Les forêts sauvages qui se rapprochent le plus de ce que les forêts primitives d’antan ont pu être en Europe nous éveillent à cette prise de conscience paradoxale :
La forêt sans l’homme
réveille l’humain intérieur.
Les forêts inexploitées offrent un voyage à rebours. Tout comme le saumon revenant de l’océan vers la source pour réengendrer son espèce, le visiteur des forêts naturelles a quitté les masses humaines pour tenter de redécouvrir en forêt sa dimension intérieure d’humain inconditionné dont le privent les relations tout en miroir de notre société. En outre, il a tôt fait de s’apercevoir que seul l’inconditionné dans l’homme contient plus grand que lui. (…)
Plus un progrès va vers le hors-sol comme le fait la ramure d’un arbre, plus la société a besoin de s’enraciner en profondeur comme le fait un arbre qui s’élève. Cela donne à comprendre en quoi un citadin contemporain avisé a légitimité de demander une nature plus radicalement primitive que ses aïeux ruraux qui, vivant plus près du sol avaient moins besoin de profondeur dans l’enracinement.
(Deuxième partie : La forêt révèle l’homme – Un basculement de conscience… Le premier postulat, p. 68-69)
Se réenraciner ou se ressourcer ?
On ne peut vraiment s’enraciner que dans les paysages
délivrant du temps organique plus long que la vie humaine.
Il s’agit de forêts matures ou de paysages avec des arbres
pluriséculaires. (…)
L’acte de réenracinement est bien plus profond et radical que le ressourcement. Le ressourcement inscrit notre ouverture aux lieux sur le mode passager. Le réenracinement nous approfondit dans la durée. Il signe un non-retour avec notre sous-vivance quotidienne. (…)
Moins vivre la nature pour le ressourcement qu’elle nous procure et nous interroger en quoi nous sommes Source en compatibilité avec elle.
(Deuxième partie : La forêt révèle l’homme – Le sentiment d’intemporalité comme déclencheur d’éveil, p. 136-138)