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3,13

sur 334 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
La page blanche, ça n'arrive pas qu'aux écrivains, ça arrive aussi à ces ratés qui parlent des livres qu'ils ont lus, sans jamais en avoir écrit un. C'est la grosse honte. Ça peut aussi être le signe d'une sympathie profonde avec l'auteur. Ça peut vouloir dire : mec, je comprends parfaitement ce que tu as ressenti lorsque tu as voulu écrire ton histoire. Imaginez : l'écrivain-narrateur de ce roman écrit un bouquin parce qu'il n'a pas réussi à faire publier son scénario. Ecrire parce que l'écriture a été un échec. Faut le faire. C'est peut-être ça le drame de l'être humain, qu'il ne désespère jamais. Et moi donc, j'essaie de trouver quelque chose à dire sur ce livre qui ne dit rien. On y trouvera bien un peu de baise, comme dans tous les livres du moment. Un peu de branlette intellectuelle, pour montrer que l'âme et le corps peuvent se rencontrer, révolution des sphères ! Des personnages célèbres, parce que le mec, même s'il est un looser, sait s'y prendre avec la jet-set. Des bons mots, des phrases agréables à lire, une littérature bien menée, même pas de quoi cracher dessus. C'est ça qui est pénible avec les romans contemporains : on n'a pas encore eu le temps de les oublier.
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Un écrivain ressemblant beaucoup à Yannick Haenel raconte quelques mois de sa vie. Le roman est construit en trois parties qui se suivent chronologiquement même si de nombreux flashbacks en cassent le déroulement linéaire. Dans la première (‘Des films') le narrateur, auteur d'un scénario sur la vie de Melville, rencontre à New York le cinéaste Michael Cimino grâce à l'aide d'un producteur. De retour à Paris, l'écrivain s'enfonce dans la solitude et la déchéance et consacre son temps à visionner des films et en particulier Apocalypse Now, qu'il repasse en boucle. Dans la seconde partie, (‘Des histoires'), quelques mois plus tard, l'écrivain passe une soirée au restaurant en compagnie du producteur, d'Isabelle Huppert et de Léna, conservatrice du Musée de la Chasse, dont il tombe immédiatement amoureux. Cette longue soirée alcoolisée fait naître des récits racontés par les protagonistes et marque un tournant dans la vie de l'écrivain. La troisième partie (‘Des noms') débute le lendemain de cette soirée d'ivresse. L'écrivain a certes une méchante gueule de bois mais il retrouve sa place dans le monde et le désir de vivre. Après quelques péripéties, il part en Italie où il attend d'être rejoint par Léna et écrit le roman que le lecteur tient entre ses mains. Il a ressuscité en retrouvant grâce à l'amour sa force vitale et son pouvoir créateur.


Ce roman se lit facilement et on suit les pérégrinations et les rencontres de l'écrivain avec un certain intérêt. Néanmoins le livre repose avant tout sur les idées. Dans un entretien avec Michel Crépu publié en 2010, Yannick Haenel s'est longuement exprimé sur ses ambitions littéraires et les fondements de son écriture. Ce roman s'inscrit dans la parfaite continuité de ce programme. Obnubilé par la littérature et pas son destin d'écrivain, Haenel a choisi pour titre de son livre une citation de Proust. Il symbolise l'idée que la littérature est un royaume, que l'écrivain en est le roi, un élu, que l'écrivain ne doit pas se laisser écarter de sa vocation, de son désir comme le fait le narrateur dans la première partie. L'oeuvre d'un écrivain est l'extrémité d'une branche qui continue de pousser et elle est la continuation de l'arbre constitué de tous ces ‘noms' qui l'ont précédé. L'écrivain est celui qui fait coïncider l'expérience de la parole et l'expérience de l'être. Le narrateur va sortir de son enfermement de la première partie pour rentrer à nouveau dans le réel et cette expérience sera la source d'un livre. Le roman de Haenel pose ainsi la question suivante : comment concilier le besoin de solitude, la nécessité du silence avec l'expérience du monde, l'épaisseur du réel, la rencontre avec l'Autre ?


