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Vous est-il déjà arrivé de regarder un vol d'étourneaux et de trouver ça magique ? Ou alors de vous émerveiller devant un rapace planant au dessus de votre tête, d'une aurore boréale, d'un arc en ciel, d'une étoile filante… ? Et là paf une tête d'ampoule se ramène et vous donne l'explication scientifique de tous ces phénomènes. Loin d'être reconnaissant vous avez juste envie de la baffer façon Obélix pour avoir gâcher la magie et la poésie du moment. Donc quand un scientifique, astrophysicien qui plus est, invoque l'idée de redonner à la science la charge poétique qui lui manque, notamment afin de repenser le problème de la catastrophe écologique je suis tellement étonnée qu'il me faut lire cet essai !

Et j'ai bien fait ! Malgré quelques termes scientifiques et philosophiques un peu retors j'ai été agréablement surprise pas cette plume facile à lire et très compréhensible. Mais surtout j'ai été surprise des propos de l'auteur qui vont à l'encontre de ce que la plupart des scientifiques prônent. Il avance l'idée que toute avancée scientifique n'est pas forcément salutaire et que faire une chose juste parce qu'elle est faisable et/ou que c'est une prouesse technique est loin d'être un objectif noble. Il soulève également une question qui me semble centrale : Une découverte ne serait intéressante que si elle a un intérêt industriel ou marchand ? On en vient au coeur du problème : la science est désormais au service du monde économique. Telle qu'elle est pratiquée en occident elle manque d'âme, d'affect, en témoigne la banalité avec laquelle sont maltraités les animaux de laboratoire. (Je passe rapidement sur ce sujet sinon je vais m'énerver.)

Cette course en avant a fait de nous des êtres technodépendants et disons le de plus en plus pathétiques. Nous sommes dépendants d'une technologie qui n'est pas indispensable à notre survie et pire, qui hypothèque la survie de notre espèce et de toutes les autres espèces.

Dans la problématique actuelle liée au développement durable ce qui est demandé à la science c'est de nous permettre de continuer tel que nous le faisons plus longtemps. Produire une énergie propre pour nous permettre de poursuivre toutes nos activités industrielles, économiques, financières qui détruisent notre habitat. La fuite en avant énergivore montre que l'Homme ne se pose pas les bonnes questions et la science se retrouve otage de cela. « Le problème est moins la propreté de l'énergie que ce à quoi elle est destinée ».

Pour l'auteur, la science ne sauvera pas le monde en trouvant comment réduire les émissions de CO2 mais en proposant un autre chemin. Selon lui, notre science a besoin de philosophie, de poésie pour ne pas devenir quelque chose d'impérial et incontestable réduit à la technique et déshumanisée. le développement des avancés scientifiques ne doit pas nous échapper. La science ne peut plus continuer à être complice de l'artificialisation de notre monde et doit reconquérir son humanité, sa poésie, c'est à dire savoir faire corps avec le monde et pouvoir encore s'étonner devant celui ci.

Venons en au fait, qu'est ce donc que l'hypothèse K me direz vous ? Et bien c'est une vision de la catastrophe écologique qui nous menace et des propositions pour y faire face que je vous laisse découvrir. Et pourquoi ce nom ? Pour deux raisons : l'une scientifique, l'autre littéraire dont la démonstration est très intéressante. Mais il faudra lire pour en savoir plus.

J'ai dévoré cet essai audacieux et courageux entre science et littérature. Je me suis complètement retrouvée dans un grand nombre des idées exposées. Sur la question environnementale j'ai souvent l'impression que la vie même est sacrifiée sur l'autel de l'économie et du high tech et que faire du covoiturage ou cultiver ses carottes ne va pas changer grand-chose. J'ai la désagréable impression que l'avenir de notre planète est entre les mains de technocrates issus de grandes écoles qui ne savent plus ce qu'est la vraie vie : le chant d'un oiseau, l'ombre d'un arbre, le vent iodé porteur de promesses, la sensation de l'herbe sous les pieds nus et non pas un écran de PC, une grosse bagnole qui va vite ou le dernier tour appris par une IA. Alors voir ce cri du coeur porté par un homme de science ça fait du bien au moral même si reste à savoir s'il sera juste un tout petit peu entendu et écouté.
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Alors il faut vraiment s'accrocher au pinceau.

