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L'immense écrivain britannique, à qui l'on doit des oeuvres majeures telles qu'Howards Ends, Avec vue sur l'Arno (a Room with a View) ou encore le très osé pour l'époque “Maurice”, publié à titre posthume, où l'auteur offre à son personnage le coming out homosexuel (doublé d'un dépassement des classes sociales, très ancrées dans la société anglaise) qu'il ne pourra jamais faire, vivant sa propre homosexualité dans l'ombre, comme d'ailleurs un autre de ses fameux contemporains anglais William Somerset Maugham.

Ce qu'il reste de son oeuvre pour le grand public ce sont aussi les adaptations magistrales du couple de cinéastes James Ivory & Ismail Merchant, longues promenades bucoliques et sentimentales dans la campagne anglaise où l'on croise (excusez-moi du peu) Anthony Hopkins, Emma Thompson, Maggie Smith, Judi Dench, Daniel Day Lewis, Helena Bonham Carter ou encore Hugh Grant et qui nous font sentir l'odeur de l'herbe humide après la pluie sur le cottage, le bruit des shortbreads qui croquent entre les dents ou encore le tintement de la cuillère qui remue le sucre dans la cup of tea.

Et pourtant, c'est dans un tout autre registre qu'E.M. Forster nous immerge dans cette courte nouvelle de science fiction “The Machine Stops”. C'est le portrait d'une société tout entière soumise à la technologie que dresse l'auteur, une humanité ayant (du moins le croit-elle) définitivement coupé le cordon ombilical qui la rattachait à la terre nourricière. Mais ne nous y trompons pas, le progrès technique n'a pas d'odeur politique, et n'est pas synonyme de liberté ou d'égalité, il reste ce qu'en font les hommes, et en l'occurence, la vision dystopique de l'auteur nous plonge dans un monde dictatorial où fouler le sol de la terre est interdit…

Et de fait, nous sommes toujours plus, pour une partie d'entre nous, éloignés de la nature, ses dangers sont de moins en moins apprivoisés, ces manifestations jugées dégradantes, vulgaires, indignes d'intérêt. Il y a un orgueil proprement humain à dompter la nature, à la mettre au pas, voire même dans les projets financiers de certains, rendre la planète terre obsolète. Accumulation de savoirs déconnectés de l'expérience du réel et de technologies facultatives, asservissement à des créations numériques, Forster dépeint avec un siècle d'avance une réalité qui n'en finit pas d'advenir.

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Je connaissais le nom d'Edward Morgan Forster à travers les adaptations cinématographiques de certains de ses romans, notamment « Chambre avec vue » et « Retour à Howards End ». Jamais je n'aurais imaginé que l'auteur de ces délicates et romantiques histoires victoriennes avait oeuvré dans la science-fiction. C'est ce qui m'avait intriguée lorsque j'étais tombée sur cette nouvelle intitulée « la Machine s'arrête ». J'ai bien fait d'écouter ma curiosité, ce texte est tout simplement bluffant et au-delà de ses qualités, il m'a vraiment parlé intimement.