Haenel développe aussi l'idée qu'il subsiste toujours une possibilité de lumière après l'obscurité du chaos et de la destruction, une possibilité d'espérance après la tragédie. L'idée quasi mystique que la vie peut vaincre la mort. L'idée non moins mystique de la rédemption. La tonalité mystique du livre culmine lors d'une scène de cérémonie mortuaire se déroulant devant le retable d'Issenheim. Le roman est à ce titre fortement métaphorique. Exemple assez drôle : le voisin est un chasseur, il s'appelle Tot (la mort en allemand) et le narrateur craint qu'il ne s'empare de sa carabine Haenel pour le tuer… Ou lorsque le producteur raconte comment, victime d'un accident, il s'est retrouvé coincé dans sa voiture par les bois d'un cerf.


Le programme est ambitieux mais Haenel ne surmonte pas toujours la difficulté de transformer cette ambition en oeuvre littéraire. Car le récit m'est trop souvent apparu comme un pré-texte ne servant qu'à justifier ses théories. Le roman souffre par moment de grandiloquence (particulièrement dans les passages évoquant les attentats parisiens de novembre 2015), de lourdeur et de pédanterie. Haenel en fait trop et son cabotinage didactique est parfois lassant. Certes on peut voir le bon côté des choses et apprécier le système d'échos et résonnances multiples que développe Haenel tout au long du livre (le cerf et la symbolique qui s'y rattache, la chasse, la figure du reclus, génie incompris ou génie du Mal…) mais il gagnerait à laisser plus souvent l'imagination du lecteur faire son propre chemin plutôt que mettre systématiquement les points sur les i, surtout lorsque ces points restent abscons. Une digression sur Apocalypse Now par exemple se transforme en réflexion assez fumeuse sur le mal, la vie et la mort, réflexion toute aussi fumeuse que l'on retrouve sur le trottoir devant le restaurant où le narrateur en attente d'une table convoque les vers de Shakespeare.


J'ai retrouvé chez Haenel ce travers propre à certains écrivains actuels de multiplier à longueur de pages les références littéraires ou culturelles. L'obsession de se retrouver dans la cour des Grands pousse Haenel à citer Melville bien sûr, sa référence absolue, mais aussi Kafka, Dostoievski, Malraux, Flaubert, Rimbaud, Fitzgerald, Lowry, Kerouac, Homere, Ovide, Wittgenstein et je dois en oublier. Sans oublier les peintres bien sûr, Rembrandt et son cavalier polonais (déjà invité dans Jan Karski) ou Turner. Cela frise parfois le ridicule comme lorsque pris d'hallucinations en voyant Paris transformée en lac de sang, le narrateur se met instantanément à penser à Rimbaud. Je crois que l'art d'aujourd'hui (y compris la littérature) n'a plus rien à voir avec l'art de la table rase prisé par les avant-gardes et qu'il fait volontiers référence aux grands artistes du passé mais multiplier les références et les exhiber à ses lecteurs n'est pas forcément un gage de qualité.


Au crédit de ce roman, je dois dire que j'ai trouvé certains passages drôles : la gestion par le maître d'hôtel Macron de l'arrivée du narrateur et de son chien au restaurant, ou la première rencontre avec Cimino que le narrateur ne reconnaît pas parce qu'il le prend pour une femme (allusion aux rumeurs sur la transsexualité de Cimino).


Et il y a, malgré l'emphase un peu lourde, quelques beaux passages poétiques notamment lorsque Haenel évoque les êtres dont l'intérieur de la tête est mystiquement alvéolé (citation de Moby Dick évidemment !) : les être habités par un feu sacré, capables de décrypter les signes pour accéder à la vérité, capables de distinguer les deux faces du monde, la face visible, matérielle, profane et la face invisible, étrange, pleine de mystère.
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Après avoir lu ce livre puis relu certains passages, je ne sais toujours pas quelle pensée ou quelle émotions Yannick Haenel cherche a susciter chez son lecteur. Peut-être, finalement, qu'il n'en n'a rien à cirer et qu'il cherche seulement à confesser quelques fantasmes : écrire un scénario de 700 pages sur la vie d'Herman Melville, rencontrer Michael Cimino à New-York et se gausser ensemble de la statue de la Liberté, dîner en compagnie d'Isabelle Huppert à la Bastille, sauter la conservatrice du musée de la Chasse, cracher sur le retable d'Issenheim, visionner cent fois "Apocalypse Now" ... C'est un livre qui parle de l'impuissance de l'écrivain ou du cinéaste à saisir et exprimer la quintessence de son art et, comme de juste, l'auteur-narrateur est aussi atteint de cette impuissance qu'il va tenter de conjurer par des excès systématiques : excès d'alcool, excès de dinguerie, excès dans l'étirement des scènes (notamment celle du restaurant) – où il rejoint en cela son maître Cimino, excès de provocation, excès de noms qu'il épingle sur son mur comme d'autres punaisent leurs lieux de vacances, excès de mots finalement là où un haiku aurait pu faire l'affaire :


Je la tenais au bout de ma carabine
Haenel mais elle s'est tirée
Quoi ? L'éternité.


