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sur 722 notes
Vous vous en doutez aisément, c'est le film d'Anne Fontaine récemment sorti en salles qui m'a donné envie de lire ce roman. de Jean Echenoz, je n'avais jusqu'à présent lu qu'un seul titre, qui m'avait laissée sur ma faim (je ne sais même lequel c'était, c'est dire…). Mais j'avais envie de rester dans l'atmosphère de ce film délicat, aussi ai-je suivi les conseils qui m'avaient été donnés par quelques lectrices de confiance… Bien m'en a pris !

Le livre que l'écrivain consacre à Ravel se concentre sur les dix dernières années de son existence : de la veille de son départ pour une tournée triomphale sur le continent américain à sa mort, soit de 1928 à 1937. Mais ce n'est pas tant le récit des événements marquants de son existence qui nous est proposé que le portrait impressionniste d'un homme peu ordinaire. En quelques pages - le livre est bref et, pour peu que vous l'ouvriez un dimanche, comme ce fut mon cas, vous le terminerez dans la journée - Echenoz parvient à nous offrir une image très nette, mais aussi extrêmement subtile du personnage étonnant que fut Ravel.

Par petites touches, dans une prose simple et élégante, opérant à l'occasion quelques brefs retours dans le temps, Echenoz révèle son tempérament, sa détermination, son élégance, ses blessures intimes, cet improbable mélange de rudesse et d'affabilité, de raffinement et de rugosité. de la même manière, il relate ses tentatives restées vaines de remporter le prix de Rome, l'acharnement que cet ancien réformé mit à obtenir son incorporation dans les troupes envoyées sur le front de la Grande Guerre, les conditions de la création du Boléro, son incapacité chronique à trouver le sommeil et les assauts croissants d'une maladie qui attaqua son système cérébral et l'empêcha de continuer à composer jusqu'à son décès consécutif à l'intervention chirurgicale par laquelle on tenta de le soigner.

L'attachement et la tendresse d'Echenoz à l'égard de son personnage sont si manifestes qu'ils suscitent chez le lecteur un profond sentiment d'empathie. Rien de théâtral, pourtant. Tout se joue dans de menus détails, dans l'évocation d'une humeur passagère, dans une simple remarque, dans le choix d'un mot qui vient éclairer une scène. Pourtant, lorsqu'on referme la dernière page du roman, on ne peut qu'être étreint par l'émotion.

