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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je suis Dickienne. Depuis le tout premier roman que j'ai lu de cet auteur, c'était « le temps désarticulé ». Ça a été comme un coup de foudre. Depuis, chacun des romans ou nouvelles que j'ai lu a su me parler d'une façon singulière. « Les chaines de l'avenir » est un des premiers romans de Dick, le 2ème après « l'oeil dans le ciel ». le côté oeuvre de jeunesse se ressent beaucoup. D'un côté, on retrouve pas mal de thématiques chères à Dick et les germes de ses obsessions mais le roman est narrativement assez différent de ce qu'il fera par la suite dans ses romans les plus Dickiens. du coup, il a manqué un petit quelque chose à la Dickienne que je suis mais « les chaines de l'avenir » est un très bon roman, riche et passionnant.

Le récit est étonnamment structuré pour un roman de Dick. La construction narrative est finalement assez linéaire. Et j'avoue que c'est ce qui m'a un peu gênée. Il m'a manqué ce vertige, cette perte de repères. C'est quelque chose que j'aime particulièrement chez Dick, le fait de ne pas savoir où le récit va m'emmener, le fait d'être déstabilisée, voire bousculée dans mes perceptions. « Les chaines de l'avenir » est donc un roman qui pourrait plaire aux lecteurs moins Dickiens, à ceux qui n'accrochent pas trop à la réalité aux contours flous de l'auteur.

Ce petit bémol ne m'a pas empêchée de passer un très bon moment de lecture. Tout d'abord, j'ai aimé trouver dans ce roman de jeunesse les thèmes que Dick traitera régulièrement au cours de son oeuvre. Ensuite, dans « les chaines de l'avenir » l'auteur déploie une imagination formidable. Avec tous les thèmes abordés dans le roman, il y aurait eu de quoi faire plusieurs romans et Dick compacte tout ça en un récit d'un peu plus de 200 pages. Bien sûr, certains ne sont qu'effleurés et auraient mérité d'être approfondis mais cette richesse narrative force le respect. En plus, ces thèmes sont abordés sous des angles intéressants et parfois même géniaux. le sujet de la précognition est traité d'une façon extraordinaire. Jones peut voir l'avenir un an à l'avance. Résumé ainsi, ça sonne comme du déjà-vu. Sauf que Dick dépeint le pouvoir de Jones d'une façon très originale. Il ne s'agit pas vraiment de visions, ici le personnage vit simultanément deux époques, il y a superposition de deux temporalités (d'ailleurs que la traduction est plutôt chouette et rend bien cet aspect avec ce genre de phrases : "l'année prochaine avait été riche en événements"). Et cette idée déjà géniale, Dick la pousse au bout. Ainsi,

Autre thème très intéressant développé dans le roman : le relativisme. J'ai trouvé les réflexions à ce sujet très intéressantes et cela nourrit le décor politique du récit. Ce contexte politique est plutôt réussi même s'il aurait dû être plus développé. Mais j'ai tout de même beaucoup apprécié la subtilité du propos. Si Jones et ses partisans sont inquiétants, le système prôné par les tenants du relativisme n'est pas tellement plus séduisant. Cette philosophie de l'ultra-tolérance s'avère tout aussi intolérante. A l'heure de la cancel culture, ce propos a une dimension encore plus forte.

Dans les romans de Dick, j'apprécie la façon dont l'auteur mêle un côté intimiste à ses récits de SF. Et c'est encore le cas ici avec les différends du couple Cussick-Nina qui permettent d'ajouter de la réalité et de la crédibilité à l'ensemble. Et cette touche intime ajoute également du sentiment. Les romans de Dick, même les plus vertigineux, sont toujours profondément humains, notamment grâce à l'insertion de ces notes intimes.
Le personnage de Jones est vraiment très réussi. Dans sa caractérisation, Dick évite tout simplisme. Si Jones est inquiétant, il a aussi une dimension tragique qui me l'a rendu attachant.

Je n'ai pas évoqué tout ce que j'ai aimé dans le roman, « les chaines de l'avenir » contient environ un million de bonnes idées et je n'ai pas envie de toutes les lister, pour découvrir ces autres trouvailles de génie je vous laisse découvrir ce très bon roman, certes inabouti pour la Dickienne que je suis, mais passionnant, riche, intelligent et attachant.
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« Bon, je tente ? » « Non, il va encore te déstabiliser. » « Oui mais ça fait du bien de temps en temps. » « Mais tu sais que tu vas le regretter. » « Bah pas forcément, c'est pas mortel non plus. » « Tu as d'autres choses à lire. » « Mais le pitch me plaît bien ! »

Bon, ok, vous avez compris. C'est toujours un peu compliqué pour moi de m'attaquer à un Philip K. Dick. L'auteur n'a souvent que faire de structure et de rationalité, secouant les idées comme des jetons de loto dans leur sac, retournant la réalité comme un gant. Pourtant j'aime bien tenter le coup de temps en temps, accepter le « petit frisson de danger » (toute proportions gardées). La quatrième de couverture finit alors par me convaincre.

Cette fois je m'en sors bien. Peut-être parce que Les chaines de l'avenir est un roman de début de carrière et que l'auteur n'a pas encore vu sa personnalité et son expérience personnelle influer son style. Je ne sais pas. Bref le roman est bien structuré. Les idées sont organisées. Cause et conséquence sont dans le bon ordre. Lol, je me dis qu'en parlant en technocrate je vais en fait vous faire fuir.
Idées organisées et cependant foisonnantes. Arriver à faire tenir tout ça dans un roman d'un peu plus de 200 pages force l'admiration. Chacune d'elle aurait mérité un roman, et d'autres auteurs se sont en effet focalisés sur l'une ou l'autre et les ont développées. Forcément, Dick n'a pas la place pour approfondir mais il utilise les thèmes à bon escient pour concevoir une bonne histoire dans un monde dystopique.

