Classes figées

La France est de plus en plus scindée en deux, explique Agathe Cagé dans son court essai, "Classes figées". D'un côté, "une minorité resserrée qui ne ressent pas l'impact des crises", et de l'autre une "immense majorité qui n'a plus les moyens d'affronter ces crises".Une France empêchée qui n'a pour seule perspective que la dégradation de sa situation dans un horizon de contraintes sans fins. La peur du déclassement que prophètisait Eric Maurin est advenue. Dans un essai assez simple, Cagé livre sa lecture du déclassement français. Une lecture qui manque parfois de politique, à l'image de sa conclusion bien succincte, mais qui appuie aux bons endroits pour montrer la réalité et la spécificité de notre régression sociale et de l'enfermement qu'il produit, sans plus aucun horizon pour la plupart d'entre nous. La France devient la championne du monde du déterminisme social : il n'y a plus d'ascenseur, il n'y a que des gens enfermés dans des conditions de vies inéluctables et degradées. Les perspectives, les ambitions, les solutions sont dégradées. Pour tous, "l'avenir est plus sombre que le présent". C'est l'impuissance qui domine, "l'impouvoir" qu'il soit d'achat ou d'extraction de sa condition sociale. Avec l'avenir qui rétrécit, c'est la vie qui se fige. Cagé livre une bonne description de la dépression française, celle d'une France desenchantée qui n'a plus les moyens d'agir et qui n'est plus écoutée.