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EAN : 9782718607689
Galilée (05/02/2008)
4/5   14 notes
Résumé :
Le drame écologique dans lequel est engagée la planète humaine a longtemps été l'objet d'une méconnaissance systématique. Cette période est désormais révolue. À travers des médias devenus hyper-sensibles à la répétition des «accidents» écologiques, l'opinion internationale se trouve de plus en plus mobilisée. Tout le monde aujourd'hui parle d'écologie : les politiques, les technocrates, les industriels... Malheureusement toujours en termes de simples «nuisances».>Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Trois points de vue écologiques se complètent intimement dans ce petit livre : le mental et le social viennent se mêler à l'environnemental.

RE-SINGULARISATION : l'accent est mis sur l'importance de la « production de subjectivité », ou re-singularisation, comme dit l'auteur. de là naîtront de nouvelles formes d'activisme, individuelles et collectives, sans que personne ne puisse prédire lesquelles.

Philosophiquement, le discours est imprégné de pragmatisme. Il est attentif aux tendances actives de notre société et aux expériences en cours : « Work in Progress ! ». Il est nourri notamment de la pratique de psychothérapeute de Felix Guattari.

Ce qui est à l'oeuvre, c'est une dynamique entre les Territoires existentiels, « qui ne concernent pas seulement d'intimes façon d'être, le corps, l'environnement mais aussi de grands ensembles contextuels relatifs à l'ethnie, la nation ou même les droits généraux de l'humanité. »

La proposition la plus stimulante de ce livre est la généralisation des pratiques d'analyses institutionnelles - à l'hôpital, à l'école, dans l'environnement urbain, la culture, le sport, l'art, les médias, la mode, etc... - « l'essaimage des d'expériences alternatives, centrées sur le respect de la singularité et sur un travail permanent de production de subjectivité, s'autonomisant tout en s'articulant convenablement au reste de la société ».

Disons que chacun peut être psychanalyste pour son prochain. L'orientation, ici, est d'abord esthétique plutôt que scientiste : « fin des catéchismes ». A l'image de l'artiste qui peut être amené à remanier son oeuvre à partir de l'intrusion d'un détail accidentel, il s'agit d'être attentif à une « mutation existentielle », c'est-à-dire, « à l'existence en train, tout à la fois, de se constituer, de se définir et de se deterritorialiser. »

« L'inconscient ne demeure accroché à des fixations archaïques que pour autant qu'aucun engagement ne le tende vers le futur. ». Ce qui importe, ce n'est pas la structure insondable du psychisme, mais les évènements singuliers qui ponctuent « le déroulement de l'historicité individuelle et collective ».

Dans cette « logique des intensités », on reconnaîtra aussi clairement la logique des processus évolutifs du vivant.

En parlant d'écosophies et de l'importance de la re-singularisation, l'auteur rejoint Arne Naess, initiateur du mouvement « Deep Ecology », mais en développant une vue entièrement originale.

Cependant, il faut bien partager les constats. Or, le pragmatisme qu'ils ont en commun, s'avère crucial, tant ces constats évoluent rapidement, à la fois globalement et de manière différenciée.


CAPITALISME MONDIAL INTÉGRÉ : la chose accusée de réifier le vivant est ici, ironiquement, nommée et quasiment personnifiée. Ce rapport de face-à-face, d'affrontement, semble également contredire l'approche de re-singularisation, qui relève d'une « logique pré-objectale et pré-personnelle ».
En fait, ce qui intéresse l'auteur, ce ne sont pas immédiatement les structures objectives du capitalisme, mais la production de subjectivité qu'il opère, notamment à travers l'usinage mass-médiatique. On voit aussi comment l'auteur s'approprie le vocabulaire pour sa propre logique : production, inconscient « machinique », constructivisme.
« C'est le rapport de la subjectivité avec son extériorité - qu'elle soit sociale, animale, végétale, cosmique - qui se trouve ainsi compromis dans une sorte de mouvement général d'implosion et d'infantilisation régressive ».
Nous sommes, en 1989, à la veille de l'arrivée de l'internet grand public. L'auteur perçoit la possibilité d'une « réappropriation des médias par une multitude de groupes-sujets », « leur possible utilisation à des fins non capitalistiques ». Or, actuellement, on peut dire que cette perception correspond à l'émergence des chaînes « Youtube » notamment, ce qui invite à être attentif aux tendances actives, même si, parallèlement, le magazine Marianne se fait racheter par un milliardaire tchèque.
Par ailleurs, lorsque l'auteur évoque les pratiques pédagogiques Freinet, on sait que les établissements dit « Freinet » sont peu nombreux, mais on sait aussi qu'il existe une appropriation de ces pratiques par les enseignants en dehors de ces établissements.
Quant au contexte de « l'énorme poussée démographique », redoutée dans ce livre, il contraste, actuellement, avec certaines tendances inverses. Il est même tenu pour possible ou probable, globalement, qu'un pic soit en vue à l'échelle d'une génération, précédant une décroissance de la population mondiale. On peut aussi se l'imaginer en regardant par exemple la série dystopique, « la servante écarlate ».
Si l'enquête est à actualiser, elle doit aussi être développée du point de vue économique, ce qui n'est pas le cas dans ce livre. On comprendrait peut-être pourquoi les jeunes consommateurs de média internet, gros consommateurs de publicités, ne semblent pas remettre en cause la société de consommation. Or, on observe peut-être, actuellement, une tendance à la décroissance des recettes publicitaires, du moins si on en croît les motifs de licenciement avancés par les dirigeants de RMC et BFM TV.
En poursuivant sur le plan économique, on arrive enfin au problème de l'investissement vert.


