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Philippe Gruca (Autre)François Jarrige (Autre)Philippe Gruca (Autre)Pierre Thiesset (Autre)Laurie Duhamel (Traducteur)
EAN : 9782373090765
112 pages
L'Echappée (10/09/2020)
4.3/5   69 notes
Résumé :
La Machine nous a volé le sens de l’espace et du toucher, elle a brouillé toute relation humaine, elle a paralysé nos corps et nos volontés, et maintenant elle nous oblige à la vénérer. La Machine se développe – mais pas selon nos plans. La Machine agit – mais pas selon nos objectifs. Nous ne sommes rien de plus que des globules sanguins circulant dans ses artères.

Publiée en… 1909, cette stupéfiante anticipation écrite par le grand auteur britannique... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (24) Voir plus Ajouter une critique
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L'immense écrivain britannique, à qui l'on doit des oeuvres majeures telles qu'Howards Ends, Avec vue sur l'Arno (a Room with a View) ou encore le très osé pour l'époque “Maurice”, publié à titre posthume, où l'auteur offre à son personnage le coming out homosexuel (doublé d'un dépassement des classes sociales, très ancrées dans la société anglaise) qu'il ne pourra jamais faire, vivant sa propre homosexualité dans l'ombre, comme d'ailleurs un autre de ses fameux contemporains anglais William Somerset Maugham.

Ce qu'il reste de son oeuvre pour le grand public ce sont aussi les adaptations magistrales du couple de cinéastes James Ivory & Ismail Merchant, longues promenades bucoliques et sentimentales dans la campagne anglaise où l'on croise (excusez-moi du peu) Anthony Hopkins, Emma Thompson, Maggie Smith, Judi Dench, Daniel Day Lewis, Helena Bonham Carter ou encore Hugh Grant et qui nous font sentir l'odeur de l'herbe humide après la pluie sur le cottage, le bruit des shortbreads qui croquent entre les dents ou encore le tintement de la cuillère qui remue le sucre dans la cup of tea.

Et pourtant, c'est dans un tout autre registre qu'E.M. Forster nous immerge dans cette courte nouvelle de science fiction “The Machine Stops”. C'est le portrait d'une société tout entière soumise à la technologie que dresse l'auteur, une humanité ayant (du moins le croit-elle) définitivement coupé le cordon ombilical qui la rattachait à la terre nourricière. Mais ne nous y trompons pas, le progrès technique n'a pas d'odeur politique, et n'est pas synonyme de liberté ou d'égalité, il reste ce qu'en font les hommes, et en l'occurence, la vision dystopique de l'auteur nous plonge dans un monde dictatorial où fouler le sol de la terre est interdit…

Et de fait, nous sommes toujours plus, pour une partie d'entre nous, éloignés de la nature, ses dangers sont de moins en moins apprivoisés, ces manifestations jugées dégradantes, vulgaires, indignes d'intérêt. Il y a un orgueil proprement humain à dompter la nature, à la mettre au pas, voire même dans les projets financiers de certains, rendre la planète terre obsolète. Accumulation de savoirs déconnectés de l'expérience du réel et de technologies facultatives, asservissement à des créations numériques, Forster dépeint avec un siècle d'avance une réalité qui n'en finit pas d'advenir.

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Je connaissais le nom d'Edward Morgan Forster à travers les adaptations cinématographiques de certains de ses romans, notamment « Chambre avec vue » et « Retour à Howards End ». Jamais je n'aurais imaginé que l'auteur de ces délicates et romantiques histoires victoriennes avait oeuvré dans la science-fiction. C'est ce qui m'avait intriguée lorsque j'étais tombée sur cette nouvelle intitulée « la Machine s'arrête ». J'ai bien fait d'écouter ma curiosité, ce texte est tout simplement bluffant et au-delà de ses qualités, il m'a vraiment parlé intimement.

