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sur 4217 notes
J'abandonne. Prix Goncourt ou pas, je n'en peux plus, je capitule.

Une histoire d'un homme incarcéré qui aurait pu être intéressante sans ces sempiternelles digressions sur sa vie passée qui m'ont semblé soporifiques à souhait.

Prix Goncourt ? Chef d'oeuvre, livre incontournable à lire, non mais, je rêve, j'ai l'impression qu'on prend les lecteurs pour des imbéciles. Ce roman trouve son lectorat, tant mieux pour lui. Karine Tuil avec Des choses humaines était en lice pour le Goncourt, d'accord, son roman est une belle réussite selon moi. Une histoire qui se tient, une écriture fine et psychologue. Mais ici, à quoi ça sert de nous parler d'un père pasteur marié à une femme affublée aux films porno, à nous parler mécanique, pneus et huile et j'en passe. Certes, la plume sait se montrer drôle, ironique, mais selon moi les passages sur le passé de Paul desservent totalement l'histoire de fond.

Je ne saurai jamais pourquoi Paul est incarcéré et finalement, je m'en balance quelque peu.
Quel ennui ce livre Goncourt 2019.
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°°° Rentrée littéraire 2019 #31 °°°

C'est l'histoire d'une vie, celle de Paul Hansen, emprisonné à Montréal, qui déroule ses souvenirs des années 1950 aux années 2000, du Toulouse de sa mère au Jutland natal de son père danois, en passant par le Canada algonquin de la femme de sa vie.

Ceux qui suivent et aiment Jean-Paul Dubois aimeront ce roman, c'est mon cas ; les autres découvriront un univers humain et touchant, des personnages pittoresques, des phrases ciselées et profondes.

Le monde de Dubois est tragique, violent, la vie y est injuste ( décès prématurés, les 6m² d'une cellule, la solitude ) mais le burlesque n'est jamais loin. On sourit beaucoup en découvrant la formidable ronde des personnages qui entourent Paul : son père pasteur qui perd la foi, sa mère soixante-huitarde qui se bat pour que Gorge profonde soit diffusé dans son petit cinéma d'art et d'essai, son épouse Wimona qui pilote un aéroplane. Et surtout, le truculent Horton, son compagnon de cellule, Hells Angel incarcéré pour meurtre, un homme et demi qui tombe dans les pommes lorsqu'on tente de lui couper les cheveux.

L'humour comme antidote à la dureté de la vie, la tendresse humaine aussi. Durant 20 ans, Paul a été surintendant d'une résidence, homme à tout faire, gardien d'immeuble, un travail qui laisse peu de temps mais qu'il a pratiqué avec bienveillance, dans le respect des autres, toujours prêt à aimer les âmes seules, à aider les mamies en détresse.

Jusqu'au jour où tout bascule. Jean-Paul Dubois dévoile assez tard dans le récit les raisons de l'incarcération de Paul. C'est là que le roman bascule aussi dans une ambiance très mélancolique qu'on a lu monter crescendo. C'est là que le roman prend une ampleur presque philosophique. Cet immeuble devient la métaphore de notre monde actuel. Il ne faut pas grand-chose, juste l'arrivée d'un gestionnaire manipulateur et autoritaire, pour que la douceur de vivre en communauté disparaisse, remplacée par un monde arbitraire, bureaucratique, quasi totalitaire.

Paul n'est pas de ce monde-là. Il ne le sera jamais. L'auteur compose ainsi un magnifique portrait qui exalte l'aspiration à la liberté, qui sublime le refus de se soumettre à autre chose qu'une éthique personnelle fait de droiture. Paul est seul mais digne. Il trouve la consolation dans un dialogue très vivace avec les fantômes de son passé qu'il convoque le plus qu'il peut.

Ce livre fait du bien et rassure dans le flot des désillusions. Il est pourtant fort mélancolique et narre l'histoire d'une chute, mais ce qu'on retient, c'est la bienveillance humaniste, la tendresse humaine dont fait montre Jean-Paul Dubois à l'égard de ses personnages. Il m'a fait du bien, souvent rire ... même si je lui préfère l'indépassable Une Vie française. Merci Monsieur Dubois.
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Jean-Paul Dubois a l'art de vous attacher immédiatement à ses personnages, et l'on a une seule envie, dès les premières lignes, de savoir comment Paul Hansen s'est retrouvé derrière les barreaux de la prison de Bordeaux, à Montréal. Qu'est-il arrivé à ce fils de pasteur danois pour être amené à partager son quotidien et sa cellule avec un Hells qui ne rêve que d'une chose, c'est de couper en deux tout humain qui se met en travers de son chemin?

