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EAN : 9791094176405
96 pages
Espaces et signes (15/02/2019)
4.3/5   5 notes
Résumé :
Seul dans son atelier d’Antibes, face à la mer, Nicolas de Staël entame, le 14 mars 1955, une toile géante de 3,5 m sur 6 m : Le Concert. On y voit d’un côté, un piano à queue noir et, de l’autre, une contrebasse ocre, séparés par des partitions posées sur des pupitres. Mais ce qui frappe c’est le fond de la composition qui mange tout le tableau : un vermillon écarlate, comme un grand rideau de scène incandescent. Deux jours plus tard, Nicolas brûle quelques papiers... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Ce très court volume retrace la vie de Nicolas de Staël et et tente en premier lieu de trouver une explication à sa fin tragique. Une seconde partie nous propose une analyse par Edouard Dor du tableau « Le concert » réalisé par Nicolas de Staël juste avant sa mort.

C'est après avoir peint sa toile monumentale intitulée « Le concert » (350 cm x 600 cm) que l'artiste s'est jetée du deuxième étage de son atelier à Antibes.

Son histoire commence en 1914 sur fond de révolution russe dans le très riche hôtel particulier de sa famille, à Saint-Pétersbourg. Son père est général et commande en tant que second la forteresse Pierre-et-Paul. En 1922 - Nicolas n'a que huit ans - il devient orphelin, reste avec ses deux soeurs et sera recueilli par le couple Fricero, industriels en Belgique.

Arraché à sa terre natale, il fait de vagues études, voyage beaucoup (au Maroc, notamment, où il découvre les sujets qui ont inspiré les peintres orientalistes), suit les cours de l'Académie d'Art contemporain où il rencontre Fernand Léger, puis entre dans la Légion étrangère !

En 1946, sa première épouse, Jeannine, meurt après lui avoir donné une fille, Anne. Il épouse Françoise presque aussitôt, est naturalisé Français en 1948. Il peint et son ami et marchand Jacques Dubourg vend bien ses tableaux, notamment aux États-Unis.
Il devient l'ami de René Char, s'installe en Provence où il aura trois autres enfants avec Françoise.
Mais la passion s'empare de lui quand il rencontre Jeanne, femme mariée et mère de famille qui accepte une liaison épisodique qui le rend fou de frustration. Il achète une superbe résidence dans le Lubéron, « Le Castelet ». Il est totalement dépendant de sa maîtresse. René Char le surnomme « Vermillon » (cf P  27).

Il déménage à Antibes où Jeanne s'est installée avec mari et enfants. Torturé par son « amour d'idiot », il peint les tableaux à la chaîne (266 en 1954!) : peindre devient un « véritable combat ».

Passionné de musique, il assiste en 1955 à un concert proposant une oeuvre d'Anton Webern, compositeur viennois élève de Arnold Schönberg avec qui il forme la « seconde école de Vienne » en compagnie d'Anton Berg. De Staël apprécie cette musique novatrice, il ressort bouleversé de la salle de spectacle et tente en quelques jours de restituer son émotion.

Sa création est un éclat omniprésent de vermillon, qui met le feu à la toile et sur lequel se détachent un piano, aux angles vifs et d'un noir coupant, puis une contrebasse aux tons d'ocre cernés de blanc, aux formes féminines, douces et rondes, énorme sur le devant de la scène. Entre les deux, un amas de partitions.

L'analyse de ce tableau s'appuie sur les sentiments et émotions contradictoires ressentis par l'artiste. Une femme - passion, aiguë et intransigeante, une femme- douceur, rassurante et patiente. La première, femme-piano, incarne l'artiste soliste, celle qui occupe la première place. La seconde a pour vocation d'accompagner, doucement. En toile de fond, un éclaboussement intense de rouge vif (« rouge majeur », disait Denis Bayle, dans un livre à lire absolument). Edouard Dor interprète cette omniprésente tache rouge : un rideau de scène ? Mais où sommes-nous ? Devant, en attente du début du concert ? Ou derrière, morts de trac car il va nous falloir jouer devant un public ?

Le saut du second étage de son atelier à Antibes, le suicide de Nicolas de Staël, dans la nuit du 16 mars 1955, ne serait donc que l'expression de son incapacité à choisir, à cesser de souffrir entre deux désirs incompatibles ? L'idée est séduisante, la démonstration riche et argumentée.
L'auteur complète son propos par une confrontation avec le « Nu couché bleu », contrepoint intéressant qui apporte de nouvelles interprétations de l'oeuvre de l'artiste.

Un livre riche et passionnant qui vient, en ce qui me concerne, compléter très opportunément une lecture plus ancienne et passionnante également : « Rouge majeur » de Denis Bayle. Tout comme l'auteur, j'aimerais aller à Antibes, au musée Picasso, pour y passer de longs moments devant ce tableau qui m'a laissé une profonde impression.

Merci à Babelio et à sa "Masse critique privilégiée" pour cette belle découverte.

