AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,88

sur 287 notes
5
18 avis
4
18 avis
3
1 avis
2
1 avis
1
0 avis
Mickaël Boulgakov, auteur de romans, de nouvelles, de livrets d'opéra et de pièces de théâtre, persécuté par Staline et censuré, ayant connu les affres de la création et la difficile relation avec le pouvoir, ne pouvait qu'être le seul à rendre un si vibrant hommage à Molière. Certes un temps le protégé du roi Louis XIV, Molière connut aussi la censure et les rebuffades que son impétuosité et sa liberté de penser provoquaient. Boulgakov nous montre ici un Molière que les délicates relations avec la cour et ses sbires, les amours malheureuses, le travail acharné, les nuits blanches, la dépression puis la maladie ont fini par faire sombrer. le dernier acte de la vie de Molière est écrit par Boulgakov d'une façon extrêmement belle et tragique, très cinématographique ; ainsi, nous le voyons le regard perdu, sa femme infidèle enfin touchée, les valets courant en tout sens pour essayer en vain de trouver un médecin, la mort qui s'approche inexorablement et enfin le cortège funèbre, improvisé par ses quelques amis fidèles admirateurs (dont La Fontaine, le peintre Mignard ou encore Boileau) pour l'emmener en terre , cheminer le soir tombé, flambeaux à la main, sous le regard désabusé de quelques badauds qui ne savent pas alors quel génie disparait.
Ne vous attendez pas, en ouvrant ce livre, à une biographie linéaire , il est surtout là question de la création et de ses doutes. Cela donne envie de relire Molière et , pour ma part, de découvrir Boulgakov.
Commenter  J’apprécie          122
Boulgakov a pour coutume d'alterner oeuvres d'inspiration réaliste (la Garde Blanche, Récits d'un jeune médecin) et récits où le fantastique domine largement (le Maître et Marguerite, Coeur de chien, Endiablade). le roman de monsieur de Molière appartient à la première veine.


Ce roman est sans doute unique chez Boulgakov en ce sens qu'il s'éloigne radicalement de ses sources d'inspiration habituelles, à savoir la société soviétique, sa propre vie (son expérience de médecin notamment) ainsi que le fantastique ou la science-fiction. Les liens avec ces thèmes ne sont perceptibles que de manière indirecte, à savoir la passion de Boulgakov pour le théâtre ainsi qu'un possible écho de ses relations avec Staline.


Les premières pages du roman sont d'une vivacité étonnante et d'emblée captivante, par le saisissant contraste qu'elles établissent entre la naissance d'un enfant encore inconnu et la conséquence que celle-ci aura sur la littérature mondiale, y compris russe (Boulgakov enfile un chapelet de dramaturges russes redevables à Molière: Gogol, Griboiédov, Tchékhov...)


L'on assiste en direct aux prémisses, puis à l'éclosion d'une vocation, favorisée par le grand-père maternel, Cressé...Bien entendu, l'on connaîtra les tribulations plus ou moins classiques que vit tout artiste débutant: de longues années de vaches maigres avant le succès.


Trois grands motifs se dégagent du roman: la nature de la vocation littéraire, le lien entre la vie de l'artiste et son oeuvre, les relations de l'artiste avec le pouvoir politique.
Le portrait de Molière dressé par Boulgakov accrédite l'idée que chaque artiste, aussi génial soit-il, ne saurait aller au-delà des dons qui lui sont en quelque sorte accordés de naissance. Cela est illustré par l'inaptitude de Molière à la tragédie, confirmant que son génie ne s'exprime pleinement que dans la comédie.

Quant à la relation existante entre la vie de l'artiste et son oeuvre, Boulgakov casse ici un mythe (du moins en ce qui concerne Molière), à savoir l'idée que les auteurs d'avant le romantisme au sens large, c'est à dire d'avant la seconde moitié du 18ème siècle, ne s'inspiraient que peu de leur propre vie, ne le faisant que de leurs prédécesseurs de l'Antiquité grecque ou latine (Racine en est l'exemple achevé). Certes Molière tirait parti des ressources léguées des Romains (Amphitryon en est l'illustration), mais Boulgakov établit que plus d'une fois, il est possible de relier des évènements de sa vie à ses pièces (une pièce comme l'Ecole des Femmes est un écho de sa vie conjugale passablement orageuse).