On reprend donc les choses au commencement, la rencontre improbable de ses parents, l'évolution divergente de ces deux êtres, jusqu'au point de non-retour et à la séparation. le pasteur émigre au Québec, le fils le rejoint et l'histoire se construit.

Outre le suspens crée par la question posée au départ, l'histoire est passionnante; Les personnages sont saisis dans ce qu'ils ont de plus universels et tout ce petit monde sème peu à peu les jalons du drame ultime.

Que dire du compagnon d'infortune, que le narrateur compte comme un homme et demi, ce qui exacerbe l'exiguïté relative de la cellule? Ce sale type est extrêmement sympathique, avec sa philosophie de comptoir et ses affirmations à l'emporte-pièce, contrastant avec ses fragilités inattendues.

Roman bien construit, pétri d'humour malgré la gravité du sujet, avec des dialogues réjouissants et une belle plume.

Une vrai réussite de cette rentrée.
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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A quoi cela tient-il, donc, d'aimer un auteur au point de trouver en chaque phrase une résonance au fond de soi ?


Je peux l'affirmer en toute certitude : Jean-Paul Dubois fait partie de mes écrivains préférés, et le roman qu'il vient d'écrire en est la confirmation.
Rempli d'humanité, de faiblesse humaine, d'effort pour faire son devoir le mieux possible même si la foi en lui s'en est allée, d'amour pour son père, pour sa femme, pour son chien, plein d'humour aussi, humour noir, entendons-nous bien, « Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon » est pour moi un chef-d'oeuvre de justesse décliné dans un style percutant.


L'histoire ? Paul Hansen est en prison. Oh, pas pour longtemps, 2 ans. Mais ce n'est pas un voyou, disons qu'il n'a pas su refréner un accès de colère bien justifié.
Il se retrouve dans la même cellule qu'un « Hell's Angel », un musclé, un « homme et demi ». Sa bécane, c'est son dieu. Mais sous la carcasse dure perce quelquefois la fragilité, et cela fait sourire, avec toute la tendresse possible.
Pendant cette détention, il se remémore sa vie depuis son enfance et la perte de ses 3 amours : son père, sa femme, son chien.
Paul Hansen a un père danois et une mère française, et vit à Toulouse durant son enfance et son adolescence. le couple de ses parents est antinomique : père pasteur et mère directrice d'une salle de cinéma qui n'hésite pas à passer des films plus que sulfureux. de Toulouse à Montréal, en passant par Skagen, perdue dans les sables là-bas tout au nord du Danemark, Paul Hansen trimballe sa vie du mieux qu'il le peut : « J'avais la patience d'un ange et surtout ce goût qui ne me quitterait jamais, cette envie de réparer les choses, de bien les traiter, de les soigner, de les surveiller. » Des choses aux gens, il n'y a qu'un pas, plein d'humanité.