Avant de rentrer dans le vif du sujet et de vous dire en quoi cette nouvelle est formidable, je vais d'abord faire un aveu : j'ai un côté vieille conne. Je m'explique. Si je ne suis pas totalement opposée au progrès, il y a eu des avancées technologiques qui ont été de véritables bienfaits, je trouve qu'il faut toujours rester prudent et vigilant quant aux conséquences de certaines innovations. Je suis même à certains égards un brin réac en considérant que le fameux « c'était mieux avant » n'est pas totalement faux. Par certains aspects, l'époque actuelle me déplait beaucoup. Je la trouve tellement déshumanisée, désincarnée… Alors je me raccroche à des petites choses du passé, et j'essaie de les transmettre à mes enfants. J'écoute des disques vinyles parce que le rituel qui va avec donne une autre dimension à la musique et la fait moins ressembler à un acte de consommation immédiate. Je regarde des films en dvd ou en blu-ray, je ne télécharge pas illégalement parce que je considère que si je ne veux pas payer pour un film c'est que je ne veux pas vraiment le voir, j'aime guetter les sorties blu-ray de certains éditeurs et avoir le plaisir un jour de dire « ah enfin, ça fait 15 ans que j'attendais qu'il sorte ce film », je n'ai pas netflix parce que j'ai envie de regarder des oeuvres parce que j'ai fait la démarche de les acquérir pas simplement parce qu'elles sont disponibles et qu'il est de bon ton de les avoir vu. Je n'ai pas de liseuse, je ne lis que sur papier parce que j'aime la sensation du papier et j'aime regarder ma bibliothèque qui déborde même si c'est un crève-coeur quand il faut faire de la place. Je n'ai pas de compte instagram ni facebook et consorts parce que je n'aime pas quand il y a un intermédiaire dans les rapports humains. Je n'ai pas de smartphone, un mobile tout simple qui ne sert qu'à téléphoner, parce je pense qu'il ne s'agit pas là d'un vrai besoin et parce que je déteste voir ces gens incapables de quitter des yeux leur téléphone, ils marchent en le regardant, aveugles au monde qui les entoure et même lorsqu'ils sont à plusieurs, à une terrasse de café ou installés dans un jardin public, ils sont tous rivés à leurs téléphones, aveugles les uns aux autres, ensembles mais finalement seuls et leurs téléphones sont les prolongements de leurs mains. Bien sûr, il est impossible d'échapper complètement au progrès, après tout le monde est comme il est et à moins de se marginaliser on est obligés d'en accepter certains aspects, et puis je ne suis pas exempte de contradictions. Après tout, je suis sur babelio, je me sers d'internet pour acheter des choses… Simplement j'essaie de rester le plus libre possible.

Cette introduction très longue, trop longue sans doute, était nécessaire pour faire comprendre à quel point cette nouvelle de Forster m'a interpellée personnellement. Pour résumer le propos de ce récit d'anticipation, je vais me contenter de citer la 4ème de couverture : « Forster dépeint une société dans laquelle tous les besoins sont satisfaits par une machine omnipotente. Dans leur désir de confort total, leur obsession de se maintenir à distance des autres et du monde physique, et après avoir exploité les richesses de la nature, les humains s'en remettent donc à la seule technique, devenue leur idole. ». Ce résumé est à la fois pertinent et insuffisant. Il donne les très grandes lignes mais on ne ressent pas la richesse du propos et surtout on ne perçoit pas à quel point il est actuel. En 1909 Forster parlait de nous. Il parle d'une société dans laquelle on communique à distance, où on est sans cesse sollicités par sortes de notifications, il parle d'un monde uniformisé où la distance est abolie, où on a des centaines d'amis mais où chacun vit replié sur soi. Ce texte est effrayant de lucidité. Vous comprenez maintenant pourquoi j'ai trouvé cette lecture saisissante. La vision de Forster correspond très bien à ce que je trouve désespérant dans le monde moderne. du coup, je me suis identifiée avec force à Kuno, le personnage de la nouvelle qui a envie d'autre chose, qui veut sortir de chez lui, aller dehors, se couper de la Machine.

Il y aurait beaucoup à dire sur « la Machine s'arrête ». C'est un texte brillant mais j'ai été tellement sidérée que je peine à argumenter de façon rationnelle. Il y a quelque chose d'assez bouleversant quand on découvre un texte qui exprime si bien ce que l'on pense soi-même, qui raconte les angoisses que l'on ressent face à certaines évolutions du monde… En 80 pages un lien insaisissable s'est créé entre moi et cet auteur. C'est certain, entre Forster et moi, ce n'est qu'un début.
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Dystopie hurlante agée de 110ans, ce court récit est pourtant d'une fraicheur saisissante.
Y'a de quoi jalouser la bonne littérature qui ne vieillit pas, elle.

