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Magali Montagné (Traducteur)Max de Carvalho (Traducteur)Patrick Quillier (Traducteur)
EAN : 9782070379712
304 pages
Gallimard (09/09/2010)
4.14/5   7 notes
Résumé :
Les poèmes d'H. Helder captent et restituent les énergies pures qui traversent les êtres et les choses.
Que lire après Le poème continu : Somme anthologique 1961-2008Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
On écrit un poème ou on ne l'écrit pas, mais on n'écrit pas un poème pour se demander pourquoi on écrit un poème. Je lis peut-être trop. Je devrais peut-être moins lire. Mais enfin, le livre est là, il faut bien que je le lise. Quelle fatigue de voir un pauvre type se désigner poète, qui nous convoque avec ses grands mots et ses rythmes chiadés et qui prend la pose pour nous dire qu'il écrit un « poème n'échappant pas au pouvoir de la folie », un « poème comme assise non concrète de la création ». Dans ces deux exemples, considérez qu'à chaque fois que le mec parle de poème il pense à lui et vous aurez une représentation assez exacte du narcissisme mégalomane de l'écrivaillon.


On écrit un poème comme ça, parce que ça fait plaisir. Je me suis toujours méfiée des mecs qui écrivent des poèmes dans lesquels ils se posent des questions métaphysiques sur cette jolie petite éjaculation (au sens noble du terme) qu'est l'objet de leur création même. Il me semble qu'on arrive là à un point de tarissement qui transforme la culture en barbarie. Moi aussi je crains parfois de n'avoir plus rien à raconter parce que, finalement, on a très vite fait le tour de ce qu'on peut dire, mais il faut se souvenir de deux choses. L'une, c'est qu'on trouve toujours assez de pain sec dans notre quotidien à tremper dans notre lait avarié pour que ça se transforme en mots. L'autre, c'est que l'être humain n'a besoin que de respirer, manger, chier, boire et pisser –quoique mes ancêtres soient également de sacrés fornicateurs, preuve en est de mon existence actuelle. Tout le reste est accessoire. A Herberto Helder comme aux autres poètes qui se branlent sur la nature de la poésie, je leur demande de s'en souvenir et de s'abstenir d'écrire lorsqu'ils n'ont plus rien à raconter de personnel. Ils pourraient ainsi sauver leur oeuvre réelle, même si elle n'est pas assez consistante pour être publiée. Car j'aurais dû épargner, en effet, ces morceaux miraculés que j'ai découverts au milieu des spéculations poétiques sans intérêt, ces beaux morceaux troublants et ces images confuses qui ne semblent motivées par aucune nécessité matérielle ou intellectuelle.
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Citations et extraits (32) Voir plus Ajouter une citation
Les menstrues quand sur la ville soufflait
cet air. Les jeunes filles respirant,
mangeant des figues - et les menstrues quand sur la ville
filait le temps à travers les airs.
C'étaient des œillets dans la neige. Les jeunes filles
riaient, criaient - et les figuiers insufflaient
les figues, de leurs poumons d'éponge
blanche. Et les jeunes filles
mangeaient des œillets dans l'air.
Et elles riaient dans la neige et criaient : c'était
le temps des menstrues.

Les pommes roulaient dans la maison.
Quelqu'un disait : la neige. La nuit venait
briser la tête des statues, et les pommes
roulaient sur le toit - quelqu'un
disait : le sang.
Dans la maison, elles riaient - et les menstrues
ruisselaient par les cavernes blanches des éponges,
et les têtes des statues se brisaient.
Des œillets - quelqu'un disait cela.
Et les jeunes filles qui respiraient, mangeaient
des figues dans la neige.
Quelqu'un disait : des pommes. Et le temps était venu…

Le sang ruisselait des cous de granit,
l’enfant plaquait sa bouche noire
sur la neige dans les figues - alors elles criaient
dans l'ombre de la maison.
Quelqu'un disait : le sang, le temps.
Les figuiers soufflaient dans l'air
qui courait, les machines aimaient. Tandis qu'un poisson,
parole ancienne
et sensible, parcourait la page de cet amour.
Et quelqu'un disait : c'est la neige.
Les jeunes filles riaient dans leurs menstrues,
mangeant de la neige. Les têtes des
statues étaient pleines d'œillets,
et les enfants plaquaient leur bouche noire sur
les cris. La nuit approchait dans les airs,
dans l'ombre roulaient les pommes.
Et le temps était venu.

Et elles riaient dans l'air, mangeant
la nuit,
se nourrissant de figues et de neige.
Alors quelqu'un disait : les enfants.
Et les menstrues ruisselaient en silence -
dans la nuit, dans la neige -
pressées par les éponges blanches, là-bas dans la nuit
des jeunes filles
qui riaient dans l'ombre de leur maison,
roulant, mangeant des œillets. Alors quelqu'un disait
c'est un poisson qui parcourt la page d'un amour
ancien. Et les jeunes filles
criaient…

…Les jeunes filles, chantant leurs enfants,
mangeaient des figues.
La nuit mangeait du sable.
Et c'étaient des œillets dans les cavernes blanches.
Les menstrues - disait quelqu'un. L'air passait -
et à travers nuit, en silence,

les menstrues ruisselaient dans la neige.
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Incertain grandit un poème
dans les désordres de la chair.
Il monte sans mots encore, purs plaisirs et férocité,
peut-être comme du sang
ou une ombre de sang irriguant l'être.
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Et dans ma solitude, quand le ciel ceint de lys
jaunes, d'animaux de lumière, de fabuleux
organes de silence, délasse
sur mes épaules
son doux poids antique – je conçois
l'existence d'un mot vengeur et pur,
une sphère d'épines de feu qui blesserait
d'abord ma voix, la clarté
ou les ténèbres
de mon imagination, puis me blesserait
dans ma propre mort, sous l'intense
profusion céleste.

Il doit exister, je pense, pour chaque être
un seul mot que l'inspiration des peuples eût laissé
vierge de sens et qui,
surgi d'un point ardent des ténèbres, frappât
comme un rayon
sur les toits d'une vie, et le ciel
eaux et astres mêlés
tomberait alors sur ce visage dormant, sur cette exultation
fermée.

Quel serait ce mot, je l’ignore. Peut-être le nom
d’un instrument ancien, un nom parent
de la mort – venin, poignard, fleuve
barbare où
les noyés apparaissent aveuglément enlacés à d’énormes
lunes impassibles.
Un nom abstrait de femme ou d’oiseau.
Qui sait ? – Miroir, Alouette, ou ce vocable inconnu
d’Amour

Je sais que ma vie tressaillerait, que
mes bras somnambules
se lèveraient incendiant la légère
nuit de juin, ou que mon cœur
serait frappé d'une folie profonde. Et dans cette
folie
chaque chose trouverait son nom et son esprit,
chaque nom éclairerait
de tous les autres noms de la terre, et tout
brûlerait d'un même feu, entre l'espace brutal
du mois printanier et la terre
basse et magnifique.
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Que faire ? Je sais bien comme se nourrit un homme,
et plein de ruse et de timidité
comme il nourrit son ironique inspiration solaire,
l’innocente astronomie
d’os et d’étoiles, de veines, de fleurs,
d’organes génitaux –
afin que tout se construise doucement,
avec les femmes assises dans leurs vêtements caillés,
souriant fixement comme les enfants dans la lyrique
et ténébreuse épaisseur de la chair.
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« Le miroir est une flamme coupée, un astre / Un enfant éternel y demeure, dans ces enclos d’air illuminé / Où nous vivons. Du dehors, la houle vivace des parcs monte aux brisants / Des fenêtres »

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