Le Destin d'un homme (1957)
Mikhaïl Cholokhov (1905-1984)
Récit.
Cholokhov, ne cherchez pas, c'est l'archétype du candidat à postuler chez les écrivains soviétiques. Chez lui déjà les vaches étaient bien gardées, puisque son père était marchand de bétail, outre le bois dans une "stanitra" près du Don. Sur ces bases, à portée de bourse, sa scolarité s'engage, on le voit à l'école à Moscou, puis au gymnase dans l
e gouvernement de Voronej, cher à
Ivan Bounine. Ce qui est drôle, les deux vont devoir s'enfuir à peu près au même moment, mais pas pour les mêmes raisons, c'est une autre histoire !..
Mikhaïl Cholokhov c'est l'écrivain soviétique qui va obtenir les honneurs du régime à la mort d
e Gorki. Comme s'il n'y avait pas de place pour deux à la tête de cette confrérie bolchevique, mais c'est une pure vue de l'esprit de ma part car la différence d'âge et Staline ont bien réglé le problème ! Ma préférence va nettement à
Cholokhov, je n'aime pas Gorki ! Sa fidélité au système sera exemplaire : il ne sera pas suspecté de quoi que ce soit compte tenu de cette inflexibilité, même si ce peintre de la vie des cosaques ne sera pas aveuglé par l'idéologie : il en sera un témoin objectif. En ce sens, il se fera intelligent dans l'ombre d'un Staline bienveillant à son égard! Ses succès avec
le Don paisible et
Terres défrichées feront de lui quelqu'un qui va gravir les échelons dans la nomenklatura. Avec cet emploi du temps bien chargé, accompagnant même les autorités du pays à l'étranger, on ne peut pas dire que son oeuvre moins dense de facto va y gagner en quoi que ce soit,
elle sera même en deça de ses standards. C'est dans ce contexte qu'il écrit le récit présent intitulé le Destin d'un homme. Son intérêt est historique.
Alors l'histoire : ah j'oublais, si l'on veut connaître les Kolkhoz et les koulaks, il faut lire
Terres défrichées. Bon alors, le Destin d'un homme, nonobstant la personnalisation du combat honnie du régime :
On aime bien comme ça dans le régime totalitaire les camarades qui s'aiment d'un désir simple et profond, c'est gage de prospérité : en illustration ça donne Sokolov et sa femme qui s'aiment depuis 10 ans jusqu'à ce que la guerre éclate en fait.
Solokov part pour le front et pense à sa femme et ses enfants qu'il vient de laisser sur le quai de gare. C'est d'une violence sentimentale inouïe ! On a déjà vu quelque chose de similaire sous la plume de
Iouri Kazakov à la même époque, autre écrivain russe admirable en passant ! C'est lui dont je cherchais le nom lors d'une précédente intervention qui a établi ses quartiers à Arbat à Moscou. C'est troublant quand même ces coïncidences avec Cholokhof : Bounine et maintenant Kazakov. On pourrait même ajouter
Soljenitsyne qui lui s'est mis à douter de l'authenticité du Don paisible signé Cholokhof: mais là il fut démontré plus tard qu'il s'était trompé ! Pour en revenir à nos moutons, rien de tel qu'un quai de gare dans cette Russie gigantesque pour illustrer cette déchirure... Mais l'actualité va le happer: Il sera blessé puis fait prisonnier !
De là, il réussit à s'échapper et il est repris ; et puis il est embringué dans une sale aventure avec un prisonnier suspect, une taupe qui dénonce les communistes, les juifs et les gradés .. il s'en faut de "trois fois rien" pour qu'il ne soit pas exécuté ! de fil en aiguille, sur les bases d'un Stalingrad gagné par les troupes allemandes, notre héros alors chauffeur d'un officier allemand dont il va régler le compte, va regagner les lignes soviétiques. Il va être distingué pour ce fait d'armes ! Ca c'est le chaud, mais le froid va être quand il apprend dans le même temps que sa petite maison a été bombardée par l'ennemi, tuant du même coup sa femme et ses deux filles. Son fils absent pour avoir rejoint comme volontaire le front, sera tué le jour de la victoire ! Face à la sidération que vit le malheureux Solokov, comme une sorte de résilience va naître, comme on dit aujourd'hui, il va rencontrer sur son chemin un môme de 6 ans abandonné, orphelin, en haillon, il décide de l'adopter ...
Ah oui, une chose encore que j'allais oublier : je dis plutôt récit que nouv
elle car c'est une histoire vraie, ficellée à la manière de Cholokhof bien entendu, pas sur le mode larmoyant de Karamzine avec sa Pauvre Lise. La guerre il faut l'écrire bien sûr, pour en principe s'en guérir à tout jamais car c'est une horreur insoutenable, et ne pas l'offrir sur un plateau pour les générations futures : je pense que l'intelligent
Cholokhov, bien qu'il fût étiqueté écrivain soviétique au sommet, avait cela en tête !..