PROBLÈME DE L'INVESTISSEMENT VERT : sur le plan de l'écologie environnementale, l'auteur nous prévient que tout peut arriver. L'imagination allant bon train, il prévoit bientôt d'immenses programmes pour réguler les rapports entre l'oxygène, l'ozone et le gaz carbonique dans l'atmosphère terrestre.
Ironiquement, voici donc que l'auteur redonne espoir au Capitalisme Mondial Intégré : « business as usual ».
Comment s'étonner ensuite du contraste observé entre, d'une part, notre immense pouvoir technologique et scientifique, et d'autre part, notre impuissance à orienter ce pouvoir « vers des finalités plus humaines », submergés que nous-sommes, par des tâches débiles ?
D'où on peut voir que l'investissement vert ne correspond pas nécessairement à l'idée qu'on s'en fait. le pragmatisme appelle une fois encore à faire attention à ce genre de tendances, mais aussi à enquêter sur les grands délires à partir des petits délires, sur les transferts de micro-psychoses aux macro-psychoses.


PERSPECTIVES : si ce livre permet effectivement de sortir de la grisaille du « conservatisme fatidique », il a aussi tendance à durcir une idée de « progrès », avec son constructivisme ou son « créationnisme ».
Au passage, cette curieuse expression ne peut pas manquer d'évoquer une sorte de double renversement de la doctrine religieuse. Pour rester sur le plan spirituel, il faudrait aussi poursuivre son enquête autour d'une autre tendance, celle « d'une sorte de retour au totémisme et à l'animisme ».
Si d'un côté, ce livre appelle une actualisation, d'un autre côté, l'expérience et la réflexion de l'auteur autour de la re-singularisation mérite d'être retrouvée éventuellement dans ses ouvrages antérieurs.
« le principe commun aux trois écologies consiste donc en ceci que les Territoires existentiels auxquels elles nous confrontent ne se donnent pas comme en-soi, fermé sur lui-même, mais comme pour-soi précaire, fini, finitisé, singulier, singularisé, capable de bifurquer en réitérations stratifiées et mortifères ou en ouverture processuelle à partir de praxis permettant de le rendre « habitable » par un projet humain. »
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
A toutes les échelles individuelles et collectives, pour ce qui concerne la vie quotidienne aussi bien que la réinvention de la démocratie, (...), il s'agit, à chaque fois, de se pencher sur ce que pourraient être des dispositifs de production de subjectivité allant dans le sens d'une re-singularisation individuelle et / ou collective, plutôt que dans celui d'un usinage mass-médiatique synonyme de détresse et de désespoir. (...) Il ne saurait plus s'agir là de mots d'ordre stéréotypés, réductionnistes, expropriant d'autres problématiques plus singulières et impliquant la promotion de leaders charismatiques.
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Partout s'imposent des sortes de chapes neuroleptiques pour fuir précisément toute singularité intrusive. (...) Il risque de ne plus y avoir d'histoire humaine sans une radicale reprise en main de l'humanité par elle-même.
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Un des problèmes analytiques clés que l'écologie sociale et l'écologie mentale devraient affronter, c'est l'introjection du pouvoir répressif de la part des opprimés.
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Vidéo de Félix Guattari
Rencontre avec Camille Robcis autour de Désaliénation. Politique de la psychiatrie. Tosquelles, Fanon, Guattari, Foucault  paru aux éditions du Seuil.
-- rencontre animée par Blandine Ponet.


Camille Robcis, spécialiste en histoire intellectuelle et politique française, enseigne à l'université de Columbia. Elle a déjà publié La Loi de la parenté. La famille, les experts et la République (Fahrenheit, 2016).
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12/03/2024 - Réalisation et mise en ondes Radio Radio, RR+, Radio TER
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