L'oeuf noir et autres contes fantaisistes

« Il ne faut jamais se fier aux apparences. Sous ses airs de respectable patriarche petit bourgeois, que l'on croirait tout droit sorti d'un roman de bonne famille, Luigi Capuana, quoique rattaché au vérisme dont il fut un remarquable théoricien, est l'auteur d'une oeuvre fantastique nourrie du folklore et des superstitions de sa Sicile natale, qui a su transcender les canons du conte de fées, ce qui fait de lui une sorte de Lewis Carroll facétieux, à l'italienne. » (extrait de la postface)

Je suis tombée par hasard sur ce livre. Je ne connaissais pas du tout cet auteur et j'étais curieuse de découvrir ses contes publiés pour la première fois en italien en 1882. L'oeuf noir & autres contes fantaisistes comprend treize contes :

1. Cecina
Un roi, passionné de chasse, répugne à se marier. En repoussant l'infante d'Espagne parce qu'elle est bossue, il risque de le regretter amèrement.

2. Tui, Tiritui, tui
Un paysan et « un roi qui, pour la troisième fois, essayait de rester sept ans sous la pluie et le soleil pour conquérir la main d'une adorable damoiselle »

3. Petit soleil
L'histoire d'une boulangère qui ne cesse de répéter à sa fille Tizzoncino qu'elle deviendra reine.

4. L'oeuf noir
Un coquelet impertinent qui ressuscite sans cesse !

5. Sans-oreilles
Une princesse qui disparaît dans un puits, un loup garou, un poisson. Mélangez tout cela et nous voilà embarqués dans un récit plutôt loufoque.

6. Ranocchino
Un père de famille nombreuse, qui n'arrive plus à nourrir ses enfants, décide à contrecoeur de les vendre. le plus jeune est surnommé Ranocchino (la petite grenouille). Une histoire de grenouille et de princesse !

7. Les trois anneaux
L'histoire d'un père et de ses trois filles à marier.

8. le cheval de bois
Un homme sauvage qui réclame une infante en mariage, une personne de petite taille qui tente de sauver la princesse et un roi qui ne tient pas ses promesses !

9. Des oranges d'or
Un arbre royal qui donne des oranges d'or et un chardonneret capable d'endormir les humains.

10. Serpentine
Une diseuse de bonne aventure prédit à la reine qu'elle accouchera d'un serpent.

11. La pièce trouée
Un bébé volé par un chiffonnier.

12. Tête -de-crapaud
Une princesse à tête de crapaud élevée par une chienne.

13. le conteur d'histoires
« Il n'y a plus de nouvelles histoires, on en a perdu la graine. »

Dans l'ensemble, on se laisse aisément prendre par ces contes. Pour chacun, j'avais envie de connaître la suite. Les récits sont assez fantaisistes (le titre est bien choisi). Tout fini (la plupart du temps) bien dans ces histoires de rois, de princesses, de mages et de fées. J'ai eu une petite préférence pour : Tui, Tiritui, tui et Les trois anneaux (même si ce dernier m'a laissée un peu sur ma faim). J'ai été très intriguée par les péripéties du récit L'oeuf noir mais un peu perplexe sur la chute.

La posface retrace en quelques pages le parcours de l'auteur. C'est une découverte intéressante. Il semblerait que ce livre ait été longtemps laissé de côté : « Il était une fois un pauvre livre qu'une méchante fée avait jeté dans l'oubli, jusqu'au jour de septembre deux mille six où il en fut tiré par le Mage Imprimeur de Lussaud...» Un livre très plaisant à lire.

Le terme « fantaisiste » est absolument bien choisi. Ces contes commencent de manière très traditionnelle. le « il était une fois » est toujours de rigueur, nous avons comme il se doit droit aux couples rois et reines qui cherchent à marier leurs enfants, au roi qui ne souhaite pas se remarier, à l'infante desespérée... Et puis, à chaque fois, ça part en vrille, on tombe dans le non-sens, l'air de rien.
Nous retrouvons avec plaisir la structure du conte, et ces mondes où tout est possible. Et ici, ce petite côté grinçant (mais pourquoi est-il aussi méchant ? ), où l'on se demande aussi comment ça va se terminer, jusqu'où Luigi Capuana va aller dans ses extravagances.
Je n'ose pas en dire plus, si vous aimez les contes à la Lewis Carroll, foncez !

Des contes baroques, et parfois durs, écrits par un Italien de la fin du XIXè siècle. Ces contes n'ont rien à envier à ceux récoltés par les frères Grimm : on y mutile ou projette des infanticides à chaque conte.
La structure habituelle du conte se double de l'envie de faire plaisir aux jeunes enfants (le roi transpercé qui recrache nourriture et vin ingurgités pour le plus grand plaisir des convives, par exemple).
Le recueil se termine sur une mise en abîme : un conteur cherche des contes inédits et, grâce aux fées, raconte... les contes du recueil.
Une retombée en enfance très plaisante.

Des contes originaux racontés avec humour! cependant il est difficile de trouver l'exemplaire... il n'est plus édité. Je suis tombé dessus par hasard dans une bibliothèque!