Avant de rentrer dans le vif du sujet et de vous dire en quoi cette nouvelle est formidable, je vais d'abord faire un aveu : j'ai un côté vieille conne. Je m'explique. Si je ne suis pas totalement opposée au progrès, il y a eu des avancées technologiques qui ont été de véritables bienfaits, je trouve qu'il faut toujours rester prudent et vigilant quant aux conséquences de certaines innovations. Je suis même à certains égards un brin réac en considérant que le fameux « c'était mieux avant » n'est pas totalement faux. Par certains aspects, l'époque actuelle me déplait beaucoup. Je la trouve tellement déshumanisée, désincarnée… Alors je me raccroche à des petites choses du passé, et j'essaie de les transmettre à mes enfants. J'écoute des disques vinyles parce que le rituel qui va avec donne une autre dimension à la musique et la fait moins ressembler à un acte de consommation immédiate. Je regarde des films en dvd ou en blu-ray, je ne télécharge pas illégalement parce que je considère que si je ne veux pas payer pour un film c'est que je ne veux pas vraiment le voir, j'aime guetter les sorties blu-ray de certains éditeurs et avoir le plaisir un jour de dire « ah enfin, ça fait 15 ans que j'attendais qu'il sorte ce film », je n'ai pas netflix parce que j'ai envie de regarder des oeuvres parce que j'ai fait la démarche de les acquérir pas simplement parce qu'elles sont disponibles et qu'il est de bon ton de les avoir vu. Je n'ai pas de liseuse, je ne lis que sur papier parce que j'aime la sensation du papier et j'aime regarder ma bibliothèque qui déborde même si c'est un crève-coeur quand il faut faire de la place. Je n'ai pas de compte instagram ni facebook et consorts parce que je n'aime pas quand il y a un intermédiaire dans les rapports humains. Je n'ai pas de smartphone, un mobile tout simple qui ne sert qu'à téléphoner, parce je pense qu'il ne s'agit pas là d'un vrai besoin et parce que je déteste voir ces gens incapables de quitter des yeux leur téléphone, ils marchent en le regardant, aveugles au monde qui les entoure et même lorsqu'ils sont à plusieurs, à une terrasse de café ou installés dans un jardin public, ils sont tous rivés à leurs téléphones, aveugles les uns aux autres, ensembles mais finalement seuls et leurs téléphones sont les prolongements de leurs mains. Bien sûr, il est impossible d'échapper complètement au progrès, après tout le monde est comme il est et à moins de se marginaliser on est obligés d'en accepter certains aspects, et puis je ne suis pas exempte de contradictions. Après tout, je suis sur babelio, je me sers d'internet pour acheter des choses… Simplement j'essaie de rester le plus libre possible.

Cette introduction très longue, trop longue sans doute, était nécessaire pour faire comprendre à quel point cette nouvelle de Forster m'a interpellée personnellement. Pour résumer le propos de ce récit d'anticipation, je vais me contenter de citer la 4ème de couverture : « Forster dépeint une société dans laquelle tous les besoins sont satisfaits par une machine omnipotente. Dans leur désir de confort total, leur obsession de se maintenir à distance des autres et du monde physique, et après avoir exploité les richesses de la nature, les humains s'en remettent donc à la seule technique, devenue leur idole. ». Ce résumé est à la fois pertinent et insuffisant. Il donne les très grandes lignes mais on ne ressent pas la richesse du propos et surtout on ne perçoit pas à quel point il est actuel. En 1909 Forster parlait de nous. Il parle d'une société dans laquelle on communique à distance, où on est sans cesse sollicités par sortes de notifications, il parle d'un monde uniformisé où la distance est abolie, où on a des centaines d'amis mais où chacun vit replié sur soi. Ce texte est effrayant de lucidité. Vous comprenez maintenant pourquoi j'ai trouvé cette lecture saisissante. La vision de Forster correspond très bien à ce que je trouve désespérant dans le monde moderne. du coup, je me suis identifiée avec force à Kuno, le personnage de la nouvelle qui a envie d'autre chose, qui veut sortir de chez lui, aller dehors, se couper de la Machine.

Il y aurait beaucoup à dire sur « la Machine s'arrête ». C'est un texte brillant mais j'ai été tellement sidérée que je peine à argumenter de façon rationnelle. Il y a quelque chose d'assez bouleversant quand on découvre un texte qui exprime si bien ce que l'on pense soi-même, qui raconte les angoisses que l'on ressent face à certaines évolutions du monde… En 80 pages un lien insaisissable s'est créé entre moi et cet auteur. C'est certain, entre Forster et moi, ce n'est qu'un début.
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AVANT DE NE PLUS TROUVER LE BOUTON : OFF...

Nous sommes quelque part dans un futur imprécis, plus ou moins proche de notre maintenant, bien qu'il semble que notre civilisation issue des développement technologiques inaugurés à l'aube du XXème siècle ait pourtant lamentablement échoué, s'étant parfaitement fourvoyée dans un machinisme idiot, proposant à l'homme d''aller de plus en plus vite, d'un lieu à un autre, tandis qu'il était pourtant tellement plus simple d'imaginer que ce serait désormais les choses - matérielles ou dématérialisées - qui se déplaceraient dorénavant à notre place. La terre ayant été partiellement ou totalement détruite, l'humanité s'est rapidement repliée sous terre. Malgré un réseau dense et efficace de lignes intercontinentales de dirigeables très rapides - l'aviation n'est encore qu'à ses balbutiements et semble encore incapable de pouvoir servir de moyen de transport de masse -, les voyages sont devenus de plus en plus rares - pourquoi rallier un point B en partant d'un point A lorsque tous les points se ressemblent invariablement ? - et la plupart des besoins physiques, intellectuels et spirituels sont pris en charge par la "machine omnipotente", chacun participant ainsi de cette sorte de doux enfer climatisé acceptable et accepté.

