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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Renonçant à la publication de certains de ses écrits de son vivant, Diderot ambitionnait d'écrire pour la postérité. Opportune lucidité que lui dictait la prudence. Il s'agissait de se protéger lui-même mais aussi sa famille des foudres que son temps de censure ne manquerait pas d'attirer sur lui de la part de ceux dont le niveau de tolérance n'allait quand même pas jusqu'à admettre la critique. Mais Diderot était loin d'imaginer que cette postérité serait aussi distante de lui qu'elle devrait attendre ce 21ème siècle pour faire éclater des préceptes de vie en société que l'on peine encore aujourd'hui à faire nôtres. La tolérance a encore du chemin à faire.

Il a trouvé en Sophie Chauveau une avocate ardente à faire valoir l'incroyable modernité de ses pensées et l'immense talent qu'il a eu à les mettre en mots, tant à l'oral de son vivant qu'à l'écrit désormais. Elle attribue au personnage, quant à la promotion du 18ème siècle en siècle des lumières, une plus grande part que celle que l'histoire a voulu lui consentir.

Le baptisant Diderot, le génie débraillé, elle lui consacre ce magnifique ouvrage. Il lie à merveille la part romancée et celle attestée par les sources. Je reste admiratif du travail de recherche et de la mise en forme de ce pavé qui ne dissimule rien de l'admiration qu'elle voue au personnage, à mettre en avant l'intelligence subtile et la hauteur de vue de ce monstre de talent, tout autant que l'avance sur son temps. Elle rend l'auteur de l'Encyclopédie bougrement attachant et sait nous rallier à son engouement.

L'innovation dans le domaine des idées n'avait rien d'une sinécure en ce siècle ou l'église régnait en maître sur les consciences. Les esprits dits éclairés étaient confrontés à des institutions sclérosées, tant civiles que religieuses, bouffies de leur pouvoir exorbitant jusqu'à disposer du droit de vie et de mort. Monarchie, noblesse et clergé confondus, tous obnubilés qu'ils étaient par la préservation de leurs privilèges. Aveuglés au point de ne pas voir surgir la vague de fonds qui allait les engloutir quelques années seulement après la disparition du philosophe. Sophie Chauveau se fait fort de lui rendre la place qu'il mérite parmi les promoteurs des idées neuves du 18ème siècle, déclassé qu'il fut par des Voltaire et autre Rousseau. Ce dernier ayant à ses yeux fait montre d'une misogynie et d'un mépris de sa progéniture en complet décalage avec les thèses développées dans ses ouvrages.

Véritable immersion en un 18ème siècle qui entretient l'utopie de promouvoir l'humain au-dessus de la chape de convoitise et d'appropriation, laquelle fige à dessein le peuple dans l'ignorance et l'indigence, cet ouvrage de Sophie Chauveau n'est pas seulement une biographie, il est un brillant plaidoyer en réhabilitation d'un jouisseur sublime.

« Mes pensées ce sont mes catins » écrit-il en prologue dans le neveu de Rameau. Et Sophie Chauveau d'intercéder pour que ses errances libertines lui apportent un jour, peut-être enfin en ce siècle qui connaîtra la compilation de ses oeuvres, la juste rétribution d'un humanisme certes hédoniste mais sincère et dépouillé de toute discrimination.
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Pris au hasard, ce livre m'a littéralement transporté et j'ai lu cette biographie romancée de Diderot avec beaucoup de plaisir.
Une belle découverte que ce personnage dont oui effectivement j'avais entendu parler comme tout le monde pour son encyclopédie et mais j'avoue ne pas avoir eu l'opportunité d'aller voir plus loin. Denis Diderot, présenté tel quel dans cette biographie, est attachant pour ne pas dire très attachant. L'auteure explique son parcours et sa façon d'être beaucoup par ses relations avec sa famille, le père et à la mère, son frère et ses soeurs, mais aussi avec ses amis (et ils sont nombreux !) et enfin ses amours.
Dans ce livre vous aurez le privilège de croiser de grands hommes et femmes du XVIIIè siècle aussi divers les uns que les autres : La Condamine, Rousseau, Voltaire bien sûr, D'Alembert, Catherine de Russie, Malesherbes et peut-être moins connus Melchior Grimm, Jacques-André Naigeon et le baron d'Holbach. Et j'en oublie encore beaucoup ! C'est un vrai privilège de pouvoir côtoyer autant d'imminents personnages dans un seul livre. Cela me donne envie d'aller plus loin et de lire encore d'autres livres sur cette période.
Je conçois que le style de Sophie Chauveau est particulier. L'écriture n'est pas forcément évidente au premier abord. Les phrases peuvent être courtes, juxtaposées, on peut trouver une liste de synonymes d'un coup, quelques fois il y a des phrases très longues qui demandent un peu de concentration. Je pense, mais je peux me tromper, que Sophie Chauveau écrit avec ses sentiments. Mais bon, je ne me suis pas arrêtée à cela et j'ai très vite adopté son style.
Cette biographie est très riche en détails, en personnages de l'époque, en évènements … Quel est la part de vrai dans tout cela !? Sophie Chauveau le confesse dans sa postface ; elle s'est laissé le droit d'imaginer certaines choses. En effet, devant la rareté des informations surtout sur la première partie de la vie de Diderot, elle a essayé, guidée par quelques indices, de reproduire ce qui lui semblait le plus réaliste. Alors oui il faut effectivement accepter la version de l'auteure qui reste une des versions possibles de la vie de Diderot !