Vraiment, je recommande la lecture de ce roman, pour la bienveillance dont Paul Hansen fait preuve, bienveillance qu'il tient de son père pasteur, malgré la vie qui n'est pas facile et les coups du sort. Pour l'humour. Pour la vivacité d'esprit et les références littéraires que tout le monde connait et qui nous font sourire. Pour l'amour. Pour cette connaissance sans concession des êtres humains, qui n'habitent pas le monde de la même façon, évidemment.
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C'est dans une cellule de prison à Montréal que débute le roman. Paul Hansen, le narrateur est incarcéré depuis le 4/11/2008, date de l'élection d'Obama, comme il le souligne. Il doit cohabiter avec Patrick Horton, "un homme et demi", en attente de jugement après le meurtre d'un Hells Angel. Ce colosse craint de tous lui offre une sorte de protection lui permettant ainsi de s'évader en rêvant éveillé avec auprès de lui la présence de ses morts chéris, Winona, sa compagne pilote, Johannes, son père et Nouk sa chienne qui comprend tout.
Tout en nous racontant sa vie carcérale avec la promiscuité, le froid glacial durant l'hiver, les rats, auprès de ce très versatile Horton qui peut exploser de colère ou alors devenir sentimental et presque attendrissant, Paul revient petit à petit sur son enfance radieuse auprès de son père, pasteur à la foi chancelante, originaire du Jutland du Nord (Danemark) et de sa mère Anna, athée, née à Toulouse qui reprendra le cinéma de ses parents après leur décès accidentel. Cependant des frictions inévitables vont naître entre les époux et iront crescendo. Ils se sépareront et Paul ira rejoindre son père au Canada et deviendra concierge à L'Excelsior, une résidence pour retraités aisés.
Jean-Paul Dubois va ainsi faire défiler le passé du narrateur en le mêlant au vécu d'aujourd'hui en prison. Il nous tiendra en haleine jusqu'au bout, ne nous dévoilant qu'au dernier moment, la cause de son emprisonnement. Car, énigme, il y a. Comment cet être si doux, si sympathique, si altruiste et si dévoué a pu se retrouver en prison ? En tout cas, Paul n'affichera aucun remord et, j'avoue le soutenir...
C'est un roman plein de mélancolie, de fraternité, de tendresse, d'amour mais aussi de révolte à l'égard de toutes les formes d''injustice et, il faut le dire d'un peu de désespoir tout de même.
La vie carcérale est très justement décrite et analysée.
La noirceur de certains personnages ou de certains côtés de la vie, la perte également sont relatés de manière très juste et souvent avec un humour très fin qui magnifie les propos. Jean-Paul Dubois arrive à nous faire rire, même du pire. Mais il sait également fort bien nous parler de la générosité !
Il y a les gens formidables, généreux avec qui l'on vit des moments de bonheur intenses et les gens mesquins, égoïstes, orgueilleux ne pensant qu'à leur ego. Souvent le pire côtoie le meilleur.
Les rêveries que s'accorde le narrateur avec ceux qu'il a aimés et ne sont plus, sont de toute beauté et chargées de poésie.
J'avais lu avec plaisir "le cas Schneijer" et "La succession", mais, avec "Tous les gens n'habitent pas le monde de la même façon", j'avoue un véritable coup de coeur pour ce roman extrêmement poignant et passionnant, Prix Goncourt 2019 !
À noter Paul et Anna, personnages fétiches de ces trois romans.

Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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♫Une araignée m'a dit "bonsoir", elle se traînait au crépuscule
Depuis que mon âme bascule vers des pays plus mécaniques
Depuis que gavé de musique, je vais porter ma gueule ailleurs
Une araignée m'a dit "d'ailleurs, le tout c'est d'avoir la pratique "
Muss es sein ? Es muss sein ! ♫
-Léo ferré - 1976 -
---♪----♫----🏍⛓----🍁----⛓🏍----♫----♪---
Tout un ressenti, le mérite de la concision...
"Tout ce qui nous entoure n'est que vie, chaque chose a son sens et son prix, et il suffit de préter son attention et son regard pour comprendre que nous faisons tous partie d'une gigantesque symphonie qui, chaque matin, dans une étincelante cacophonie, improvise sa survie" - p87 -
Affection, défection,
Cacaphonie, défécation
Cutille, cortex et médulla
Ecrin pratique pour ranger les doutes, la foi
Irréfragable envie
Petite panique
Nearer,my God, to thee
Musique du Titanic
Hells Angels , Harley Davidson
Cellule grise, Parking sonne
Introspection, choc des passions
Idoine température, choc des cultures
Spécialiste en tout, qualifié en rien
Révéler la meilleur part de chacun
Même si c'est une croix
Qui t'a élevé
♪Car ton bras sait porter l'épée,
Il sait porter la croix!
Ton histoire est une épopée
Des plus brillants exploits.♪
♪Quel temps perdu
A les aimer pour rien
Tous tes ennuis, chagrins
Oui, tu t'en souviens
Et t'as souffert l'enfer
Et t'as le coeur aussi dur
Aussi dur que... Dubois♪
(Ô Canada selon poème d'Adolphe-Basile Routhier,
et arrangement largement inspiré de Johnny Hallyday)
Puisque l'homme est un ours qui a mal tourné
et que l'ours est un écrivain comme les autres
il est normal que tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon !
Muss es sein ? Es muss sein ! Cela doit-il être ? Cela est !




