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EAN : 9782072859229
272 pages
Gallimard (19/09/2019)
4.25/5   8 notes
Résumé :
Même si largement reconnu dans le monde de la poésie (Prix Apollinaire, Prix Georges Perros, exposition rétrospective à la Bibliothèque de Charleville, chroniqueur éminent de remue.net), Jean- Marie Barnaud (né en 1937) est certes un poète discret, mais il a bâti au fil des décennies, dans la proche parenté de Jaccottet et Bonnefoy, au reste très attentifs à son travail, une oeuvre d'une cohérence et d'une constance rares.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique

Très belle idée d'avoir réuni en une anthologie des poèmes choisis parmi onze recueils du poète ! Je connaissais les textes écrits de 1987 à 1990 mais ici l'éventail temporel est plus large: de 1983 à 2014. Car Jean-Marie Barnaud parait peut-être fort discret , il n'en est pas moins prolixe et régulier dans l'acte d'écrire.

J'ai retrouvé ici, de façon plus ample, ses thèmes de prédilection: l'appel du ciel, des espaces aériens, sa fascination pour la lumière, cette " imperturbable clarté ", la voix mystérieuse et vivace de la nature qui nous envoie ses messages, la fugacité du temps, les éclats de joie furtifs...Dans la partie " Fragments du corps incertain", j'ai découvert aussi la présence intense de la femme aimée.

Toujours ces mots clairs et vibrants, toujours ce rythme qui nous emporte, toujours l'éblouissement de vie au coeur des vers...

Voici, pour clore et célébrer ce livre, un poème qui me semble contenir tout l'élan poétique de l'auteur:

" Et cependant elle persiste
La voix
Comme l'oiseau revient aux fenêtres
Éteindre et rallumer le ciel
Et l'on s'arrête
Désorienté
On voudrait retenir l'éclair
S'abriter dans un pli du drapé
Qui vous a ébloui"....

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Citations et extraits (66) Voir plus Ajouter une citation
On avait fait son miel
Jusqu'alors
De la mélancolie
La vieille lune traîne ses fripes
Un peu partout
On pouvait se croire sauf
Le poème déroulé
Pour solde de tout compte

La litanie grise
On l'a jouée sur la corde sensible
Tant de fois

Mais l'on sait bien
Depuis toutes ces années
Où l'on s'est débattu dans le chiffre
Et la mesure
Qu'il faut un jour abandonner
Ouvrir ses paumes
Se laisser prendre
Au tremblé
Qui passe là
Sous peine d'en mourir
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Ils sont ainsi les morts
légers et fidèles
Ne pèsent rien
moins que l'air que tu respires
moins que les mots qui se souviennent

Eux ne parlent pas
pas plus que la lumière ou l'ombre

Ne pèsent rien
moins qu'une aile

Le poids juste de l'âme
sourire et geste d'effacement
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Fermant tes paupières
N'appelle plus les visages absents
Mais plonge tes deux mains
Dans la fraîcheur à ciel ouvert

Arc-bouté sur toutes les margelles
Tire
À pierre fendre
Sur les chaînes
Et fais tinter l'eau vive
Par ici

( Dans "Le beau temps", 1985 )
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Un peu de nuit déjà morcelle
Le beau temps qu'il fait
Un peu de nuit sur l'eau
Comme une haleine
C'est peu de poids qui pèse là
Moins qu'un sourire
On attend simplement qu'un souffle
Vienne de plus loin
Et que la barque évite

(extrait de "Celle qu'on attendait", 1990) - p. 88
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(Cette lettre a été écrite en réponse à une enquête lancée par la revue Friches en 1990 sur le thème « L’écriture et la genèse du poème ». Elle a été publiée par Cheyne éditeur en édition hors commerce le 1er mai 1991, puis reprise dans Poèmes en 1996.)

Cher ami,

Les réticences que j’ai pu montrer à l’égard de votre projet venaient, je le crois, des rapports conflictuels que j’entretiens, depuis l’origine, avec l’écriture. Évoquer ces rapports suffira peut-être à remplir ma tâche, même si ce type de confession a quelque chose d’impudique et relève, à tout le moins, de la vanité.
 
Il y a d’abord cette contradiction sans cesse vécue par moi entre cet homme que je suis et qui s’impose des heures d’immobilité à sa table de travail, écrivant, relisant à voix haute, gommant, écrivant à nouveau, relisant, etc., tantôt pris par cet exercice au point d’en « oublier l’heure et le signal convenu », tantôt impuissant à rien écrire qui vaille, occupé en quelque sorte à ne rien écrire du tout, un œil fixé sur la feuille, tandis que l’autre voit le dehors où les entreprises du corps sont plus sereines et rayonnantes, le grand air, le grand froid, la lumière ; et puis cet autre homme, que je suis toujours, passionnément engagé dans des travaux campagnards, ou encore naviguant en Méditerranée, ou marchant en montagne, et qui, tout heureux, fébrile et tout en sueur, se demande soudain s’il n’est pas en train, là où il se trouve, de démériter de l’écriture, s’il ne trahit pas le poème ou le roman en gésine, s’il ne lui faudrait pas bien vite rentrer à l’abri, verrouiller toutes les issues, et se consacrer au seul métier, au seul service nécessaire, celui qui veut que nous traquions le vrai dans la parole.
 