"Tiens ferme ta couronne" (ce titre est une citation de Proust, elle-même inspirée de l'Apocalypse de St Jean, ah, cette obsession des références ...) est un roman foutraque et horripilant mais que quelques fulgurances m'ont quand-même rendu sympathique, par moment.
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Le narrateur est un type mal au monde, ne « vivant » que dans le cinéma et l'écriture. Son dieu est Michael Cimino. Il s'est lancé dans l'écriture d'un scénario sur la vie d'Herman Melville, rejeté par tous les cinéastes, jusqu'à ce qu'une occasion lui permette de le remettre en main propre à son idole Cimino. Voilà le fil du rouge du livre qui nous entraînera dans des aventures rocambolesques, loufoques où nous croiserons Isabelle Huppert, un sosie de Macron, un dalmatien, et quelques femmes.
Il y a de bonnes pages, mais je suis sans doute passé à côté de l'essentiel.
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Avis très mitigé ...je me suis laissé emporter au début par ce récit puissant et audacieux, j'ai bcp aimé l"histoire déglinguée et les nombreuses références cinématographiques et littéraires...mais au milieu du récit, le rythme s'étiole pour devenir difficile à suivre avec des descriptions inutiles, tirées en longueur au travers d'une histoire qui s'essouffle et qui finit par emmerder le lecteur.
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C'est le récit d'un hurluberlu, d'un sacré bonhomme un peu décalé, un écrivain incompris qui a du mal à vendre son projet invendable de scénario, "The Great Melville", à des producteurs peu inspirés, frileux et engoncés dans leur obsession pour le fric. On pourrait s'attacher à ce personnage narrateur dans ses déambulations cocasses et aventures rocambolesques; une sorte de Don Quichotte des temps modernes. Mais, contrairement à Cervantès, Yannick Haenel ne fait rien pour le rendre empathique. Bien qu'il nous fasse rire par moment par sa fragilité et sa maladresse qui sont l'occasion de scènes ridiculement comiques, il ne parvient pas à dissiper le malaise qui s'installe dès les premières pages du roman.
Car Jean, notre narrateur écrivain, est là pour nous donner la leçon. Ses actes, ses rencontres, sont toujours l'occasion de longues et confuses digressions sentencieuses sur le sens de la vie, sur la littérature, le cinéma, l'art. Il insiste sur le mystère qui se cache derrière tout ça..., que lui seul peut comprendre parce qu'il sait voir.
Ce ton professoral agace, car on est loin de Melville, de Faulkner ou de Proust. On est loin de Cimino et de Coppola. C'est dommage, car on sent bien par moment que l'inventivité de Yannick Haenel pourrait nous faire voler. Mais elle est régulièrement plombée par cette prétention de toujours vouloir nous éclairer.
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C'est un roman qu'il faut prendre comme une navigation : on part du port avec une légère tempête qui empêche de voir à 100m, et en persistant, il faut se laisser emporter par les flots jusqu'à cet horizon qui se dégage. Et le voyage est finalement agréable si on va au bout. Si on quitte le navire avant destination, on reste avec un sentiment de noyade inutile. Tiens la barre ! C'est pas LE roman mais c'est excentrique.

TOTAL : 10/20
Idée(s) - 3 - Original(e)s
Ecriture - 3 - Accessible à tout point de vue
Intrigue - 2 - Une lecture détente sans prise de tête
Globalement - 2 - Voilà ça c'est fait !
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Quatrième de couverture très alléchante qui promettait un roman drôle, déjanté etc etc.

J'ai un peu déchanté durant la lecture. Alors oui, la plume est belle on ne peut pas enlever ça à Yannick Haenel, de plus les (longs) passages consacrés à des monstres du cinéma et à des films cultes sont parfois savoureux avec des décryptages particulièrement intéressants.

Mais voilà, j'ai eu beaucoup de mal à accrocher et à m'immerger dans ce livre. Je ne suis jamais vraiment rentré dedans et cela a donc donné une lecture détachée tirant en longueur vers la fin.