J'ignore quelles ont été les sources d'inspiration d'Anne Fontaine pour écrire le scénario de son film et le réaliser, mais elle avait certainement lu ce livre. J'y ai retrouvé une même construction, une même atmosphère intimiste, une même approche impressionniste, une même attention portée aux silences et aux détails permettant de révéler une personnalité. Phénomène étonnant, ayant lu le livre quarante-huit heures après avoir vu le film, de nombreuses images de celui-ci me réapparaissaient à la lecture des mots d'Echenoz. Un splendide doublé, en somme.
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Biographie partielle mais instructive sur le dernier grand compositeur français du XXeme siècle. Nous sommes au début 1928, à l'aube de son départ en tournée pour les Etats Unis et le Canada. On accompagne Maurice Ravel, fatigué, alors qu'il va quitter sa maison de Montfort-l'Amaury en Seine-et-Oise, le Belvédère. Ce sont les dix dernières années de sa vie.
Ce choix de Jean Echenoz n'est sûrement pas anodin, car c'est au retour de cette tournée triomphale qu'il écrira son fameux "Boléro" et fera de lui un génie musical.
Mais d'où vient ce génie ? Qu'est ce qui a inspiré cet homme, dandy aux frusques colorées, amateur de belles voitures, fumeur invétéré, amateur de bonne chair, mystérieusement solitaire malgré les cours incessantes qui l'ennuie, élève de Fauré, rival de Debussy, ami de Stravinsky, et intuitivement ouvert aux autres cultures (le jazz et le blues américain, les mélodies espagnoles, l'Asie...) ?
Dans ce court roman de 124 pages, Jean Echenoz, écrit les petits déclics, les renversements, les remises en causes, les découvertes de ce qui construit la légende.
Avec son écriture délicate, de la vraie dentelle musicale, il fait de ce compositeur discret, une chair animée de curiosité, d'un esprit fin, et conscient de ses limites.
On partage donc avec un certain privilège les dix dernières et riches années de la vie de Ravel. Cela nous donne l'envie d'en savoir plus sur l'origine de ce compositeur à forte personnalité, anti conformiste, et en prise sur son époque... Et surtout l'écouter !
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J'adore l'écriture de Jean Echenoz, précise, détaillée,le ton monocorde, voire distrait,avec une pointe d'humour saillant de temps en temps,l'air de rien.
Alors pour Ravel,les dix dernières années de sa vie au plus fort de son succès, c'est tout à fait top,le contraire du romantisme,le décalage et l'ironie du personnage,son côté obsessionnel, attaché à ses rituels et en même temps son assiduité aux mondanités.
Joli petit roman enCD lu avec la voix de l'auteur, qui lui rend toute sa mélancolie attachante .
Je me lancerais bien dans" Courir" et " Des éclairs" histoire de poursuivre la trilogie.
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Avec Ravel, Jean Echenoz sacrifie, une nouvelle fois, avec bonheur, à la monographie à visée biographique. Il retrace avec concision la dernière décennie du musicien qui s'acheva sur un lamentable ramollissement psychomoteur. le récit culmine sur la tournée outre-Atlantique triomphale et épuisante et la narration de la composition d'un des morceaux les plus joué de toute la musique universelle, son fameux Boléro. On découvre un homme dans son intérieur, au Belvédère, à Montfort-l'Amaury. Toujours tiré à quatre épingles, il s'adonne à une virulente tabagie n'arrangeant en rien sa constitution fragile, sujet qu'il est à l'insomnie, miné par un épuisement chronique, fort étourdi en conséquence. Bien qu'universellement célébré, c'est un homme seul en proie à l'ennui et dont la vie affective est un mystère, sinon un désert.

Jean Echenoz est un auteur à la prose impeccable, sans affectation, qui conduit un récit au pas de charge prenant le lecteur, séduit et conquis, par la main, et ne la lâchant pas qu'il n'ait conduit ce dernier là où il veut le mener. Remarquable.
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Ce n'est pas biographique, non plus un dialogue avec le musicien sur son processus d'écriture, mais un voyage au sein de son quotidien par des petits détails qui font de Ravel sa personnalité. Une démarche originale pour aborder un morceau de vie d'un très grand compositeur. Écrivains, musiciens et autres personnalités de son époque sont cités, à la fois pour nous situer dans le contexte social, mais aussi pour signifier combien cet homme était connu et aimé. Particulièrement touchant dans les dernières années de sa vie où la mémoire et les gestes de tous les jours sont absents ou oublié.
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Le style, le vrai ! Dans "Ravel", publié six ans avant, on trouve les prémices de l'écriture quasi parfaite de "14", le livre qui m'a fait connaître l'auteur et donné envie d'explorer son oeuvre plus avant. Un vrai bonheur de se laisser porter par la prose légère et précise de Jean Echenoz, comme une évidence.
Même épaisseur, cent-vingt pages, un format qui lui convient à merveille. Cent-vingt pages sur les traces de Maurice Ravel, ou plutôt de sa dernière décennie. Cent-vingt pages pour faire revivre l'ambiance de la période de l'entre-deux guerres, si riche sur le plan artistique, si propice à l'innovation et à l'exploration. le lecteur entre dans l'intimité de Ravel de la meilleure façon qui soit, par l'intermédiaire d'un incipit après lequel il est impossible de lâcher le livre : "On s'en veut quelquefois de sortir de son bain". le célèbre compositeur est en plein préparatifs pour un voyage de plusieurs mois.A travers ce périple, de la traversée sur le paquebot France aux multiples déplacements du Nord au Sud et d'Est en Ouest de ce vaste terrain qu'est l'Amérique, et d'autres voyages encore, en Angleterre, en Autriche, émerge le portrait d'un artiste reconnu, adulé, applaudi bien au-delà de son propre pays. Un peu capricieux, sûr de son art, un peu précieux...
Lien : http://motspourmots.over-blo..
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Comme à chaque roman de Jean Echenoz que je lis, ce que j'apprécie le plus, c'est la plume de cet auteur. Son écriture est légère, fluide. Elle s'envole … et l'on s'envole avec elle.