Autre point fort de cet ouvrage, l'aventure de l'Encyclopédie est présente certes, mais elle n'est pas tout. En effet on a le plaisir de s'attarder sur d'autres oeuvres ou réalisations de Denis Diderot (comme les bijoux indiscrets, le neveu de Rameau, Supplément au voyage de Bougainville, …). J'avoue personnellement avoir été particulièrement touchée par la présentation de « la religieuse » ; la raison pour laquelle il l'a écrit et ce qu'il dénonce en même temps. Je me suis lancé dans cette lecture il y a maintenant 2 jours et je suis sûre que sans cette biographie ma lecture n'aurait pas été la même.

Quand un auteur aime autant son personnage que Sophie Chauveau « son » Diderot, ben moi…, je suis fan ! Vous l'aurez compris, A LIRE, bien sûr !
Lien : https://ideeslivres.jimdo.co..
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Lire une biographie de Sophie Chauveau, c'est s'assurer de grands moments de bonheur, tant elle sait donner vie à ses personnages, ici en l'occurence Diderot.
Ce grand héros , ambitieux, curieux, surdoué, avide de connaissances, d'expériences, fera tout pour échapper à la prêtrise.
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Diderot, le génie débraillé/Sophie Chauveau
D'une lecture très agréable, cet ouvrage de plus de 500 pages, tel un thriller se dévore littéralement. Il faut dire que la vie de Denis Diderot dépasse largement toute fiction : un personnage méconnu et hors du commun, sympathique, voltairien, forte tête mais grand coeur. Séducteur dès son plus jeune âge, « il conquiert qui et quand il veut. Frondeur mais jamais assez révolté pour être pris en défaut, il semble la parfaite illustration de la pédagogie jésuite. »
Sa boulimie de savoir et son insatiable curiosité de toutes connaissances est à peine imaginable ; elle épouse toutes les formes : latin, grec, théologie, philosophie, mathématiques, anglais, italien, physique, théâtre, opéra, jeu d'échecs ; en tout il brille et toujours premier de la classe. Sans pour cela négliger les plaisirs de la chair au cours d'amours voluptueuses et multiples. Sa vie est un tourbillon incessant d'enthousiasme et de gourmandise, d'exaltation et d'émerveillement. Esprit universel, curieux de tout et doué d'une largeur de vue peu commune, Diderot est compétent dans toutes les matières.
Grand admirateur De Voltaire et Montesquieu dont il dévore les écrits, il a Homère et Horace à son chevet ; et Marivaux pour se distraire.
Affecté d'un pyrrhonisme latent, « il affirme péremptoirement que Jésus n'est pas né d'une vierge. Vierge est une mauvaise traduction, une traduction fautive du latin « virgo », qui veut simplement dire « jeune fille ». » Il fait scandale évidemment. Et ce n'est qu'un début !
D'un physique imposant, il est bagarreur ce qui lui vaudra de quitter le lycée jésuite Louis le Grand pour aller chez les jansénistes. Il fréquente également la Sorbonne.
A 28 ans, il fait la rencontre de Jean Jacques Rousseau : c'est le coup de foudre intellectuel. La même année il séduit une jeune couturière, Toinette. La liaison est rendue difficile par la famille de Denis qui ne voit pas la chose d'un bon oeil. Victime du stratagème de Lysistra (grève du sexe comme dans la pièce d'Aristophane) mis en oeuvre par Toinette pour qu'il la présente à sa famille, alors qu'il vient de l'épouser clandestinement, Denis se réfugie dans le travail, écriture et traductions.
Il fait alors la connaissance de D'Alembert et de Condillac. Avec Rousseau, ils vont s'atteler à la rédaction d'une encyclopédie collectant toutes les connaissances actuelles.
Par ailleurs, il adresse ses premiers écrits personnels publiés anonymement en raison de la censure, à Voltaire qui le félicite et le nomme expressément son rival. Mais ses écrits sont jugés subversifs et il est emprisonné au donjon du château de Vincennes durant 102 jours : cette détention lui fait une publicité notable inattendue.
De son union avec Toinette vont naître trois enfants qui vont tous trois mourir en bas âge. Il sera très affecté par ces malheurs successifs. Plus tard, il aura une fille qui vivra et à l'éducation de laquelle il consacrera beaucoup de son temps.
Sa passion pour la musique va l'entrainer dans la querelle qui sévit alors entre les défenseurs de la musique française et ceux de la musique italienne. Pour Diderot, « la musique, c'est à la fois le plaisir et la rigueur de la pensée, l'imagination et l'ordre mathématique, la science mâtinée de sensibilité, la théorie plus la pratique, outre une réflexion métaphysique, esthétique, morale, sociologique, pédagogique et même politique. »
