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4,27

sur 3172 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
amuel Akounis se définissant comme "Juif de Salonique, devenu grec par l'exode, français de préférence et metteur en scène parce que lorsque je n'ai plus d'idée, j'invente un personnage", souhaite monter "Antigone" d’Anouilh à Beyrouth. Les acteurs appartiendront à toutes les factions et pour la préparation et le spectacle oublieront leurs fusils. Pour lui, "monter Antigone sur une ligne de feu allait prendre les combats de court. Ce serait tellement beau que les fusils se baisseraient".
Hospitalisé, car il lutte contre un cancer en phase terminale , il demande à son ami de fac, Georges avec lequel il a fait le coup de poing contre les étudiants d’Ordre nouveau, d’aller à Beyrouth pour monter à sa place cette pièce de théâtre.
Pourquoi Antigone ? Ce serait un beau clin d’œil à l’histoire puisque cette pièce a été montée dans des conditions identiques pendant l’occupation. Georges découvre cette ville, sa situation complexe : il va connaitre les barrages dans les rues et les laissez-passer, les snippers, la boule dans le ventre, le danger permanent. Il doit marcher sur la pointe des pieds pour convaincre Chrétiens, Musulmans, Chiites, Palestiniens….d'accepter l'ambitieux projet de son ami Samuel.
Allers retours vers Beyrouth, tractations avec les acteurs, si certains se reconnaissent dans les personnages d'autres rechignent compte tenu de leur religion à tenir tel ou tel rôle.
Tous cependant acceptent ce challenge et arrivent à être côte à côte, à parler pendant ces quelques heures de préparation sans se battre en laissant leurs armes à la porte.
Mais la guerre omniprésente reprendra ses droits. Georges sortira fortement traumatisé par cette expérience, par ses visions d'horreur.
Une tragédie autour de la tragédie d'Anouilh. L'auteur aussi a, à l'occasion d'entretiens, confirmé que cette période de sa vie de journaliste reporter à Beyrouth l'a fortement marqué. Il réussi dans ce livre à transmettre ses tensions, ses peurs...
Un livre que je n'ai pas pu lâcher, que j'ai dévoré, qui m'a marqué. Un livre dense, plus troublant, plus dérangeant que "Retour à Killybegs" ou "Mon traitre". Je le relirai certainement dans un an

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" [...]. C'était sublime. C'était impensable, impossible, grotesque. Aller dans un pays de mort avec un nez de clown, rassembler dix peuples sans savoir qui est qui. Retrancher un soldat dans chaque camp pour jouer à la paix. Faire monter cette armée sur scène. La diriger comme on mène un ballet. Demander à Créon, acteur chrétien, de condamner à mort Antigone, actrice palestinienne. Proposer à un chiite d'être le page d'un maronite. Tout cela n'avait aucun sens. Je lui ai dit qu'elle avait raison. Ses remarques étaient justes. La guerre était folie ? Sam disait que la paix devait l'être aussi. Il fallait proposer l'inconcevable. Monter Antigone sur une ligne de feu allait prendre les combats de court. Ce serait tellement beau que les fusils se baisseraient.
— Pour une heure, a ricané Aurore.
Elle était assise. je me suis accroupi entre ses genoux.
— Une heure de paix ? Et tu voudrais que nous rations ça ? "

Voilà le défi que se donne Georges le narrateur du roman le quatrième mur de Sorj Chalandon, représenter l'Antigone d'Anouilh à Beyrouth, théâtre du futur massacre de Sabra et Chatila, afin de respecter le voeu de Samuel Akounis, l'ami malade, le militant juif grec admiré. le jeune Georges y arrive en 1982, juste avant le massacre de septembre. Là-bas, c'est le Liban qui tire sur le Liban, lui dit son chauffeur.

Une fois n'est pas coutume, je ne suis arrivé qu'au tiers des 325 pages du roman en vous proposant ce compte-rendu. Je ne devrais d'ailleurs pas faire une estimation en pages : j'écoute la brillante version audio – durée 9h10 – (le Grasset papier sur le côté) qui m'a été gracieusement envoyée par Audiolib dans le cadre de l'opération Masse critique de Babelio, merci à eux.

La lecture de Feodor Atkine, qui s'attèle seul à reproduire intensément les dialogues, est irréprochable. La présentation et le découpage en tranches d'un gros quart d'heure sont bien conçus. L'ensemble est complété par un entretien de trente minutes avec Chalandon où il explique qu'il a voulu, par ce roman, «faire sortir» la blessure de plus de vingt années de reportage de guerre. Intact physiquement, il porte en lui « quelque chose qui est de l'ordre de la barbarie ou de la mort », qu'il a tenu à éclairer par ce livre.