L'Homme assoiffé de technologie à réussi à créer une machine, La Machine, qui subvient à tous ses besoins, il vit alors dans un type de chambre universel et consensuel qui rappelle l'épisode 15 millions de mérites de l'excellente série Black mirror. Agencée comme une alvéole dans un nid d'abeilles un peu facon Matrix, cette chambre mène pourtant à des vomitoires donnant l'accès aux transports en commun qui permettent de voyager partout, pourtant l'homme ne se déplace presque plus puisqu'il a tout a porté de doigt et que la planète devient extrèmement uniformisée.
Mais ce petit « techno-cocon » comme l'appellerait certainement Alain Damasio, n'est pas au gout de tous…

Je m'arrête ici pour ne pas spoiler, je préciserai juste qu'on y retrouve tout l'humanisme profond dont faisait preuve E.M. Forster, dans cette lecture riche qui peut se révéler entre autre comme un plaidoyer pour la nature et un questionnement quant à la providence de la mécanisation extrême et ses dérives.

Un petit récit puissant et surement en avance sur son temps car plusieurs technologies contemporaines y sont citées avant d'avoir été inventées, on se sent un brin soulagé que depuis Isaac Asimov ait suffisamment marqué les esprits avec ses trois lois de la robotique et qu'elles soient aujourd'hui appliquées.

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AVANT DE NE PLUS TROUVER LE BOUTON : OFF...

Nous sommes quelque part dans un futur imprécis, plus ou moins proche de notre maintenant, bien qu'il semble que notre civilisation issue des développement technologiques inaugurés à l'aube du XXème siècle ait pourtant lamentablement échoué, s'étant parfaitement fourvoyée dans un machinisme idiot, proposant à l'homme d''aller de plus en plus vite, d'un lieu à un autre, tandis qu'il était pourtant tellement plus simple d'imaginer que ce serait désormais les choses - matérielles ou dématérialisées - qui se déplaceraient dorénavant à notre place. La terre ayant été partiellement ou totalement détruite, l'humanité s'est rapidement repliée sous terre. Malgré un réseau dense et efficace de lignes intercontinentales de dirigeables très rapides - l'aviation n'est encore qu'à ses balbutiements et semble encore incapable de pouvoir servir de moyen de transport de masse -, les voyages sont devenus de plus en plus rares - pourquoi rallier un point B en partant d'un point A lorsque tous les points se ressemblent invariablement ? - et la plupart des besoins physiques, intellectuels et spirituels sont pris en charge par la "machine omnipotente", chacun participant ainsi de cette sorte de doux enfer climatisé acceptable et accepté.

E.M. Forster, pour illustrer son propos, nous fait suivre la destinée d'une mère et son fils. La première, Vashti, est une femme que l'on pourrait qualifier de "bien dans son époque", conférencière - sans jamais avoir nécessité de sortir de son antre/bureau/salle à manger/chambre - par le biais de son "cinématophe", un genre de "skype" bien avant l'heure, ne remettant en rien, bien au contraire, les avancées réformistes qu'elle vit, ou plutôt subit, au sein de cette pseudo-démocratie des idées - les êtres humains ne sont plus que des producteurs "d'idées" dont on ne voit jamais, comment ni à quel moment elles sont opérantes -. le second, son fils Kuno, semble vouloir se rebeller contre cet état de fait. Se rendant compte du caractère blasphématoire de ses pensées à l'encontre de cette divinité qu'est sur le point de devenir La Machine - un Dieu parfaitement vide et mécanisé, sans âme, sans contenu, sans désir -, il insiste à plusieurs reprise pour que sa génitrice vienne physiquement le voir. Au passage, nous apprenons que les liens de parentalité sont réduits à leur seule fonction biologique, l'éducation étant confiée à des tiers : un monde décidément de rêve, n'est-ce pas ? Malgré ses réticences au déplacement, cette dernière se résout à entendre cet enfant pour lequel elle ressent malgré tout une certaine empathie, mais c'est pour mieux écouter le récit sacrilège d'un jeune homme rebelle à cette nouvelle forme d'autorité, qui est parvenu à rejoindre la surface, sans la moindre autorisation, a découvert que des humains y vivaient encore mais s'est fait ramener illico presto dans son sous-sol ennuyeux par des espèces de vers blancs qui sont autant d'avatars de "l'appareil réparateur". Offusquée, Vashti prévient son enfant qu'il risque d'être condamné au "sans-abrisme", lequel est censé aboutir, peu ou prou, à une condamnation à mort.