Personne ne déteste Aurélien Barreau. Lorsqu'on l'évoque, le plus souvent les gens réagissent par un "Je l'aime bien" qui fait référence à son look et à sa posture cool. J'ai suivi (enfin, façon de parler) quelques conférences d'astrophysique postées sur You-tube par celui qui intervient à l'université de Grenoble. Des conférences genre "pour débutant", sur les particules élémentaires je crois. Mais très vite, j'ai décroché. le moins qu'on puisse dire, c'est que j'ai trouvé cela ardu et pourtant j'avais quelques bases…

Le livre, je préfère le dire tout de suite, est à l'avenant. Mais, si on le décode un peu et qu'on va à l'essentiel, il nous délivre un message…révolutionnaire !

"Michel-Ange exténué, j'ai taillé dans la vie
Mais la beauté, Seigneur, toujours je l'ai servie."
Jean-Genet nous met d'emblée au parfum .

Aurélien Barreau grâce à une exergue et une introduction nous prie de bien vouloir l'excuser par avance : il ne cherche d'aucune manière à donner des leçons et encore moins à cracher dans la soupe. Penser, c'est toujours contre soi. Voilà qui est clair.

Puis très vite, il fait un certain nombre de constats dont tout le reste va découler.
Nous vivons une catastrophe civilisationnelle, un effondrement de la vie et une perte de sens. le premier étant, en partie, une conséquence de la seconde.
Ce petit essai ne propose donc, selon lui, qu'un "renouveau poétique et ontologique". Soit une redéfinition du réel. En porosité à l'inouï. En invite à l'extraire…

Le premier chapitre s'intitule : "Bien sûr, bien sûr…"
Il rappelle l'évidence de l'anéantissement biologique global, de l'avénement de la sixième extinction de masse : un tiers des insectes, des mammifères sauvages et des arbres ont disparus. Aucun retour en arrière n'est possible. Il ne s'agit pas seulement du réchauffement climatique mais aussi de la pollution, des forêts rasées ou brûlées , d'un taux d'extinction des espèces sans doute plus de mille fois supérieur à la normale, de millions de tonnes de déchets produits chaque jour.
L'eau de pluie est impropre à la consommation et toute l'Europe est contaminée aux "polluants éternels". Les centaines de milliers de réfugiés climatiques attendus ne sont guère compatibles avec un monde sans guerre ni génocide ou dictatures.
Le cas de l'effondrement de la vie sur terre est aussi incontestable que…la rotondité de la planète. Et la célérité de cette extinction dépasse nos pires anticipations .
À partir de ce constat sans appel, Aurélien identifie les responsables : les techno-sciences au service du productivisme, nous propose de changer radicalement d'ontologie et nous fait quelques propositions. C'est donc l'objet des chapitres suivants.
"Et pourtant"
Ce chapitre est important car il fonde le principe de décroissance porté par AR
La science a fait beaucoup plus de mal que de bien. Je cite :
"La science est souveraine en sa capacité à remanier ses propres construits, mais elle est absolument étrangère à toute revisitation substantielle de la méta-architecture"
Suit un réquisitoire implacable sur les méfaits de toutes les technologies qui ont provoqué un extraordinaire effondrement de notre "puissance d'être", une véritable réification consentie. Je cite à nouveau:
"Lire un texte écrit par une intelligence artificielle revient à faire l'amour avec une poupée gonflable"
La référence au réel s'est perdue dans une double déréférentialisation (perte du lien au monde et à l'auteur). Nous effaçons toute altérité. Il faut "convoquer ce carcan axiologique et ontologique".
Tout, ou à peu prés est à figer, pour arrêter la destruction systématique du vivant. AB ne veut pas d'une société technocratique sans visée et sans désir, sans intention et sans projet, vouée à peaufiner les fonctions qui ignorent leurs raisons.