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Justice et loi ne font pas toujours bon ménage.

Paul a été durant des années l'intendant attentif d'une copropriété pour le plus grand bonheur des résidents, jusqu'au jour où un nouveau président Sedgwick, est élu, et ce cost killer, technocrate obsédé par les économies de bout de chandelle, commence à harceler Paul avec une batterie de notes de service et de remarques désobligeantes, sans la moindre considération pour l'oeuvre accomplie antérieurement.

La canicule et l'été arrivent, Paul plonge discrètement dans la piscine de la résidence, et Sedgwick le licencie pour faute. C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase et Paul redessine Sedwick lors d'une bagarre jubilatoire ... qui l'envoie à l'ombre partager injustement une cellule avec Horton.

Jean-Paul Dubois nous offre des pages superbes en mettant en scène des personnages attachants en qui le lecteur s'incarne aisément. Réquisitoire terrible contre la violence quotidienne que les élus et les technocrates infligent à des électeurs abrutis par des campagnes de communication qui les asservissent et les enchainent.

Ce prix Goncourt 2019 rejoint à mes yeux celui de 1940 attribué à Francis Ambrière en 1946 pour avoir décrit "les grandes vacances" offertes par les allemands à nos deux millions de prisonniers. A court terme le législateur peut freiner la révolte mais la fraternité et la justice l'emportent à terme.
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Le nouveau roman de Jean-Paul Dubois est une plongée dans les affres des rapports humains, un dialogue d'anthologie.


Comment cohabiter dans une cellule de 6 m² avec un géant, Patrick Horton, un homme et demi, "qui s'est fait tatouer l'histoire de sa vie sur la peau du dos", celle d'un Hells Angel.

Il est difficile d'imaginer qu'un homme de sa dimension puisse se plaindre de douleurs à une dent sans avoir le courage de se faire soigner,
d'espérer qu'une famille de rongeurs le laisse indifférent, ou de prier pour qu'il devienne plus discret en passant à sa toilette,
et cesse ses vocalises imitant le vrombissement des bielles entrecroisées d'une Harley-Davidson.


Il faut pour accepter un tel colocataire, une patience d'ange, comme celle de Paul Hansen, qui ne connaît que par la rumeur les Hells Angel. 
Concoctées par Jean-Paul Dubois après une insomnie de 31 jours, les 240 pages de son dernier livre, "Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon", offrent tout au long de 2 années d'enfermement, un dialogue inclassable entre deux détenus d'une cellule de la prison de Bordeaux ( Montréal) que tout oppose (pourquoi ne pas imaginer ce dialogue entre Depardieu et Michel Blanc).


Le jeu scénique préféré de Jean-Paul Dubois est d'inviter, les bons et les méchants, et dans le langage de Jean-Paul Dubois, confronter les crapules aux bienveillants.

Il donne d'ailleurs une définition assez précise d'une crapule ou d'un salopard incandescent : tout l'attirail d'un gommeux, l'archétype du fourbe cauteleux, du chacal sournois, mélange de familiarité et d'arrogance, de technicité et de mépris, fervent et résolu à veiller scrupuleusement sur tous les détails, le pervers adepte de rudoyer la piétaille.


La bienveillance est incarnée par Paul Hansen, mais aussi largement par son père le Pasteur Johanes Hansen et la lumineuse Winona qui le fera chavirer. A ce moment de leur histoire le bon pouvait encore l'emporter, largement.
Mais un compagnon de route Noël Alexandre, l'a établi un jour capitaine du bateau l'Exelsior.


L'Excelsior était un immeuble à l'image de sa piscine. "C'était un immeuble fragile, fantasque aussi, joueur et primesautier. Été comme hiver, il fallait toujours garder un œil sur lui. Sinon, profitant de la moindre inattention, il risquait de lui fausser compagnie".

"Il en allait alors de l'Excelsior comme du dentifrice, prompt à gicler hors de son tube, moins fervent pour y retourner. Page 150".