Que faire quand on est capable de voir l'avenir avec un an d'avance, mais qu'il semble impossible d'influer son chemin ? C'est peut-être l'idée phare développée ici. J'ai tout de suite pensé à l'Homme stochastique de Robert Silverberg. Avoir conscience de l'inéluctabilité a de quoi abîmer n'importe quel psychisme. le pauvre Jones – oui je ne peux pas m'empêcher de le plaindre – vit ce que j'appelle un enfer. Tente-t-il pour autant d'agir différemment de ce qu'il a vu ? Quand le moment arrive un an après, s'en souvient-il suffisamment bien ? Dick développe l'effet dévastateur de ce don sur Jones. Il l'extrapole à un point qui m'a surpris et impressionné.
Comment conquérir les autres planètes ? En les terraformant ou en essayant de s'adapter à elles ? Un autre thème d'importance ici, qui nous offre quelques scènes délicieuses dont un épatant effet de miroir entre le premier et le dernier chapitre.
Et quelle est la nature de ces étranges extraterrestres monocellulaires qui sont apparus dans le système solaire ? Comment l'humanité va-t-elle réagir à leur présence ? Avec curiosité ou brutalement en cherchant immédiatement à détruire l'étranger ? La vision déformée de l'alien différent m'a rappelé La stratégie Ender d'Orson Scott Card. La solution est là aussi surprenante.

Et il y a d'autres idées encore. L'importance pour un gouvernement d'offrir des rêves au peuple, des perspectives d'avenir. La possibilité pour un gouvernement qui fait de la tolérance son cheval de bataille de dériver vers un autoritarisme plombant. L'utilisation d'un décor post-guerre nucléaire. L'effet détaillé des événements mondiaux sur les relations d'un couple.
N'en jetez plus ! Tout cela est très bien mis en musique. Toutes les questions ne sont pas résolues à la fin et j'en ai éprouvé un peu de frustration, et un peu de plaisir à laisser dériver mon imagination.

Bref ce fut une bonne pioche parcourue avec Foxfire et Tatooa dans le cadre d'une LC express. Je les remercie de m'avoir accompagné. Ça faisait longtemps.
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Tout d'abord merci à mes co-lecteurs, BazaR et Foxfire.
Mettant entre parenthèse la lecture de l'intégrale de Terremer, je me suis (très cordialement, lol) invitée, sur le fil, à leur lecture commune, le livre étant disponible en version "liseuse" !

Et j'ai très bien fait... J'aime beaucoup Dick, on peut même dire que je suis fan, je crois. J'admire son imagination quasi-visionnaire, j'ai parfois l'impression qu'il est allé visiter tous les futurs possibles pour revenir nous les dévoiler dans ses bouquins.

Comment décrire ce voyage halluciné et hallucinant dans un monde utopico-dystopique ? Sans le déflorer, en plus... Cela ne va pas être simple... D'autant que les avis de mes co-lecteurs, déjà parus, sont assez exhaustifs, au final. Que pourrais-je bien y ajouter ?

Pourquoi utopico-dystopique : parce que certes, c'est post-nucléaire, mais très franchement, le système du "relativisme" aurait tout pour plaire.
C'est quand même une grande utopie que chacun ait le droit d'être qui il est sans que personne n'ait à lui dire quoi faire quoi dire quoi penser. Non ?
Ben si vous lisez ce livre, vous verrez qu'en fait, oui, mais non ! Mdr !

Au départ, j'ai cru me retrouver dans la nouvelle "minority report". La "précog" était manifestement un sujet qui titillait Dick sur les années 1955/56 ! le traitement est tout à fait différent ici.

Et très intéressant. Foisonnant, même.
Car nous avons en fait deux points de vue "opposés" : le point de vue de Cussik, un membre actif de la "police" qui court après les contrevenants au "relativisme" (parce que même là il y a besoin d'un service d'ordre, lol !), et Jones, le "précog" (et donc contrevenant en chef au système, mdr !).
La femme de Cussik, Nina, "l'être humain moyen" de cette société, servant de "liant" entre ces deux extrêmes. Oscillant entre les deux, comme un pendule, tic-tac...
Et tous trois sont très attachants, très humains, tellement bien décrits, c'est quand même fou qu'en aussi peu de pages, Dick ait réussi ce tour de force de créer trois personnalités aussi fortes, et complémentaires...

Et que c'est bien écrit, bien ficelé !
En fait, il y a plein de questions de fond soulevées dans ce livre, également évoquées par BazaR et Foxfire. Comment aller vivre sur d'autres planètes ? Qu'est ce que la société ? Qu'est ce que la tolérance ? Quelle organisation "humaine" serait la meilleure ? Qu'est ce que la liberté ? L'être humain est-il capable de la supporter ?
C'est vertigineux...

Dans ce cadre, j'ai donc particulièrement apprécié l'ironie de la solution des "aliens" face à la menace "humaine"... Et même si, comme toujours avec Dick la fin est un brin précipitée et n'apporte pas toutes les réponses aux nombreuses thématiques évoquées, j'ai aussi bien aimé que "l'amour gagne à la fin", pour une fois... Même si c'est avec une saveur aigre-douce... :)





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isbn:9782253046271
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