Celles et ceux qui prennent le temps de me lire savent combien j'aime partir à la rencontre de nouveaux écrivains, que l'inconnu livresque ne m'effraie pas et que j'en ressors souvent satisfaite.
Comme beaucoup de passionnés de lectures, le nom de Karine Giebel était loin d'être étranger mais je ne connaissais pas l'auteure.
C'est mon amie Nathalou93 de Babelio, sachant que je suis friande de polars, qui m'a proposée de la découvrir à travers « Juste une ombre ».
Je rentrais donc dans cette histoire en espérant y trouver un texte saisissant, captivant susceptible de me procurer des heures de plaisir.
Venant de le ranger définitivement, j'admets que, sans être un coup de coeur, il a parfaitement rempli sa mission puisque j'ai passé un agréable moment.
A travers ces quelques lignes, je vais essayer de vous expliquer les raisons pour lesquelles j'en suis parvenue à cette conclusion.
Ne vous est-il jamais arrivé un jour d'avoir l'impression qu'une présence maléfique vous épie ? qu'elle connaît vos habitudes, qu'elle scrute vos moindres faits et gestes ? qu'elle s'immisce lentement mais sûrement dans votre quotidien ? Oui, non, peut-être ? Ce qui est certain, en revanche, c'est qu'en accompagnant Chloé, l'héroïne du roman qui nous intéresse, vous vivrez cette expérience effroyable.
Au moment où nous ouvrons ce livre, notre protagoniste principale, jeune femme trentenaire publiciste de profession, s'apprête à concrétiser un de ses plus grands rêves, à savoir succéder à son boss, Président d'une importante agence de publicité. Tout réussi à cette forcenée du travail, ambitieuse et jolie qui fait fi de ses collègues, de leurs difficultés, de leurs jalousies. Qui ne se laisse influencer par personne même par son bien-aimé. Qui ne s'apitoie pas, ne s'excuse pas, ne pardonne pas. Qui ne cherche qu'à asseoir sa supériorité, son autorité jusqu'à ce maudit soir où elle aperçoit une sombre silhouette marchant sur ses pas. Sa vie vient de basculer. Elle ne saura jamais plus la même…
A partir de là, une ombre. Juste une ombre la poursuit. Méthodiquement. Sans relâche.
Ensuite, c'est une omniprésence sans visage, sans nom, sans motif déclaré qui la suit, pénètre chez-elle à son insu, chamboule sournoisement et méticuleusement son intérieur, l'observe à tout instant. Un fantôme pour ses proches, ses amis, les flics.
Une apparence qui devient finalement une obsession. Qui la brise professionnellement. L'isole de tous ceux qui l'entourent. La terrorise au pont de la rendre folle. Un être invisible, insaisissable, qui s'empare de son existence, qui fait d'elle sa « chose ». Pourquoi ? le temps qu'elle comprennes, il sera peut-être trop tard…
Vous êtes curieux quant à la suite ? Vous essayez déjà de trouver les raisons d'un tel comportement ? Vous êtes impatients de connaître la chute finale ? Je ne vois qu'une solution : vous plonger dans cette troublante et énigmatique aventure.
Une fois n'est pas coutume, je vais commencer par vous parler de la fin car c'est le gros point positif de cet ouvrage, Sans trop en dévoiler par crainte de vous gâcher le plaisir de la découverte, sachez seulement qu'elle m'a laissée pantoise. Elle est étrange, audacieuse et je pense que, comme moi, elle a plu ou plaira à beaucoup. Bravo Madame Giebel ! Il fallait oser ! le sort réservé à vos héros est intéressant pour ne pas dire non conventionnel. J'ai supputé sur différents coupables avant de deviner finalement au détour d'une phrase. En revanche, j'ai échafaudé un aboutissement en vain.
