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EAN : 9782849214428
430 pages
Editions Thot (13/04/2018)
4/5   4 notes
Résumé :
Le 21 janvier 1927, une surprise-party de la haute société nantaise dégénère en bacchanale, déclenchant une « affaire » qui défraya la chronique. Pourquoi cette soirée mondaine bascula-t-elle en orgie demeure un mystère... Jérémie Cavé donne ici sa version des faits : l'irruption d une bande de noceurs séditieux, la déflagration sensorielle du jazz, la désinhibition inspirée par le vin Mariani... Le drame se noue autour de cette soirée scandaleuse et de ses cruelles... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Pour être parfaitement honnête, j'ai choisi ce livre parce qu'il mentionnait la ville de Nantes, à laquelle je suis particulièrement attachée. Je ne suis pourtant pas particulièrement intéressée par les faits divers mais celui-ci ayant provoqué un scandale dans la bourgeoisie nantaise des années 20 a éveillé mon intérêt.

Le livre alterne les chapitres entre Nantes et la Colombie entre Bogotá et le haut Catatumbo, territoire des indiens Barukami. Nous découvrons Nantes à l'époque des faits ayant défrayé la chronique puis la Colombie quelques années plus tard, par le regard de Santiago/Jacques, rescapé du naufrage de la soirée du 21 janvier 1926.

Ce livre de 422 pages est d'une densité exceptionnelle, les informations qu'il délivre sont nombreuses et j'ai craint un moment que Jérémie Cavé ne se perde dans les détails de la petite histoire. Il n'en est rien, tout est intéressant, tout est important, tout est matière à réflexion.

Au fil des pages nous découvrons la vie provinciale des années 20 ; Nantes la grande bourgeoise et son passé négrier, Nantes l'hypocrite bien pensante imbue de sa propre morale mais aussi Nantes l'ouvrière et ses travailleurs misérables, ses gens du peuple qui n'ont peur ni des étrangers ni du "djâse" cette musique diabolique jouée par des "Nègres". Ce peuple qui, faisant une irruption impromptue dans le monde des notables va prouver que la course au pouvoir et à l'argent créé des dommages collatéraux. Comment la haute société nantaise va-t-elle choisir de faire face ? Peut-être en assumant son côté animal à la recherche des plaisirs faciles en complète opposition avec sa morale étriquée. Peut-être en se voilant la face pour sauver sa réputation et en reportant le dommage collatéral sur une personne innocente. Je le sais à présent, et bien que je ne sois nullement surprise, Jérémie Cavé le raconte avec une grande adresse, son texte prenant de plus en plus de force jusqu'à la fin du livre.

En parallèle, nous voyageons en Colombie avec le padre Santiago qui y a trouvé un refuge bienvenu pour expier "sa faute" après cette folle soirée. Réticent au départ devant ce pays dont il ne maîtrise pas la langue, effrayé par ses paysages luxuriants et foisonnants de vie, le père Santiago va finir par aimer ce pays. Il va même le comprendre et l'accepter dans toute sa différence jusqu'à dédier sa vie à la défense des indiens Barukami du haut Catatumbo qui, pour suivre le parallèle avec la surprise-party de Nantes, sont aussi les dommages collatéraux de la soif inaltérable de pouvoir et d'argent de l'Homme et plus précisément de l'Homme Blanc. Cette communauté d'humains représentant la partie dite "développée" de la planète est amoureuse de l'or noir et de la poudre blanche, amoureuse de ses possessions jusqu'à s'approprier les étoiles, amoureuse de pouvoir et d'avoir au point de tout détruire sur son passage, jusqu'à scier la branche sur laquelle l'Humanité tout entière est assise.

Au final, Jérémie Cavé est assurément un écrivain d'avenir et très adroit car, tel l'arbre qui cache la forêt, le fait divers révèle un mal bien plus grand, qui loin d'avoir été soigné par le passage des années et sa prétendue sagesse, ne fait que grossir et s'aggraver au risque d'entraîner dans son sillage l'Humanité tout entière. La Planète n'est pas prête de disparaître, la Vie sur Terre ne s'éteindra pas de sitôt, mais peut-on en dire autant de la Vie Humaine ? Rien n'est moins sûr si nous continuons notre ascension irréfléchie, toujours plus haut, toujours plus grand, car à l'instar d'Icare héros mythologique et héros de ce livre, nous pourrions bien nous brûler les ailes et nous écraser comme les gros mammifères décérébrés que nous sommes en train de devenir.

Jérémie Cavé écrit très bien et avec subtilité alors si vous avez un tant soit peu de curiosité pour la petite histoire de Nantes mais surtout un gros questionnement sur l'avenir de l'Homme et un minimum de confiance dans le talent et la sagesse de la jeune génération, je vous encourage vivement à lire ce livre que je ne regrette pas d'avoir sélectionné.