"L'évident"
C'est le chapitre le plus rigolo du livre puisqu'il s'adresse surtout aux chercheurs.
Plus de viande à la cantine, rénovation énergétique des locaux, arrêter les colloques à l'étranger, arrêter de publier pour publier, se débarrasser du fantasme théandrique, ne plus admirer les spationautes, esquiver Twitter et Rihanna(!), faire une césure dans l'élan extracteur et arrêter de se voiler la face: la recherche n'est pas un geste irréfragalement bienfaisant: regardez le coût du futur méga-accélateur de particules qui ne servira pas à grand chose !
"La science peut bien éclairer le monde mais elle laisse la nuit dans les coeurs" proposait Durkheim cité par AB

Pour ne pas alourdir cette chronique, je vais rassembler les chapitres suivants ."L'important", "L'exemple", L'hypothèse K" se confondent facilement :
La science est un outil redoutable au service des puissantes dominantes, elle est investit d'un caractère religieux mais c'est une trans immanence échouée.
Il faut donc TRAHIRE, trahir l'origine, l'attendu, l'inertie, l'identique des thèmes institués pour réhabiliter une dynamique de l'errance.
Il s'agit de poétiser la science pour la refonder, déplacer nos expectatives, apprendre à aimer l'onto-poéto-logie oubliée ou effacée.
AB convoque Baptiste Morizot pour prouver qu'une science peut exister qui saurait subvertir les réponses en promesses hétèrotopiques, les accueillir en surprises uchroniques…
Il convoque aussi Freud, Valéry, Bergson, Anders, Deleuze, Wittgenstein, Bruno Latour et Jacques Ellul. Il s'agit de militer pour une science oblique, irrévérencieuse et incongrue, qui risque l'inconnue, polysémiquement juste.
Une science nomade, touareg ou tzigane, un espace ensemencé d'étonnement.
"Hanter poétiquement la science pour libérer son extraordinaire puissance d'insoumission"
Et de réhabiliter Alexander Grothendiek dans son ascèse de roi tragique des mathématiques.

Alors, alors pourquoi Hypothèse K.
K c'est le cancer, la science étant aujourd'hui ontologiquement métastatique.
K c'est Kafka
L'Hypothése K c'est "la prolifération technométastatique du cancer numéromachinique porté par un hôte-humain hébété et engourdi mais déjà symptomatique"

Il faut donc habiter poétiquement le monde. Concrètement, que cela signifie-t-il ?
AB est formel : "Rien, parce que précisément ça n'ambitionne rien "

Voilà, voilà, je vous avais un peu prévenu et j'ai beaucoup traduit, en tout cas, je l'espère.


Aurélien Barreau, aussi compliqué soit-il à lire, est absolument incontournable car il nous annonce "une expectative assumée d'une révolution du sens, d'une révolution du signe ."

Arrêtons-nous de consommer, de produire ! Faisons tous ensemble un grand Haïku à la gloire de la décroissance et à l'avenir de nos petits-enfants !! Ré-écoutons le chant des oiseaux, marchons pied-nu dans l'herbe.
Rêvons avant qu'il ne soit trop tard.
Rêvons, les ami(e)s.
Rêvons...