Le thème de la relation entre l'artiste et le pouvoir est sans doute celui qui a appelé le plus de commentaires, aussi ai-je choisi de le traiter en dernier.


Selon certains exégètes, il faudrait voir dans la relation entre Molière et Louis XIV une décalque de la relation entre Boulgakov et Staline. Pour ma part, sans la nier totalement, cette thèse présente des limites à plusieurs titres:
-Louis XIV, tout monarque absolu qu'il ait été, ne saurait être assimilé au dirigeant d'un régime totalitaire que fut Staline. Je ne dis pas cela par royalisme ou quelque prétexte fallacieuse de ce tonneau-là: je le dis parce que c'est historiquement inexact, ne serait ce qu'en comparant la manière dont la répression s'exerçait envers les opposants au régime (Fouquet et les protestants ont été emprisonnés ou exilés, et non exécutés en masse).


-Le soutien de Louis XIV à Molière apparaît constante, et ce y compris lorsqu'il fut question de lui accorder une sépulture chrétienne (la manière dont le Roi-Soleil a négocié cela avec l'Eglise est un chef d'oeuvre de compromis: puisque la terre consacrée s'étend jusqu'à quatre pieds de profondeur, alors il suggère de creuser un tombeau de cinq pieds). On peut mesurer l'ampleur de la différence entre leur fortune littéraire dans le fait que Molière connut la gloire durant sa vie de dramaturge, soutenu par Louis XIV là où Boulgakov, censuré par Staline ne l'atteignit que de manière posthume.
Staline a certes soutenu Boulgakov et admirait un certain nombre de ses oeuvres, mais il s'agit d'un soutien à minima: s'il lui épargne de manière constante le pire (le goulag voire la mort), il exercera sur la majorité de ses oeuvres une censure qui se pérénnisera jusqu'à sa mort...


Au final, j'aurais davantage tendance à voir dans la relation entre Molière et Louis XIV un reflet de ce que Boulgakov aurait souhaité, plus qu'un reflet de ses relations réelles avec Staline. On peut ainsi tout à fait imaginer qu'en vérité, Boulgakov aurait préféré avoir affaire à un tsar (ses sympathies profondes allaient vers une monarchie constitutionnelle, respectueuse de l'orthodoxie autant que des libertés fondamentales...)


Le débat reste bien entendu ouvert. Pour vous faire votre propre idée, un seul conseil: lisez-le!
Commenter  J’apprécie          110
Dès le titre, le ton est donné. En effet, il ne s'agit pas là d'une simple biographie. Boulgakov, que je ne connaissais pas (honte à moi ! Oui, oh, ça va, je sais bien que c'est celui qui a écrit le Maître et Marguerite.... On ne peut pas avoir tout lu non plus, hein ?! ), met en scène la vie du sieur Molière, la romançant pour le plus grand bonheur des lecteurs qui dévorent ce livre à la vitesse de la lumière. Car s'il s'est basé sur des éléments réels - et je puis vous assurer que j'ai appris des choses - il ne pouvait pas rentrer à un tel point dans la peau et les pensées du personnage. Et pour que ce texte soit fluide, rien de tel que d'ajouter de-ci de-là quelques touches personnelles, fictives. Tiens, mais voilà qui me rappelle quelqu'un que j'aime beaucoup: Jean Teulé. Attention, je ne parle pas du style bien sûr, les deux étant radicalement différents. Mais le procédé est bel et bien le même. de ce fait, je suis allée faire des recherches pour démêler le vrai du faux. Et moi qui croyais connaître Molière.... je me trompais lourdement ! Vous découvrirez la vie de cet homme qui, finalement, s'est toujours battu, ou plutôt débattu, tant dans sa vie privée, avec les soeurs Béjart (et l'accusation d'inceste), que dans sa vie professionnelle, notamment avec les comédiens de l'Hôtel de Bourgogne.

