A travers la vie de Valérien abandonné par sa mère, l'auteur nous fait découvrir la vie dans la campagne du Lot.
Elle nous fait découvrir ses saveurs, ses parfums et son patois.
C'est un livre plein de tendresse et d'amour pour cette région.
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p 62
Le travail du dernier jour d'attente se passa à la cuisine, à confectionner de la mangeaille moins banale que le quotidien dont on usait.
Du civet de lapin fut mis à mijoter. Les volailles de tout âge, destinées à des fins différentes, déposées nues et vidées dans le garde-manger de la cave, attendraient, bien protégées, les menus des jours suivants.
p 19
En se laissant bercer au pas de la mule , Anglèle arrangeait tout cela dans sa tête. Sa mauvaise conscience ressentait le besoin de tirer droit les traits de la vie future du jeune répudié.
Elle venait d'abandonner son enfant, on la jugerait, on la maudirait peut être, le monde n'absout pas volontiers, mais ses trente-deux ans exigeaient encore de l'amour, du bonheur.
Elle pensait les avoir trouvés en cet Hercule rieur assis près d'elle et dont elle détaillait à la dérobée la crinière drue couleur soleil, la moustache de bourre de maïs et les larges épaules habillées d'une chemise de toile ouverte sur un poitrail puissant. Cet homme lui plaisait et excitait sa gourmandise de femme.
Ce garçon qui lui était venu, il s'en félicitait. Sa présence lui évitait l'âpre solitude de la vieillesse. Courageux, il ne lui avait jamais manqué de respect comme le font volontiers les jeunes d'aujourd'hui. Il était unanimement estimé de tout le village pour sa vaillance, sa réserve et son honnêteté. Vraiment, le Félix admettait qu'il ne pouvait demander mieux. Évidemment, restait le point noir de son ignorance. Ne savoir ni lire, ni écrire, ni signer de son nom s'inscrivait en plaie profonde dans la tête du crouzaïré. Bon sens et courage au travail remplaceraient peut-être cette énorme lacune. Alors, tout ne serait pas perdu.
Faut ce qu'il faut quand il faut. De l'argent, j'en gagnerai encore et maintenant je saurai pour qui. Et quand nous serons de retour au Mazet, nous trinquerons au Champagne avec tous nos voisins. Parfaitement. Je veux qu'on sache que le Faustin a trouvé sa Faustine pour toujours. Par tous les diables, ça va me coûter des sous, mais la chose en vaut la peine. Et puis, tu veux que je te dise, ma jolie : le bon temps, c'est pas comme le café, faut pas le laisser passer. »
« Le progrès nous tuera, empoisonnera nos terres », clamaient-ils en jetant un oeil soupçonneux sur les sacs de phosphates, de scories et autres nitrates. Les jeunes agriculteurs optaient pour les nouveautés.