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Dans un coin de mon cerveau, un gros type tempête. Des cendres dans la barbe, une chemise pas très nette sur un ventre pas très plat, il s'insurge : « Mais enfin, on ne peut pas dissocier la science de la société qui l'a produite. En parler comme d'un absolu hors sol, juste récupéré après coup par une politique technophile et progressiste jusqu'au suicide, c'est un non sens ! »

La Science, statuaire de marbre blanc au drapé découvrant un sein rond et plein s'hydrate les cuticules dans le fond de la pièce. « Rêve de pierre, je suis neutre, incorruptible et vierge de toute pensée », geint-elle doucement.
- Ben voyons ! La pénicilline, l'invention de la roue et celle de l'écriture, c'était pour le geste peut-être ?
- Mais-euh ! C'est pas ça qu'il dit, Aurélien, d'abord. C'est pas parce que ça a été aussitôt récupéré à des fins utilitaristes que je n'étais pas toute entière contenue dans la beauté gratuite de ce que ces découvertes révélaient du monde.
- C'est cela, oui. Admettons si tu veux. Mais ça ne fait pas de toi une émanation ex nihilo, quelque chose qui échappe aux tensions sociales, aux conditions de production historico économiques dans lesquelles on barbote tous. Un concept étanche a priori. La superstructure, punaise ! La superstructure, c'est pas pour les chiens !

Fier de sa tirade, le gros type n'a que le temps de tirer sentencieusement quelques bouffées de son cigare que débarque un énergumène, l'oeil frétillant, camé jusqu'à l'os, le genou tressautant au rythme de ses paroles hachées et grasseyantes tout à la fois. C'est Voltaire : « N'a-t-on pas assez lutté contre les superstitions, l'obscurantisme religieux, n'ai-je pas assez trempé ma plume dans mon sang et dans mes larmes pour qu'advienne ce monde de transparence et de vérité univoque ? Ah, voir un tel idéal réduit par ce fat chevelu, c'est Kant qu'on assassine ! »
- Oh, toi, le négrier libéral, ta gueule !

Ca envoie dans mon ciboulot depuis que j'ai lu l'hypothèse K !

Au début, je n'étais que révérence. le type, tout de même, ce n'est pas n'importe qui. Un super scientifique, super calé en plein de trucs dont l'objet même m'échappe complètement. Versé dans des théories visant à la décroissance, dénonçant l'inertie et le cynisme des décideurs face aux multiples catastrophes écologiques qui nous menacent. Arguant que seule la poésie pourra nous sauver. J'étais déjà conquise. Un style flamboyant qui envoie des métaphores comme d'autres des tonnes de CO2, dans un foisonnement débordant, éthylique peut-être. Mais charmant. Je n'étais qu'amour et enthousiasme.

Le constat est sans appel, je ne vous le refais pas. Ca craint du boudin sur tous les fronts, on ne fait rien, on en rajoute même avec des promesses technicistes. Nous sommes d'une idiotie abyssale quand nous songeons à produire une énergie même propre alors que, propre ou pas, c'est cette énergie qui nous permet de continuer à étendre le champ de nos destructions, à accélérer la fin rapide et inéluctable de toute existence (dont humaine) sur cette terre. Comme si on était très fiers de produire des bombes H qui soient écologiquement conçues et biodégradables. L'image m'a bien plu. Ce qu'on est cons, quand même !

Donc, le constat, on est raccord Aurélien et moi. La cause : considérer que les sciences exactes contiennent l'intégralité du monde et des façons de le concevoir. Laisser aux sciences des décisions qui ne relèvent pas d'elles mais d'une réflexion philosophique, éthique, poétique, autre quoi. Bien, là aussi, j'adhère.

Un peu moins à l'idée que la science puisse être décorrélée des fonctionnements de nos sociétés. D'où la saynète que je vous ai livrée plus haut. Aurélien Barrau semble s'étonner qu'elle suive « les mêmes schèmes d'évaluation, de financement, de publicisation, de concurrence, de surveillance et de communication qu'au sein des entreprises privées ». Bah oui, mon loup. C'est la même chanson partout. La science est sociale, faite du même matériau que toutes les autres créations humaines. Charmant, brillant mais un tantinet candide, le jeune homme, ou c'est moi ?

Et ce n'est pas seulement un passage, il y revient : « User de la science comme d'un simple accessoire d'étaiement et de fortification des présupposés systémiques – l'effondrer dans une pratique de consécration presque despotique – constitue plus qu'une offense à sa beauté et à sa grandeur [vous la voyez la statue de marbre aux jolis nibards ? ndlr] C'est également, et peut-être même surtout, une perfidie ou une forfaiture quant à son histoire elle-même. » Si c'est pas mignon, cette indignation !

