Piller, tuer, asservir, réduire à néant des cultures séculaires… les Occidentaux le font sans scrupule dès la découverte du Nouveau Monde. de la fin du XVème siècle jusqu'au milieu du XVIIIème, les Espagnols, en particulier parce qu'ils s'implantent en Amérique, dominent ce marché de la colonisation. Car il s'agit bien d'économie. Les colons veulent s'enrichir, faire du profit ; tout cela est bien sûr approuvé par les plus hautes autorités de l'
Eglise Catholique. Il faut christianiser les indigènes à tout prix !
Avec @La colonisation du savoir, @
Samir Boumediene nous explique comment les colons se sont approprié les plantes médicinales utilisées par les Amérindiens. Ces plantes nous sont familières aujourd'hui, même si pour certaines, il n'en existe plus que des traces sous forme synthétisée.
L'essai de @
Samir Boumediene se lit comme un roman et est très richement illustré, ce qui est agréable, même en format folio. Dans leur soif de conquête, de domination et leur volonté première de faire fortune, les colons sont allés jusqu'à faire croire que les plantes des terres indiennes les avaient attendus ! C'est vraiment incroyable et de plante en plante, nous traversons cette histoire du Nouveau Monde sous un prisme original et intéressant. Qui aurait pensé à l'histoire des plantes ? Ok, ok ! Un botaniste !
Cette histoire nous montre bien que la colonisation se fait toujours aux dépens des peuples vaincus. @
Samir Boumediene nous entraîne à la découverte de ces plantes qui peuvent guérir, droguer ou tuer et nous dit comment elles sont appréhendées par les colons selon les moeurs, la société, la religion des puissances dominantes en Occident. Les colons en font commerce et qui dit commerce dit intermédiaires, passeurs, contrebandiers. Et cela rapporte ! Entre autres, @
Samir Boumediene nous conte – très sérieux et sourcé, @La colonisation du savoir, se lit comme un conte ou une histoire avec suspense – comment le quinquina est arrivé jusqu'à nous, l'écorce du quinquina plus justement, et appelée longtemps dans les cours européennes « la poudre des Jésuites », appellation signifiante. Les Espagnols sont très religieux et l'époque de l'Inquisition marque ou a marqué les esprits. L'écorce de quinquina fait tomber « la fièvre intermittente », la fièvre des poussées de malaria. A ce moment-là, on ne connait pas encore les causes de la maladie.
Descartes, au XVIIème siècle, avec l'homme-machine va ouvrir la porte à la physiologie mais pendant des siècles, la sorcellerie plane ainsi qu'une répression inimaginable. @La colonisation du savoir nous apprend encore beaucoup de choses sur la conquête du Nouveau Monde. Et nous dit, encore une fois, le mépris des colons pour les Indiens, la négation de leurs civilisations précédant cette époque, le refus de l'altérité et fatalement, leur manque d'empathie.
TzvetanTodorov parle du massacre des Indiens comme du « plus grand génocide de l'humanité » (Intro @La conquête de l'Amérique : la Question de l'autre). Et si j'ai choisi le quinquina comme exemple de plante, c'est que, d'une part, la malaria a été amenée dans le Nouveau Monde par les Occidentaux et que d'autre part, @
Samir Boumediene dit à son propos : « La malaria est sans doute la maladie la plus mortelle de l'histoire de l'humanité » (page 196). Comment l'écorce de quinquina est-elle arrivée jusqu'aux Espagnols ? C'est encore un sujet nimbé de mystères.
@La colonisation du savoir de @
Samir Boumediene est un essai à lire. Absolument. Il est aussi passionnant qu'instructif et il est certain que je l'utiliserai avec les étudiants à la rentrée prochaine. Quelle chance ! Merci infiniment, @
Samir Boumediene ! Merci @nicolasbabelio pour cette MC et merci encore mille fois à BABELIO !
PS pour @nicolasbabelio : désolée de cette critique envoyée si tardivement. J'ai eu de gros soucis familiaux mais je voulais néanmoins écrire sur ce livre si intéressant et qui m'a beaucoup apporté.