Je suis bègue depuis ma plus tendre enfance, et malgré les années, je n'y comprends toujours pas grand-chose. Des mots deviennent imprononçables du jour au lendemain ; Je peux mettre une minute entière à prononcer une phrase de dix mots, mais une fois que c'est fait, je peux la répéter immédiatement de manière parfaitement fluide ; chanter supprime toute trace de bégaiement (mais chanter dans toutes les occasions de la vie courante n'améliore malheureusement pas beaucoup vos rapports sociaux).
Enfant, on m'a bien emmené chez quelques thérapeutes, mais tous ont jeté l'éponge au bout de quelques séances. Pas parce que mon cas était désespéré, mais parce qu'aucun d'entre eux ne m'a jamais entendu butter sur une seule syllabe, et que sans problème, on ne peut pas trouver de solutions.
Deux décennies plus tard, ce livre m'est arrivé dans les mains un peu par hasard. L'occasion pour moi de voir s'il y avait quelque chose de neuf dans le domaine. Point négatif : le bégaiement et ses causes semblent toujours échapper à la compréhension des professionnels. Point positif : quelques méthodes nouvelles ont émergés, avec des résultats encourageants dans certains cas.
Le fait que le livre soit destiné aux professionnels m'a beaucoup plu : on aborde le sujet sans langue de bois, et sans fausses promesses. Ça m'a arraché quelques grimaces de temps en temps, mais avoir un discours honnête est bien plus appréciable qu'avoir un moral qui joue les montagnes russes entre rêve et désespoir.
J'ai été agréablement surpris également que beaucoup de propositions s'appliquent aux adultes. Généralement, dans la littérature sur le sujet, la documentation se base principalement sur les enfants, et j'avais parfois l'impression que, comme j'avais raté le coche enfant, tout espoir d'amélioration s'était évanoui à l'âge adulte.
L'essai est à conseiller pour toutes les personnes concernées de près ou de loin par le bégaiement.
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Le courant le plus en vogue se développera grâce à ceux qui s’intéresseront moins à la température de la langue qu’à sa taille et à sa motilité avec, en conséquence, des remèdes plus radicaux, chirurgicaux cette fois, allant de la section du frein de la langue à l’incision directe. Différentes techniques de glossotomie furent préconisées, de l’incision latérale, par ceux qui considéraient la langue comme trop large, à l’apicale, pour ceux qui la jugeaient trop longue (Aétios d’Amida).
L’incision de la racine de la langue, afin de la séparer de son innervation et de lever ses spasmes lors du bégaiement, fut particulièrement (et durement) appliquée par Johann Friedrich Dieffenbach (1841), tandis que d’autres chirurgiens (Alfred Velpeau, Jean Zuléma Amussat) proposaient des sections discrètes de différents nerfs linguaux, des anomalies sélectives de motilité ayant pu, selon les cas, découler de leurs dysfonctions individuelles. Étrangement, les résultats rapportés semblèrent tellement encourageants qu’ils incitèrent la poursuite de ces pratiques. Il est vrai que l’ablation d’une partie de la langue peut réduire la propension à « parler tout court », et donc aussi le bégaiement, et que ces chirurgiens semblent n’avoir évalué que l’avenir postopératoire immédiat des patients.