Bon, alors je ne suis pas calée du tout en épistémologie mais il me semble que si l'on devait chercher la beauté et la grandeur de la science, son essence en fait, ce ne serait pas du côté de l'histoire mais plus de la philosophie qu'il faudrait aller. Au niveau conceptuel et non diachronique. Chez Spinoza, tiens, par exemple (bah quoi ?). Laquelle philosophie peut prétendre à être une science, au passage. Même pas molle. Juste un moyen méthodique et organisé d'appréhender le réel selon une démarche visant à une forme de systématisme. Mais bon, ce n'est pas l'essentiel et il serait bon que je ne sois pas interminable.

L'autre grande idée qui m'a dérangée, et c'est ennuyeux, c'est celle qu'il propose en solution : le recours à la poésie. A un moment, j'ai cru que ça irait. « La poésie n'intervient pas comme métaphore guillerette mais en tant que dynamique paradigmatique [euh… t'es sûr, Aurélien ? ndrl] d'une connaissance pointue ouverte sur son propre questionné. Une maîtrise souveraine de la langue qui, pourtant s'autorise à chaque phrase l'exercice d'une profonde violence à la grammaire comme à la syntaxe. » Alors, pas exactement. Y a de cela, mais pas que. Tu vois, il faudrait aussi parler du lexique, des connotations, des brouillages entre signifié et signifiant quand c'est justement l'arbitraire du signe qui va chercher un sens inédit. de la connivence avec le lecteur, de la réception. de la plasticité de la langue travaillée par le poète comme le peintre la matière. Des limites fluctuantes entre les mots, le monde, entre les mots qui disent le monde et ceux qui le sont. de l'énonciation qui leur permet d'advenir mais s'efface pourtant. Ou pas. Donc bon, tu n'y es pas exactement mais je vois ce que tu veux dire et c'est une belle idée. Allons-y ! Mettons de la poésie au coeur des processus scientifique ! Ca fera un peu d'air !

Sauf que. La poésie, là, comme ça, tu la fais reposer sur quoi ? A part cet extrait que je viens de recopier, Aurélien, tu ne parles jamais du langage. Ce qui est tout de même un peu problématique. Dans cet essai, pas bornée, j'ai cherché des références à la matérialité des sons si on ne veut pas aller sur la poésie au sens classique du terme, à l'inconscient, au symbolique, au religieux même, à quoi que ce soit en fait qui remplisse d'horizons ce vide que tu laisses derrière le mot « poésie ». Rien, que pouic !

Surgit de ma cervelle surchauffée et indignée une silhouette longiligne intégralement moulée dans une combinaison en peau de serpent. Après avoir jeté un regard de braise par-dessous ses longs cheveux noir corbeau, Silvia Lippi invite, d'une voix rendue rauque par le désir et les gauldo bleues sans filtre : « Come one, Aurélien, tu vas voir, on va te l'investir ton champ poétique, avec les frangines ! du contenu, tu vas en déborder, mon coco, du dense et de l'attente, de l'haletant et du pulsionnel, Là quand ! tu veux ? »

Bien, bien, bien… Ca s'arrange pas là haut !

En fait, comme pour la science, Aurélien Barrau fait de la poésie un hors-sol, même pas un concept mais une étiquette qui doit fournir une tangente. Il parle d'ontologie, mais ne la définit pas. Comme, au moment d'exposer ce qu'est sa vision de l'hypothèse K, il glisse le mot « téléologique », je crois comprendre qu'il s'inscrit tout de même dans une représentation du monde qui s'oriente vers une fin. Non seulement je ne suis pas d'accord, non seulement cette représentation est terriblement ethnocentrée et datée (cf les travaux de Philippe Descola et d'Emilie Hache) mais en plus, Aurélien Barrau n'est même pas conscient du cadre très limité dans lequel il s'inscrit.

