Le désir à l'âge du néoféminisme
On suit deux personnages radicalement différents dans leur quête d'amour, à travers leurs journaux personnels (un dandy et son carnet de drague et une féministe via son journal intime).
On ne sait pas très bien ce que fait de sa vie Victor Sabran, don Juan quadragénaire (hormis draguer des femmes beaucoup plus jeunes que lui dans les jardins et parcs parisiens). Libertin et anachronique, il aime séduire et enchaîne les conquêtes féminines par différents stratagèmes.
Sa voisine, Magali Bavoir, est son double inversé. Professeur d'arts plastiques en surpoids, féministe radicale et triste ; elle épie son voisin dragueur et lui voue une détestation sans borne (quel est le pire ennemi des féministes radicales que le dragueur qui additionne les conquêtes ?), qui n'est qu'une jalousie déguisée.
On suit leurs péripéties amoureuses avec sourire (l'un assouvit ses désirs, l'autre passe d'échecs en échecs avec ses rendez-vous ratés obtenus sur des applis de rencontres), jusqu'à ce qu'un non-événement fasse basculer le récit.
𝑳𝒆 𝑱𝒂𝒓𝒅𝒊𝒏 𝒅𝒆𝒔 𝒇𝒆𝒎𝒎𝒆𝒔 𝒑𝒆𝒓𝒅𝒖𝒆𝒔 est une galerie de portraits de femmes. Les nombreuses conquêtes de Victor Sabran sont décrites, et à travers elles, Clavel dresse un portrait sans concessions de l'urbaine contemporaine.
Le portrait majeur est évidemment celui de Magali : victime de l'époque, elle tombe dans le panneau de toutes les modes intellectuelles dominantes. Elle se flatte d'être libérée d'un prétendu patriarcat, mais sa soumission à toutes les injonctions féministes la perd.
Clavel produit dans son roman un exercice de style réussi ; chaque personnage écrivant son journal, on passe d'un chapitre à l'autre de la langue surannée et précieuse de Sabran à celle de Magali qui écrit comme elle parle et manie une langue actuelle et appauvrie. Deux personnages en opposition, même dans l'écriture : le subjonctif imparfait contre l'écriture inclusive.
Cette idylle moderne est parue aux éditions de la Nouvelle Librairie.
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