Je vous conseille vivement ce livre qui se lit vraiment très facilement. Il permet également une immersion dans ce monde du XVIIe siècle où pouvoir et culture ne faisaient pas forcément bon ménage.


Lien : http://www.lydiabonnaventure..
Commenter  J’apprécie          110
Découvertes anecdotiques d'un des plus grand destin de son temps et de ces siècles qui lui succédèrent.

De détails en regards pleins de concessions, l'auteur nous ouvre les portes d'un talent plein de surprises et de rebondissements.

A lire pour le simple plaisir d'apprécier la liberté de style et une originalité de style unique.
Commenter  J’apprécie          100
Voici donc la vie de Molière, bigrement romancée par un fabuleux amateur, lui-même fabuliste russe éperdu d'admiration devant le dramaturge français. Si les informations factuelles sont- semblent – exactes, l'ensemble est pris dans le roman d'un véritable personnage de fiction. En effet, les dates, les noms correspondent, mais qu'en est-il réellement ? Boulgakhov s'amuse à inventer ce qu'il n'a pas pu entendre : réunion d'ivrognes (Boileau, Charrette, etc) qui décident d'en finir avec la vie, avant de se rendormir docilement sur les conseils de Jean-Baptiste ; petites discussions entre amis avec le roi ; conciliabules avec Madeleine. L'auteur rapporte aussi les rumeurs contre le dramaturge, dissensions dans la troupe, crée un faux suspense autour d'un faux scandale : le mariage de Molière avec Armande, fille de Madeleine (et peut-être de Molière ?) Mais l'auteur ne croit pas à ces fausses rumeurs et défend bec et ongles pièces moyennes et dramaturge moqué. Il en fait un véritable héros picaresque qui, parti de rien, s'envole vers les sommets de l'art et de la société. Il souligne bien les erreurs et limites de Molière (son jeu de tragédien notamment), mais ce n'est que pour rendre le personnage plus humain, pour que le lecteur s'apitoie ou s'identifie et qu'il s'inquiète finalement de cet aveuglement qui peut conduire à la ruine le célèbre comédien.
Boulgakhov écrit avec élégance, fluidité et légèreté. Quel plaisir de lire une telle biographie ! On s'amuse, on tremble, on rit pour un auteur trop connu qui s'use avec les années d'école. Mais toute cette lassitude s'envole dès les premières pages et fait tenir en haleine le lecteur jusqu'à la fin, presque un happy end. Une vraie découverte !
Commenter  J’apprécie          80
Jean-Baptiste Poquelin, ce nom réveille en vous des souvenirs d'adolescence. Molière, on lit ses pièces au collège, on l'étudie, mais que savons nous réellement de lui? Pas grand chose.