Un grand Merci à Masse Critique et aux Éditions ThoT
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On pourrait s'attendre au simple récit, romancé, du fait divers qui a défrayé la chronique au début du 20ème siècle à Nantes dont s'est inspiré Jérémie Cavé, il n'en est rien, et heureusement. le sacrilège d'Icare c'est le récit des trajectoires de vie de plusieurs personnages qui vont se croiser. Et principalement 4 personnages : Rodolphe, jeune aristo baignant dans la fête parisienne perpétuelle avec son fidèle ami Icare, Agathe, cousine adolescente de Rodolphe, élevée dans un cadre très strict et religieux et l'oncle Jacques, jeune diacre.

Le roman est rythmé par le récit de 2 histoires en parallèle, 2 histoires distinctes au sens des personnages et de la période. le premier (qu'on pourrait croire le principal), c'est le récit des événements de 1926 et 1927, qui ont conduit à cette nuit « folle » du 21 janvier 1927. le second (que j'estime le plus important après la lecture du roman), c'est la vie de Jacques, après sa fuite de Nantes en janvier 1927, son changement radical de vie pour devenir, au fil des années, missionnaire dans la jungle Colombienne.

Même si on peut être attiré par les histoires qui se cachent derrière les faits divers (et Jérémie Cavé réussi joliment à raconter la chose), par voyeurisme refoulé par exemple 😉, c'est la vision qu'apporte Jacques (l'oncle) sur la société qui donne son caractère à ce roman et qui en fait son intérêt. L'auteur nous fait partager la situation sociale et politique de la Colombie durant le 20ème siècle à travers le récit de ce jeune diacre parti à l'autre bout du monde pour chercher la rédemption. Et c'est à partir de là que Jacques (mais à travers lui l'auteur j'imagine) nous livre ses réflexions sur le monde moderne et les dérives de la consommation de masse sur les populations. Voici un extrait de ces réflexions, inspirantes : « Les gens de sont éloignées des religions, par défiance envers l'Eglise [...] Mais ils ont remplacé la vie de l'âme par un néant ; un néant que ne sauraient hélas combler ni le travail, ni la consommation, ni l'alcool, ni la télévision, ni les drogues. [...] le coeur du problème, il est en soi, à l'intérieur de soi. le problème fondamental de la civilisation occidentale capitaliste, c'est l'intériorité. » S'appuyant sur le Livre de Jérémie de l'Ancien Testament, l'auteur, à travers Jacques, nous livre une réflexion parallèle entre la chute de Jérusalem (souillée par des orgies et des actes païens nous dit le Livre) et ce fameux Icarisme de la société, le développement de la décadence, des actes immoraux, de la liberté sans limite, de la consommation de masse, etc… presque le début d'un essai sur le thème…

Le récit des événements de janvier 1927 n'est que pure fiction mais j'ai découvert, à travers ce récit de Jérémie Cavé, l'existence du vin Mariani. L'auteur en fait en effet le déclencheur des actes immoraux et libidineux qui se sont déroulés ce 21 janvier 1927, ça c'est une supposition ; il n'en reste pas moins vrai que le vin Mariani a fait fureur jusqu'au début du 20ème siècle et, intégrant des éléments de la cocaïne, on peut imaginer ce que peut produire la consommation excessive de ce breuvage…
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Avant toute chose, merci à Masse Critique qui m'a permis de découvrir ce roman assez étonnant.

J'apprécie beaucoup les romans en deux parties, et celui est assez particulier car il compose avec deux périodes, deux contrées, deux histoires tout a fait différentes. Ce n'est qu'au fil du livre que l'on commence à découvrir l'origine familiale de Jacques, et par la suite, la raison de son engagement dans les ordres.

Le style m'a beaucoup fait penser aux grands romans du début du siècle passé, j'avais presque l'impression de lire un "classique". Superbe utilisation des mots, des temps, des séquences narratives.

Nous avons donc d'une part un fait divers qui a fait scandale dans la haute société nantaise, ruinant à tout jamais les espoirs de trois jeunes femmes, de par la rudesse d'un père qui ne veut rien entendre, rien comprendre, ne pensant qu'au"droit chemin" et à sa réputation. Cette partie du récit est émaillée de faits d'époques : la venue du jazz, l'abus de drogues sous couvert de mondanités, une jeunesse qui se cherche, les bandes de zazous ou de jeunes adultes désoeuvrés dont le seul but est le plaisir ou sa recherche.

D'autre part, la chute de la Colombie, rongée par différents cartels, que ce soit la drogue ou les ressources premières, et cette défense dérisoire des indigènes face à ce fléau. de belles personnes, un courage à toute épreuve, et une volonté qui va par delà notre entendement d'Européens.Et cette absence de réaction de l'Église qui m' révoltée, cherchant plus à protéger ses arrières qu'à soutenir sa vocation première !

J'en ai appris plus sur les FARC dans ce livre, et sur cette lutte colombienne, même si je n'approuve pas tout !

