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EAN : 9782266316163
168 pages
Pocket (02/09/2021)
4.33/5   24 notes
Résumé :
J’apprends à mon père à écrire son nom. Il tient bien le stylo entre ses trois doigts, il ne tremble pas. Est-il épaté ou troublé d’écrire pour la première fois de sa vie, à trente-six ans ?

Mon père est de cette génération qu’on a fait venir en France après la Seconde Guerre mondiale, pour reconstruire ce que les Américains et les Allemands avaient bombardé. Que de temps perdu, depuis les années qu’il est là. On aurait pu proposer aux ouvriers algéri... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
1962. Ahmed est arrivé d'Algérie avec sa famille. Il quitte le bidonville des Pâquerettes à Nanterre pour le "paradis" : les baraquements préfabriqués de la Cité de transit. Il y a l'eau courante, un poêle, des toilettes individuelles et des chambres, rendez-vous compte !
Mehdi Charef, romancier, cinéaste, revient à la littérature pour nous raconter la vie d'Ahmed, un petit bonhomme qui comme lui âgé d'une dizaine d'années découvre la France, l'école, la lecture, les "illustrés"... le livre est très court, les chapitres brefs, très brefs parfois, comme des flashs, des saynètes de la vie quotidienne pas toujours facile. le froid, la boue, le mépris des institutions mais aussi la solidarité, les traditions d'accueil, la bienveillance d'une institutrice, celle d'une bonne soeur soignante (rigolote avec sa burka bleue, je cite 😁). On découvre attendri la vie de ce gamin heureux malgré tout, la culture arabe que les mamans tentent de faire vivre, ces pères illettrés qui sont fiers de se tuer au travail pour faire de leurs enfants des écoliers malgré la pauvreté. 
J'ai connu, vu, un de ces bidonvilles qu'on apercevait depuis le HLM dans les années 60. J'ai fréquenté ce quartier des Pâquerettes à Nanterre, celui aussi des Provinces Françaises quand j'enseignais dans les années 80 pas très loin de là. Alors tout ce roman me parle...
Ni haine ni revanche à prendre, parfois de la colère ou du fatalisme. Juste le portrait d'un enfant intelligent qui se rêve riche et intégré plus tard. On devine celui que deviendra Mehdi Charef. Mais il y a aussi ceux qui échouent sur le chemin de la réussite, ceux qui ont trahi et qu'on chasse (les harkis), ceux qui sont venus seuls travailler pour envoyer de l'argent là-bas... et puis ce père qui apprend à écrire son nom, cette mère pour qui aller au marché d'Argenteuil est une parenthèse heureuse. La découverte de la télé, de la machine à laver,  de la Sécurité Sociale par ceux qui travaillent, cotisent et ne savaient pas y avoir droit, et le rêve un jour de devenir Français. (Ministre ? Non, faut pas exagérer... ça les fait rire)

