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EAN : 9782070468652
272 pages
Gallimard (07/01/2016)
4.39/5   23 notes
Résumé :
Abdellatif Laâbi est né à Fès en 1942, au temps du protectorat français au Maroc. Son père est artisan sellier, et sa mère, femme au foyer. Il sort à peine de l'enfance lorsque son pays accède à l'Indépendance. Après des études universitaires à la faculté des lettres de Rabat, il est nommé professeur de français dans un lycée de la capitale. Sa vocation pour la culture se décide tôt. Encore étudiant, il est l'un des créateurs du Théâtre universitaire marocain, qui m... >Voir plus
Que lire après L'arbre à poèmes : Anthologie personnelle 1992-2012Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Huit années de prison n'auront pas réussi à briser la voix du poète. Tout au contraire, il semble qu'Abdellatif Laâbi ait su puiser dans cette épreuve force et profondeur. Enfermé, séparé de celle qu'il aime, il écrit de merveilleux poèmes d'amour, teintés de sensualité. Mieux que quiconque il connaît le prix de la liberté et l'importance de vivre pleinement chaque instant. Il en découle une poésie sans façons, libre de ton comme de forme, parfois espiègle et exubérante, allant jusqu'à l'impertinence. Et si certains poèmes ont la douceur nostalgique de l'exil, je n'ai senti ni tristesse ni amertume, seulement le chant d'un homme qui pleure sa terre avec tendresse.
Cette terre c'est le Maroc et la poésie d'Abdellatif Laâbi lui ressemble, gorgée de lumière, de couleurs et de fruits.

Cette anthologie fut pour moi une lecture-voyage, une véritable évasion en même temps qu'une expérience sensorielle. Certains poèmes m'ont fait sentir le parfum des orangers et du jasmin. Je me suis même imaginée marchant sous ce ciel immensément bleu.
Et voilà bien la magie de ces poèmes débordant de vie. Ils pétillent et vous tirent par le bras pour vous montrer combien le monde est beau.
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" Je suis l'arbre à poèmes. Je me ris de l'éphémère et de l'éternel. Je suis vivant".

Superbe ode à la poésie, exprimée par cet auteur marocain, au passé douloureux, qui a dû quitter son pays après avoir été emprisonné neuf ans pour avoir fondé une revue mettant en cause l'ordre social et politique des années 1970. Il vit maintenant en France.

L'anthologie présente des poèmes s'échelonnant de 1992 à 2012. Les textes sont variés, certains très longs, avec un refrain sous forme d'anaphore, d'autres fort courts, quatre ou cinq vers, presque des aphorismes. On sent une énergie, une vigueur, une rage aussi, à travers les textes. Un besoin de dénoncer, d'agir par la parole:

" Va ma parole
délie-moi
délire-moi
sois drue, âpre, rêche, ardue, hérissée,
Monte et bouillonne
Déverse-toi"

La sensualité s'exprime aussi, à travers la femme aimée:

" Comme un lierre fou
je m'enroule
autour de tes branches
Ton écorce s'attendrit
et s'ouvre"

Et l'émotion est forte lorsqu'il évoque l'enfance et le pays maternel perdu:

" Aujourd'hui, quand je suis seul,
j'emprunte la voix de ma mère (..)
Je n'ai pas vu ma mère depuis vingt ans
mais je suis le dernier homme
à parler encore sa langue"

L'ensemble du recueil est attachant, riche, cependant je n'ai pas été séduite par tous les poèmes, certains sont ardus, difficiles à déchiffrer, d'autres ne m'ont pas assez touchée. Mais une chose est sûre, l'auteur sait communiquer son ardeur, sa fougueuse parole poétique, et c'est l'essentiel.






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Ah les poèmes d'Abdellatif Laabi !!!! Ce poète marocain aux nombreux prix dont celui du Goncourt de la poésie en 2008 et le prestigieux Grand prix de la francophonie en 2011 ne cessera jamais de m'émerveiller !
Dans cette anthologie de 1992 à 2012, c'est fécond et dans chaque vers transpire l'homme libre, en colère, en révolte mais aussi en compassion et gardant toujours l'humour et l'humanité du coeur pour faire face.
Stupéfiant : le poème qui a pour titre "Gens de Madrid, pardon !" qui fait référence aux attentats du 11 mars 2004
Bouleversant : le texte écrit le jour de l'enterrement de Tahar Djaout, écrivain algérien assassiné en 1993 à Alger par des fanatiques
Sourire et subtilité : "La lampe dit : Je n'aime pas cette concurrence déloyale avec le jour !" et aussi "Que cache-t-on au juste quand on dit : parlons franchement !"
Implacable lorsqu'il écrit "Il faudra un jour nous excuser auprès de la terre et nous retirer sur la pointe des pieds."
Je pourrais continuer ainsi... tellement c'est riche, intéressant, profond !
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Citations et extraits (66) Voir plus Ajouter une citation
Le problème que j'ai avec la société
et jusqu'à mon entourage
c'est que je prends tout mon temps
et élève au rang d'art la distraction
J'abandonne volontiers la course
aux gagneurs
aux accumulateurs et autres tueurs
À la voie royale
des apprentis dominateurs
je préfère le sentier, la lisière
là où les oiseaux ne chantent pas encore
en service commandé
et l'herbe intelligente pousse à vue d'oeil
là où l'errant a une chance
de rencontrer son frère
et qui sait son peuple
là où l'on sent son cœur battre
et que les questions essentielles affleurent
Saura-t-on un jour
que le vrai centre
se situe dans la marge ?
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L'ÉTREINTE DU MONDE
La langue de ma mère