Un propos qui ne s'historicise pas et qui ne s'ancre dans aucun référentiel idéologique, systémique ou symbolique, c'est pour moi, aussi louable et sympathique soient la démarche et le garçon, un propos qui ne tient pas. Il aura le mérite de faire parler, d'accompagner la prise de conscience et de produire, à sa suite, contre lui peut-être, d'autres discours. Espérons-les un peu plus enracinés.
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La science, c'est bien, mais...
Ce serait résumer lapidairement un essai brillant, trop peut-être, à la fois aguichant et déroutant. L'auteur, "hyper" intelligent, applique à la lettre son idée d'habiter poétiquement le monde et donc de réinjecter une bonne dose de fantaisie à une discipline qui a perdu de sa puissance révolutionnaire en se soumettant aux puissances dominantes, engluée dans une civilisation techno-logique, destructrice du vivant, humain, minéral et végétal .
Aurélien Barrau déplore le renoncement de la science à penser son sens et ses finalités, qui permettrait d'éviter une catastrophe civilisationnelle dont les scientifiques, essentiellement rationnels et mono-orientés, font le lit. D'où l'injonction à construire une chaopoétique du réel, à susciter des ruptures intellectuelles.
Le gaillard aligne les néologismes à satiété, me perd dès qu'il dévide son propos en suivant les circonvolutions fulgurantes de sa réflexion émises dans un style tarabiscoté ; il m'enthousiasme quand il questionne le projet de construire un grand accélérateur de particules, à la consommation d'énergie démentielle, nécessitant un tunnel souterrain de 90 km de long et l'excavation de 10 millions de mètres cubes de molasse.
"Est-ce digne" ?
Poser la question, c'est y répondre.
Le danger réside dans la dynamique propre d'un emballement insensé de la machine et de la programmation. le techno-cancer gagne en espace.
Je retiens de cette lecture déconcertante, que laisser la science penser pour nous, "relève d'une faute logique autant que d'une faillite politique."
Qu'un scientifique se positionne à rebours de son milieu me réjouit, de même que sa radicalité, dès qu'elle s'exprime détachée de tournures absconses.