Fallait-il que la cabane tombe sur Nouk, le chien ? Jean-Paul Dubois est un inaltérable amateur des anti-héros, c'est là son charme, celui d'écrire des contes qui finissent mal.
Un anti-héros façon Dubois est un personnage optimiste, un peu naïf, dont la vie s'égrène au jour le jour, simple et nonchalante. Il est convivial, aime la nature, les amis, et s'il se trouve confronté à une situation singulière et dramatique, c'est contre nature qu'il y fait face.


Il avoua face à l'immense crapule, président du syndic de copropriété' Monsieur Sedgwick, : ces quelques mots,"il réveillait en moi l'éducation que m'avaient prodiguée les loups", puis comme Monsieur Sedgwick poursuivait ses diatribes,
"foutez-moi ce putain d'animal dehors je ne veux plus le voir ! C'est clair !"
"C'est alors que les loups m'ont montré le chemin, j'ai bondi je l'ai percuté...Ajouta t-il à la page 234."


Paul Hansen était dans cet état d'esprit face au juge, Gaëtan Brossard, au physique de Viggo Mortensen. Il regrettait, sans le dire le plus sincèrement, de n'avoir pas eu davantage de temps ou suffisamment de force pour briser tous les os de la carcasse de ce type méprisant, imbu de lui-même et répugnant.


Viggo Mortensen répondit à son silence par: "j'attendais autre chose de vous Monsieur Hansen une réaction plus appropriée".


Comme son père le pasteur, Paul est totalement démuni face à la chance inespérée ou à la malchance cruelle. Il ne pourra à aucun moment appliquer la règle de son compagnon d'infortune, "une moitié de plaider coupable".

