Deux flics, Beauregard et Howard, un caïd local, Sobchak, Mardiros, le facétieux collecteur de dettes arménien déjà apparu dans Crow, deux millions de dollars disparus, l'assassinat d'un enfant, un flic à la recherche de son petit frère et
Freeman bien entendu. Voilà pour le pitch. Ben oui, je n'en dis pas davantage. Ce ne serait pas sympa.
Freeman est un roman à part des deux précédents,
Hunter et Crow. Il peut à mon sens se lire totalement détaché des deux autres. Mais ce serait se couper de bonnes histoires.
La chronique de
Hunter => https://nigrafolia.fr/2018/05/22/chronique-
hunter-braverman/
La chronique de Crow => https://nigrafolia.fr/2019/03/14/crow-braverman/
Roy/Ian/Patrick continue sa fresque états-unienne et se penche dans une écriture très typée Roman Noir Américain sur le Bayou, La Nouvelle-Orléans dans une approche résolument différente, descriptive.
Aucun doute là-dessus. Ce roman est humide et poisseux. le style n'est pas sans rappeler les opus de
James Lee Burke lorsqu'il met en scène David
Robicheaux.
Freeman, c'est quoi à part un bon moment de lecture ? A dire vrai, c'est à mon sens un bouquin sur les cocktails. L'écriture est enivrante. Rares sont les raconteurs d'histoire qui ont cette capacité à varier d'un style à l'autre, et à maitriser tant le style, cette petite musique des mots que le fond.
Là, il y a fort à dire.
Freeman est une mise en abime des effets de « Big Easy », de la capacité de résilience des survivants et une excellente description de la vie de Nouvelle-Orléans. La disparité de cette ville divisée par couleurs de peau, où à quelques kilomètres, entre les quartiers aisés et ceux défavorisés, l'espérance de vie, la criminalité sont le théâtre de tous les excès. Corruption, trafics, proxénétisme, l'argent et le pouvoir qu'il confère sont présents à chaque page. Pourtant, c'est bien la force de la nature qui transparait. Que cela soit dans le vent ou au milieu des mâchoires d'un alligator, le lecteur est secoué de toutes parts.
Chaque personnage apporte sa pierre pour bâtir une intrigue ciselée. A la lecture, il n'y a finalement que des personnages secondaires extraordinaires. Chacun y va de son aptitude à switcher, à créer des rebonds. La lecture se fait engluée dans un maelström dense. Les seconds couteaux sont visqueux, parfois immoraux mais toujours ajustés à la perfection.
Chaque trilogie a sa fin. Avec
Freeman, elle commence fort et elle finit à l'image de cette Louisiane trouble. Il a fallu à Braverman trois opus pour nous trimbaler dans son Amérique. Elle est musicale et parfumée. Les femmes et les hommes qui peuplent ses états, restent violents, parfois primitifs et sont de temps à autre sauvés par un supplément d'âme. Pourtant, à mes yeux, le personnage le plus cruel, puissant et redoutable, reste bien la Nature. Elle était là avant. Elle sera encore là. Elle est brutale et magnifique. Comme quoi rien n'est jamais perdu.
Editions Hugo Thriller
Roy/Ian/Patrick et tous les autres, sont une seule et même personne. C'est un raconteur d'histoire. Déf : Personne qui raconte, aime raconter.
Il sait être passionnant, divertissant et grave. Surtout, il a la capacité rare, de se muer dans un style d'écriture à chaque nouveau roman. de l'Islande, au Brésil en passant par les steppes Mongoles, Patrick est un auteur attachant qui sait propulser le lecteur dans un monde à part. La réalité devient alors le terrain de jeu de multiples intrigues. Capable de te faire ressentir les odeurs d'un thé salé au beurre rance, la froideur d'une chute d'eau en Alaska ou le climat humide du
Mato Grosso, il n'oublie jamais qu'une bonne histoire doit avant tout donner vie à des personnages auquel le lecteur doit pouvoir s'attacher. A découvrir, si ce n'est déjà fait.
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