Dans ce livre, Jean Echenoz raconte certains passages marquant de la vie de Maurice Ravel de façon très romancée. Ravel dont il n'est aucunement fait mention du prénom. Alors que l'on connaît les prénoms des autres protagonistes.

Jean Echenoz, s'offre le plaisir de nous emmener dans diverses digression : sur le paquebot France sur lequel Ravel traverse l'océan pour aller aux Etats-Unis ; sur les affres de la création ; l'élaboration des signatures, les problèmes d'endormissement…

L'auteur met aussi en valeur le génie de la création musicale, les doutes du musicien, la pression, la concurrence, et sa déchéance…

Lien : http://coffresalivres.canalb..
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En commençant « Ravel » de Jean Echenoz, un roman paru aux Éditions de Minuit, je pensais lire une oeuvre qui parlerait musique, création. Sur une base biographique, avec des « citations » tirées de ses recherches, Jean Echenoz nous livre en réalité la vie d'un homme, qui se trouve être musicien, et faire des tournées dans le cadre de ses activités, aller aux concerts -qu'il dirige ou non-, faire des rencontres -mondaines ou d'interprètes.
L'essentiel de l'oeuvre porte en effet sur le quotidien de cet homme dans les dix dernières années de sa vie dans les années 1930, insomniaque, préoccupé de son habitus extérieur, aimant bien manger, le tout présenté dans des descriptions très détaillées. La vie d'un homme de plus en plus distrait, qui perd la tête en réalité, qui pense même qu'on va lui « couper cabèche », l'un des traits d'humour de l'écrivain.
le rythme du roman joue avec les attentes du lecteur, à qui il est dit plusieurs fois que ne sera pas développé ce qu'il attend ! Il est question du fameux Boléro, assez méprisé à l'origine par son créateur même, du concerto pour la main gauche -dénaturé par son interprète ce qui fait souffrir Ravel- rappel du respect que l'on doit avoir pour la création, l'interprète étant au service de l'oeuvre (Ravel ira jusqu'à dire qu'il est un « esclave ») et non la soumettant pour se révéler lui-même.
Une manière magistrale de laisser la place à l'oeuvre musicale, en creux, dans le silence, sur laquelle on ne peut écrire, mais qui existe par l'écoute attentive qu'on veut bien lui porter, attiré par sa modernité et sa nouveauté.
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Jean Echenoz nous fait partager les derniers moments de notoriété mais aussi d'intimité de Maurice Ravel : sa demeure avec son petit jardin, son amour pour l'élégance de ses tenues vestimentaires, son cercle de connaissances et d'amis, sa tournée triomphale aux Etats-Unis et sa lente déchéance psychique, quelques événements marquants de son existence.
Jusqu'au bout l'auteur montre son attachement à la vie, la préoccupation régulière de son entourage proche face à son état de santé avec une recherche permanente de solutions pour l'améliorer.
J'ai aimé le choix de l'écrivain de présenter davantage l'homme que l'artiste - compositeur.
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J'adore Boulez dont le répertoire était Debussy, Wagner la deuxième école de Vienne et Ravel bien sûr. La somme de sa musique ne représente au mieux qu'une vingtaine d'heure, rien de médiocre,, tout est parfait. Bref un biopic sur Ravel. C'est d'abord un livre d'Echenoz. Il y a le style, la faconde, l'ironie. Mais il aime ravel. Son affection transpire à chaque page ce qui en fait un livre chaleureux. Je n'ai pas trop aimé les biopics suivant Telsa et Zatopec. Il est heureux qu'il soit retourné au roman avec Envoyé spécial qui est une vraie réussite. J'aime bien aussi le dernier, Gérard Fulmard ou il prend de la distance avec la structure narrative, sortant du récit pour parler au lecteur.
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