Lors de l'occupation allemande, Jean Anouilh a voulu réécrire et représenter Antigone avec la consonance de la tragédie qu'il vivait. Nous en vivons une autre aujourd'hui au Proche-Orient, qui se ravive à Gaza. Quel théâtre faudra-t-il tenter d'y jouer...?

Compte-rendu complet sur le blog Marque-pages (lien ci-dessous).

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Le quatrième mur, c'est celui qui sépare l'acteur de son public pour l'isoler dans une autre vie, celle où il n'est plus homme mais tragédien sur scène. le quatrième mur, c'est celui, infranchissable, de la guerre, celle sans pitié du Liban. Sorj Chalandon plante le décor entre factions qui entre-tuent, milices, invasions, tirs, roquettes. Partout rode la mort. Et c'est dans ce décor qu'un homme veut, le temps d'une trêve de deux heures, monter l'Antigone de Anouilh, sur la ligne de démarcation qui coupe Beyrouth, jouée par des Druzes, Chrétiens, phalangistes, chiites, juifs, tous ces gens qui se haïssent. Au départ, l'idée était folle, surtout quand l'initiateur de cette tentative de paix si courte se meurt lui aussi et que son meilleur ami la reprend à son compte pour honorer sa mémoire. Sorj Chalandon traite ce brillant sujet en mettant l'homme face à son destin théâtral. C'est le vrai sujet du livre: la métamorphose du metteur en scène qui passe de jeune père de famille occidental à un guerrier libanais. L'amour est partout, qu'il s'appelle amitié ou passion. la mort est partout, qu'elle s'appelle Antigone ou guerre. L'idée folle, bien plus que de jouer Antigone en ces lieux, est de narrer le conflit Libanais, les exactions de Sabra et Chatilla, les années de plomb au pays du cèdre sous la forme d'un projet théâtral. Pari réussi!
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Ce roman est artistiquement et émotionnellement très réussi. Je me le suis pris de plein fouet.

Le Liban j'y suis allée, j'y ai adoré la beauté et la diversité des paysages, la chaleur et la convivialité des gens ainsi que la gastronomie.
J'ai bien vu les impacts de balles sur les bâtiments à Beyrouth, mais cela restait abstrait, comme venant d'une réalité parallèle.
La guerre civile, je connaissais son existence, sans prendre conscience de sa terrible réalité.
Erreur réparée, ignorance comblée.

L'argument de départ de cette histoire, c'est un pari complètement fou, celui de monter "Antigone", la poignante pièce de Jean Anouilh, dans le Beyrouth des années 80. En pleine guerre civile, donc. le defi est de taille, le but étant de réunir le temps d'un soir des adversaires, comme une parenthèse dans cette guerre. Antigone sera jouée par une palestinienne, Créon par un chrétien, le reste du casting réunissant un druze, trois chiites, une chaldéenne et une arménienne.
Tout est compliqué dans cette aventure, de la logistique aux ressentis ancestraux de ses protagonistes ; pourtant Georges, un français jeune marié et jeune papa, s'en empare. Il s'en empare pour poursuivre le rêve de son ami mourrant au départ, mais être confronté à cette guerre ne peut laisser indifférent. Sa vie s'en trouve complètement ravagée, à l'image du pays qu'il a découvert et des souffrances qu'il a embrassées.

