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« Dans ce livre atroce, j'ai mis toute ma pensée, tout mon coeur, ma tendresse et ma haine. »
Les Fleurs du Mal est la grande oeuvre de
Charles Baudelaire écrite sur dix-sept années entre 1840 et 1857. Six parties la compose :
Spleen et Idéal, Tableaux parisiens, le vin, Fleurs du Mal, Révolte, La Mort.
Spleen et Idéal constitue la section la plus importante de l'oeuvre : 85 des 126 poèmes du recueil sont regroupés dans cette seule partie.
Baudelaire garde en lui les préceptes d'une éducation catholique aux préjugés bien enracinés. Toute sa vie il applique à sa vie sentimentale le dualisme du Bien et du Mal. « Il y a en tout homme, à toute heure, deux postulations simultanées, l'une vers Dieu, l'autre vers Satan ». Il associe ces contraires dans sa poésie : le spleen et l'idéal représente les deux composantes qui traduisent ces extrêmes qui l'attirent.
L'IDÉAL
La femme… Un accès à l'idéal… Il l'adore, la divinise.
Pour échapper au mal de vivre le poète se tourne vers l'art et la beauté.
Trois muses vont lui offrir leurs charmes :
Liaison satanique aux charmes vénéneux, Jeanne Duval, mulâtresse, est à la fois source de plaisir et de souffrance. Elle est l'image de la sensualité féminine. Son corps éveille ses sens « le serpent qui danse » ; « Sed non satiata ». La Vénus noire le mène au spleen dans « le démon » ou lorsqu'elle prend les traits d'un être maléfique « le vampire ».
« Hymne à la beauté » :
« Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, qu'importe,
Ô Beauté ! monstre énorme, effrayant, ingénu ! »
Dans « Parfum exotique », son odeur lui évoque un ailleurs exotique :
« Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d'automne,
Je respire l'odeur de ton sein chaleureux »
La bourgeoise et demi-mondaine Madame Sabatier, froide, intouchable, lui inspire un amour plus calme, plus tendre.
« À celle qui est trop gaie » fera partie des 6 poèmes qui seront condamnés pour outrage aux bonnes moeurs en 1857 :
« Ces robes folles sont l'emblème
De ton esprit bariolé ;
Folle dont je suis affolé,
Je te hais autant que je t'aime ! »
Les yeux verts mystérieux de Marie Daubrun, actrice de la Gaîté, lui inspirent de la jalousie : « À une Madone » :
" Bourreau plein de remords, je ferai sept couteaux
Bien affilés, et, comme un jongleur insensible,
Prenant le plus profond de ton amour pour cible,
Je les planterai tous dans ton Coeur pantelant
Dans ton Coeur sanglotant, dans ton Coeur ruisselant ! "
LE SPLEEN
« Ce que je sens, c'est un immense découragement, une sensation d'isolement insupportable, une peur perpétuelle d'un malheur vague, une défiance complète de mes forces, une absence totale de désirs, une impossibilité de trouver un amusement quelconque… Je me demande sans cesse : à quoi bon ceci ? à quoi bon cela ? »
Dans cette lettre à sa mère, le poète exprime ce « spleen », ce mal existentiel qui l'habite. Tout au long du recueil on ressent sa souffrance et son désespoir. Un idéal non réalisé ? Des désirs d'absolu ? Une aspiration vers la perfection ?
Après ces cycles d'amour
Baudelaire retrouve son amertume le conduisant au « Goût du Néant ». Des images funèbres affluent sans cesse dans les pensées du poète qui finit par se condamner lui-même dans « L'horloge » :
" Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible,
Dont le doigt nous menace et nous dit : Souviens-toi !
Les vibrantes douleurs dans ton coeur plein d'effroi
Se planteront bientôt comme dans une cible "
Le 20 août 1857,
Baudelaire est condamné pour atteinte à la morale publique et religieuse. Un journaliste du Figaro écrit : « Rien ne peut justifier un homme de plus de trente ans d'avoir donné la publicité du livre à de semblables monstruosités. »
À la recherche d'une nouvelle esthétique, en proie à ses fascinations noires,
Charles Baudelaire, l'un des plus grands poètes de ce siècle, aura plongé dans les profondeurs de l'âme humaine à la recherche d'un art absolu qu'il ne trouvera jamais.
À 46 ans, il meurt dans une petite chambre devant une toile de sa maîtresse Jeanne Duval peinte par
Edouard Manet.
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