J'ai également été sensible au côté très psychologique du récit. Avec talent, la romancière nous invite à voyager dans un monde oscillant entre folie et persécution. Nous suivons avec anxiété, peine mais aussi avec avidité l'impitoyable descente aux enfers de Chloé ou plus exactement son entrée dans la psychose. Grâce ou à cause de sa méfiance innée, de son comportement imbuvable, du manque de preuves, nous doutons de plus en plus de la véracité de ses dires. Nous sommes persuadés qu'elle présente réellement des signes de paranoïa en étant convaincue d'être sous l'emprise d'une personnalité étrangère et inapparente. Cheminement flippant mais existant à parcourir !
Au moyen d'un style tranchant, de courts chapitres, K.G. tisse admirablement son emprise sur le lecteur. Elle fait monter la tension progressivement au fil de l'avancement pour la porter à son summum dans le sprint final. Elle nous permet ainsi de ne pas décrocher.
L'originalité de ce bouquin réside dans le fait que, par l'entremise d'une lettre destinée à la victime, nous pénétrons la psyché du psychopathe. Nous rentrons dans ses pensées, son délire. Nous apprenons à le connaître. Cela donne évidemment du sens aux allégations de la jeune femme que nous ne croyons pourtant pas quelquefois.
Toutefois, je ne peux qualifier cet opus de parfait.
Le début et la fin sont entraînants alors que des longueurs se font jour au milieu. Bénéfiques à l'instillation d'une angoisse graduelle, ces dernières m'ont gênée. J'ai donc eu le sentiment de faire du surplace. Ça a altéré mon plaisir.
Parlons enfin des protagonistes.
Chloé, qu'en dire ? Elle m'a déçue. Je n'ai eu aucune empathie pour elle. C'est une personne hautaine, détestable, égoïste qui n'a pas la moindre considération pour son prochain. Je concède volontiers que sa situation est cauchemardesque, je peux faire preuve de compassion, je ne voudrais pas être à sa place mais je ne suis pas arrivée à m'attacher à elle. Grosse désillusion.
Bertrand, Carole ne sont pas enthousiasmants. Ils sont probablement indispensables sans pour autant que j'en garde un franc souvenir dans le futur.
L'ombre est une actrice essentielle. Sans elle, pas d'histoire. Mystérieuse, terrifiante, elle m'a envoûtée, tenue en haleine d'un bout à l'autre.
Mon chouchou, si j'ose m'exprimer de la sorte, se prénomme Alexandre Gomez. Ce commandant de police « borderline » est attendrissant, émouvant. A la dérive émotionnellement, il est complexe, humain, professionnel et généreux sentimentalement. J'ai adoré investiguer avec lui. le concernant, j'aurais préféré un autre épilogue. Dommage, par ailleurs, que deux de ses proches (Sophie et Laval) soient si peu utilisés.
En résumé, j'ai eu dans les mains une oeuvre de bonne facture. L'intrigue assez classique sur le fond est bien construite. le dénouement renversant vaut le détour à lui tout seul. Les ingrédients indispensables à un bon roman noir sont réunis : l'efficacité, l'angoisse, l'addiction. L'enquêteur est, en outre des plus charmants. Qu'exiger de plus ?
Mon conseil : Vous n'avez rien à perdre à l'acheter ou à l'emprunter. Malgré certains détails qui ne m'ont pas emballée, cette oeuvre est une réussite et mérite amplement, par le suspense, le frisson, la manipulation mentale, le harcèlement obsessionnel qu'elle nous offre, de figurer dans la catégorie thrillers psychologiques. Pour une première concernant cette auteure, c'est un succès qui ne demande qu'a être confirmé par d'autres lectures. Pourquoi pas « Meurtres pour rédemption » ?
° Si vous êtes un inconditionnel du genre, vous apprécierez sans nul doute. Vous serez possiblement interloqués par son couronnement étonnant mais il quasi-certain que le moindre bruit, la moindre pénombre ne vous indifférera plus une fois le livre lu.
° Si vous avez tendance à vous croire persécutés ou si vous êtes excessivement méfiants à l'égard de menaces imaginaires ou réelles, attention de ne pas faire une crise de paranoïa.
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