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Du Aurélien Barrau pur jus dans le texte, qui déplore une fois de plus notre effondrement civilisationnel et le compare malicieusement à la progression inexorable d'un cancer métastatique inarrêtable avec son hypothèse K. « K » comme Karkinos, du grec ancien désignant le crabe ou « K » comme Kafka. Un essai bien conduit, une réflexion sur la contribution de la science à la marche du monde sous ses aspects négatifs et positifs et la nécessité d'un pas de côté du scientifique par la pratique d'un art (la poésie et Jean Genet en particulier ayant sa préférence!).On se régale de cette prose, parfois alambiquée, mais toujours avec l'emploi du mot juste qui contribue à renforcer l'argumentation de l'auteur.
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Court mais dense ,ainsi pourrait-on qualifier cet essai d'Aurélien Barrau .L'astrophysicien revient sur le sujet qui lui tient à coeur celui de la catastrophe écologique en cours. Il s'attache en particulier au rôle de la science et des scientifiques tant comme cause que comme remède . Dans un constat rigoureux , il montre comment une certaine conception de la science entraîne la prolifération mortifère de la technologie (qu'il compare à un cancer) et un appauvrissement dans notre approche du réel . Les derniers chapitres ,dans lesquels il envisage une science rendue à son rôle subversif et poétique, sont à la fois stimulants par leur originalité mais aussi parfois un peu obscurs (pour moi ,lecteur lambda) par abus d'un langage frôlant la préciosité. Une lecture à conseiller toutefois en nos temps où l'intelligence devient une denrée rare.
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Comment la science participe à, voire accélère l'effondrement de notre civilisation, voire du vivant en général, en s'arrimant aux destin du système capitaliste ultra-dominant, en oubliant les valeurs de remise en cause des hypothèses, et en ayant perdu sa poésie. C'est la thèse de ce livre dont la première partie laisse KO au point de m'avoir fait hésiter à continuer.
Il est malheureusement des vérités que l'on n'a pas forcément envie d'entendre mais fallait-il un discours aussi noir, pessimiste et déprimant !?
Le dernier tiers, à partir du chapitre "l'exemple" renoue avec une pensée positive et malgré la désagréable impression qu'on aura du mal à changer de direction, nous laisse un peu d'espoir.
L'écriture est assez emphatique, compliquée par l'emploi de mots, adjectifs (souvent inventés) qui n'ajoutent pas vraiment de sens au texte, et c'est un peu dommage.
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Il semble qu'Aurélien Barrau soit désormais moins connu comme astrophysicien (ce fut son métier initial) que comme philosophe très engagé en faveur de l'écologie. Lui qui est scientifique, il s'interroge dans ce nouveau livre sur la science. Selon lui, celle-ci n'est pas neutre dans le processus qui conduit inexorablement la Terre à sa perte. Elle contribue à cautionner, voire à accélérer la catastrophe annoncée. Cette thèse est discutée d'une manière globale, mais aussi individuelle (au niveau de la déontologie personnelle du chercheur). A noter que l'auteur insiste sur le fait qu'on ne devrait pas se focaliser uniquement sur le réchauffement climatique, car il est aussi accompagné de problèmes très graves, comme l'extinction massive de la biodiversité par exemple.
Vers la fin, Aurélien Barrau tente une comparaison. Considérant l'actuelle prolifération technico-scientifique non maîtrisée et inconditionnellement productiviste, il fait le rapprochement avec le cancer [en grec karkinos = crabe, d'où l'initiale K qui apparait dans le titre du livre]. Cette maladie peut être soignée, avec plus ou moins de succès, mais la meilleure approche n'est autre que la prévention. C'est donc une prévention rigoureuse qui devrait s'imposer aussi dans la gestion de notre planète… mais ce n'est vraiment pas le cas.
L'écriture d'Aurélien Barrau n'est pas toujours agréable, car elle est à la fois nerveuse et ampoulée. J'avouerai que le personnage - presque fanatique - ne me semble pas très sympathique, même si je lui donne largement raison sur le fond.

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Aurélien Barrau signe un livre dont la forme délibérément absconse peine à masquer une pensée qui aurait pu tenir en une double page.
On appréciera de découvrir ou re-découvrir certains mots, comme autant de légumes oubliés. Mais quel dommage d'en faire un plat aussi indigeste que peu nourrissant.
J'ai vainement recherché dans cette lecture l'intervenant que j'ai entendu avec tant de plaisir il y a quelques années à l'université d'été du MEDEF pour n'y trouver que fatuité. La baudruche s'est totalement dégonflée sous mes yeux à la lecture du chapitre sur la mécanique quantique, probablement le seul cas à ne pas prendre pour illustrer son propos tant il se prête naturellement à un exercice que l'auteur aura mis, lui, 150 pages à introduire. C'est donc avec tristesses et satisfaction que l'on parvient au bout de cet essai. Tristesse de constater que la baudruche reste flasque et inerte, même à l'issue d'un dernier chapitre qui a pourtant donné son titre à l'ouvrage, mais satisfaction de pouvoir enfin passer à une lecture moins indigeste et plus féconde.
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Je sympathise sur le fond avec les idées développées ici par Aurélien Barrau, la nécessité d'une remise en question profonde de nos façons de faire de la science et plus largement de voir le monde, sur fond de crise écologique majeure.
Mais quel ton pompeux ! Monsieur Barrau a l'air de prendre très au sérieux son rôle de penseur. Il nous dit en beaucoup de pages et de belles phrases qui en jettent ce qui aurait pu être dit en quelques paragraphes. Je me suis sentie bien bête face à tant de références et de tournures savantes. Et je ne suis pas sûre d'avoir appris grand chose.
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