Mehdi Charef nous donne ici un roman tendre, quasi autobiographique,  sans misérabilisme sur une enfance des années 60 parfois dure mais toujours riche d'humanité.  😊
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Plus qu'un roman, ce livre est, pour moi, un documentaire. Il écrit la vie de ces immigrés algériens venus, au lendemain de la seconde guerre mondiale, en France pour reconstruire un pays ravagé. Comment sont-ils reçus ? Mal, très mal puisqu'ils n'ont pas de toit et qu'ils doivent, pour se loger, se débrouiller en construisant des bidonvilles. Comment vivent-ils dans cette France colonisatrice de l'Algérie? Comme ils le peuvent, avec les moyens du bord. Travailleurs au départ temporaires qui restent finalement en France, ces immigrés mènent une existence loin de l'attention et du regard de celles et ceux qui écrivent, la plume à la main, L Histoire. Illettrés pour la plupart, engloutis dans une pauvreté et relayés dans des quartiers ghettoisés, ils ne peuvent effectivement écrire L Histoire à laquelle ils contribuent pourtant. Ils vivent dans un silence imposé et intégré. Il est donc de bon augure qu'il y ait des écrivains, descendants d'immigrés, qui prennent la plume pour nous raconter cette histoire inconnue. Mehdi Charef éclaire donc. Il donne la voix à des gens qui en ont été privé. Son roman est d'utilité politique et social. D'un point de vue strictement littéraire en revanche, je ne lui trouve rien de particulier. Il est, pour moi, assez quelconque. Mais qu'importe, je vous le conseille vivement!
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Mehdi et sa famille rejoignent son père en France. A l'âge de 10 ans, il va devoir faire face aux multiples bouleversements de sa vie depuis cette arrivée, dans les ghettos d'immigrés de Nanterre. A travers ses yeux, le lecteur vit ses réflexions, ses pensées.
Les changements se situent à plusieurs niveaux, tant culturelles que le mode de vie.
La dureté des changements et sa découverte de ce nouveau monde sont dévoilées peu à peu. L'alternance passé-présente nous permet de comprendre la façon dont l'auteur aborde sa nouvelle vie.
Rien n'est épargné à ce jeune adolescent, il met en lumière très habilement le quotidien, l'école, le marché et toutes les tâches quotidiennes.
Son père qui travaille dur la semaine mais ne sait pas écrire son nom. Jeune garçon, de nombreuses tâches lui sont incombées, en effet la barrière de la langue (écrite et parlée) se fait rapidement sentir vis-à-vis de sa mère.
J'ai pris beaucoup de plaisir à découvrir cet épisode de vie, surtout car l'auteur se replace dans la situation de l'enfant qui l'était. L'écriture est fluide mais les émotions explosent à chaque phrase. Les descriptions peuvent être comparées à des photographies. L'immersion est totale, des senteurs d'épices au froid ressenti. Parfois certains passages sont glaçants d'effroi.
Le deuil, l'amour, la solitude, la haine et l'envie sont des notions très bien retranscrites. de même, le rôle des femmes et des mères est prédominant et le lecteur ressent leur importance, leur pouvoir. Parallèlement, la façon dont les français gaulois sont perçus, nous donne à réfléchir, tout autant que le personnage du cousin dont l'auteur porte un jugement sincère.
La famille au premier plan, l'entraide de la communauté, découvrir les soins, l'enseignements ; en même temps que Mehdi ouvre les yeux, nous le vivons à travers ses yeux.
Puissamment, l'auteur a su parfaitement faire passer ses ressentis. La noirceur, la tristesse ou la colère sont palpables, au même titre que l'incompréhension et les doutes.
Une lecture qui m'a touchée et émue. Apprendre, comprendre et se rendre compte du passé, peut permettre de mieux appréhender le présent et de facto l'avenir.
Un style touchant et poignant, je lirai sans aucun doute d'autres livres.
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Vivants certes, mais en France, dans le bidonville de Nanterre, ou dans la cité toute proche, posée là et non bâtie correctement en haut d'une côte difficile à monter par les petits et les grands, et surtout dans la boue, cette boue qui colle aux semelles des chaussures, loin des semelles de vent dont chacun rêve !
Ahmed, 11 ans s'adapte plutôt vite à cette nouvelle vie sous un ciel gris, après avoir d'abord quitté les montagnes algériennes et le bled de Maghnia où ils vivaient, ses soeurs et sa mère et lui depuis le départ du père pour les usines en région parisienne.
Les enfants s'adaptent vite, l'école les y aide, la volonté de ne pas rester illettrés comme leurs pères ! ou de ne pas comprendre le français comme leurs mères «  je me laisse attraper par la grammaire » , l'instit de gauche ou la bonne soeur en « burqa bleue » se pointent toutes les semaines pour leur faire franchir le pas ! L'instit commence très vite à faire comprendre que seule l'éducation va les sortir de là, les garçons ET les filles, qu'un enfant par an n'est pas la règle !

Je connais ou reconnais certains lieux, moi aussi je suis née en 52 et j'habitais Courbevoie, cette ville de « rupins » , pas si rupin que cela avec tous ces petits ateliers devant lesquels nous passions pour aller à l'école, certes sur des trottoirs propres où l'on croisait peu de petits arabes !
Des petits flashes, des brefs commentaires, une certaine nostalgie mais surtout une envie de s'intégrer, que tous ses copains n'avaient pas.
Avec un regard tendre sur ses parents, amusé pour sa mère qui sans parler un mot de français et dans les conditions difficiles qui sont les leurs, trouve du positif partout, utilise l'aide de son fils les jeudis pour passer du bon temps à Monoprix, profiter au maximum de ce que lui a apporté cette immigration et compenser ainsi les inconvénients majeurs auxquels ils ont à faire face.

Certaines phrases bien senties, mots bien choisis, idées suggérées à peine développées mais énoncées clairement nous mettent sur la piste de ces difficultés à hauteur d'enfant.
Roman ou document, à vous de décider !
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Dans Rue des Pâquerettes (disponible dorénavant en format poche chez Pocket), Mehdi Charef revenait sur son arrivée en France en 1962, dans le bidonville de Nanterre. Une fois celui-ci détruit, les familles ont été relogées dans une cité de transit en attendant de pouvoir accéder aux habitations à loyer modéré. Vivants est le récit de cette période.

