e narrateur, romancier marié et père de famille, reçoit une lettre d'un correspondant perdu de vue depuis tente ans, depuis cet hiver à Paris en 1984.
A l'époque, bac en poche et décidé à quitter le cocon familial, cocon bien mince au demeurant, intéressé par la littérature, il tente sa chance pour une inscription en hypokhâgne dans un grand lycée parisien où il est admis à sa grande surprise.
L'atmosphère de la prépa est sévère ; les notes de fin du premier trimestre font la consternation des parents d'élèves, habitués à de brillants bulletins et qui ne se consolent qu'en consultant les notes de la moyenne de la classe. Notre héros supporte l''intensité du travail, mais il se retrouve bien seul, sans amis, partagé entre le lycée, sa chambre d'étudiant et les trajets depuis Saint Lazare quand il se rend de l'une à l'autre.
Admis douzième parmi les douze élus appelés à passer en seconde année, il hésite encore et est tenté de retourner à, Blois où un camarade lui propose une colocation. Il revient cependant à Paris et remarque un camarade d'hypo qu'il se propose d'inviter à son anniversaire.
Le drame se joue quand ce camarade, Mathieu Lestaing ne peut supporter les sarcasmes de la note minable (0,5/20) infligée par son prof de français et se jette du cinquième étage. le narrateur, de la classe voisine, a perçu le geste fatal, se précipite, et est le premier à approcher le corps.
Ce suicide bouleverse son existence, non qu'il ait noué une amitié avec la victime, mais parce qu'il devient, sans l'avoir voulu, LE témoin, celui dont on pense qu'il tient les causes du drame et qu'on veut connaître. Tout le monde veut l'approcher, chacun se dévoile, et par un jeu de miroir, nous renvoie son image. Paradoxalement, cette tragédie le fait exister. Nous sommes même autorisés à connaître son prénom, Victor. Il est vrai que nous sommes à la page 183.
A travers les relations qui se nouent avec le corps enseignants, ses camarades garçons et filles, et les parents de la victime, nous pénétrons dans l'univers des classes prépa. Nous percevons aussi les relations parents-élèves qui sont parfois difficiles à ce moment du passage de l'adolescence à l'âge adulte.
L'intrigue se concentre sur les contacts entre Victor et Patrick Lestaing, le père de son camarade suicidé, qui cherche à comprendre et projette l'image de son fils dans la personne de Victor. Il devient envahissant mais Victor est une victime consentante. C'est l'entourage qui perçoit le caractère malsain de cette liaison et qui met Victor en garde. Il parvient à se libérer du caractère obsessionnel de cette relation et finit par quitter le lycée pour se lancer, depuis Blois, dans une carrière d'écrivain.
La lettre qu'il reçoit dans le premier chapitre témoigne que les deux protagonistes ont survécu.
Cet ouvrage se lit facilement et, d'un style léger, fait bien revivre cette période charnière des classes prépa qui marquent pour chacun le début d'une nouvelle existence.
Jean-Philippe Blondel n'y aurait-t-il pas passé quelque temps ?