Rarement je n'ai eu l'occasion d'en apprendre autant sur le sujet que dans cet ouvrage, véritable témoin perspicace d'un temps et d'un contexte encore soumis aux idées reçues. On y apprend comment s'articulait l'existence de ces jeunes femmes entre secrets et vie publique. Les terribles destins de certaines d'entre elles, et les positionnements de l'état vis-à-vis de leurs activités. Selon moi la force du livre c'est qu'il allie les émotions dans un style presque littéraire à des faits réels assimilés à des articles de presse.C'est pour moi un excellent moyen de découvrir cet univers qui mérite vraiment que l'on s'y interessat.
Commenter  J’apprécie         00
Dès la nuit tombée, des milliers de "lupae", c'est-à-dire des" louves" en langue latine, apparaissaient dans les dédales de Rome et ses bas-fonds, des alentours du Forum aux quartiers les plus sordides. La plèbe avait surnommé "louves" les prostituées en hommage à celle qui avait allaité Romulus et Rémus, les deux fondateurs de la Cité romaine. Celles-ci étaient chez elles partout dans cette Rome affranchie et bientôt décadente. Pour qu'on ne les confonde pas avec les femmes de la bonne société, elles n'avaient pas le droit d'attacher leurs cheveux. Elles devaient porter une sorte d'uniforme: des souliers rouges et une longue tunique jaune. Le jaune, la couleur de l'infamie dans tout l'Empire. La fille qui manquait à la règle avait la gorge tranchée.
J’ai veillé pendant toutes ces années sur un monde étrange. Sans le juger. Un univers que beaucoup, sans toujours le connaître, ont encensé ou méprisé. Interdit ou toléré. J’ai veillé sur des femmes et des hommes. Des brigands, des jeunes filles égarées, des maîtresses de maison au caractère bien trempé, des rabatteurs, des femmes légères et d’autres éternellement tristes, des clients salaces, des coquins, des gentils garçons ou de vrais pervers. Je n’ai jamais rien dit. Muette pour l’éternité. Jusqu’à ce jour où j’ai décidé de me confier. Oh, je ne vous dirai pas tout. Il y a des secrets qui partiront avec moi. Mais je veux être celle qui vous éclairera une dernière fois sur ce qui se passait derrière le velours des rideaux qu’il fallait écarter pour entrer dans ces maisons fermées. Des maisons closes. Qui portaient si bien leur nom.
Dans les ruelles de Subure, on volait, on trafiquait, on tuait pour rien. Et on faisait l’amour également. Car c’était un des hauts lieux de la prostitution romaine : dès la neuvième heure du jour, heure légale d’ouverture des bordels sous l’Empire, Subure devenait un gigantesque lupanar. On y croisait la lie de la plèbe, des vagabonds, des éclopés, des adolescents à peine pubères en mal de sensations fortes, à la recherche d’une prostituée à deux sous.
La Cinquième République pour les Nuls