Je crois bien que je mourrai sans avoir pu résoudre la contradiction, n’arrivant pas tout à fait à me satisfaire de l’idée conventionnelle que le premier homme nourrit le second – et réciproquement – comme si je flairais malgré tout un piège dans l’écriture, comme si je craignais que nous autres, les poètes, n’ayons fini par céder à un « genre », étant entrés par le poids des choses dans cette confrérie-là qui, il est vrai, en vaut bien d’autres, mais entrés… faute de mieux, peut-être.
 
Et pourtant je reviens toujours à la table, certain que je me dois quand même à je ne sais quel « autre » encore qui, en ce lieu, me réclame, assuré qu’il me faut absolument donner sa chance à un chant qui m’habite en secret, et combler ce vide, ce rien, dont la feuille est le signe, comme s’il y avait une place, une « chaleur vacante » à remplir.
 
Ajoutons, pour être tout à fait honnête, que j’éprouve aussi à cet exercice, et lorsque le résultat me semble accompli, une qualité de joie irréductible à toute autre – même si, très vite, le poème ou la page achevés me deviennent étrangers et s’éloignent de moi comme fait la peau après la mue.
 
Et tout est à reprendre ; et tout recommence…
 
L’inconfort de ma pratique m’a toutefois imposé quelques règles de déontologie à usage interne, et auxquelles je crois n’avoir jusqu’à présent jamais dérogé, dont la plus grave est de ne jamais écrire par jeu ou sur commande, l’écriture devant toujours pour moi se refuser, sauf à trahir l’essentiel, aux prouesses des savoir-faire, et ne tenant sa légitimité que de cette évidence : la parole engage (d’où la nécessité où je suis quelquefois de refuser des inédits, que je n’ai pas, ayant déserté pendant des mois parfois l’écriture de poésie, sans avoir pour autant, je crois, abandonné l’état de poésie…).
Mais, puisque vous me demandez de réfléchir sur un exemple précis, je vous propose celui-ci :
Dans Sous l’écorce des pierres (Cheyne éditeur, 1983), on peut lire ce « quintil » :

Dans la faille du temps
Irons-nous à la mort
Comme de bons marcheurs
À grandes foulées vers l’incendie
Sourds aux écorces qui pourrissent

Ce poème pose la question : irons-nous à la mort comme de bons marcheurs. Mais j’avais d’abord écrit : nous irons à la mort comme de bons marcheurs, dans une sorte d’enthousiasme, ou alors c’était un exorcisme, et en conclusion d’un poème que j’avais longtemps porté en moi comme une espèce de blessure, et dont l’achèvement m’avait en quelque sorte libéré.
 
Cependant, une fois l’émotion de la création évanouie, la forme affirmative me parut d’une grande hauteur, d’une pauvre prétention ; et, des exemples cruels autour de moi m’ayant aussi rappelé à la réalité des choses, je me suis rendu compte que la vie pouvait bien me réserver un jour la mauvaise surprise de me mettre dans l’incapacité d’assumer jusqu’au bout cette parole, même si la relecture du poème me confirmait toujours dans le sentiment que l’affirmation semblait esthétiquement pertinente.
 
J’ai balancé, je m’en souviens, de longues semaines entre l’une et l’autre formule, et je ressens encore le soulagement que fut, en fin de compte, la décision de choisir l’interrogation, les préoccupations esthétiques ayant dû se soumettre aux impératifs d’une voix qui me disait que, sur cette question, je ne pouvais rien affirmer sans me mentir à moi-même, et par là, sans risquer d’ôter à mon poème la seule valeur à laquelle il devait prétendre.
 
Et je pense aujourd’hui que cette exigence de fidélité est sans doute l’une des rares choses qui justifient l’activité poétique devant les malheurs du temps.
 
Croyez à mes sentiments très amicaux.
 
J.-M. B.
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La crise sanitaire a été l'accélérateur et l'amplificateur d'une réflexion en cours depuis quelques années sur l'impact écologique de l'écosystème du livre. Mais que recouvre véritablement la notion d'écologie dans le secteur du livre ? A quelle échelle peut-on agir ? Quels accompagnements sont nécessaires pour assurer les transitions vers de nouvelles pratiques ?
Modération : Charles Hédouin, Co-fondateur de Livr&co, expert en écoconception éditoriale
Avec : • Audrey Carpentier, Gérante, et François Barnaud, Gérant, Éditions La Butineuse • Sophie Courtel, Responsable, Médiathèque intercommunale de Redon et membre de la Commission Bibliothèques Vertes ABF (Association des Bibliothécaires de France) • Mélanie Mazan, Coordinatrice, Association pour l'écologie du livre • Fanny Valembois, Consultante, le Bureau des acclimatations
Captation réalisée par le webmedia culturel breton KuB.
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