Mère et fils se quittent sans plus jamais devoir se revoir - mais Kuno, comprenant sans doute l'aberration itérative de la Machine en prophétise la mort prochaine. Celle-ci se fait d'abord attendre mais son emprise totale se double d'une fragilité de plus en plus vive, et d'autant plus que l'humanité qu'elle est supposée servir, quand bien même nous comprenons tout l'inverse, est une humanité de moins en moins "Faber" et de plus en plus vainement "Sapiens", laquelle n'est donc plus d'aucune utilité pour prendre techniquement soin du monstre qu'elle a créé. Ainsi la fin prévue par le jeune homme devient-elle inexorable et, après une série de pannes plus ou moins graves, c'est toute la machine-Léviathan qui cesse brutalement de fonctionner, entraînant avec elle toute cette humanité totalement inféodée à ce confort facile et ennuyeux dans un épouvantable cataclysme définitif.

S'il est difficile de dire aujourd'hui encore à quel point cette dystopie froide, effrayante, déshumanisée s'avérera prophétique, il n'en demeure pas moins que cette longue nouvelle d'un auteur esqsqentielqlqemeqnt connu pour sa description minutieuse, forte, attentive de ses contemporains britanniques, de leurs petits et grands travers - que l'on songe, en particulier, au célèbre Howard End -, E.M.Forster fit montre, en rédigeant ce texte en 1909, d'une singulière sensibilité et d'un don tout aussi étonnant de prévision. Jugez-en plutôt : en des temps où le seul moyen de communication immédiat et international était encore le télégraphe et son langage Morse, où l'automobile ainsi que l'avion n'en sont qu'à leurs premiers balbutiements, que le téléphone ne semble avoir d'avenir qu'au sein d'une classe sociale particulièrement aisée, que le premier essai officiel de Télédiffusion Sans Fil n'aura lieu que 6 années plus tard, notre jeune romancier préfigure l'informatique et les écran portables, conçoit les réseaux sociaux - plus particulièrement ceux de type "Skype" -, prévoit ce mode d'enseignement à distance de plus en plus en vogue que sont les "Mooc", imagine des lignes aériennes internationales, assure les réseaux souterrain d'immenses lignes de métro, etc, etc, etc.

Mais plus encore, il prédit l'apparition de la "Mégamachine", conceptualisée par des philosophes comme Jacques Ellul ou Günther Sanders, comprends que toutes les petites machineries - électriques, téléphoniques, etc- sont de plus en plus interconnectées, reliées irréversiblement les unes aux autres, créant ainsi un genre de Léviathan mécanique où, si un morceau se met à flancher, tout le reste peut déraper et cesser de fonctionner. Il a aussi déduit que de cette hyper-connexion entre les êtres surgissait un phénomène aussi imprévu que néfaste, c'est à dire une uniformisation irréversible des modes de vie, des habitudes, des envies, des rêves... Et, conclusion des conclusions, E.M. Forster a fort bien pressenti que de maître-créateur, l'être humain pouvait finir par devenir l'esclave de sa création, tandis que le machinisme tendait peu à peu à une machinisation stupéfiante de l'individu, devenu en même temps le disciple fidèle et révérencieux de la chose qu'il a tout d'abord su créer.

