop, et c'est le seul compagnon du Kid, que l'on ne connaîtra que sous ce nom. le Kid, vingt et un an, libéré depuis peu après une condamnation pour délinquance sexuelle, interdit de séjour à moins de 800 m d'un endroit fréquenté par des enfants (ce qui inclus beaucoup d'endroits), vit de ce fait avec d'autres délinquants du même type sous un viaduc reliant le centre ville de Calusa (avatar de Miami) à sa banlieue, un bracelet électronique à la cheville pour les dix ans à venir.

Le Kid rencontre Le Professeur (lui-même loin d'être frais), un prof de sociologie de l'université qui se traîne une réputation de génie, et qui fait de la recherche sur les sans-abris. Il va interviewer le Kid et intervenir dans sa vie comme dans celle d'un rat de laboratoire.

Il fallait oser, prendre pour héros un délinquant sexuel, les parias abso­lus, les intouchables amé­ri­cains, une caste d'hommes classés bien au-dessous des simples alcooliques, des toxicomanes ou des malades mentaux sans abri. Des hommes inaccessibles à la rédemption, aux soins ou aux traitements, méprisables mais impossibles à éloigner, et donc des hommes dont la majorité des gens souhaitait simplement qu'ils cessent d'exister.

Même si la 4ème de couv' vend la mèche, on n'apprend les faits qui lui ont valu sa condamnation qu'à plus de la moitié du livre, ce qui laisse tout le temps au lecteur de se débrouiller avec la sympathie qu'il éprouve rapidement pour le Kid (un gamin non pas vraiment maltraité ni abandonné, mais pitoyablement négligé par une mère un peu nymphomane qui l'élève seule, viré de l'armée, un gamin coupé de toute affection, de tout soutien, de tout repère, et qui s'adonne tout jeune à la pornographie sur internet comme à une drogue), l'appréhension qu'il ait commis quelque chose d'atroce (la délinquance sexuelle va des attouchements au viol en série en passant par la pédophilie), et l'affligeant traitement que l'Etat réserve à ces criminels. Autant dire que ça n'est guère confortable.

Soulevant les questions de la honte et de la culpabilité, de la vérité et des apparences, de l'exclusion et de la normalité, de la place des réseaux sociaux (qui n'ont rien de social), Banks présente avec le Kid (dénué de toute culture mais doté d'un “bon fond” comme on dit), l'éveil d'une conscience au monde (réel) qui l'entoure. Et pose la question lancinante de la place et l'image de nos enfants dans une société à la fois “pédophage” et “pédocentrée”, surprotégés d'un côté, très érotisés de l'autre, par la publicité par exemple, vivants dans un monde déréalisé très tôt, confrontés très jeunes à des images pornographiques, dans une société dont le seul credo semble être “surveiller et punir”. “Quand une société réifie ses enfants en les transformant en groupes de consommateurs, quand elle les déshumanise en les convertissant en un secteur économique crucial fermé sur lui-même, quand elle érotise ensuite ses produits pour les vendre, les enfants en viennent peu à peu à être perçus comme des objets sexuels par le reste de la communauté mais aussi par eux-mêmes”.

Je ne sais pas si ça leur fait une belle jambe, mais les laissés-pour-compte de l'Amérique ont une voix et une parole avec Russell Banks, qui ne cesse d'en peindre le portrait saisissant d'une manière d'autant plus efficace qu'elle est liée à un art romanesque accompli et qu'elle n'est pas (trop) didactique (sauf quand Le Professeur s'exprime, mais après tout, il est prof)
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De Russell Banks, je n'avais lu que La réserve, qui n'est apparemment pas son meilleur roman mais que j'avais apprécié pour la complexité de ses personnages et l'analyse relationnelle.
Avec Lointain souvenir de la peau, l'auteur renoue avec un sujet fétiche sur les laissés pour compte d'une Amérique moderne et puritaine. Kid, jeune délinquant sexuel vit sous le viaduc de Calusa, inspiré du camp similaire de Miami. C'est un des rares endroits où peuvent s'installer ceux que l'Amérique craint le plus et considère comme les plus grands parias, loin de toute présence d'enfants. La législation a ainsi créé un état pire que la prison qui ne laisse aucune chance à ces délinquants. Pourtant, certains, comme le Kid, ne sont victimes que du système, ne sont que des gosses rejetés par les structures de l'éducation et de l'armée, que des enfants en mal de tendresse. le Kid n'a jamais eu de reconnaissance de ses parents, du fait de l'absence de père et de la prostitution de sa mère. Son seul ami est un iguane.
Sa rencontre avec Le Professeur sera déterminante. Petit à petit, au fil de son étude sociologique des délinquants, il va le guider vers la responsabilité vis à vis de ses congénères et de deux autres animaux dont il aura la responsabilité.
" Il faut leur redonner la responsabilité de quelque chose. D'un truc où ils ne vont pas échouer. Comme ça, ils auront assez de confiance en eux pour ne pas redouter d'être rejetés..."
Même si la nature et les évènements sont contre l'épanouissement du Kid, celui-ci va prendre en compte son identité et la mesure de sa faute, la réalité de sa honte.
Le Professeur devient lui aussi un mystère et l'on comprend que paria ou génie, chacun a ses zones d'ombre, ses addictions, son passé obscur.
Lointain souvenir de la peau est un roman majeur sur la société américaine, l'évolution des moeurs avec l'arrivée des réseaux sociaux. C'est une intéressante analyse humaine avec en plus, de très belles descriptions de la nature des marais du Panzacola ( bayou) et un certain humour aussi.
Malgré ses perversions, le Kid est un personnage très sensible et attachant, un être simple soumis à la tentation du serpent (Internet) qui va lui faire prendre conscience du Bien et du Mal. Il m'a fait penser au jeune homme du roman Des fleurs pour Algernon de Daniel Keyes.
Lien : http://surlaroutedejostein.o..
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Après avoir été déçue par La réserve, son précédent roman, c'est avec impatience et un peu d'appréhension que j'attendais de lire Lointain souvenir de la peau.

Que dire si ce n'est que c'est du GRAND Russel Banks ! Renouant avec ses thèmes fétiches (l'exclusion et la marginalité),, Russel Banks nous offre une critique aiguisée d'une Amérique bien pensante faisant continuellement le grand écart entre ultra-libéralisme et ultra-conservatisme.

Comme dans d'autres de ses romans, Affliction, Trailerpark, ses héros (ou plutôt anti-héros) sont des hommes ordinaires, blancs, exclus du grand rêve américain dans une société qui leur laisse peu de chance de (re)trouver leur place (même si dans le cas du Kid, on peut percevoir à la fin du roman l'ombre un espoir).

Mention spéciale pour Pierre Furlan, le traducteur de Russel Banks qui par la qualité de son travail participe grandement, d'après moi , au succès de cet auteur en France !

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Même avec un peu de recul ,j'ai du mal à savoir si j'ai vraiment aimé ou pas . le sujet est vraiment intéressant, à savoir la vie des délinquants sexuels condamnés , on ne s'ennuie pas ,c'est bien écrit mais je trouve les propos un peu redondants et c'est ce qui me gêne . Combien de fois le Kid évoque le sois-disant amour de sa mère ,le fait qu'il regarde des pornos depuis ses 11 ans de façon compulsive ,ect....j'ai l'impression parfois que ça tournait en rond ! Et après toutes ces interrogations ,d'un coup il sait finalement en deux minutes ce qu'il va faire de sa vie....
Pour autant c'est un portrait assez intéressant de ces déviants sexuels et du regard que leur porte la société.
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