E.M. Forster, pour illustrer son propos, nous fait suivre la destinée d'une mère et son fils. La première, Vashti, est une femme que l'on pourrait qualifier de "bien dans son époque", conférencière - sans jamais avoir nécessité de sortir de son antre/bureau/salle à manger/chambre - par le biais de son "cinématophe", un genre de "skype" bien avant l'heure, ne remettant en rien, bien au contraire, les avancées réformistes qu'elle vit, ou plutôt subit, au sein de cette pseudo-démocratie des idées - les êtres humains ne sont plus que des producteurs "d'idées" dont on ne voit jamais, comment ni à quel moment elles sont opérantes -. le second, son fils Kuno, semble vouloir se rebeller contre cet état de fait. Se rendant compte du caractère blasphématoire de ses pensées à l'encontre de cette divinité qu'est sur le point de devenir La Machine - un Dieu parfaitement vide et mécanisé, sans âme, sans contenu, sans désir -, il insiste à plusieurs reprise pour que sa génitrice vienne physiquement le voir. Au passage, nous apprenons que les liens de parentalité sont réduits à leur seule fonction biologique, l'éducation étant confiée à des tiers : un monde décidément de rêve, n'est-ce pas ? Malgré ses réticences au déplacement, cette dernière se résout à entendre cet enfant pour lequel elle ressent malgré tout une certaine empathie, mais c'est pour mieux écouter le récit sacrilège d'un jeune homme rebelle à cette nouvelle forme d'autorité, qui est parvenu à rejoindre la surface, sans la moindre autorisation, a découvert que des humains y vivaient encore mais s'est fait ramener illico presto dans son sous-sol ennuyeux par des espèces de vers blancs qui sont autant d'avatars de "l'appareil réparateur". Offusquée, Vashti prévient son enfant qu'il risque d'être condamné au "sans-abrisme", lequel est censé aboutir, peu ou prou, à une condamnation à mort.

Mère et fils se quittent sans plus jamais devoir se revoir - mais Kuno, comprenant sans doute l'aberration itérative de la Machine en prophétise la mort prochaine. Celle-ci se fait d'abord attendre mais son emprise totale se double d'une fragilité de plus en plus vive, et d'autant plus que l'humanité qu'elle est supposée servir, quand bien même nous comprenons tout l'inverse, est une humanité de moins en moins "Faber" et de plus en plus vainement "Sapiens", laquelle n'est donc plus d'aucune utilité pour prendre techniquement soin du monstre qu'elle a créé. Ainsi la fin prévue par le jeune homme devient-elle inexorable et, après une série de pannes plus ou moins graves, c'est toute la machine-Léviathan qui cesse brutalement de fonctionner, entraînant avec elle toute cette humanité totalement inféodée à ce confort facile et ennuyeux dans un épouvantable cataclysme définitif.

S'il est difficile de dire aujourd'hui encore à quel point cette dystopie froide, effrayante, déshumanisée s'avérera prophétique, il n'en demeure pas moins que cette longue nouvelle d'un auteur esqsqentielqlqemeqnt connu pour sa description minutieuse, forte, attentive de ses contemporains britanniques, de leurs petits et grands travers - que l'on songe, en particulier, au célèbre Howard End -, E.M.Forster fit montre, en rédigeant ce texte en 1909, d'une singulière sensibilité et d'un don tout aussi étonnant de prévision. Jugez-en plutôt : en des temps où le seul moyen de communication immédiat et international était encore le télégraphe et son langage Morse, où l'automobile ainsi que l'avion n'en sont qu'à leurs premiers balbutiements, que le téléphone ne semble avoir d'avenir qu'au sein d'une classe sociale particulièrement aisée, que le premier essai officiel de Télédiffusion Sans Fil n'aura lieu que 6 années plus tard, notre jeune romancier préfigure l'informatique et les écran portables, conçoit les réseaux sociaux - plus particulièrement ceux de type "Skype" -, prévoit ce mode d'enseignement à distance de plus en plus en vogue que sont les "Mooc", imagine des lignes aériennes internationales, assure les réseaux souterrain d'immenses lignes de métro, etc, etc, etc.