Je n'ai pas vu ma mère depuis vingt ans
Elle s'est laissée mourir de faim
On raconte qu'elle enlevait chaque matin
son foulard de tête
et frappait sept fois le sol
en maudissant le ciel et le Tyran
J'étais dans la caverne
là où le forçat lit dans les ombres
et peint sur les parois le bestiaire de l'avenir
Je n'ai pas vu ma mère depuis vingt ans
Elle m'a laissé un service à café chinois
dont les tasses se cassent une à une
sans que je les regrette tant elles sont laides
Mais je n'en aime que plus le café
Aujourd'hui, quand je suis seul
j'emprunte la voix de ma mère
ou plutôt c'est elle qui parle dans ma bouche
avec ses jurons, ses grossièretés et ses imprécations
le chapelet introuvable de ses diminutifs
toute l'espèce menacée de ses mots
Je n'ai pas vu ma mère depuis vingt ans
mais je suis le dernier homme
à parler encore sa langue

p.57
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Une maison là-bas
avec sa porte ouverte
et ses deux tourterelles
récitant inlassablement le nom de l'absent
Une maison là-bas
avec son puits profond
et sa terrasse aussi blanche
que le ciel des constellations
Une maison là bas
pour que l' errant se dise
j'ai lieu d'errer
tant qu'il y aura une maison là-bas
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C'est une maison
où nous avons reçu à profusion
la saveur et l'odeur des êtres
les couleurs tactiles des éléments
la beauté pudique des arbres
Nous y avons mangé de préférence
avec l'étranger
bu avec le commensal le plus désespéré
et veillé de nuit comme de jour
avec nos fantômes avisés
Nous y avons conçu les enfants libres
de nos rêves
Tout cela
en gardant une oreille suspendue à la porte
pour capter les pas hésitants
de l'inespéré

(extrait de "Écris la vie / Les signes sont là") p.201
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Me réveiller auprès de toi
t'apporter le café
écouter ensemble la radio
accueillir ta tête sur mon épaule
te masser les doigts
L'amour simple
comme bonjour
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Videos de Abdellatif Laâbi (18) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Abdellatif Laâbi
Avec douze écrivains de l'Anthologie Avec Anne le Pape (violon) & Johanne Mathaly (violoncelle) Avec Anna Ayanoglou, Jean d'Amérique, Camille Bloomfield & Maïss Alrim Karfou, Cyril Dion, Pierre Guénard, Lisette Lombé, Antoine Mouton, Arthur Navellou, Suzanne Rault-Balet, Jacques Rebotier, Stéphanie Vovor, Laurence Vielle.
Cette anthologie du Printemps des Poètes 2023 proposent 111 poètes contemporains et des textes pour la plupart inédits. La plus jeune a 20 ans à peine, le plus âgé était centenaire. Tous partagent notre quotidien autour de la thématique corrosive des frontières. Leurs écrits sont d'une diversité et d'une richesse stimulantes. Ils offrent un large panorama de la poésie de notre époque. Avec notamment des textes de Dominique Ané, Olivier Barbarant, Rim Battal, Tahar Ben Jelloun, Zéno Bianu, William Cliff, Cécile Coulon, Charlélie Couture, Jean D'amérique, Michel Deguy, Pauline Delabroy-Allard, Guy Goffette, Michelle Grangaud, Simon Johannin, Charles Juliet, Abdellatif Laâbi, Hervé le Tellier, Jean Portante, Jacques Roubaud, Eugène Savitzkaya, Laura Vazquez, Jean-Pierre Verheggen, Antoine Wauters…
Mesure du temps La fenêtre qui donne sur les quais n'arrête pas le cours de l'eau pas plus que la lumière n'arrête la main qui ferme les rideaux Tout juste si parfois du mur un peu de plâtre se détache un pétale touche le guéridon Il arrive aussi qu'un homme laisse tomber son corps sans réveiller personne Guy Goffette – Ces mots traversent les frontières, 111 poètes d'aujourd'hui
Lumière par Iris Feix, son par Lenny Szpira
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