Vivre dans des préfabriqués constitue une vraie progression pour ces familles d'immigrés. Finie la promiscuité, l'eau coule à flot et chaque baraque dispose de ses propres toilettes. Même si tout n'est pas encore parfait, si cette avancée est cher payée et que le provisoire s'éternise, la vie s'organise. Des femmes et des hommes se marient, des enfants naissent et le progrès technologique s'invite dans les baraques. Les télévisions et les machines à laver révolutionnent le quotidien. Et puis chaque jeudi matin, parce que les enfants ne sont pas à l'école et qu'ils traduisent ses propos, une bonne soeur faisant office d'infirmière et d'assistante sociale déboule sur son Solex pour parler santé, hygiène et contraception aux mères pendant que leurs maris sont sur les chantiers ou dans les ateliers d'usine. Malgré tout ce qu'ils ont enduré, ces hommes, ces femmes et ces enfants sont Vivants. Ils connaissent de réels moments d'insouciance et de joie. Ils sont solidaires et forment une communauté soudée.

Vivants est parsemé d'anecdotes du quotidien au sein de cette cité de transit, de souvenirs du bled et de réflexions personnelles. Oui parce que les français ne sont pas si accueillants que cela, ils font peur. En dépit de son jeune âge, Mehdi Charef a conscience du monde qui l'entoure. Il sait que le retour en Algérie est un leurre, que seules l'école et la maîtrise du français l'émanciperont. Alors, malgré tous les obstacles, les préjugés, il fera tout pour s'intégrer.

Vivants est un témoignage à la fois touchant de sincérité et révoltant. Avec émotion et une certaine candeur, Mehdi Charef de sa plume alerte raconte cette période de sa vie à hauteur d'enfant et c'est là tout son talent. Ce n'est pas l'adulte érudit qu'il est devenu qui s'exprime, mais l'enfant qu'il était alors, tiraillé entre insouciance et crainte. Espoir et volonté de s'en sortir dominent le récit. Un vraie leçon d'humilité et de vie. On ressort de cette lecture, Vivants.

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Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Lorsqu’il copie le modèle que je lui ai mis sous les yeux, il lève le stylo et fixe longuement la lettre qu’il vient de tracer. Est-il épaté ou troublé d’écrire pour la première fois de sa vie, à l’âge de trente-six ans ? Après le C, c’est maintenant au H. Il trace une barre, relève la tête, la regarde, trace l’autre, parallèle. Il n’a plus qu’à les joindre par un tiret. Il est content.
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Lorsque trois élèves se redressent brusquement pour tenter de répondre à une question, notre maître [...] fixe les trois candidats et fait durer l'attente tendis qu'ils poussent des " moi, moi, moi, monsieur !" Lorsqu'il pointe finalement l'élu du doigt, je me demande s'il n'a pas puni les deux autres
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Je regarde la danseuse. Je remarque que les mouvements de ses mains et de ses bras sont souples, lents, fluides. On dirait qu’elle dessine la vague de l’océan, ou le vol gracieux d’un oiseau. Elle ondule du bassin et des épaules dans son costume étincelant. Il me semble qu’elle pourrait s’envoler, qu’à ces hommes qui n’ont d’yeux que pour elle, elle délivre un message. Je me dis aussi qu’il n’est pas possible que cet argent, ces billets que les hommes lui plantent dans le soutif, sur le bandeau qui lui serre le front, ne reviennent qu’à elle et et aux musiciens, c’est beaucoup d’argent.
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Quel choc de cultures ! Se faire accoucher par quelqu’un qu’on ne connaît pas… Pas de youyous, pas de chants, pas d’embrassades. Mais du confort, du repos, du silence, des vacances pour une mère. Et une solidarité entre femmes qu’elle n’imaginait pas et qui la laisse songeuse.
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Je me demande s’il a pleuré quand il a été obligé de quitter le bled. Il a le regard profond de quelqu’un qui a laissé quelque chose de lourd derrière lui, du chagrin, des regrets, des remords, de la rancune ou une histoire d’amour qu’il se traîne. Lorsque, du bord de la rivière où je me baignais, je regardais le convoi d’automobiles de Français qui quittaient l’Algérie, je ne comprenais pas leurs larmes, leur désespoir de partir, puisque pour moi ils rentraient chez eux.
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Troisième débat : Quand la littérature éclaire le social avec Faïza Zerouala, journaliste à Mediapart, Faïza Guène, écrivaine et scénariste, Marin Fouqué, écrivain et artiste, Medhi Charef, écrivain et réalisateur.
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