« Diderot aime à parler et s'y adonne avec éloquence. du talent, de la grâce, et parfois du génie. Il règne sur la communauté dispersée des encyclopédistes dont Voltaire est le grand maître, Montesquieu l'inspirateur, D Alembert l'intendant, d'Holbach le trésorier, Rousseau le prieur. » Diderot est l'élément fédérateur et tous travaillent de façon solidaire pour Diderot.
Peu à peu Diderot verse dans l'athéisme –(« Seule la matière régit le monde » )- et il écrit sans publier, comptant sur des publications posthumes. Il a vendu sa bibliothèque à Catherine II de Russie et donc n'a plus de soucis financiers. Tandis qu'il est éperdument amoureux et amant de Sophie Volland et de ses deux soeurs, et qu'il n'a toujours pas rencontré Voltaire en chair et en os, il continue « d'opter pour une gloire posthume. C'est moins risqué ! Il a paradoxalement davantage confiance dans la postérité que dans ses contemporains pour reconnaître ses talents. Et sa modernité. »
Il écrit : « Je suis homme aujourd'hui je serai poussière demain et après-demain la matière qui me constitue sera associée à d'autres formes matérielles. » Avec de tels propos il n'en fallait pas plus pour être emprisonné en ces temps où la religion d'état faisait loi.
Âgé de 60 ans il part pour la Russie ; passant par la Hollande, il voit la mer pour la première fois. Il va passer plusieurs mois à la cour de Catherine II la tsarine qui a besoin de ses conseils politiques éclairés et aime la compagnie du philosophe.
Ce n'est qu'en 1778 qu'il rencontre son idole Voltaire ; cela se passe au théâtre De Voltaire, et la querelle concernant Shakespeare paraît inévitable ; Shakespeare que Voltaire traite de faquin dont « l'oeuvre ne recèle que quelques perles dans un énorme tas de fumier ! »
Puis il s'enthousiasme de la naissance du grand pays démocratique que Jefferson et Benjamin Franklin portent sur les fonds baptismaux avec l'aide de Lafayette.
Diderot travaille à son oeuvre posthume jusqu'à son dernier jour au cours duquel il déclarera : « Moi encore vif, je ne crois ni au Père ni au fils ni au Saint Esprit, ni à personne de la famille. » Et : « le premier pas vers la philosophie c'est l'incrédulité. »
Au terme de cet ouvrage passionnant de bout en bout qui fourmille d'anecdotes conférant in fine un caractère de bon vivant totalement hédoniste à Diderot, il faut noter le travail considérable de Sophie Chauveau et la grande connaissance qu'elle a de toute l'immense correspondance de Diderot qui a écrit des milliers de lettres à ses nombreux amis.
On peut juste regretter comme l'ont noté certains lecteurs, quelques longueurs surtout dans la seconde partie du récit.
« L'homme n'est ni le tout, ni le maître de tout. C'est un maillon, tardif sans doute, éphémère certainement, infime et fragile en tout cas. »(Diderot)
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Une écriture descriptive, mais ni lourde ni ennuyeuse, bien au contraire, le lecteur est transporté par vagues dans un univers très loin de l'image que l'on peut avoir de Denis Diderot. Un boulimique d'apprentissage, une vigueur intellectuelle hors norme, fascinante, époustouflante, irréelle et tellement moderne !
Un être, un génie dont les idées nous parlent aujourd'hui encore plus que jamais !
Exquis
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Cette biographie très complète se lit comme un roman, avec délice. L'écriture de Sophie Chauveau est limpide et entraînante. le lecteur se laisse complètement emporter par la vie si aventureuse de ce personnage solaire qu'est Diderot. Sa personnalité est bien mise en avant et on comprend mieux cet homme qui a contribué à révolutionner la pensée au XVIIIe siècle. Cet ouvrage est une véritable réussite.
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Sophie chauveau a vraiment le talent de nous intéresser à la vie de ces gens de talents. C'est parfait, super sympa et donne envié de mieux connaître encore tous ceux dont elle romancé la biographie. J.adore !
Diderot joyeux intellectuel et coquinou c'est genial
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passionnant !
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Magnifique ! Sophie Chauveau nous présente avec brio un Diderot très attachant. Un biographie qui se lit comme un roman.
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