Cette lecture s'est avérée aussi douloureuse que bouleversante. J'aime le Liban, j'aime Sorj Chalandon, j'aime (j'idolâtre) Antigone de Anouilh, je me faisais donc une joie de plonger dans cette lecture. Je n'ai rencontré ni cette joie ni le plaisir escompté, mais la catharsis a fait son oeuvre et je ressors de la rencontre avec ce texte pas tout à fait indemne.
Du grand art.
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Un roman qui m'a laissée troublée, entre incompréhension devant l'entêtement de cet homme à gâcher sa vie et compassion. Après tout, il devient l'héroïne de la pièce qu'il montait, Antigone, et tout ce qui en découle est inéluctable.
Difficile donc d'affirmer que j'ai aimé ou non ce livre! Par moments, j'en ai suivi les événements avec plaisir, amusement, mais très souvent, la violence qui en émane m'a scotchée à ma chaise, ce poche à la main, sans pouvoir m'en détacher, révulsée. Sorj Chalandon possède le don inoui de partager avec son lecteur l'horreur d'une guerre, dans toute sa complexité, sans jugement.
Ai-je compris le conflit qui a embrasé le Liban dans ces années-là? Répondre par l'affirmative serait un mensonge éhonté, mais au moins, j'en ai saisi la complexité.
Un roman que je ne relirai jamais, bien qu'il restera avec moi longtemps je pense.
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Ce livre fut un uppercut pris en pleine figure. J'ai passé une nuit blanche, avec les descriptions des scènes de guerre comme fantômes qui m'empêchaient de dormir. J'ai revu Georges, jeune idéaliste qui affronte son ultime combat, celui qu'il ne peut pas gagner.
Mais commençons par le début : Georges est le personnage principal de ce livre. Nous allons le comprendre au fur et à mesure : il revient sur son passé, son enfance solitaire et triste, un militant des années 68 qui le pousse à toutes les manifestations et à toutes les batailles contre le fascisme et toute forme d'oppression. Récemment père de famille, il commence enfin à se ranger jusqu'à ce que Samuel, son ami, lui fasse une ultime demande.
Georges veut réaliser coûte que coûte le rêve de son ami Samuel : jouer Antigone à Beyrouth, avec des comédiens venus des différentes communautés. Mais la guerre civile est là, sournoise, cruelle et imprévisible. Georges s'engouffre dans ce piège et n'en sort pas indemne! Je suis presque en colère contre ses deux hommes qui courent après toutes ces illusions au point de gâcher le bonheur à portée de main !
Antigone est le fil d'Ariane de ce livre mais la tragédie qui se joue est bien plus horrible. Je ne connaissais pas le contexte de politique de Beyrouth dans les années 1980 : c'est chose faite. J'ai eu froid dans le dos face à toutes ses atrocités et toutes ses horreurs.
Son style d'écriture est précis, mais fluide. Ces phrases sont courtes, parfois un peu hachées à mon goût.
Je pense qu'on ne sort pas indemne de ce roman : la vie est absurde ; la paix une illusion et l'art comme vecteur de paix un vain espoir qui s'envole à la moindre grenade. Un livre percutant à mettre entre toutes les mains !
Lien : https://leslecturesdehanta.c..
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Quel coup de poing ce livre ! D'abord, il y a ces jeunes qui manifestent, en France, pour la libération de la Palestine et des rencontres, des amitiés qui se nouent. Ensuite, il y a ce projet de monter une pièce de théâtre en pleine zone de conflit avec des acteurs de confessions différentes, pour créer un havre de paix durant quelques heures. Et puis, la guerre cruelle, brute, inhumaine, broyant tout sur son passage…
C'est terrible à lire, émouvant, angoissant, très réaliste mais très juste. Si ce n'était que de la fiction, ce serait magnifique, et j'ai beaucoup aimé lire ce livre mais je ne puis m'empêcher de penser au quotidien de toutes les personnes qui vivent dans un pays en guerre. Ce livre ne peut laisser indifférent, c'est là aussi son mérite.
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Le livre est magnifique, l'idée originale quoique utopique de monter une pièce de théâtre dans un pays en guerre,le Liban, avec des acteurs des différentes factions en conflit
Le problème est que le personnage principal porte déjà en lui une telle violence (sur le plan de l'engagement politique dans son pays d'origine,la France) qu'on peut difficilement s'étonner de son engrenage dans ceconflit meurtrier et d'une violence absolue
Je n'ai pas tout apprécié le début du livre justement en raison de cette violence subie et infligée par ce personnage qui la justifie de façon tout à fait inacceptable
Passées ces premières pages le livre devient tout à fait passionnant notamment par l 'interprétation d'Antigone que font les différents belligérants
La fin du livre aboutit,assez naturellement, à une violence qu'on pressent dans les premières pages du livre
Dommage car la description la vie au Liban, des atrocités commises est absolument inoubliable
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Je vais avoir du mal à parler de ce roman tant il m'a remué. Et puis comment en parler, il faut le lire, le ressentir, et sentir tout à tour, et entremêlé, l'espoir, la joie, la peur le plaisir, la tristesse, l'envie, la colère, l'horreur, le désespoir.

Mais bien sur, j'ai beaucoup aimé, d'abord par les matériaux utilisés (le théâtre, le combat politique, l'histoire récente du Liban et de Beyrouth...) mais aussi et surtout par l'écriture, toujours délicate, mais au combien perçante et percutante de S. Chalandon.

Un roman qui bouscule.
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Une fois de plus, les lycéens ont tapé juste et fort en choisissant un roman profond qui laisse longtemps son empreinte en nous. Sorj Chalandon est devenu un écrivain majeur qui n'a pas peur de se compromettre. Il va loin dans sa réflexion et ne se contente pas d'hypothèses. Son récit est documenté, puissant, il nous interroge et nous incite sans hésitation à fouiller dans notre propre implication quotidienne. Un beau et grand roman.
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