Peut-être aurais-je du me fier aux critiques plutôt très mitigées sur ce roman et commencer par un autre livre de l'auteur mais bon le résumé proposé m'attirait vraiment , d'où ma déception. Peut-être aussi n'avais-je pas l'intérieur assez "mystiquement alvéolée" pour suivre l'auteur.

Bref, un roman, qui malgré une belle écriture et certains passages intéressants, ne m'a pas conquis et m'a même plutôt bien déçu. Il ne restera pas dans ma mémoire.
Je tenterai un autre livre de cet auteur mais je vais laisser passer un peu de temps pour ne pas avoir un trop fort a priori.
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Tiens ferme ta couronne c'est l'histoire d'un mec qui a écrit un scénario sur Melville. Herman Melville, le papa de Moby Dick, qui se trouve être, comme on le sait depuis qu'il a reçu le Prix Nobel de Littérature, un des livres préférés de Bob Dylan (et on le sait d'autant plus que la partie de son discours sur Moby Dick pourrait être un plagiat).

Bref, le mec en question est écrivain, en passe de tourner quinqua, un peu alcoolo, avec un rien de Bukowski en plus bobo. C'est un fan de cinéma, en particulier de Cimino (cinéma-Cimino, y a pas de hasard dans la vie) donc il parle beaucoup de Voyage au bout de l'enfer (Deer Hunter en anglais, faut le savoir pour accepter la forte teneur en cerfs de ce livre), de la Porte du Paradis avec Isabelle Huppert (ça aussi ça a son importance car on rencontre Isabelle Huppert plus loin) et il parle pas mal d'Apocalypse Now de Coppola, aussi.


Bref, en bon pied nickelé qu'il est, il lui arrive toutes sortes de péripéties avec tous les ingrédients classiques de la fresque déjantée et un peu intello (compagnonnage canin, frictions avec la gardienne, galères financières, coïts crus, divagations mythologiques, apparitions mystiques de cerfs, vapeur éthyliques…). Rien de très nouveau mais ça a le mérite d'être relativement amusant.

En fait, c'est pas tellement la complaisance dans le registre du délire foisonnant qui m'a mise à distance, c'est que je me suis souvent ennuyée. Je me serais bien passée d'un bon tiers du livre. Ça fait quand même deux tiers que j'ai lu avec plaisir, c'est pas négligeable. J'ai particulièrement aimé la rencontre avec Isabelle Huppert chez Bofinger (des fois que vous auriez pas compris que j'étais fan). Elle raconte le tournage de la Porte du Paradis (avec Kris Kristofferson, siouplé) et son incubation préliminaire dans un authentique bordel du Wyoming histoire de se mettre dans la peau du personnage. Je ne sais pas si c'est vrai et je n'ai pas cherché à vérifier, mais Yannick Haenel raconte ça très bien. Et puis moi, si ça me permet de tourner une scène d'amour avec Kris Kristofferson, je suis prête à embarquer pour n'importe quel lupanar des Grandes Plaines (je parle de Kris Kristofferson jeune, faut pas pousser).

En matière d'imbrications entre littérature et cinéma, j'ai largement préféré Cortex d'Ann Scott (dont je vous parlais ici) : non seulement je ne m'y étais pas ennuyée une seconde, mais en plus il n'y avait les ronds de jambes que je trouve à Tiens ferme ta couronne.
Lien : https://www.ramona-lisa-read..
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Jean est un écrivain qui a eu un certain succès dans les années passées. En panne d'inspiration il décide d'écrire un scénario sur la vie de Melville et suite aux nombreux refus de cinéastes décide de le proposer à Cimino qui pour lui et le seul à pouvoir mettre en images la désespérance d'un homme.
S'ensuit alors une série de portraits ( Cimino, Isabelle Huppert, ......) des études comparées d'oeuvres cinématographiques ( les films de Cimino et de Coppola) et d'analyse filmique ( Les portes du Paradis, Voyage au bout de l'enfer, Apocalypse Now) , des déambulations dans le Paris chic des célébrités et des cafés miteux où les brèves de comptoir fusent.
Un livre un peu fourre tout, très parisien; si vous n'aimez pas le cinéma, la littérature américaine, des histoires sans véritables suivies, la lecture en sera difficile voire désagréable et inintéressante.
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