Personnage entier, en empathie avec les siens, avec son compagnon d'infortune trop souvent grincheux, Jean-Paul Dubois fait de Paul Hansen notre ami, un meilleur ami qu'on aimerait croiser dans sa vie, juste un homme plein d'humanité. Un duo à l'humour décapitant !
Chapeau l'artiste.
Un livre culte, il en a toutes les ficelles, les excès, les humeurs.
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C'est un Prix Goncourt pas ordinaire que celui décerné début novembre 2019 car Jean-Paul Dubois, déjà lu avec La succession, m'a entraîné dans une aventure essentiellement humaine, d'une richesse inouïe en rencontres, du Danemark au Canada, en passant, bien sûr, par Toulouse.
Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon, cette phrase du grand-père danois de Paul Hansen, le narrateur, résume bien une histoire qui débute en 2008, dans la cellule de la prison de Bordeaux… pas en France, mais dans le pénitencier de Montréal.
Ainsi, peu à peu, l'histoire familiale de Paul se dévoile et m'a fait passer par tous les états, de la curiosité la plus intense au ravissement plein de tendresse. Curieux, je voulais savoir ce qui valait à Paul ces deux ans de prison ferme et surtout pourquoi il se retrouvait au Canada.
Ravi, puis attendri par l'amour de Winona, moitié indienne, moitié irlandaise, ainsi que par la présence si rassurante de Nouk, petite chienne adorant se rouler dans la neige, je me suis laissé porter par l'histoire.
Les séquences en prison rythment le retour en arrière dans la promiscuité et l'ambiance bruyante due à l'incarcération, sans oublier les terribles rigueurs du froid à supporter comme la chaleur accablante de l'été. Patrick Horton, le biker, membre des Hells, son compagnon obligé de partager les 6 m2 de cellule et une intimité bien bafouée, donne l'occasion de sourire et de frémir, suivant l'état de ses humeurs.
Les parents de Paul, un couple plus qu'insolite, prouvent une fois de plus toute l'imagination de l'auteur. Anna Margerit, sa mère, tient un cinéma art et essai à Toulouse et a épousé Johanes Hansen, d'origine danoise, qui est pasteur, alors qu'elle est farouchement athée.
Quand le couple se sépare, Johanes perd son poste et n'en retrouve que dans une ville minière, au Canada où son fils le rejoint.
Leurs vies subissent de nombreux bouleversements mais Paul trouve un travail de superintendant à l'Excelsior, résidence de soixante-huit logements, dotée d'une piscine. Tout se passe bien lorsqu'un nouveau venu prend la tête du conseil d'administration…
Je n'en dis pas plus mais je souligne encore toute l'importance de Skagen, à l'extrémité nord du Danemark d'où vient Johanes. C'est un excellent endroit où se ressourcer en retrouvant toute la famille Hansen.
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D'un roman à l'autre, les personnages de Jean Paul Dubois partagent le même génome et l'auteur cueille ses histoires dans le même marronnier.
Ses doubles se prénomment presque toujours Paul. Il est difficile de vous dire à quoi ils ressemblent car les descriptions n'esquissent que les reflets de leurs ombres. Un effet miroir. Si l'auteur ne décrit pas l'emballage, on devine toujours chez les « Paul » de bonnes bouilles de victime, plus locataires que propriétaires de leur existence, plus fatalistes que révolutionnaires aux poings levés.
Le héros de « Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon » ressemble trait pour trait... de crayon à ce portrait-robot.
Paul a un père danois, pasteur exilé au Canada pour prêcher à proximité d'un gisement d'amiante à ciel ouvert et qui joua les derniers deniers du culte dans les champs de course. Un personnage très bien construit qui perd la foi et se réfugie dans le hasard pour continuer à croire en quelque chose.
Paul a une mère qui ne risquait pas une overdose d'instinct maternel. Elle exploita un cinéma d'art et d'essai à Toulouse et y programma dans les années 70 « Gorge Profonde ». Une liberté artistique incompatible avec les principes moraux et religieux du mari. Les fidèles s'indignèrent et la belle devint infidèle.
Chez Jean Paul Dubois, les héritages familiaux sont lourds à porter, comme un tatouage de jeunesse au milieu du front. Point d'inné, que de l'acquis, souvent bien mal. La question de la déliquescence du couple traverse l'oeuvre de l'écrivain. L'usure du temps et des sentiments.
Paul n'a pas bénéficié de circonstances atténuantes et il a le temps de nous raconter ses joies, ses peines et l'acharnement du destin car il purge une peine de deux ans de prison à Montréal pour des faits de violence.
Entre deux souvenirs, il nous livre le quotidien de la cellule qu'il partage avec Horton, un Hells Angels imprévisible qui attend son procès pour meurtre, réfractaire au bon sens et phobique aux rongeurs.
En prison, les heures ne manquent pas pour raconter et se raconter des histoires. du pain béni pour cet auteur qui ne découpe jamais la vie de ses héros en tranches, préférant les accompagner de la naissance au trépas.
le récit alterne des scènes assez désopilantes qui se passent entre les quatre murs de la cellule et le fil de la vie pré-carcérale de Paul, une corde raide qu'il traversa comme un funambule apatride et aveugle, sans filet de sécurité.
Suite à la séparation de ses parents et après avoir suivi son père au Canada, Paul fut pendant longtemps le super intendant d'une résidence de standing, concierge dévoué qui réparait aussi bien les robinets que les âmes des pensionnaires. Il fut aussi l'heureux mari d'une pilote d'avion, femme de caractère au sang Algonquin.
L'élection d'un nouveau président de syndic, un « cost killer » Trumpisé, plus affamé de rendement que de bons sentiments, allait précipiter la fin des beaux jours et conduire Paul à la case Prison.
Le récit ne sombre jamais dans la tragédie grâce à l'humour un peu « smart » et distancié de l'auteur qui possède le don d'enchanter le désenchantement de ses personnages. de la langueur, mais point de longueurs dans ce texte dont la lecture est aussi douce et fluide que celle du titre.
Chez Jean-Paul Dubois, les romans disposent de deux adresses postales : L'une à Toulouse (ville natale de l'auteur, et de l'auteur du présent billet, soyons chauvin) et une en Amérique, mais il ajoute des lieux insolites qui sont un prétexte à dénoncer les injustices du destin et celles des hommes (l'exploitation de l'amiante au mépris des alertes sanitaires, l'emprisonnement de la victime et non du bourreau).
Jean Paul Dubois est un écrivain dont l'univers ressemble à celui de Ian Mac Ewan et s'il creuse toujours le même sillon, j'adore fréquenter son exploitation.



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