Mais plus encore, il prédit l'apparition de la "Mégamachine", conceptualisée par des philosophes comme Jacques Ellul ou Günther Sanders, comprends que toutes les petites machineries - électriques, téléphoniques, etc- sont de plus en plus interconnectées, reliées irréversiblement les unes aux autres, créant ainsi un genre de Léviathan mécanique où, si un morceau se met à flancher, tout le reste peut déraper et cesser de fonctionner. Il a aussi déduit que de cette hyper-connexion entre les êtres surgissait un phénomène aussi imprévu que néfaste, c'est à dire une uniformisation irréversible des modes de vie, des habitudes, des envies, des rêves... Et, conclusion des conclusions, E.M. Forster a fort bien pressenti que de maître-créateur, l'être humain pouvait finir par devenir l'esclave de sa création, tandis que le machinisme tendait peu à peu à une machinisation stupéfiante de l'individu, devenu en même temps le disciple fidèle et révérencieux de la chose qu'il a tout d'abord su créer.

Un petit texte intelligent, vif, d'une grande facilité de lecture, qui souffre un peu de n'avoir été développé plus longuement par son auteur, car, avec un tel foisonnement de thèmes, une telle sensibilité, nul doute que l'auteur avait-là matière à rédiger l'une des grandes dystopie du siècle passé. Mais on ne refait pas l'histoire et demeure, pour notre plus grand plaisir, ce "La Machine s'arrête" republié fort plaisamment par une petite maison d'édition décalée et passionnante nommée le pas de côté. Une excellente initiative de leur part !
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Dystopie hurlante agée de 110ans, ce court récit est pourtant d'une fraicheur saisissante.
Y'a de quoi jalouser la bonne littérature qui ne vieillit pas, elle.

L'Homme assoiffé de technologie à réussi à créer une machine, La Machine, qui subvient à tous ses besoins, il vit alors dans un type de chambre universel et consensuel qui rappelle l'épisode 15 millions de mérites de l'excellente série Black mirror. Agencée comme une alvéole dans un nid d'abeilles un peu facon Matrix, cette chambre mène pourtant à des vomitoires donnant l'accès aux transports en commun qui permettent de voyager partout, pourtant l'homme ne se déplace presque plus puisqu'il a tout a porté de doigt et que la planète devient extrèmement uniformisée.
Mais ce petit « techno-cocon » comme l'appellerait certainement Alain Damasio, n'est pas au gout de tous…

Je m'arrête ici pour ne pas spoiler, je préciserai juste qu'on y retrouve tout l'humanisme profond dont faisait preuve E.M. Forster, dans cette lecture riche qui peut se révéler entre autre comme un plaidoyer pour la nature et un questionnement quant à la providence de la mécanisation extrême et ses dérives.

Un petit récit puissant et surement en avance sur son temps car plusieurs technologies contemporaines y sont citées avant d'avoir été inventées, on se sent un brin soulagé que depuis Isaac Asimov ait suffisamment marqué les esprits avec ses trois lois de la robotique et qu'elles soient aujourd'hui appliquées.

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Avec cette nouvelle d'anticipation, écrite en 1909, E.M. Forster (1879-1970) décrit une société dans laquelle tous les besoins, physiques comme sociaux, sont désormais satisfaits par la Machine. La surface de la Terre, n'étant plus que « poussière et boue », chacun vit désormais cloitré dans sa chambre, enterrée quelque part. La civilisation antérieure utilisait « le système pour amener les gens aux choses, au lieu d'amener les choses aux gens ». « Les hommes partaient pour changer d'air plutôt que de changer l'air de leur chambre. » « Ni le jour ni la nuit, ni le vent ni la tempête, ni les marées ni les tremblements de terre n'entravaient l'homme à présent. Il avait attelé le Léviathan. Toute l'ancienne littérature, avec son éloge et sa crainte de la Nature, sonnait aussi faux que le babil d'un enfant. » Un jour, pourtant, il semble que la Machine commence à s'arrêter.
(...)
Son texte, non seulement n'a pas pris une ride, mais semble être un miroir tendu à son lecteur par delà les révolutions technologiques, dans l'espoir qu'il soit réceptif à l'optimisme de Kuno : « L'humanité a retenu la leçon ».

