Mr China : Comment perdre 450 millions de dollars à Pékin après avoir fait fortune à Wall Street

Cette réédition tombe à point, au moment où la Chine tient enfin (à nouveau, plus exactement) la place qu'elle mérite dans le paysage mondial, notamment économique.

La Chine est incontournable et on recommence comme au XVIIe siècle à vraiment s'intéresser à elle, sa culture, son histoire, par delà les craintes qu'elle suscite dans nos pays. Il est commode pour nos gouvernants incompétents de lui jeter l'opprobre, de la rendre responsable de tous nos maux actuels alors que sa montée en puissance n'est le résultat que d'attitudes pragmatiques (lesquelles font particulièrement défaut à nos vieilles économies, essentiellement dogmatiques).

Or, derrière son apparente inflexibilité, l'Etat chinois sait observer l'évolution du pays et adapter très progressivement sa doctrine post-maoïste. Il en résulte une progression économique étonnante, qui part toutefois de très bas.

On voit que les nouveaux objectifs de croissance reviennent à un niveau qui permettra de contrecarrer les effets néfastes d'un développement anarchique ces dix dernières années (pollution, misère, corruption,...). Contrairement à ce qui prévaut chez nous, le discours étatique chinois est généralement suivi d'effets, l'avenir va donc être très intéressant.

Tim Clissold nous ramène avant cette période. Tout est allé si vite en Chine que sans lui, on ignorerait ou oublierait trop vite cette 'préhistoire' de l'expansion économique, ce 'Far-West' [la Chine est bien à l'Ouest des Etats-Unis...] vers lequel se sont précipités des financiers prétentieux éblouis par des perspectives de profits faciles.

Les aventures de quelques-uns de ces pionniers de la Nouvelle Frontière nous sont contées par le menu, souvent avec humour alors que les choses prennent rapidement une tournure catastrophique. L'ouvrage se lit quasiment d'un trait, tant on a envie de connaître le détail de ces enchaînements d'erreurs qui aboutissent au naufrage annoncé.

Il en ressort l'observation que tout expat peut faire après quelque expérience en pays exotique : les métropolitains vissés sur leurs sièges de conseils d'administration ne savent rien du pays, ne comprennent rien à ses usages, mais croient qu'ils ont barre sur des populations qu'ils méprisent fondamentalement.

L'aventurier sur place, lui, a déjà ramassé quelques bons coups et a vite compris comment s'adapter à son environnement sans cesse changeant. Mais sa faible voix éloignée ne parvient que rarement à convaincre les soi disant 'élites' restées dans leurs bureaux cossus, jouant leur argent ou celui des autres - gagnant ou perdant selon les circonstances.

Les conditions actuelles des affaires en Asie n'ont plus rien à voir avec ce qui nous est relaté dans ce livre, raison de plus pour se plonger dans ce qui en fut le brouillon bouillonnant et désordonné, comme le creuset d'une économie déjà bien installée mais qui est encore en devenir.