Un petit texte intelligent, vif, d'une grande facilité de lecture, qui souffre un peu de n'avoir été développé plus longuement par son auteur, car, avec un tel foisonnement de thèmes, une telle sensibilité, nul doute que l'auteur avait-là matière à rédiger l'une des grandes dystopie du siècle passé. Mais on ne refait pas l'histoire et demeure, pour notre plus grand plaisir, ce "La Machine s'arrête" republié fort plaisamment par une petite maison d'édition décalée et passionnante nommée le pas de côté. Une excellente initiative de leur part !
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Avec cette nouvelle d'anticipation, écrite en 1909, E.M. Forster (1879-1970) décrit une société dans laquelle tous les besoins, physiques comme sociaux, sont désormais satisfaits par la Machine. La surface de la Terre, n'étant plus que « poussière et boue », chacun vit désormais cloitré dans sa chambre, enterrée quelque part. La civilisation antérieure utilisait « le système pour amener les gens aux choses, au lieu d'amener les choses aux gens ». « Les hommes partaient pour changer d'air plutôt que de changer l'air de leur chambre. » « Ni le jour ni la nuit, ni le vent ni la tempête, ni les marées ni les tremblements de terre n'entravaient l'homme à présent. Il avait attelé le Léviathan. Toute l'ancienne littérature, avec son éloge et sa crainte de la Nature, sonnait aussi faux que le babil d'un enfant. » Un jour, pourtant, il semble que la Machine commence à s'arrêter.
(...)
Son texte, non seulement n'a pas pris une ride, mais semble être un miroir tendu à son lecteur par delà les révolutions technologiques, dans l'espoir qu'il soit réceptif à l'optimisme de Kuno : « L'humanité a retenu la leçon ».

Article complet sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Étonnante nouvelle d'E.M.Forster, publiée pour la première fois en 1909. "La machine s'arrête" propose de découvrir une société dominée par la technologie, où les rapports humains n'ont lieu qu'à travers des écrans, où l'idée même de sortir de son habitation devient une source d'angoisse intense... Une mère et son fils se confrontent: la première est totalement dépendante de ce mode de vie, le second lui assure que la machine n'est pas une divinité, qu'il faut s'en débarrasser. Et quand la machine s'arrête, tout le monde est démuni... Chaque invention de l'auteur trouve écho dans nos interrogations actuelles face à l'invasion de la technologie dans notre quotidien. Une nouvelle datée de plus d'un siècle qui parle de notre époque avec une force incroyable.
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Pour une fiction de 1909 elle est très actuelle. Un monde où l'humain à force de tout confier aux machines c'est lui-même mis sous la tutelle d'une super machine. Plus besoin de bouger, plus besoin d',interactions avec les êtres humains, tout passe par la machine. Tout est intellectualisé, le muscle est négatif, l'effort inutile. Mais peut-on vraiment tout confier à une machine qui est après tout une création humaine et donc avec des limites humaines?
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Extrait de ma chronique :

"La force et la singularité de la Machine s'arrête tiennent autant à son style (une narration classique au passé simple et à la troisième personne, dont la maîtrise en remontrerait à bon nombre de nos contemporains) qu'à ses concepts (qui annoncent une foultitude d'oeuvres ultérieures, l'expédition de Kuno dans le chapitre 2 allant jusqu'à évoquer THX 1138 de George Lucas !)


La novella se divise en trois chapitres à peu près égaux (29, 26 et 24 pages) :

– le premier, "Le Dirigeable", raconte la sortie exceptionnelle que Vashti, peu habituée à quitter les souterrains, fait pour aller retrouver son fils Kuno, ce qui permet notamment d'illustrer la "terreur d'une confrontation directe" (page 33) avec l'extériorité qui est désormais le lot de l'espèce humaine (l'allusion à Guy Debord que fait Pierre Thiesset page 12 de la préface est parfaitement justifiée, la vie dans le monde futur de Forster étant entièrement médiatisée par la Machine) ;

