Splendide poésie qui mêle désert, vent et violence au combat d'un peuple contre les frontières qui leur sont imposées au siècle dernier.
Hawad alterne entre poèmes en vers, prose, contes et récits où personnages récurrents prennent la parole ; il n'hésite pas à accuser ceux qui oppriment les Touaregs : la France, mais aussi les gouvernements des pays où s'étend le Sahel, l'uranium et les compagnies qui l'exploitent, jusqu'aux essais nucléaires.
Tentant de résister à l'immobilité à laquelle on aimerait le contraindre, Hawad crie sa lutte au moyen de sa plume, et propose comme moyen de transcender l'espace sa Furigraphie.
Un recueil qui ne peut manquer de surprendre, et dont on regrette l'absence d'illustrations d'oeuvres picturales de l'auteur, aux talents multiples. J'ai particulièrement apprécié la préface, qui permet de mieux comprendre Hawad.
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C'est une oeuvre presque impénétrable que "Furigraphie" de l'artiste touareg Hawad. Il construit des espaces originaux qui traduisent le mouvement. le désert sans frontière où le pastoralisme est opprimé voire persécuté, interdit. Comment dire autrement le monde lorsque le territoire, le corps sont morcelés.
Le colonialisme, puis la décolonisation et la création de nouveaux pays ont bouleversé la géographie du continent africain. Des limites ont été imposées aux migrations. L'horizon des touareg s'est rétréci.
De ses mots poussière, Hawad exprime avec colère et douleur la disparition de son monde.
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Quelqu'un a-t-il été peiné
par la destruction des écritures, art
et cosmovisions touaregs ?
Aucun chien n'a jappé. La douane
de l'émotion et de l'imaginaire passe
hormis Tombouctou et ses manuscrits d'hygiène
de la charia et de l'imam Malek.
Et pourtant Azawad,
dans le Sahara touareg,
même le silence crie à perte de vide.
Les tatouages ululent
sur toutes les fresques lithiques
de Tanger jusqu'au fleuve Niger,
de l'oasis de Siwa jusqu'aux îles Canaries.
Oh vous qui avez rentabilisé l'exclusion
de mes squelettes vivants de frères
dépecés et jetés par les pelleteuses
comme un tas d'os sur les décharges,
à coups de décrets ânonnlés aux foules
des Etats bananiers et de leurs chefs
cannibales
(Le coude grinçant de l'anarchie - 1998)
Amène-nous au-delà,
Notre cri déjà dresse les pierres tombales
des étoiles
et nos mains curent l'abîme
pour y jeter la mort
(Buveurs de braises - 1995)
Mon regard est pierre ponce
qu'aiguisent les roulades de l'histoire
Donnez-moi une cartouche
d'encre-tifinagh
Je vous taillerai
d'autres lisières de routes
où pas même le rêve
ne s'est aventuré
Poésie et LSF - Hawad à Sète juillet 2010 traduction Carlos Carrera