Quant au titre, qui parle de l'icarisme, je reste perplexe. d'un côté l'auteur nous le déficit comme la perpétuation d'un mode de vie d'une intensité matérielle insensée qui plonge l'humanité dans une crise écologique, mettant en péril les conditions d'existence future. Et d'autre part, selon Cabet, l'icarisme est le frère aîné du communisme. L'un d'entre vous peut-il m'éclairer ?

Pour ce qui est de l'auteur, je lui tire mon chapeau ! Avoir lancé une campagne de dons sur Linkedin pour faire paraître son roman, il fallait sacrément y croire !
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Voilà un livre qui sort des sentiers battus!
Si l'on est au début quelque peu décontenancé par les deux histoires parallèles, en des lieux et des temps différents (la Colombie dans les années 60 et Nantes dans les années folles) sans lien apparent, l'intrigue se noue peu à peu pour accrocher la curiosité du lecteur : quel peut bien être ce fait fondateur à l'origine de l'exil forcé du prêtre Santiago au fin fond de la Colombie? Pendant ce temps, nous intégrons un bande de joyeux drilles, teufeurs précurseurs des bas fonds nantais, que l'on suit gaiement pour picoler du muscadet dans des troquets et danser dans des caves de jazz jusqu'au petit matin. Rodolphe et Icare sont de la partie, l'un de bonne famille, l'autre âme libre aux mille et une vies. Comment vont-ils faire basculer le quotidien bien rangé des Cournillon et des Ribotin?

Mais l'histoire est un prétexte pour délivrer une critique acerbe des excès de notre société. Ne ménageant ni la chèvre ni le chou, tout le monde en prend pour son grade: la société de consommation, le capitalisme, la bourgeoisie et ses soi-disant bonnes moeurs qui trouvent leur source dans l'esclavagisme, l'église et ses missions d'évangélisation, la surexploitation des ressources naturelles, le patriarcat...

Je me suis laissée happée par cette ambiance d'insouciance d'une époque révolue, savamment contée, et par l'épopée des destins croisés à travers le 20e siècle.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
- [...] Mais... Il me semble que l'orchestre a repris, alors, si vous me permettez, je retourne danser : allons ben à revoir, cher ami !
Le jeune homme éclata d'un rire grave et sonore et le retint par le bras au moment où Rodolphe sortait.
- Mais, ma parole, ne me dis pas que tu es nantais, moussaillon ?
- Nantais ? Si ! Mais comment le savez-vous ?
- Alors, d'une, je ne suis pas si vieux et tu peux me tutoyer. De deux, sache qu'il n'y a qu'un Nantais pour prendre congé en disant : "Allons ben à revoir !" Et de trois, je m'appelle Icare, j'ai grandi dans le quartier de Malakoff et je ne croise jamais un frère breton sans lui payer un verre !
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- Fort bien ! Alors revenons à Louis Podray, si tu le permets. Il commence à envoyer des indiennes - des toiles, hein, pas des femmes... ho ho ho ! - et des mouchoirs via l'Afrique, jusqu'en Martinique. Son correspondant là-bas est Delluc, l'un des plus importants négriers de l'île. Après "le Trésor", il devient consignataire de "la Louisette". Puis, dès 1817, du "Rubis", un vaisseau de trois cent quinze tonneaux et quarante hommes d'équipage ! Il en vient à faire du négoce avec des propriétaires d'"haciendas" à Cuba et au Venezuela. Et ainsi de suite ! Entre 1816 et 1825, plus de deux cents négriers ont été affrétés, dont trente par notre aïeul ! Formidable, n'est-ce pas ?
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Tandis qu'ils dévoraient les batraciens, Pierrot raconta son expérience d'ouvrier spécialisé sur le chantier du paquebot "L'Île-de-France", à Saint-Nazaire. Il avait travaillé onze mois seul devant une machine, à raison de onze heures quotidiennes. Ils étaient des milliers à s'échiner comme lui pour bâtir ce gigantesque navire : deux cent quarante et un mètre de long ! Six ouvriers étaient morts, des dizaines d'autres avaient été mutilés...
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Au cours de la même année(*), des zones d'autodéfense paysanne furent créées : Marquetalia, Rio Chiquito, El Pato et Guayabero. Ces "républiques indépendantes" furent immédiatement exterminées par l'armée, avec l'aide active des États-Unis. S'appuyant sur les rescapés de ces guérillas, le dixième congrès du parti communiste colombien proposa de former un appareil armé révolutionnaire : les "Fuerzas armadas revolucionarias de Colombia" (FARC).

N.D.L. : (*) 1964
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Berita enchaîna en s'en prenant au capitalisme du "peuple de la marchandise", les Blancs, qui détruisaient impunément la forêt, afin de s'emparer de ressources souterraines qui seraient ensuite consommées par des gens à l'autre bout de la planète, sans la moindre retombée bénéfique pour les gens d'ici. C'était profondément absurde !
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