Avec beaucoup d'humour, Boulgakov raconte Molière et dresse le portrait d'un homme passionné par le théâtre, qui a refusé d'être tapissier comme son père, ou avocat après des études, et profondément hypocondriaque (ça vous rappelle quelqu'un?). le roman débute avec la naissance de Molière par une scène vivante et captivante. Les commentaires du narrateur vous feront rire. Molière, voué à être tapissier comme son père, a décidé de devenir comédien et écrire des pièces de théâtre. Quoiqu'il en coûte ! (Il sera souvent fauché et criblé de dettes). Certaines de ses pièces sont largement inspirées de sa vie. Ses aventures amoureuses sont aussi relatées avec une interrogation sur le lien qu'il a avec son épouse… mais pour en savoir plus, il faudra vous plonger dans le roman de monsieur de Molière !
Commenter  J’apprécie          70
Encore un chef d'oeuvre! Que peut-on demander de plus? Vous avez l'histoire de la vie d'un homme qui a boulversé la littérature, symbole universel de la langue française et de la comédie, racontée par un génie de la littérature russe.
A lire d'urgence!
Commenter  J’apprécie          70
Cher Jibé,
J'ai parfois pris la liberté de m'adresser aux personnages des romans que je lisais… aussi je saute sur l'occasion de vous écrire à vous, illustre Molière dont les pièces ont façonné mon amour du théâtre !
A l'occasion d'une publication de Camille je découvrais l'existence de ce texte que Boulgakov, né à Kiev et donc russe puis soviétique (quelle temporalité !) vous consacrait. Aussitôt je me montrais très intéressée et sautais sur Claire en cours de lecture d'un autre récit à votre sujet pour convenir d'une lecture commune de celui qui nous intéresse ici.
Voilà pour le contexte de ma lecture. Sans doute que vous me répondrez qu'on s'en fout. Et vous n'aurez pas complètement tort. Néanmoins, à défaut d'un récit biographique à votre sujet dont il me semble que les éléments concrets d'une véracité incontestable ne sont pas si fréquents, j'ai moi aussi surtout lu la contextualisation de l'écriture de vos pièces.
Quand et pourquoi avez-vous très tôt décidé de tourner le dos à votre mission héréditaire de valet tapissier du roi ? Quand et comment l'art de la tragédie vous a tourné le dos ? Quand et à quelle occasion êtes-vous parvenu à l'écriture des géniales Précieuses ridicules qui vous a valu les premiers signes d'une reconnaissance méritée ?
Toutes ces questions trouvent leur réponse dans le roman de Mikhaïl Boulgakov qui assume néamoins avoir pris quelques libertés. le ton est délicieux, souvent arrogant et fantaisiste. Cela donne un roman vivant et condensé à la prose savante qu'il ne fallait pas lire trop vite au risque de se fatiguer le coeur et l'esprit. le découpage que Claire et moi avons improvisé nous a permis de l'aborder en « trois actes » et ainsi de ressentir pleinement les différentes périodes de votre vie de comédien et d'auteur de théâtre qui, si elles se distinguent grâce aux succès que vous rencontrez, se teintent toutes de l'errance, de l'acharnement, de la loyauté et de la solitude que vous avez éprouvés.
J'ai désormais l'agréable impression de vous connaître, monsieur de Molière.
Et c'est un honneur.

Céline
Commenter  J’apprécie          62
Formidable biographie de Molière !!

J'ai découvert cet ouvrage après avoir lu le célèbre 'Maitre et Marguerite'. On y retrouve l'humour de Boulgakov, conteur passionné de la vie mouvementée de Molière ! Pour les amoureux de théâtre et de littérature... à dévorer !
Commenter  J’apprécie          60
Ce livre est un véritable voyage que l'on entreprend aux côtés de Boulgakov à travers la vie de Molière. Grâce à Boulgakov, on est le témoin de la vie du comédien dramaturge comme si l'on était dans les coulisses d'un théâtre et que Molière jouait sa propre vie sur scène. L'écriture de l'auteur est légère, dynamique, incisive. Molière n'est pas idéalisé, loin s'en faut. Il n'hésite pas à dire que c'était un très mauvais acteur de pièces dramatiques. Mais il montre la grande admiration qu'il a pour cet homme, ce génie de la comédie, qui a pris tous les risques pour faire ce qu'il aimait, le théâtre. C'est un livre excellent, bien écrit et pétillant. On ne s'ennuie jamais et à la fin, j'ai eu énormément de peine au récit de la mort de Molière.
Commenter  J’apprécie          50




Lecteurs (752) Voir plus



Quiz Voir plus

Titres d'oeuvres célèbres à compléter

Ce conte philosophique de Voltaire, paru à Genève en 1759, s'intitule : "Candide ou --------"

L'Ardeur
L'Optimisme

10 questions
1295 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature française , roman , culture générale , théâtre , littérature , livresCréer un quiz sur ce livre

{* *}