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« Le Concert » est une toile gigantesque. La dernière oeuvre de Nicolas de Staël, qui se suicide dès qu'il l'a terminée.
L'auteur de cet opuscule l'aime tout particulièrement, puisqu'il est allé la contempler « plus de cent fois ».
Que dis-je ? « aimer » ? N'est-ce pas un verbe trop faible pour traduire les sentiments d'Édouard Dor ? N'avoue-t-il pas : « dès que la vie me semble un peu trop fade ou trop pénible, j'ai pris l'habitude d'aller, à Antibes, passer quelques précieuses minutes avec ce tableau. »
On parle souvent d'un livre ou de la musique d'une vie. Pour Édouard Dor, c'est « le Concert » qui joue ce rôle.
Son ouvrage est court. Il ne compte même pas cent pages. Mais quelle force et quelle richesse dans ces quelques lignes !
Si j'aime énormément la peinture, hélas, je n'y connais pas grand chose. Il y a des années, à la porte de mon bureau , dans des tons gris et bleus, la reproduction d'un bateau peint par Nicolas de Staël. Combien de fois ne me suis-je pas perdue dans sa contemplation. Il m'aidait à m'évader lors d'une réflexion difficile. J'entendais le bruit des vagues, le cri des mouettes. Mon esprit voguait vers l'infini. Aussi l'artiste est-il devenu un de mes préférés. Je n'ai pas eu la chance d'aller admirer ses oeuvres à Antibes, comme Édouard Dor. En revanche, j'ai acheté plusieurs volumes qui lui sont consacrés. J'étais donc curieuse de découvrir l'analyse de ce « Concert » dont le titre m'intriguait, puisqu'aucun musicien n'y figure.
Dès les premiers mots, mon coeur se serre : « dans un état d'extrême solitude, Nicolas de Staël le peignit en trois jours, avant de se jeter dans le vide depuis la terrasse de son atelier. C'était dans la nuit du 16 mars 1955. » C'était le jour de ma naissance... Je le savais, bien sûr. Et cela me cause toujours le même choc.
L'auteur commence en nous résumant la vie du peintre. Je découvre que, orphelins, les enfants De Staël sont recueillis par un couple « qui habite une grande propriété à Uccle » et Nicolas s'inscrit à l'Académie royale des Beaux-arts de Bruxelles. J'ignorais totalement qu'il avait vécu et étudié dans mon pays.
En évoquant ses amours, Édouard Dor explique que, quoique marié à Françoise, qu'il aime, pourtant, il a eu un véritable coup de foudre pour Jeanne, qui devient sa maîtresse, sa muse et qui le fait énormément souffrir. Il est déchiré entre ces deux femmes.
Peu avant la réalisation du « Concert », Nicolas de Staël peint le « Nu couché bleu », dont le modèle est Jeanne. Édouard Dor établit un rapport, une concordance entre les deux oeuvres dont le fond est d'un rouge intense. Une analyse très subtile, très convaincante fait (re)découvrir ces deux toiles. Attire le regard sur des détails auxquels, sans doute, n'aurait-on pas prêté attention. En donne une interprétation audacieuse et vraiment originale.
Les oeuvres, reproduites dans l'ouvrage, sont d'une qualité exceptionnelle.
Au cours de ses explications, l'auteur décrit avec précision l'atelier d'Antibes. Mais pas besoin de se lancer dans une recherche sur le net, il suffit de tourner la page. Une photo permet de visualiser l'endroit.
De nombreux extraits de correspondances, de poèmes enrichissent le texte.
J'ai appris énormément de choses. J'ai été enchantée de cette lecture. J'ai eu l'impression d'en ressortir un peu moins bête qu'avant.
Mon seul regret : n'avoir, hélas, aucun pouvoir magique qui me permette, d'un claquement de doigts, de me téléporter face aux tableaux, de les admirer d'un autre oeil.
J'adresse donc un immense merci à Babelio et Masse critique pour m'avoir permis cette extraordinaire découverte, ainsi qu'aux éditions Espaces et signes qui m'ont offert ce précieux petit livre.
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Quand on pense à la peinture de Nicolas de Staël, on voit des à-plat de couleurs vives et lumineuses.
Son dernier tableau, « le concert », ne déroge pas à la règle.
Il présente un fond rouge avec, au premier plan, un piano à queue et une contrebasse séparés par des feuillets/partitions.
Il l'a peint en trois jours, en mars 1955, dans son atelier d'Antibes, juste avant de se donner la mort.
Ce petit livre de 90 pages ne prétend pas présenter cet artiste, ni même une partie de son oeuvre.
C'est un instantané de ses dernières semaines avec une évocation de ses tourments, sa vie sentimentale passionnée et douloureuse, son besoin vital de s'exprimer par la peinture.
D'où ce tableau qu'il peint après deux concerts à Paris consacrés à Webern et à Schönberg et qui sera son oeuvre ultime.

L'oeuvre de Nicolas de Staël est tellement importante et complexe que ce petit ouvrage ne peut être qu'un aperçu de celle-ci, et je l'ai pris comme tel.
Il m'a remis en mémoire quelques éléments biographiques du peintre et m'a surtout donné envie de visiter le musée Picasso à Antibes qui propose plusieurs de ses tableaux.
Et de lire la biographie réputée de Laurent Greilsamer, « le prince foudroyé ».

Merci à Babelio, Masse critique et les éditions Espaces et Signes
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Vidéo de Edouard Dor
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