– le deuxième, "L'Appareil réparateur", raconte l'entretien de Vashti avec Kuno qui s'ensuit, entretien où Kuno raconte sa sortie à l'air libre (mais pollué) et "l'enthousiasme" (page 65) que le contact avec la nature lui a procuré (ici, c'est notamment le Pierre Cendors de L'Enigmaire qui vient à l'esprit, mais aussi Lovecraft, à cause de l'apparence de l'Appareil réparateur éponyme) ;

– le troisième enfin, "Les Sans-abri", en vient, après ces deux chapitres de mise en place, à l'événement qui donne son titre à la novella, et qui permettra, paradoxalement, à Vashti et Kuno d'entrevoir enfin ces "fragments de ciel immaculé" (page 94) que la Machine leur dérobait (toute la réflexion sur le rapport perdu de l'humanité aux "étoiles", entamée pages 19-20, annonce elle la désidération chère à Lucien Raphmaj, voir Une météorite nommée désir)."
Lien : https://weirdaholic.blogspot..
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Voilà, encore une perle que je découvre grâce à babelio. Comme d'autres lecteurs l'ont commenté, j'étais familière des oeuvres de Forster, que j'apprécie beaucoup, mais je ne me doutais pas de sa (si remarquable !) incursion dans le roman d'anticipation.
Le récit date de 1909 et m'a littéralement scotchée, je l'ai lu d'une traite. Il est aussi court que fascinant - Forster a réussi à condenser beaucoup de réflexions et d'inventions marquantes en si peu de pages, comme Karel Capek dans "R.U.R : Rossum Universal Robots" (1920), ou plus récemment, comme Camille Romain-Smith dans "Noël 2041".
Concernant les innovations technologiques qu'il prévoit, j'ai notamment été marquée par celle des "tubes" qui apportent tout aux individus du récit : musique (ce que nous avons aujourd'hui dans un sens via internet et un PC), mais aussi la nourriture (à quand pour nous ?!?!), et le "contact" avec des "amis innombrables".
Concernant les réflexions, j'ai trouvé très intéressantes celles sur la vitesse (qui nous fait perdre la notion de distance), sur le danger des idées de "première main" et de l'observation directe dans ce monde dirigée par la Machine, sur la bureaucratie poussée à l'extrême (avec les formulaires à remplir pour devenir parents ou mourir). Encore une fois, ce récit est très riche, donc je m'arrête ici et laissent d'autres lecteurs le découvrir eux-mêmes.
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Avec "La Machine s'arrête", E.M.Forster a écrit en 1909 la nouvelle de l'année 2020.
En effet quelle "drôle" d'écho à notre année confinée...
Où enfermé dans nos, plus ou moins, spacieuses cellules nous n'avions plus que notre Machine : l'Internet couplé aux chaînes de télévision, comme miroir sur le monde et moyen d'accès à nos envies (commandes drive, livraisons colissimo...) et nos proches.

Dans ce court ouvrage, l'humain est devenu ultra-sédentaire, enfermé dans sa chambre, sociabilisé par l'intermédiaire de la Machine qui connecte les individus (une sorte de "Skype"). Il obtient tout ce dont il a besoin par la simple pression sur le bon bouton...

Dans ce monde "de rêve", nous suivons 2 personnages.
D'un côté Vashti, bien intégrée, iconise la Machine et qualifie de blasphémateur quiconque en parle en des termes négatifs.
De l'autre son fils, Kuno, qui ne veux plus de cette Machine infernale qui a coupé les humains de la nature et ne se retrouve pas dans le mode boîte de conserve.
Mais que pourrait-il se passer si un jour "la Machine s'arrête".

En s'inspirant des avancées technologiques de son époque E.M.Forster a tissé, une société techno-dépendante angoissante (sans doute pour dénoncer un projet de société qui l'inquiétait) et cela se ressent dans cette oeuvre, d'autant qu'a de multiple égards nous pourrions y voir de la clairvoyance.
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