Article complet sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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critiques presse (1)
Bibliobs
10 novembre 2020
« Nous ne sommes rien de plus que des globules sanguins circulant dans ses artères », écrit Forster dans ce petit livre génial posté au siècle dernier, édité de nouveau pour ceux qui « likent » par principe la 5G et l’invention de véhicules qu’on dit autonomes.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Méfiez-vous des idées de première main ! s'écria l'un des intellectuels les plus évolués d'entre eux.
Les idées de première main n'existent pas vraiment. Elles ne sont rien de plus que des impressions physiques produites par l'amour et la peur, et qui pourrait ériger une philosophie sur cette base grossière ? Faites en sorte que vos idées soient de deuxième main, et si possible de dixième main, car elles seront alors très éloignées de l'élément perturbateur : l'observation directe.
N'apprenez rien de ce sujet qui est le mien : la Révolution française. Retenez plutôt ce que je pense de ce qu'Enicharmon pensait de ce qu'Urizen pensait de ce que Gutch pensait de ce que Ho-Yung pensait de ce que Chi-Bo-Sing pensait de ce que Lafcadio Hearn pensait de ce que Carlyle pensait de ce que Mirabeau disait à propos de la Révolution française.
Par l'intermédiaire de ces dix grands esprits, le sang qui a été versé à Paris et les fenêtres qui ont été brisées à Versailles seront clarifiés en une idée que vous pourrez employer de la manière la plus utile dans la vie quotidienne (...).
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Ne pouvez-vous voir que c'est nous qui sommes en train de mourir, et qu'ici-bas la seule chose qui vive vraiment, c'est la Machine ? Nous avons créé la Machine, pour qu'elle accomplisse notre volonté, mais nous ne pouvons plus la faire plier à notre volonté. Elle nous a volé le sens de l'espace et le sens du toucher, elle a brouillé toute relation humaine et réduit l'amour à un acte charnel, elle a paralysé nos corps et nos volontés, et maintenant, elle nous oblige à la vénérer. La Machine se développe — mais pas selon nos plans. La Machine agit — mais pas selon nos objectifs. Nous ne sommes rien de plus que des globules sanguins circulant dans ses artères.
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Plus un homme connaissait ses propres devoirs envers la Machine, moins il comprenait les devoirs de son voisin, et pas une seule personne au monde ne comprenait le monstre dans son ensemble.
Ces génies souverains avaient péri. Ils avaient laissé des instructions complètes, il est vrai, et leurs successeurs étaient chacun devenus les experts d'une portion de ces directives. Mais l'humanité, dans son désir de confort, avait dépassé les limites elle avait beaucoup trop exploité les richesses de la nature. Avec calme et complaisance, elle sombrait dans la décadence, tandis que le progrès avait fini par signifier le progrès de la Machine.
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L'un des paradoxes de la modernité relevé par Forster est le suivant : la planète est de plus en plus uniformisée, et dans le même temps, des efforts colossaux sont déployés dans le seul but de parcourir le plus vite possible l'espace d'un point A à un point B. À quoi bon se déplacer, si l'on vit dans un monde qui n'est fait que de points A ?

Postface. Avant que la machine ne s'arrête, ... par Phillippe Gruca et François Jarrige, p. 103
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Personne n'admit que la Machine était hors de contrôle. Année après année, elle était servie avec une efficacité croissante et une intelligence décroissante. Plus un homme connaissait ses propres devoirs envers la Machine, moins il comprenait les devoirs de son voisin, et pas une seule personne au monde ne comprenait le monstre dans son ensemble.
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Vidéo de E. M. Forster
RENTRÉE LITTÉRAIRE 2023 « La Vie Nouvelle », le premier roman de Tom Crewe
Le jeune médecin et critique littéraire Henry Ellis vient d'épouser Edith. Ils se sont rencontrés dans un groupe de libres-penseurs appelé la Vie Nouvelle, et se sont promis de construire un couple moderne, loin des rigidités de l'Angleterre victorienne. Au même moment, John Addington, grand bourgeois respecté par la bonne société londonienne, marié et père de trois jeunes femmes, entre en contact avec Henry. Ensemble, ils décident de concevoir un ouvrage à quatre mains : une étude historique de l'homosexualité depuis la Grèce antique.
Tout en travaillant à ce livre, chacun des deux coauteurs est pris dans les contradictions de sa vie intime. Henry aimerait consommer son mariage avec Edith, mais n'y parvient pas, et John est aux prises avec sa passion pour Frank, un jeune homme rencontré à Hyde Park, ce qui met en péril son mariage. Puis le procès scandaleux d'Oscar Wilde fait la une de tous les journaux du Royaume-Uni et change la donne… Deux mariages, deux affaires : un premier roman époustouflant sur le conflit entre l'ordre moral et notre besoin de liberté – entre E.M. Forster et Alan Hollinghurst – d'une étonnante actualité.
https://bourgoisediteur.fr/catalogue/la-vie-nouvelle/ Le 24 août en librairie
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